L'expression lamentablement méprisante de François Hollande à l'égard des pauvres , qu'il qualifierait, parait-il, de "sans dents", ne surprendra que les naïfs.
Parmi ceux-ci , tous les gens de droite qui avaient poussé des cris d'orfraie quand le candidat Hollande s'était avisé de dire qu'"il n'aimait pas les riches".
Indignation doublement stupide.
D'abord parce que ce n'était pas vrai . Issu lui-même d'un milieu aisé , Hollande , fréquente bien entendu plus de gens fortunés (ses liens avec François Pinault sont notoires) que de "sans-dents". , comme la plupart des hommes politiques d'un certain niveau , de gauche ou de droite - nous serions même tentés de dire surtout de gauche : il suffit de compter dans les gouvernements socialistes les membres du Bilderberg ou du Siècle, plus nombreux encore que du temps de Sarkozy . Il y a peu de risque qu'il déteste ces gens là.
Ensuite parce que , même si cela était vrai, il fallait être très ignorant des ressorts de la nature humaine pour imaginer que les pauvres ou ceux qui s'estiment tels, qui demeurent une majorité , aiment tant que cela les riches. En disant qu'il ne les aimait pas, Hollande mentait certes, mais il faisait une belle opération électorale : il faisait croire à tous les sans grade qu'il était des leurs et que donc il était encore de gauche ( au moins, au sens que ce mot avait autrefois) !
Mais cette opération n'aurait pas réussi si bien si le concert d'indignation de politiciens et éditorialistes de droite ne lui avait pas apporté la résonance maximale.
Il y a certes une catégorie de riches que Hollande ne semble pas apprécier beaucoup: ceux qui croient l'être et qui ne le sont plus vraiment: l'immense armée des classes moyennes que son gouvernement attaque de toutes parts , par la hausse de la pression fiscale, par la perspective de la suppression de toute une série de prétendus privilèges (médecins, pharmaciens, biologistes, notaires, taxis) qui avaient au moins le mérite d'assurer un encadrement social minimum dans une société en perte de repères. Dans tel quartier nord de Marseille, le seul "bourgeois" qui reste, m'a-t-on dit, est le pharmacien. Pas le seul riche bien entendu car il est dans ces coins là d'autres moyens de s'enrichir! En supprimant tous les privilèges prêtés à ces catégories moyennes, Hollande s'en prend en effet à certains riches , mais pas les vrais ; surtout il prépare une société un peu plus inhumaine.
Et si Hollande n'a aucun scrupule à pressurer les classes moyennes, il serait bien naïf de croire que cela en fait un ami des pauvres.
Car les vrais riches, ceux que fréquente au quotidien le président se fichent, eux, comme d'une guigne que le niveau des impôts devienne insupportable en France. Ouverts au grand large de la mondialisation ( Vive l' Internationale !) , ils ont un patrimoine assez disséminé et assez de conseillers fiscaux pour ne pas avoir à craindre beaucoup du fisc français.
Et , bien entendu, s'ils sont vraiment à la mode, le chic du chic sera pour eux d'être de gauche.
Roland HUREAUX