EN SYRIE LA FRANCE SAIT-ELLE CE QU'ELLE VEUT ?
www.bvoltaire.fr/rolandhureaux/syrie-france-sait-veut,204573
Le 27 août, se tient au Quai d'Orsay la conférence annuelle des ambassadeurs où Fabius confirme que l'objectif de la France est de trouver une solution en Syrie sans Bachar el Assad qui ne peut pas, dit-il, être l’avenir de son peuple en raison même de ses "crimes"[1], et de trouver un accord avec l'opposition "non-terroriste". Il dit par ailleurs qu'il continue à chercher à "affaiblir" Assad.
Nous sommes dans une guerre civile . Il y a deux camps: le camp gouvernemental et les rebelles djihadistes, qu'ils appartiennent à Al Nosra ( ex-Al Qaida) ou à Daesh . Ces deux camps se battent férocement , ce qui est peu dire considérant que les islamistes sont des kamikazes, ce qui met à rude épreuve leurs adversaires . Que veut dire dans une guerre civile affaiblir un camp si ce n'est renforcer l'autre ?
Au demeurant, depuis quatre ans , le gouvernement français envoie des armes, de munitions et des conseillers militaires ( dont une trentaine s'étaient fait prendre en 2012) à ces rebelles djihadistes.
On prétend certes ne soutenir que les "non-terroristes". Foutaises. L'opposition démocratique très présente dans les hôtels parisiens ou londoniens n'existe pas sur le terrain. Si on combat le régime d'Assad, ce sont les djihadistes que l'on aide et eux seuls !
Oui, il faut le dire haut et fort : alors quel notre gouvernement prétend mener une guerre sans merci au djihadisme sur le sol national, il l'aide militairement en Syrie.
Quelques jours après, le 6 septembre , François Hollande fait sa conférence de presse de rentrée. Or, cette fois, la cible a changé : la France mènera des frappes aériennes contre Daesh , comme elle le faisait en Irak. "Notre sécurité se joue aussi à l’extérieur de nos frontières. Daesh est le plus grand danger ". Ne croirait-on pas, à entendre le président, que l'ennemi numéro un ne serait plus le régime d'Assad mais Daesh ?
On n'ira pas, dit-on, jusqu'à envoyer des troupes au sol. Certes, mais il serait déjà suffisant de ne pas en envoyer dans le camp adverse comme on l'a fait jusque là .
Commet s'y reconnaitre ? On dira , pour combiner les deux positions, que la France combat Daesh mais aide l'autre mouvement djihadiste , Al Nosra, qui "fait du bon boulot" avait dit Fabius. Personne n'est capable d'explique la différence de doctrine entre les deux mouvements . Qu'importe, les seconds seraient, eux, plus fréquentables : des "terroristes modérés" en quelque sorte !
Alors que s'est il passé à une semaine d'intervalle ? Changement de cap ? A la place d'Assad, on se méfierait. Rien ne dit que, entrant dans le ciel syrien, notre aviation ne frappera pas aussi les troupes gouvernementales.
Une autre explication , la plus abjecte mais pas invraisemblable, est que la France ( comme d'ailleurs les Etats-Unis et bien d' autres) veut faire durer la guerre. Il faut que personne ne gagne et pour cela, on aide tantôt les uns , tantôt les autres. Il y a tellement d'hypocrisie , depuis le début, dans ce conflit que rien ne saurait nous y étonner !
Et les populations dans tout cela ? Et bien, elles se réfugient en Europe où la France généreuse leur ouvrira les bras. Compte tenu des volumes d'armes que nous avons vendus ( payés par l'Arabie et le Qatar) , cela peut s'expliquer. C'est sans doute là l'humanisme de Hollande , héritier de Jaurès ?
Le plus probable reste que Hollande a senti le changement d'ambiance internationale , dont l'origine est l'accord conclu en juillet entre Washington et Téhéran et qui fait de Daesh une cible désormais privilégiée. Privilégiée mais non exclusive. Quoi qu'il en soit, les Etats-Unis infléchissant leur ligne, Hollande, caniche obéissant, suit. Mais sait-il lui-même où il en est ?
Roland HUREAUX
[1] Parmi les rimes reprochés à Assad, trois a moins ne sont pas avérés : l'utilisation de gaz, l'assassinat de Rafic Hariri et le lâchage d'explosifs par avion. Nous ne nous prononçons pas sur la répression , assurément très dure, des premières manifestations.