NON A LA REFORME DES RESSORTS DE COURS D’APPEL
27/04/2021
Quand un gouvernement lance une réforme de l’implantation territoriale de tel ou tel ministère, on peut dire à coup sûr qu’il est court d’idées.
C’est ce qu’on peut penser de celui du président Macron à le voir se lancer dans la réforme de l’implantation des cours d’appel.
Rachida Dati avait commencé de la même manière en réformant l’implantation des tribunaux d’instance. Elle s’est rattrapée heureusement en mettant en place les peines plancher pour les récidivistes, ce qui était bien plus utile.
La justice et la sécurité sont parmi les sujets où les frustrations des Français sont les plus grandes. En témoigne entre autres la popularité du général de gendarmerie Soublet, sanctionné par Hollande pour avoir osé mettre le pied dans le plat.
Il est tout aussi clair que Macron n’a rien à dire sur le sujet. La culture politique qui est la sienne, les soutiens associatifs dont il a profité tout au long de sa campagne l’empêchent de faire quoi que ce soit qui aille au cœur de problèmes de la justice.
Pour amuser la galerie ?
Alors pour amuser la galerie et ne pas laisser créneau inoccupé, il lance une réforme territoriale.
Qui croit une seconde que les dysfonctionnements de la justice française viennent de l’implantation des cours d’appel ?
La réforme projetée est doublement inadéquate.
D’abord, comme dans toutes les réformes territoriales, on fait fi de l’aménagement du territoire. Que des villes moyennes comme Agen ou Pau, et pas seulement des grandes, soient le siège d’une cour d’appel était une manière de ne pas réserver les fonctions administratives de premier rang aux seules métropoles régionales qui n’ont pas besoin de cela pour exister. Il y avait aussi l’héritage de l’histoire, toujours respectable. Sur le plan financier, on ne fait pas d’économies, au contraire. La réforme Dati qui avait ce but a eu l’effet inverse : les petits tribunaux ont été fermés mais leurs bâtiments se sont avérés invendables : au centre de Figeac, l’ancien tribunal d’instance a l’allure d’un temple de Jupiter (ou de Thémis), construit bien après que les empereurs romains ont interdit les cultes païens. En revanche il a fallu investir dans de nouveaux bâtiments dans les juridictions où s’est opérée la concentration des services. Il en sera de même pour les cours d’appel.
Ne sont pas seulement concernés les juges mais aussi toutes les professions qui tournent autour : avocats, huissiers etc.
Par ailleurs le déplacement dans les grandes métropoles va exposer un peu plus les magistrats des Cours d’appel aux tentations des connivences propres aux grandes villes : ils retrouveront dans les cocktails de la préfecture toutes les huiles de la région.
Enfin un projet qui se propose de liquider ce qu’il pourrait y avoir ne disons pas d’irrationnel mais de non orthodoxe dans notre carte administrative a un aspect maniaque, pour ne pas dire paranoïde, il procède d’une volonté de mettre tout au carré, tendance dont on regrette que l’action administrative se résume aujourd’hui à cela.
Réformer, certes, mais pas n’importe quoi n’importe comment.
Roland HUREAUX