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Roland HUREAUX

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6 novembre 2021 6 06 /11 /novembre /2021 14:46

LA MODERNITE AUX PRISES AVEC SES CONTRADICTIONS

17/05/2021

Jamais peut-être le monde n’a été si plein de contradictions.

La modernité ou ce qui est tenu pour tel est contradictoire.

Lors de la journée de la femme, des « trans » (hommes ayant voulu devenir femmes) ont été agressés par des féministes. La transsexualité et la promotion de la femme sont pourtant des tendances que l’on rattache toutes deux à l’« avancée » des mœurs.  

Les « trans » veulent pousser au plus loin la théorie du genre selon laquelle les sexes sont fongibles et doivent être indifférenciés ; ayant choisi de devenir femmes, ils voudraient être admis parmi les femmes militantes pour partager leurs combats mais celles-ci ne veulent pas d’eux. C’est comme ça.

A peine élu le président Biden a autorisé les hommes « trans » à participer aux compétitions sportives de femmes, même la boxe. Les obliger à rester dans leur sexe d’origine serait selon eux ( ou elles ) discriminant mais les femmes de naissance craignent une concurrence qui leur fera sans doute perdre beaucoup de médailles.

Beaucoup de ces contradictions concernent, on le voit, les rapports entre les sexes.

 

GPA et égalité

 

A l’heure de la promotion générale – et bienvenue – de la femme à travers le monde, certains milieux libertaires, partisans de la théorie du genre, poussent pour que soit autorisée la gestation pour autrui, qui seule permettrait à des homosexuels d’avoir des enfants et qui conduit, on le sait, à une forme particulièrement odieuse d’esclavage. « La femme loue bien ses bras dans les usines, pourquoi ne louerait-elle pas aussi son utérus ? » n’hésitait pas à dire Pierre Berger, cet homme délicat.  La  GPA (gestation pour autrui)  , si contraire à l’égalité , est pourtant l’aboutissement d’une  démarche de non-discrimination :  il n’y  pas de raison, dit-on,  que le mariage soit le privilège des couples homme-femme, instaurons un mariage homosexuel ; les femmes homosexuelles , voire seules, ont autant de droits que  celles qui vivent  avec un homme à avoir un enfant, d’où le droit à la  PMA (procréation médicalement assistée)  pour  femmes seules ou en couples de femmes  actuellement en débat au Parlement français ; dernière étape dont nous nous approchons : il n’y a pas de raison que la paternité et la maternité soient réservées aux femmes en couple, il faut que les hommes en couple y aient accès aussi, donc la GPA doit être autorisée ; ainsi trois étapes de raisonnement supposées libératrices aboutissent  à un  abaissement de la femme que dans les pires périodes d’esclavage, on n’avait pas imaginé .  

Divergences analogues sur la prostitution qui oppose les différentes écoles ultraféministes.  Pour les unes, elle est une forme d’esclavage à bannir, à l’initiative de la puissance publique.  Pour les autres, d’inspiration libertaire, elle fait partie de la liberté sexuelle, voire de la liberté du commerce et de l’industrie: l’Etat n’a pas à la réglementer. L’idée moyenne que « le plus vieux métier du monde » pourrait être simplement toléré échappe  à l’un et l’autre camp : il n’y a pas de moyenne chez ces gens là. 

 

Parité politique et parité conjugale

 

Toujours le mariage homosexuel : il conduit à abolir la parité homme femme dans sa forme la plus élémentaire, le couple. Fort bien, mais pourquoi coïncide-t-il avec l’instauration sans précédent d’une rigoureuse parité dans les élections à tout niveau, dans les conseils, dans le recrutement des entreprises publiques – et aux Etats-Unis de plus en plus privées. Si la parité est une nécessité, pourquoi ne pas la maintenir dans un couple de parents ? « Il faut la parité pour se porter candidat au conseil général et pas pour se marier ! » nous disait Jean Lassalle.

Toujours la parité : il y avait autrefois des écoles normales d’instituteurs et des écoles normales d’institutrices,  une agrégation pour les hommes et une agrégation pour les femmes qui garantissaient pour chaque discipline la parité dans l’enseignement. Au motif de s’adapter à l’évolution des mœurs, ces écoles et leurs concours d’accès ont été rendus mixtes, déséquilibrant la profession au détriment de l’un ou l’autre sexe, généralement féminin. Alors qu’on introduit la parité là où elle n’existait pas, on la supprime là où elle existait !

Il se dit que dans les couples isosexes, si advient, n’importe comment, un enfant, l’un se fait père, l’autre mère. Pointe extrême de l’existentialisme ou chacun choisit d’être ce qu’il est hors de toute contrainte de la nature. Pourtant, l’existentialisme a ses limites :  la théorie du genre n’étend pas la liberté existentielle au désir sexuel. Celui ci est au contraire tenu pour une fatalité inexorable. Le genre masculin est librement choisi par l’individu, l’attirance homosexuelle est une contrainte qui s’impose à lui. Pour parler le langage aristotélicien l’homosexualité ou hétérosexualité sont de l’ordre de l’essence alors qu’être physiquement mâle ou femelle est de l’ordre de l’attribut, donc réformable.

La liberté sexuelle, forme de la modernité s’il en est, est à l’origine d’autres paradoxes.

 

Ouverture de la chasse

 

Qui ne voit qu’elle a transformé certains milieux, dont bien souvent le monde l’entreprise,  en terrain de chasse pour jeunes mâles prédateurs. Ils n’ont pas besoin d’avoir recours au viol ou au harcèlement pour se mettre dans la peau du chasseur.  Dans la vieille société, cet esprit prédateur existait aussi mais il était borné par le sens de l’honneur des honnêtes femmes, alors majoritaires et les usages mondains : « ce que les hommes tiennent pour un honneur est le déshonneur des femmes » (Marguerite de Navarre). Aujourd’hui cette borne ayant largement cédé, la chasse a libre cours. « Tous les hommes sont des cochons » dit une veille chanson, et aussi la pointe du mouvement féministe, comme Me too, adepte pourtant de la même liberté sexuelle.

Il reste bien quelques hommes scrupuleux qui subordonnent leurs désirs à la liberté des personnes du sexe, voir au respect de leur vertu et dans ce cas, la séduction, si séduction il y a, reste discrète. Mais les ultraféministes ne les fréquentent guère car ils n’appartiennent pas au même monde :  adeptes des vieux codes moraux ou religieux - ou simplement courtois, ils sont exclus de la sphère de la modernité dont elles se réclament.  Dommage pour elles.

Comment ne pas voir  pourtant que la libération sexuelle ne pouvait que transformer la femme en objet ?

 

Concurrence victimaire

 

Il reste que si l’Occident a suivi cette pente, il ne l’a jamais reconnu. La femme objet est au contraire, on le sait, plus ouvertement affichée dans la religion musulmane, laquelle contredit de manière frontale les exigences du féminisme. Mais en Europe, les musulmans sont des immigrés, donc des opprimés. Entre les femmes et les adeptes de l’islam, il y a, comme on dit,  « concurrence victimaire », une concurrence rude.  Dès lors, quelle attitude prendre pour rester politiquement correct :   censurer l’islam au nom des droits des femmes ou mettre ces droits entre parenthèses pour ménager l’islam,  religion des opprimés ? Quant à Cologne, lors des fêtes du nouvel an 2016, des immigrés musulmans harcelèrent de manière organisée des centaines de femmes allemandes, les associations féministes furent très embarrassées pour condamner ces agressions, de crainte d’apporter de l’eau au moulin du racisme et de l’islamophobie. Il est intéressant d’observer que la sympathie pour l’islam prit alors, dans le discours public, le dessus sur la cause de femmes et que les militantes féminines les plus exaltées choisirent de ne pas protester. Ce choix est significatif d’une hiérarchie implicite des préoccupations occidentales que l’on observe aussi d’autres circonstances. L’islamo-gauchisme, oxymore étonnant, juxtapose une préoccupation politique et sociale issue des Lumières, par marxisme interposé, le gauchisme,  et la défense de valeurs qui, aux yeux des mêmes Lumières, apparaissent les plus rétrogrades. Quand on sait la part essentielle prise par l’UNEF lors des manifestions de mai 698, à la tonalité libertaire explicite, comment ne pas être étonné que sa vice-présidente soit aujourd’hui une jeune fille voilée ?  Et que par ailleurs le même mouvement organise des séminaires interdits aux blancs ?

De même les défenseurs de la cause animale, si en pointe aujourd’hui, se trouvent fort embarrassés pour condamner l’abattage hallal.

Pourquoi ce privilège de l’islamophilie sur le féminisme ou la cause animale ?  Ne serait-ce pas que les islamistes sont davantage craints dans la société occidentale que les femmes ou les animaux ?  Hiérarchie des valeurs ou hiérarchie des peurs ?

Autre contradiction : la prévention légitime du sida, souvent prise en mains par les associations homosexuelles, ne se transforme-t-elle pas en propagande subliminale pour les comportements dits à risque ? Quand lors d‘une soirée télévisée consacrée à la lutte contre le sida, il y a quelques années, l’abbé Pierre avait suggéré que cette lutte pourrait commencer par le refus de la promiscuité sexuelle, il se fit copieusement huer. Tout autre que lui se serait fait lyncher.

Comment comprendre que soit institué un mariage homosexuel, tributaire d’une théorie du genre qui nie les identités sexuelles innées, au moment précis où nos sociétés redécouvrent massivement, au travers de l’écologie, la nature végétale et animale dont la reproduction sexuée est la règle, rappelons-le, depuis un milliard d’années. Toutes les « avancées » biologiques ou sexuelles, y compris les plus artificielles, peuvent être soumises à l’Assemblée nationale.  S’il est un groupe dont on est sûr qu’il les votera, c’est bien le groupe écologiste. Il m’a été rapporté qu’une « cheffe » écologiste s’était fait faire un enfant par PMA, alors que, saine de corps, elle aurait pu arriver même résultat en faisant l’amour comme tout le monde.  Une vieille dame qui avait toujours voté écologiste par amour de la nature, cessa quand elle apprit que Noël Mamère, alors maire vert de Bègles, célébrait des mariages homosexuels.

 

Le temps du rock’n roll

 

Revenons au féminisme : comment comprendre que la génération qui a été par excellence celle de la libération de la femme, ait pu avoir pour danse emblématique le rock‘n roll ? Qu’est-ce en effet que cette danse sinon un symbole fort de l’inégalité de l’homme et de la femme ?  Non seulement la femme fait le plus d’effort car elle est amenée à tourner sur elle-même presque en permanence, mais c’est l’homme qui lui dicte ses mouvements par de légères impulsions données au bon moment. La fin de la fin pour le play boy de surprise party était de faire tourner sa partenaire très vite en ne bougeant lui-même presque pas, prenant ainsi la posture de la maitrise facile, d’une domination d’autant plus discrète qu’elle est efficace, de l’aisance souveraine dans la position de la supériorité, telle que la décrit Bourdieu dans l’univers scolaire.  Personne à ma connaissance n’a jamais demandé que les rôles soient inversés.

Pour se situer à un autre niveau, un des plus grands tirages de la génération qui a connu l’émancipation féminine fut Gérard de Villiers et son fameux SAS. Il est sans doute inutile de s’attarder sur le rôle qui échoit la femme dans le climat de sexualité débridée qui est celui de ces romans.  

Nous avons évoqué la parité en politique. Tous ceux qui s’y sont exercé savent à quelles acrobaties conduit la règle de la parité dans l’établissement des listes.  On commence généralement par faire, non sans arbitrages sanglants, une liste d’hommes en leur conférant un numéro sur deux ; puis sont inscrites les femmes, souvent peu demandeuses, plus difficiles à trouver et   trop souvent tenues pour des figurantes.  Comme par hasard, il est rare que cet exercice favorise celles qui ont la plus forte personnalité. Chez les hommes non plus d’ailleurs. Création idéologique s’il en est, la parité forcée n’est pas seulement une atteinte au libre choix démocratique, puisqu’elle le limite, elle illustre aussi ce que Hayek appelle « la loi des effets contraires aux buts poursuivis ». Nous sommes loin d’une vraie promotion de femme qui, elle, n’aurait pas besoin d’une telle contrainte.  

Paradoxe : la même génération qui a vu l’émergence des femmes en politique a conduit une femme d’Etat aussi talentueuse que Marie-France Garraud, qui ne nous en voudra pas, pas, je l’espère, de l’évoquer, assignée chez elle pendant quarante ans.

 

Mai 68 au risque de la pédomanie

 

Dans les années soixante-dix, les tenants de la libération sexuelle ne craignirent pas d’aller jusqu’ bout de leur philosophie : on a assez reproché à Daniel Cohn-Bendit de s’être fait  l’avocat de relations intimes entre adultes et enfants ; il ne faisait que suivre la logique qui était celle de son époque.

Les temps ont changé :  de plus en plus ces relations font horreur, surtout si elles sont incestueuses, et c’est légitime. Le paradoxe demeure que l ‘hallali contre la pédomanie (un terme que nous préférons à celui de pédophile, par respect pour la φιλία grecque, sentiment noble s’il en est) soit le fait non des tenants de la morale traditionnelle, discréditée, mais des libertaires eux-mêmes.  Choc des logiques : les derniers représentants de la pensée mai 68 se heurtent de front aux défenseurs des droits de l’enfant.

Paradoxe proche : notre société qui a mis en valeur comme aucune avant elle (pas même la société grecque du Ve siècle à laquelle on se réfère de manière souvent abusive) l’homosexualité, est en même temps devenue la plus sévère qui soit contre la pédomanie. Or la limite  entre l’une et l’autre tient souvent à peu de choses : juste une date anniversaire. Il en résulte que le mot pédérastie, qui signifiait au départ l’amour érotique des enfants mais qui en était venu à désigner l’homosexualité en général, se trouve aujourd’hui banni.

 

L’abolition du handicap

 

Avec les questions de vie et de mort, nous entrons dans un autre domaine. Jamais le handicap n’avait fait l’objet d’une attention aussi grande : les handicapés reçoivent une allocation, ils ont des maisons spécialisées  qui coûtent  cher, le droit du travail les favorise, ils ont des emplois, des places de parking réservés, les bâtiments publics leur sont adaptés.  On se demande pourtant qui va bientôt bénéficier de ces avantages. La même société si attentive au handicap, pratique de plus en plus un eugénisme impitoyable, autorisant, voire prescrivant, en cas de handicap repéré, un avortement quasi-systématique.

Alors que l’avortement normal est limité à douze semaines de grossesse, l’avortement dit thérapeutique peut se pratiquer jusqu’à la naissance. Un enfant qui nait dans le délai normal, et que ses parents veulent garder fera l’objet d’un luxe de moyens de réanimation sans précédent, allant parfois jusqu’à l’acharnement thérapeutique, pendant que l’autre, déjà formé lui aussi mais paraissant handicapé, sera mis à mort dans les conditions les plus sordides. On peut s’interroger sur les raisons d’un tel paradoxe.  Croyant peu à l’autre monde, notre société pense qu’une vie en situation de handicap, dès lors qu’elle est la seule qui nous soit donnée, est le plus grand des malheurs ; les gens normaux   se sentent par rapport à lui, vaguement coupables et tentent de se racheter par des politiques généreuses. Mais le malheur parait si grand que la même société se fera compréhensive à l’égard des parents (souvent pressés par leur entourage, y compris hospitalier) qui abrègent une vie dont on juge par devers soi qu’elle « ne vaut pas la peine d’être vécue ». Les  bien portants exorcisent ainsi  leur culpabilité en faisant disparaitre les handicapés de leur vue. Le « meilleur des mondes » est à ce prix.

Nous nous sommes attardés sur les contradictions de nos contemporains touchant à la sexualité et à la vie car c ‘est là un terrain où les contradictions sont les plus patentes, mais nous pouvons élargir la question à d’autres sujets.

 

Droit naturel et mise en scène

 

Par exemple les beaux-arts dans leur rapport au droit.   Point de théorie si décriée dans les milieux dits progressistes que celle du droit naturel, l’idée que la nature humaine implique par elle-même des règles pérennes et universelles qui s’appliquent à toutes les sociétés, par exemple l’interdiction du meurtre au sein du groupe ou celle de l’inceste.  C’est au contraire le positivisme juridique qui prévaut, l’idée que la loi positive est la norme ultime, qu’aucun principe pérenne, moral ou religieux, ne saurait lui être opposé et qu’elle est naturellement variable.

N’oublions pas la dimension scientifique du sujet : ainsi l’idée de nature humaine se trouve disqualifiée au moment où prend son essor la génétique moderne selon laquelle le génome humain est constant depuis au moins 35 000 ans.

Voyons d’abord le paradoxe qu’il y a de voir le positivisme juridique dominer au moment où sont parallèlement exaltés de droits de l’homme, que la déclaration du 26 août 1789 qualifie de « naturels et imprescriptibles ». La nature mise au rancart d’un côté, plus célébrée que jamais de l’autre ? Et  curieusement, la race n’existe pas, mais la nature humaine universelle non plus !

Ce paradoxe s’étend même aux questions esthétiques. Combien d’entre nous sont exaspérés par ces mises en scène de théâtre ou d’opéra qui habillent les personnages d’Andromaque ou de Carmen en costumes d’aujourd’hui, ou les personnages du Ring en clochards. Beaucoup ne vont plus à l’opéra par horreur de ces usages.  Mais elles ont une signification bien précise : le grand art traite de l’homme en général, les figures qui sont mises en scène se veulent éternelles, elles transcendent l’espace et le temps, elles nous touchent si directement qu’il n’est pas nécessaire de les mettre en costume d’époque.  Cela au moment où l’historicisme et le relativisme n’ont jamais été aussi à l’honneur, où jamais les émissions historiques n’ont eu tant de succès. Qui y comprendra quelque chose ?

 

Egalité et transhumanisme

 

Nous parlons de la nature humaine : l’existentialisme qui se fait si restrictif en matière d’orientation sexuelle, reprend toute sa place dans les recherches à la mode tendant à un dépassement de l’humanité par le transhumanisme, par la génération d’hommes nouveaux plus performants que ceux du passé, d’hommes « augmentés ». Il n’est pas certain que ces recherches aboutissent jamais à faire des êtres viables, mais comment ne pas être frappé de voir qu’elles fleurissent, comme le comble de l’audace libérale voire libertaire, en un temps où l’égalité est recherchée partout, voire où le socialisme national, qui fut précurseur en la matière,  est tenu, à juste titre, pour une infamie absolue. Le libéralisme moderne veut en outre qu’aucun homme n’ait un pouvoir excessif sur un autre. Le transhumanisme, forme supposée la plus « avancée » du libéralisme, c’est que certains hommes aient un pouvoir illimité sur d’autres, présents ou à venir.

On terminera pour l’anecdote par la surpression de toute mention locale dans les plaques d’immatriculation des véhicules. Elles facilitaient l’identification de ces derniers, leur suppression va la rendre plus difficile, cela à l’heure où se met en place une surveillance électronique généralisée. Il se peut cependant que l’extension sans limites de la surveillance des individus rende inutile toute attache géographique.

D’autres paradoxes propres à la modernité pourraient être aisément relevés.  Nous disons modernité car il ne nous semble pas que les sociétés du passé étaient si fertiles en étonnantes contradictions. Pourquoi donc ?

 

L’idéologie jusqu’à l’absurde

 

Peut-être la réponse se trouve-t-elle dans le fait que les attitudes supposées modernes que nous avons évoquées sont toutes rattachées à une idéologie.  Une idéologie, c’est l’envahissement de la pensée politique par une préoccupation unique ou quasi-unique.  Pour les ultra - féministes, la préoccupation de l’égalité des femmes est devenue un absolu au point de tenir toute différence pour une injustice et de prôner l’identité et la fongibilité des sexes. Il en est de même pour les militants homosexuels adeptes de la théorie du genre.  La culpabilisation de l’Occident amène les antiracistes et autres décoloniaux à occulter toute préoccupation de la condition de la femme dans les anciens pays colonisés.  Pour certains, le handicap mérite une attention sans mesure ; pour d’autres, et quelquefois les mêmes, la possibilité d’avorter sur demande ne saurait être limitée etc.

Là où le politique ordinaire arbitre en permanence entre des préoccupations concurrentes et par là même, à un moment ou à un autre, les limite, l’idéologue s’attache à une ou deux logiques et les pousse jusqu’aux extrémités, soit, bien souvent,  jusqu’à l’absurde.

Il y a en tous les cas un lien entre la multiplication des contradictions idéologiques et l’affaiblissement de la fonction politique qui a précisément le rôle d’arbitrer entre ces logiques avant quelles ne viennent à s’affronter ou s’entre-détruire.

Nous sommes dans un monde profondément idéologique. Pour des raisons qu’il conviendrait d’approfondir – mais c’est un autre sujet – il n’est pas aujourd’hui de politique publique qui ne soit marquée par une forme ou une autre d’idéologie.  Poussées jusqu’au bout sans que la sagesse ancestrale, le sens de la mesure ou la prise en considération de logiques concurrentes ne vienne à les tempérer, elles se contredisent et s’entrechoquent, donnant parfois au paysage politique un air d’absurdité.  Comment, s’en étonner ?

 

Roland HUREAUX

 

 

 

 

 

 

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6 novembre 2021 6 06 /11 /novembre /2021 14:44

LA FRANCE N’A RIEN A SE REPROCHER AU RWANDA

18/05/2021

La France n’a rien à se reprocher au Rwanda, au contraire.

Les accusations qu’on porte contre elle sont de deux sortes.   La première a   fait long feu : comme l’a rappelé Edouard Balladur, alors premier ministre, les forces de l’opération Turquoise, dépêchées au Rwanda à la demande du Conseil de sécurité pour une mission pacifique d’interposition de deux mois (juin- août 1994), n’ont, ni de près ni de loin participé au génocide des  Tutsi.  Bien au contraire, elles ont sauvé des dizaines  de milliers de vies.   L’actuel président du Rwanda, Paul Kagame, tutsi, a lancé cette accusation en 2004 quand la justice française l’a mis en cause à la demande des familles des deux pilotes français tués dans l’attentat du 6 avril 1994 à Kigali ( capitale du Rwanda) . Cet attentat a coûté la vie   aux présidents du Rwanda et du Burundi, tous deux hutu.  C’était la première fois qu’il y avait deux présidents issus de la majorité hutu dans ces pays  dirigés par la minorité tutsi  depuis le Moyen Age - ce qui montre l’absurdité de l’idée répandue par Kagame selon laquelle les Tutsis seraient les Juifs de l’Afrique des Grands Lacs !  Autre rumeur absurde, imposée sur le moment à l’opinion mondiale : que cet attentat, visant deux présidents hutus, aurait été le fait des Hutu !  Le 24 décembre 2019 au soir, la justice française a pourtant prononcé un non-lieu qui ne l’honore pas car le monde entier sait aujourd’hui, par des  transfuges, que le président tutsi   a seul ordonné  cet attentat. Kagame n’a jamais autorisé la moindre enquête de la justice internationale au Rwanda. Le non-lieu explique que les accusations contre l’armée française aient été mises en veilleuse, l’autre raison étant la proximité des élections françaises[1].  

 

Une coopération normale

 

La deuxième accusation est que la France serait responsable du génocide par la polique qu’elle avait menée dans les années antérieures. C’est là-dessus que met l’accent le rapport Declert demandé par le président, selon la même méthode qu’il a   appliquée à l’Algérie : sous prétexte d’apaisement, confier une mission d’étude à une personnalité entièrement acquise aux thèses des accusateurs . Dans les deux cas, l’étude conclut à la culpabilité de la France et, au lieu de panser les plaies, les envenime.

La France s’était engagée, dès la présidence Giscard d’Estaing, dans une coopération militaire classique avec le Rwanda  comme avec beaucoup d’autres pays francophones d’Afrique.

Le Rwanda était sans doute une dictature à parti unique et un pays corrompu mais ni plus ni moins que d’autres, plutôt plus libre que ce qu’il est devenu sous Kagame. La majorité hutu (85 % de la population) avait pris le pouvoir à l’indépendance grâce au jeu démocratique.  Le colonisateur allemand, puis belge, ayant réservé l’instruction à l’aristocratie tutsi (10 % de la population), le régime avait instauré une discrimination positive en faveur des Hutu   pour éviter que les Tutsi  n’occupent toutes les places .  Des pays démocratiques l’ont fait sans qu’on les taxe de racisme. Dans les années quatre-vingt, le pays passait pour « la Suisse de l’Afrique », ce qui était sans doute exagéré.  

La guerre a commencé quand en 1990, avec des Tutsi émigrés dans l’Ouganda voisin en 1962, Kagame a décidé de conquérir le pays pour rendre le pouvoir à la minorité tutsi. Il avait l’appui discret des services secrets  anglo-saxons et surtout de compagnies privées qui espéraient mettre la main sur les très riches gisements   de métaux rares du Kivu (Congo)  , la province voisine, ce elles ont fait    quand Kagame après avoir pris le pouvoir au Rwanda  en 1994  a envahi le Congo-Kinshasa en 1997. La France a naturellement continué à assister un gouvernement issu de la majorité. Et ce ne sont pas nos militaires qui ont appris aux populations à se servir du coupe-coupe, principal outil du génocide de 1994 !  

A la demande de la France, ont été conclus en août 1993, les accords d’Arusha qui prévoyaient un cessez-le feu avec interposition de l’ONU et l’arrêt de toute aide militaire des deux côtés. Pour être bref, cet accord a été respecté par les Français et pas par les Anglo-Saxons permettant à Kagame d’avancer vers la capitale où 1 million de Hutu en fuite devant l’envahisseur s’étaient réfugiés. En 1993, l’armée tutsi du Burundi voisin avait tué plus de 100 000 Hutu. La terreur et la colère des Hutus après l’attentat qui a coûté la vie à deux présidents hutus se déchaine immédiatement. Combien de victimes ? Il y avait 700 000 Tutsi  dans le pays et il en reste encore 300 000 après la guerre. Ils s’ajoutent aux centaines de milliers de Hutu massacrés par Kagame pendant la conquête.  La France qui n’avait plus de soldats sur place n’a pu rien faire dans l’immédiat. Elle fut en définitive la seule puissance à tenter de s’interposer mais bien tard. La force  de l’ONU, scandaleusement, n’a pas bougé. 

L’affaire ne s’arrête pas là.  Trois ans plus tard, Kagame envahit avec son armée tutsi, escortée de conseillers anglo-saxons, l’immense Congo voisin, ce qui provoque la chute du régime de Mobutu . Il poursuit alors dans tout cet immense pays les réfugiés hutus. Au total, selon l’ONU, plus de 4 millions de victimes :  hutus mais aussi congolais.

Comme cet épisode est soigneusement occulté par ceux qui font l’opinion mondiale, Kagame passe pour le sauveur qui a arrêté le génocide de 1994. Seul le Dr Mukwege, Prix Nobel de la Paix 2018, congolais, a eu le courage d’élever la voix.

Boutros Boutros-Ghali, alors secrétaire général des Nations-Unies, n’a pas hésité à dira que les massacres du Rwanda étaient à 100 % de la responsabilité des Etats-Unis. Qui les met en accusation ? Il est vrai que la France est le seul membre du Conseil de sécurité duquel on exige des repentances.

Non seulement la France n’a rien fait de répréhensible mais elle peut s’honorer d’être le seul pays à avoir tenté de faire obstacle à une des opérations les plus criminelles qui aient été.

Kagame a l’éthique d’un seigneur de guerre. Plus la France s’abaissera, plus il la méprisera.

 

Roland HUREAUX

 

[1] Malgré la fausseté totale des accusations portées contre eux, aucun président n’a pris la défense de nos soldats. 

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6 novembre 2021 6 06 /11 /novembre /2021 14:42

 

MOURIR DANS LA  DIGNITE

Ecrit en 2012

http://libertepolitique.com/Actualite/Decryptage/Mourir-dans-la-dignite2

  La question, de l’euthanasie revient à l’ordre du jour.

Comme il arrive souvent, les défenseurs des bonnes  causes ne trouvent pas toujours les bons arguments.

 

Tu ne tueras pas ?

 

  Il est sans doute plus que jamais nécessaire de rappeler  que la vie humaine est sacrée, que, sous aucun prétexte, on ne saurait y mettre un terme ou aider un malade à y mettre un terme volontairement. «Tu ne tueras pas »  est tenu pour un absolu de l’héritage judéo-chrétien. Sous le serment d’Hippocrate,  les  futurs médecins disent  à peu près la même chose.

  Mais si c'était là le seul argument des adversaires de l'euthanasie, comment se cacher les objections auxquelles il se heurte : toute l’histoire de l’Occident n’a-t-elle pas consisté, quoiqu’on dise,  à organiser des exceptions à ce principe qui en principe n’en souffre pas ?  La légitime défense,  le droit de la guerre qui en procède, la peine de mort, incontestée pendant des siècles, sont de ces exceptions. Sans doute les condamnés à mort n'étaient-ils pas innocents, mais ils n'étaient pas non plus volontaires !

 

Des limites difficiles à fixer

 

C'est pourquoi il convient de compléter cet argument par d'autres :  même si le droit a toujours admis des exceptions au précepte « Tu ne tueras pas », au moins faut-il que ces exceptions soient bornées par une limite claire.  Il est douteux que la légalisation  de l’euthanasie  permette de marquer une telle limite. Si le droit d’accélérer la fin de moribonds qui le demandent ( ou  paraissent le demander) était admis, comment éviter les abus  dans une société où les progrès de la médecine aidant , le nombre de grands vieillards en état de dépendance ne cesse de s’accroître. La crise du COVID a déjà ouvert la porte à de tes abus sous la forme hypocrite de « sédation profonde ». Il n’est pas toujours facile de savoir ce que veulent ces personnes (dont beaucoup sont privées de la capacité juridique par  la mise sous tutelle) mais la tentation est de les tenir pour  encombrantes. Comment dès lors  éviter que, une fois l’habitude prise d’abréger leurs jours à leur demande,  on n’en arrive vite à le faire avec un semblant de consentement ou pas de consentement du tout . Surtout si notre société s’appauvrissait au point de ne plus supporter le poids des dépenses sociales les plus lourdes. C’est ce qui arriva en Union soviétique à la fin du communisme où le taux de mortalité s’éleva très vite au milieu de la dégradation générale des systèmes de santé. L’expérience de pays comme  la Belgique ou les Pays-Bas qui  ont légalisé l’euthanasie n’est pas pour nous rassurer sur le risque de telles dérives. Parmi les défenseurs de la proposition de loi  en cours de discussion, qui  voudrait être admis dans une maison de retraite belge ?

Si la ligne rouge venait ainsi à être fréquemment transgressée, on n’ose imaginer ce que serait l’état d’esprit des malades hospitalisés, toujours aux aguets de crainte d’être « euthanasiés ». Le  souci peu éclairé d’adoucir les derniers jours des grands malades  plongerait au contraire ceux-ci  dans une angoisse dramatique. Cette inversion des résultats est  le destin, désormais bien connu,  de tous  les  partis  pris  idéologiques.

 

Lutter contre la mort est au cœur de la condition humaine

 

Mais nous pensons qu’il faut prendre aussi la question sous un autre angle. Même si la fin de vie se traduit par de grandes souffrances, toute la noblesse de la condition humaine historique n’est-elle pas dans ce combat sans espoir contre la mort ? Cela est vrai au niveau de l’espèce laquelle a traversé dans des conditions de précarité incroyable des centaines de milliers d’année, luttant avec acharnement contre la menace de l’extinction.   S’il est vrai que le commandement « Choisis la vie » (Dt 31,19) par lequel se termine le Pentateuque est, aux dires de Pierre Chaunu, le plus important de la Bible, il faut croire qu’il fut ardemment mis en œuvre tout  au long de l’histoire humaine pour que celle-ci malgré les multiples menaces qui pesaient sur les hommes se prolonge jusqu’à nous.

Le confort exceptionnel dont jouissent nos contemporains (au moins la majorité d’entre eux dans les pays développés), bien qu’il ne soit que le fruit de ces luttes  multiséculaires,   amortit  la perception que  la vie est une lutte acharnée contre la mort, que celle-ci prenne le visage de la guerre, de la famine ou  de la maladie. A ces menaces  de toujours, il faut sans doute ajouter celle du    désespoir, de la perte de sens individuelle ou collective. .

Il s’agit d’une une lutte sans espoir. Car à la fin, au moins en ce bas monde, c’est la mort qui gagne. Comme dit Heidegger, l’homme est dès le départ un « être pour la mort ». Même sains de corps et d’esprit,  nous sommes tous des morts en sursis, au même titre que ceux qui sont frappés d’une maladie mortelle à évolution lente. Cela n’a jamais été une raison pour ne pas combattre.

Le combat contre la mort porte sa part de souffrances : le travail,  l’  accouchement, la   lutte contre la maladie, parfois la guerre. Pourquoi ce combat ne se prolongerait-il pas dans un ultime affrontement contre la mort ? L’agonie, étymologiquement, ne signifie-t-elle pas le combat ? Combattre jusqu’au bout, n’est-ce pas en définitive cela,  « mourir dans la dignité » ?

Vouloir faire l’économie  de cet ultime combat  (nous ne remettons évidemment pas en cause la légitimité et la nécessité des soins palliatifs), n’est ce pas risquer de briser le ressort par lequel notre espèce a traversé les siècles, en tous les cas mettre la mettre dans un engrenage  allant à contre-sens ?

Cette perte de ressort  n’est-ce pas ce dont souffrirent des civilisations déclinantes, comme l’Empire romain ou d’autres où, au moins dans les hautes classes,  le recours au suicide se banalisa ? Heureusement pour l’espèce, d’autres civilisations prirent le relais.

On dira que cette vision héroïque de l’existence humaine ne saurait s’appliquer  à tous,  et aussi  qu’il existe des souffrances si grandes que, devant elles, de tels propos ne tiennent pas. Notre société a certes beaucoup fait pour limiter les souffrances. Elle supporte d’autant moins celles qui restent.  La compassion pour ceux qui souffrent encore, notamment  certains grands malades, est plus forte que dans les sociétés plus aguerries d’autrefois.

Nous ne supportons pas davantage la souffrance des animaux à l’égard desquels la pratique de l’euthanasie est généralisée.

Cette compassion « animale » que nous éprouvons envers nos frères inférieurs peut-elle être étendue à des moribonds qui  demanderaient qu’on abrège leurs souffrances? Non,  l’homme n’est pas un   chat ou un chien. Plus important que la compassion, il y a  le respect, non point seulement le respect de la vie mais le respect de cette éminente dignité qui est le propre de l’homme, le droit pour chacun, même les petits et les sans grade, de mener jusqu’au bout le combat qui fait la grandeur de leur destinée.  Éventuellement contre lui-même, contre les demandes que le désespoir ou des souffrances trop aiguës pourraient le conduire à formuler.

Si la morale chrétienne - la morale tout court - n’étaient que  ce que disait Nietzsche, une pitié animale, une compassion primaire, une sorte de  sensiblerie   , rien ne devrait s’opposer à l’euthanasie. Mais la morale  est justement plus que cela : la reconnaissance de l’éminente noblesse de tout homme  - de  toute femme -, quelle que soit sa condition.  Ce n’est pas seulement  la vie qui doit être respectée, c’est la personne vivante.

 

Le risque de l’acharnement thérapeutique

 

Reste à trancher la question de l’euthanasie dite passive, ou plutôt de l’acharnement thérapeutique. Bien que  la distinction entre euthanasie active (donner la mort par un acte positif) et passive (laisser advenir la mort par la cessation de certains soins devenus déraisonnables) soit à peu près claire, les partisans de l’euthanasie active cherchent à mêler les deux problèmes.

 Les progrès de la médecine, s’ils ont permis le développement des soins palliatifs qui, dans la plupart des cas, permettent d’atténuer les souffrances des grands malades, ont aussi donné les moyens de prolonger   la vie par des soins sophistiqués et lourds, lors même qu’il n’y a plus  d’espoir de guérison ou de retour à la conscience. Cela pose un problème  nouveau. Le zèle médical aidant, la tentation de ce qu’il est convenu d’appeler l’ « acharnement thérapeutique » est grande. N’est-ce pas d’ailleurs le même esprit technicien qui inspire  l’euthanasie active et  l’acharnement  thérapeutique ? L’homme moderne, fort de sa technique,  veut être maître absolu de la vie et de la mort.

Si, parait-il, une large majorité de nos compatriotes sont favorables à l’euthanasie, c’est surtout par crainte de l’acharnement thérapeutique.

Indépendamment de son coût qui ne saurait entrer en considération, l’acharnement  thérapeutique est aujourd’hui un vrai problème de société. Nous connaissons des personnes qui se sont suicidées non point par crainte de  la maladie et de la mort, mais de l’acharnement thérapeutique. Un brave homme de nos provinces nous dit une fois: « Heureusement, l’ambulance est arrivée trop tard : ma mère a pu mourir dans sa maison ». Cet homme, n’en doutons pas,  aimait beaucoup sa mère. La maison dont il parlait, ses ancêtres y avaient vécu et y étaient morts, de génération en génération, depuis trois siècles. A une époque où , en France, 80 % des gens meurent à l’hôpital, généralement dans les services dits de réanimation, ne faudrait-il pas reconnaître aux grands vieillards le droit de mourir chez eux , quitte à les y mieux soigner ? En Italie, pays de développement comparable, 80 % des décès ont lieu au contraire au domicile.  Le matin de sa mort, le pape Jean Paul II refusa  une ultime hospitalisation   pour rendre son dernier soupir au Vatican: n’y a-t-il pas là un exemple à méditer ?

Cela ne veut pas dire que les soins intensifs soient illégitimes. D’autant que, ainsi que le rappelle  le beau film de Pedro Almodovar  Parle avec elle (2002),   le destin du  comateux le plus lourd peut encore s’inscrire dans une socialité. En outre, des retours à la conscience quasi-miraculeux ont été observés. 

Mais si la  césure entre euthanasie active et passive est à peu près claire, il faut bien admettre que la frontière entre soins intensifs légitimes et acharnement thérapeutique ne l’est pas toujours. Nous entrons là dans le domaine prudentiel. Les moralistes comme les médecins qui  voudraient trouver  une règle parfaitement logique auront du mal: en toutes choses,  la logique conduit aux excès. La vertu de prudence est, en la matière, plus que jamais nécessaire. 

La  loi Léonetti légalisant la sédation lourde a paru un moment résoudre le problème . Elle a cependant montré à l’usage ses dangers . Tant l’affaire Vincent Lambert où on  a pu mettre à mort un patient par inanition, dans le respect littéral de cette loi,  que le Covid où la sédation lourde de personnes âgées a servi de prétexte à leur élimination massive,  ont  montré les risques de cette loi. Il reste qu’elle  vaut mieux que  l’euthanasie pure et dure que le présent gouvernement voudrait faire adopter.    

 

Roland HUREAUX

 

 

 

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6 novembre 2021 6 06 /11 /novembre /2021 14:40

A un an de l’élection présidentielle,

MACRON BRÛLE-T-IL SES VAISSEAUX ?

https://w ww.bvoltaire.fr/a-un-an-de-la-presidentielle-macron-brule-t-il-ses-vaisseaux/

17/05/2021

A moins d’un an de la prochaine élection présidentielle, on pouvait s’attendre à ce que Macron,  que l’on dit candidat à sa propre succession,  ne fasse plus rien d’autre que ce qui peut lui permettre d’être réélu.

Par rapport à cette règle, on voit pourtant d’étonnantes étrangetés de comportement.

 

L’ENA

 

D’abord la suppression, coup sur coup de l’ENA, des grands corps, notamment l’Inspection des finances dont il vient et du corps préfectoral. Il est classique que, depuis la nuit de temps, les rois, confrontés à des revers, coupent les têtes de leurs « mauvais conseillers » pour les donner en pâture au peuple qui veut qu’on punisse les responsables. Mais ce projet va bien plus loin.  Ce n’est pas à tel ou tel ministre, c’est à la substance même de l’appareil d’un Etat multiséculaire que Macron s’en prend.  Décision d’autant plus étonnante qu’il   est lui-même, jusqu’à la caricature, le produit de ce système incarné par l’ENA et l’Inspection des finances, y compris dans ses pires   travers : apriorisme, arrogance, mépris secret du peuple français, voire de France.

Mais tout stratège électoral sait qu’on ne  touche pas impunément à un groupe aussi nombreux : plus de 5000 personnes en position décisionnaire, politisées et influentes, sans compter tous ceux qui l’on assimile à des énarques parce qu’ils ont les mêmes défauts et qui n’en sont pas : les médecins qui ont organisé la lutte contre le covid ou les pédagogues qui font les programmes scolaires.   Il est clair que la plupart d’entre eux voudront à n’importe quel prix se débarrasser de Macron dans l’espoir que ces réformes seront rapportées. Pour un effet d’annonce vite oublié, Macron se fait beaucoup d’ennemis.

 

Le Rwanda

 

Le Rwanda est une autre énigme. Macron doit faire prochainement  une visite au président-dictateur Kagame qui ne correspond à aucune nécessité et qui ne peut conduire qu’à déposer de nouvelles repentances au pied de cet homme qui ne cesse depuis 25 ans d’attaquer et d’humilier la France. Cela par des accusations de complicité de crimes imputées à notre armée qui sont totalement fausses. Kagame a la mentalité d’un seigneur de la guerre sans pitié pour ceux qui se couchent. Macron ne récoltera de cette visite qu’un peu plus de mépris. Mais la question est pourquoi ? La plupart des Français ne savent pas où est le Rwanda et électoralement (à la différence des Algériens), les Rwandais ne pèsent rien. Macron est au contraire sûr, par cette visite, de mécontenter un peu plus   une armée déjà à cran en confortant les accusations du dictateur, sans que personne en haut lieu, ne la défende.

Le comportement du président est incompréhensible. A moins de se dire qu’il sait déjà que, de gré ou de force, il ne fera pas un second mandat. Il   tient dès lors à achever une « œuvre », qui est plutôt une œuvre de destruction, qui figurait à l’agenda. L’agenda de qui ? De lui ou d’autres, de ceux qui, en France et à l’étranger, avaient permis son élection de 2017 et dont l’abaissement de la France est un objectif en soi ?  L’ENA et le corps préfectoral sont plus que des symboles, ils sont la figure actuelle de ce qui a fait la force de la France, son Etat, avec ses bons et ses mauvais côtés. Avec le Rwanda, c’est l’honneur et la fierté de notre pays qui sont en jeu. Dans les deux cas, c’est la France. Pour Macron, brûler ses vaisseaux, c’est s’en prendre à elle.

 

Roland HUREAUX

 

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6 novembre 2021 6 06 /11 /novembre /2021 14:38

MISE EN EXAMEN DE RENAISSANCE CATHOLIQUE : DANGER TOTALITAIRE

https://www.bvoltaire.fr/mise-en-examen-de-renaissance-catholique-le-danger-totalitaire/

17/05/2021

Que Renaissance catholique soit poursuivi en justice pour avoir rappelé la doctrine traditionnelle de l’Eglise sur l’homosexualité, doctrine venue tout droit de la Loi de Moïse, montre à quel point de graves dérives menacent notre démocratie.

Dérive,  l’idée qu’un tel rappel serait une incitation à la discrimination, voire à ne pas  célébrer de  mariage homosexuel. Ce ne l’est pas : le penser est confondre comme beaucoup le font la morale et la loi : s’imposer ou prôner une règle morale est une chose, l’inscrire dans la loi en est une autre ; avoir une morale plus exigeante que la loi civile est parfaitement légitime.  Quant à parler de discrimination, rappelons que ce mot   a un sens précis : il désigne le fait d’appliquer un traitement différent (dont l’un est plus avantageux) à des personnes distinctes sur la seule considération de critères étrangers à l’objet de l’avantage en cause :  ainsi permettre l’accès à tel lieu public aux blancs et pas aux noirs, dans la mesure où l’accès à ce lieu n’a, intrinsèquement, rien à voir avec la couleur de la peau. De même, donner la préférence dans les promotions professionnelle  à un homme par rapport à une femme  alors que leurs titres et leurs résultats sont exactement les mêmes etc.

Les opposants au « mariage » des homosexuels partent, eux, du principe que le mariage est, de manière intrinsèque, l’union d’un homme et d’une femme et que donc marier deux hommes ou deux femmes n’a pas de sens par rapport à l’objet même du mariage. C’est un raisonnement qui n’a pas été suivi par le pouvoir politique mais qui n’est pas absurde : de la même manière ont peut dire que, par définition, conduire une voiture est réservé à ceux qui ont le permis de conduire ; ceux qui ne l’ont pas ne peuvent  exciper d’une discrimination si on leur refuse le droit de conduire.

 

Le vote d’une loi ne saurait priver de liberté d’expression des opposants 

 

Nous savons qu’en France et dans la plupart des pays occidentaux, le pouvoir politique a refusé ce raisonnement, mais est-il pour autant interdit de le tenir ? Le vote dune loi met fin au débat politique, mais doit-il mettre fin à la discussion, comme si la société était devenue une armée en campagne, où on ne discute plus les ordres une fois qu’ils ont été donnés. Une réforme du droit du travail a été adopté par ordonnance par Macron, affaiblissant notablement les droits des salariés : est-il illégitime de continuer à en discuter – pas au Parlement évidemment, mais dans tout autre lieu public ou privé - une fois qu’elle est entrée dans le droit ? La vitesse limite sur les routes départementales a été abaissée de 90 à 80 km/h. N’aurait-on plus le droit de le déplorer ?  Non, évidemment, ce serait absurde.

Pourquoi en irait-il différemment dans une question de mœurs ?  Dans un pays libre, le vote d’une loi ne saurait être mettre fin à la discussion. Quitte d’ailleurs à ce que cette discussion aboutisse un jour à la remise en cause de la loi elle-même, comme cela arrive parfois.

Prétendre le contraire : que le vote d’une loi non seulement interdit telle ou telle pratique mais interdit toute discussion ultérieure de son bien-fondé, serait une dérive grave qui nous ramènerait aux temps sombres des dictatures totalitaires : quand, sous Staline, la ligne du parti avait été arrêtée, il était interdit à tous les échelons de la discuter. A fortiori quand la prétendue remise en cause, ne fait que  rappeler le contenu d’un texte les plus fondamentaux de la cuture universelle.

 

Roland HUREAUX

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6 novembre 2021 6 06 /11 /novembre /2021 14:35

DISCIPLINE SANITAIRE : L’INVERSION DES POLES

Quand l’indiscipline est à droite.

17/05/2021

https://www.bvoltaire.fr/discipline-sanitaire-linversion-des-poles/

L’incident qui a eu lieu à l’Eglise Saint-Eugène de Paris le soir du Samedi saint est significatif de certaines évolutions de l’opinion française.

Tout en étant rattachée au diocèse, cette église se caractérise par l’emploi fréquent du rite « extraordinaire » à base de chant  grégorien.

Lors de la veillée pascale, un quidam infiltré  a filmé l’assistance et est ensuite allé, de manière assez vile, rapporter à la police que  beaucoup  de pratiquants ne portaient pas le masque.

Ce qui  est significatif :  face à ce que certains n’hésitent pas à appeler une « dictature sanitaire »,  c’est à droite que l’on trouve les plus récalcitrants , en particulier ceux qui doutent de l’utilité des mesures gouvernementales

Au contraire, ceux qui portent le masque avec scrupule - et sans doute  crainte et tremblement -, sont souvent des gens du centre et de la gauche, en phase avec le président actuel . En tous les cas, ceux qui soutiennent Macron sont généralement  respectueux des règles.

La tradition française voulait  pourtant que la droite soit  le parti de l’ordre et de la  discipline : Thiers, Maurras, Pétain ,  et que la gauche soit au contraire celle de la fronde, de l’individualisme, de l’indiscipline :  l’idéologie aujourd’hui dominante à gauche, sous ses  trois  variantes : En marche, socialiste, écologiste, vient de mai 68  où on écrivait sur les murs : « il est interdit d’interdire ». Il y a bien  en France une tradition   « anarchiste  de droite », mais elle  pesait peu[1].

Aux Etats-Unis, c’est pareil : les Etats qui ont décidé d’abandonner toute discipline sanitaire et refusent la vaccination de masse sont le Texas et les autres états du  Sud qui ont voté Trump. Biden, lui, se laisse voir en toutes  circonstances masqué comme les Dalton à la banque.  

Il y a certes l’exception de la Suède, de tradition de gauche et rebelle à la discipline internationale du confinement :  que ses chiffres  de contamination sont plutôt meilleurs  pourrait prouver que les  Suédois sont   intelligents .

Je ne sais s’il reste des  rebelles à la discipline sanitaire à l’extrême- gauche : les insoumis semblent se soumettre ; nous en connaissons qui expriment leur dissidence à titre privé  mais aucune grande voix issue de ce côté-là ne s’est, à notre connaissance, élevée pour la  contester.

La discipline à gauche, l’esprit de révolte à droite : nous assistons à ce que les physiciens appellent une inversion des pôles. Elle n’est pas pour rien dans le trouble qui règne aujourd’hui dans les esprits .

A la rigueur pourrait on l’expliquer par le fait que, la gauche mondialiste étant au pouvoir dans tout l’Occident, l’indiscipline  ne peut venir que des opposants, donc de la droite  ; quand la droite bourgeoise était aux commandes, il y a bien longtemps, c’était l’inverse.   

Il semble cependant que l’on assite à un phénomène plus profond.

L’actualité nous offre d’autres exemples de cette  inversion : ainsi à la dernière  élection présidentielle   américaine, l’électorat blanc riche a voté à gauche, le pauvre a voté à droite. Une nouvelle donne socio-politique qui commence  à traverser l’Atlantique.

La conclusion, au moins  provisoire,  est que si l’on veut  comprendre  ce qui se passe aujourd’hui dans le monde ci-devant libre, il faut résolument abandonner les schémas du passé.  A droite comme à gauche, il est temps de mettre les pendules à l’heure.  A quand un mai 68 de droite ?

 

Roland HUREAUX

 

[1] Il y avait aussi sous Staline des gens de gauche disciplinés mais c’était autre chose.

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6 novembre 2021 6 06 /11 /novembre /2021 14:33

NON A UNE CONSTITUANTE

13/05/2021

Il est fréquent d’entendre aujourd’hui demander la réunion d’une constituante. Ce slogan avait il y a quelque temps  déteint chez les  Gilets jaunes à la recherche  de projets et poursuit son chemin à son rythme. Dans le chaos ambiant, on comprend qu’il signifie  le désir d’une rupture radicale et d’un retour à une vraie démocratie.  Nous croyons pourtant  que cette revendication débouche  sur  une impasse.

Les raisons pour la  récuser sont nombreuses. 

D’abord l’histoire : en France les constituantes n’ont  jamais conduit qu’à  des échecs.  Les Etats généraux s’érigèrent  en Assemblée constituante  dès le 17 juin  1789. Après deux ans pleins de travaux , il  en sortit  une monarchie constitutionnelle , dominé par une « Assemblée législative » qui ne dura que neuf mois.  La Convention  nationale (1792-1795) était, elle aussi, formellement  une constituante, celle de la Première  République : il en sortit le Directoire ,  rarement tenu pour une réussite  et qui ne dura que cinq ans . La Constituante de 1848 déboucha sur une régime présidentiel   à l’américaine  dont on sait à quoi il aboutit. Les deux constituantes  de 1945 et 1946 conduisirent à la IVe République qui tint à peine douze ans.

Les deux seuls régimes durables de la France contemporaine : la IIIe et la Ve République n’émanèrent ni  l’un ni l’autre  d’une constituante  : le premier dura 70 ans,  l’autre dure depuis déjà 62 ans. Les lois constitutionnelles de 1875 étaient un expédient provisoire , la Constitution   de 1958 émana d’abord de volonté d’un homme.

A l’étranger, le constitutions de  la République de Weimar (« la plus démocratique du monde », disait-on ) et celle la IIe République espagnole    émanèrent elles aussi de constituantes. Qui  en ignore le destin fatal ?

A la rigueur peut-on tenir la Convention de Philadelphie de 1787 , qui aboutit à la  Constitution des États-Unis  pour une constituante qui a réussi ;  elle tenait cependant plus d’une réunion d’ambassadeurs que d’une assemblée élue.  

 

Une constitution vaut d’abord pour son ancienneté

Mais ce qui fait la réussite de la constitution  américaine, c’est moins sa perfection ( elle révèle aujourd’hui de graves défauts) que sa patine. Une constitution  vaut d’abord par son ancienneté. Longtemps   on tint pour une malédiction de la France de changer sans cesse de régime  ( quinze au total depuis  1789). Le Ve République a paru nous guérir de cette fatalité . Il serait  fort imprudent de nous y ramener.    La  nouvelle constitution   aurait des défauts qui en appelleraient   une autre et ainsi    de suite.  Vouloir revenir à l’instabilité  serait manquer à la vertu de prudence, la plus nécessaire aux constituants  depuis le vieux Solon.

Autre raison de se méfier :   dans la plupart des cas  à commencer par celui  de 1789 , il existait   avant la réunion de l’         assemblée constituante ou   au moins pendant , un noyau de personnalités, ouvert ou  occulte ,  sachant à peu près  où ils voulaient en venir. Ceux qui revendiquent  bruyamment la réunion d’une constituante ont-ils aujourd’hui la moindre idée   du genre de régime qu’ils veulent instituer   ? Il ne semble pas .

Comment ne pas soupçonner dès lors les promoteurs d’un nouveau régime de vouloir  revenir  à  la IVe République ? Dans le tableau de Mendeleïev des constitutions possibles, il n’y en a pas beaucoup en  France : soit un régime  semi-présidentiel comme aujourd’hui ( qui est en réalité plus présidentiel  que celui des Etats-Unis ) , mais évite ,  pour le meilleur  et pour le pire, tout blocage du processus  décisionnel , soit   un régime comme les IIIe et IVe Républiques , centrés sur un président   du conseil de ministres ou un premier ministre, surveillés de près par les assemblées.  Il ne serait d’ailleurs  pas nécessaire de changer de  constitution pour en arriver là : en passant d’un scrutin majoritaire  à un scrutin   proportionnel , on n’en serait   pas loin. Ce serait le régime des centres , unis contre le « populisme » c’est-à-dire du statu quo national et international. C’est ce que réclame  étourdiment Marine Le Pen qui , élue, serait avec un tel  système une présidente réduite à l’impuissance. 

On dira : mais vous voyez  où nos mène le régime actuel :  la déliquescence  de l’Etat, le chômage de masse, la baisse du pouvoir d’achat, la lourdeur des impôts, le déclin  de l’Eduction nationale ,  les injustices d’un système social obèse,  les inégalités croissantes, des mouvements de population hors de  contrôle, bref tout ce dont se plaignaient légitimement les Gilets jaunes - et d’autres !

Pour que ce constat, tout à  fait justifié aboutisse à  l’idée d’une  constituante, il faudrait qu’on nous dise  avec précision,  comment tel  ou tel article de la constitution actuelle a conduit à ces dérives .

Il est vrai qu’au fil des temps   nous nous sommes éloignés de la constitution initiale de la Ve République   , version 1958 , amendée 1962. L’instauration  du quinquennat par exemple a profondément dénaturé les institutions   , aboutissant à  un    affaiblissement du Parlement. La primauté du droit  européen n’ était pas non plus prévue, avec  son ampleur  actuelle,  dans la constitution primitive.

 

Le droit est vicié par l’idéologie

Mais  les textes   sont-ils  essentiels ?  Le général de Gaulle a révélé son grand  secret dans des confidences faites à Alain Peyrefitte   : si  les hommes sont mauvais, leur action sera mauvaise quelles que soient les institutions.  S’ils sont bons, il ne faut pas que, le jour venu, ils se trouvent empêchés de bien faire  par des institutions qui leur  lieraient les mains. Il est clair que nous sommes dans le premier cas de figure, ce qui fait que la réunion d’une constituante n’y changerait rien.

La vérité , c’est  que  les réalités juridiques sont aujourd’hui largement vidées  de leur sens par des facteurs extraconstitutionnels. Le plus important est l’idéologie. Du temps de l’Union soviétique, la constitution avait établi  un régime démocratique, fédéral,   décentralisé  : quel sens cela avait-il dès lors que le parti communiste contrôlait  tout par  derrière. Nous n’en sommes pas encore là mais quel sens a encore la démocratie  face à une presse unanime pour soutenir les candidats  et partis  de l’oligarchie et  du politiquement   correct ?  L’idéologie est comme une rouille qui  ronge et dénature les  édifices  juridiques le mieux construits ; or l’idéologie  aujourd’hui est partout .  

Elle est inséparable de la puissance écrasante des instances  internationales, pas seulement  européennes,   souvent occulte , qui vident de leur substance les pouvoirs nationaux.

Est-ce le sens de la revendication d’une constituante : rappeler  la souveraineté  éminente du peuple  français ? Ce serait un détour  bien compliqué et bien aléatoire . On ne sait quel  en serait le résultat :   souvenons-nous de 1945-46 où on voulait , dans l’euphorie de la Libération,  tout changer :  on  revint de fait à la IIIe République,    en pire.

Non,  la constitution  actuelle offre mieux qu’aucune autre les moyens de redresser le  pays. A condition qu’elle ne soit pas dénaturée comme elle l’a été par les réformes    de Giscard, de Chirac et de Sarkozy ( Mitterrand  eut la sagesse de ne pas toucher à un régime qu’il  avait autrefois qualifié de  « coup d’Etat permanent »). Cette constitution est peut-être la pire de   toutes quand la république est en de mauvaises  mains, comme il advient aujourd’hui. Mais plus qu’aucune autre , elle peut, si un bon président  vient à  être élu, lui permette de redresser rapidement le pays.  Est-ce possible ? Ne désespérons pas du  suffrage universel  : les exemples des Etats-Unis , du Royaume-Uni, de l’Italie sont là pour nous en  rappeler  la puissance. 

Pour le donner le jour venu à un bon président  toutes ses chances, nous  ne proposons qu’un seul changement  : abroger   toutes les révisions  qui ont été faites depuis 1962.

Roland HUREAUX

 

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6 novembre 2021 6 06 /11 /novembre /2021 14:31

POURQUOI TANT D’ACHARNEMENT A HUMILIER LA FRANCE ET SON ARMEE ?

13/05/2021

La technique est toujours la même. Au motif qui y aurait un contentieux à apurer dans le rapport de la  France à son passé, en réalité inventé par nos ennemis, M. Macron nomme une commission d’experts chargée de rédiger un rapport sur la question. Cette commission est présidée et largement composée de gens hostiles aux thèses profrançaises et favorables aux thèses antifrançaises de la partie adverse. Elle rend son rapport qui est, on pouvait s’en douter, non une tentative d’apaisement, mais nouvelle salissure sur la mémoire de la France, et doit être l’occasion de nouveaux actes de repentance, s’ajoutant à d’autres, humiliants pour notre pays.

 

Algérie

 

Avec l’Algérie, on pouvait tout à fait laisser les plaies se cicratiser avec le temps, plaies ouvertes, non par le souvenir d’une guerre vieille de soixante ans, que très peu d’Algériens ont gardé, mais par la propagande antifrançaise insensée du FLN au pouvoir depuis 1962, un parti qui ne représente plus du tout les combattants de l’indépendance, presque tous morts, qui a échoué sur tout et est rejeté par le peuple algérien. Mais M. Macron a cru bon de confier à Benjamin Stora la présidence d’une commission soi-disant paritaire mais dont le président, universitaire d’extrême gauche, épouse entièrement les thèses du FLN, en occultant notamment le souvenir des harkis dont le massacre, en violation des accords d’Evian qui prévoyaient l’amnistie des deux côtés, est de la responsabilité de l’Etat algérien ou d’autres massacres.  En face, un rappel insistant des bavures incessamment reprochées à l’armée francise depuis deux générations. Le résultat, par l’exaspération que ce rapport suscite : non point l’apaisement mais  un  renouveau d’hostilité à l’égard des  Algériens dans une partie de l’opinion. Quant au gouvernement algérien, loin d’être apaisé, il redouble de ressentiment à l’égard de la France. M. Macron est bien le seul qui ignore que les repentances à répétition suscitent le mépris et un surcroit de haine de la partie adverse. A moins que, plus malin qu’on pense, il ne le sache que trop bien.

 

Rwanda

 

Avec le Rwanda, le président a procédé de la même manière : il a installé une commission d’historiens ou prétendus tels, confiée à Vincent Duclert qui a remis, le 26 mars 2021, un rapport sur le rôle de la France dans le génocide des Tutsis au Rwanda en avril-mai 1994. Sans aller jusqu’à accuser l’armée française de complicité de génocide, du moins par écrit, ce rapport pointe des "responsabilités accablantes" pour la France. Quelles responsabilités ? Quand le Rwanda a été attaqué en 1990 par une milice sans légitimité venue de l’étranger, la France, par sa coopération militaire avec le gouvernement en place, ni meilleur ni pire que les autres en Afrique quoi qu’on ait dit, a permis à celui-ci de se défendre. La France avait dès les années soixante-dix formé les forces armées rwandaises, notamment la gendarmerie, dans le cadre d’une coopération militaire normale. Nous ne leur avons pas appris le maniement de la machette, principal instrument du massacre. Cette coopération a cessé avec les accords d’Arusha (août 1993), qui devaient mettre fin à toute aide étrangère, accord respecté par la France et le gouvernement en place mais violé ouvertement par les envahisseurs et leurs parrains, principalement anglo-saxons.  Il s’en est suivi des massacres croisés entre les deux ethnies, tutsi et hutu, qui ont fait 5 millions de victimes dans lesquels Paul Kagame, le chef des envahisseurs, grand ami de Macron, porte une responsabilité accablante.  Cette responsabilité a été mise en valeur par des journalistes respectés et indépendants comme Pierre Péan et, plus récemment la canadienne Judy Rever, ou des universitaires comme le belge Filip Reyntjens ou le franco-camerounais Charles Onana, qui n’y avaient aucun intérêt alors que les experts de l’autre bord ont souvent un lien avec le régime de Kagame. Il y a eu, entre 1994 et 1999, si l’on en croit des rapports de l’ONU peu divulgués entre cinq et dix fois plus de morts hutu que tutsi mais l’influence  des alliés de Kagame chef des envahisseurs tutsi et  président du Rwanda à partir de  1994   a permis que l’opinion internationale ne soit sensible qu’au massacre des tutsi . En aucun cas l’armée française engagée pour s’interposer entre juillet et août 1994 n’a, contrairement à ce qu’allègue Kagame, participé à un quelconque génocide ; elle a au contraire sauvé des centaines de milliers de vies au cours d’une mission pacifique qui avait l’aval du Conseil de sécurité.  Or Macron , entièrement acquis à la thèse des Anglo-saxons qui a déjà multiplié les faveurs pour le régime de Kagame, toujours en place 27 ans après, projette un nouveau voyage au Rwanda où il faut s’attendre à une nouvelle couche de repentance pour des griefs inexistants.

Rappelons que l’égyptien Boutros-Ghali qui était alors secrétaire général des Nations unies et donc bien placé pour savoir ce qui se passait, avait dit que la responsabilité de la tragédie rwandaise revenait entièrement aux Etats-Unis, qui ne s’en sont, eux, jamais repentis. En fait, notre pays fut le seul à tenter de faire quelque chose pour arrêter les massacres.  La France est, on le sait, le seul membre du conseil de sécurité à pratiquer la repentance !   

Le résultat de ces excuses à répétition : non point l’apaisement, mais la haine, l’humiliation de la France et de l‘armée française (qu’aucun président depuis 2007  n’a défendue), le ravivage des plaies, la diffusion de mensonges et de points de vue unilatéraux.

 

Pourquoi, mais pourquoi ?

 

On pourrait mettre cet acharnement  de Macron à salir son pays sur le compte du souci électoral : une partie de l’électorat d’origine algérienne pourrait être conduite à  revoter Macron par le gouvernement d’Alger, souvent prescripteur. Mais était-ce bien nécessaire ? Et si cela vaut pour l’Algérie, pourquoi le Rwanda, dont les Français ne savent rien et dont le gouvernement ne pèse nullement dans la politique française ? Et d’ailleurs, quelle famille de militaires votera encore pour un président qui ne cesse d’humilier l’armée française ?

On pourrait dire aussi que le président n’est pas très intelligent. Accepter une thèse unilatérale, celle des partisans de Kagame, malgré les nombreux démentis opposés à cette thèse, sans jamais s’interroger sur sa véracité est le signe d’un aveuglement qui confine à la bêtise.

Un aveuglement qui n’a d’explication que l’idéologie : imprégné à Sciences Po (version Richard Descoings) par l’idéologie décoloniale venue des campus américains, Macron est sincèrement convaincu que la colonisation ne fut qu’une série de crimes, alors que la plupart des anciennes populations coloniales, hors d’Algérie, ne le pensent pas. Lors de sa dernière sortie antifrançaise en Côte d’Ivoire, Benalla lui même rappela les bienfaits de la colonisation au Maroc. Mais mois après mois, Macron s ‘obstine.

Comme il ne faut rien exclure, l’inintelligence de cette posture semble avoir un côté pathologique : comme si le jeune et fringant président se voulait l’interprète d’un masochisme national. “Nous devons déconstruire notre propre histoire” a-t-il avoué à la chaîne américaine CBS. Rien que ça ! Déconstruire, en français, c’est démolir.

Mais dans cette obstination où il a tout à perdre sur  le plan électoral, comment ne pas se demander s’il ne serait pas investi d’un  agenda d‘abaissement systématique de la France, lequel revêt  d’autres aspects comme le démantèlement de nos industries stratégiques ?  Un agenda dicté  par ceux  qui pensent que la mondialisation ne pourra atteindre pleinement ses objectifs que par une disparition du sentiment national, spécialement chez « la grande nation », plus que d’autres à même , par son histoire singulière,  de résister à ce processus. « La France, nous la punirons » disait Condolezza Rice après le refus de Chirac de participer à la désastreuse guerre d’Irak. Apparemment la punition continue.

Roland HUREAUX

 

 

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6 novembre 2021 6 06 /11 /novembre /2021 14:27

INTOLERANCE ET IDEOLOGIE

15/05/2021

Il est difficile de comprendre le rétrécissement  de  la   liberté de penser et d’expression auquel nous assistons aujourd’hui, sous la forme de la pensée  unique, du « politiquement correct », sans se référer à la notion d’idéologie.

Face aux désastres totalitaires du XXe siècle, le communisme principalement,  et aussi le nazisme, nous pensions savoir ce qu’était l’idéologie.

Toute une  série de penseurs libéraux : Souvarine, Orwell, Arendt, Popper, Hayek,  Aron, Kriegel, Papaioannou, Besançon, Baechler,  etc. avaient analysé le fait idéologique dans sa version totalitaire,  à  l’origine des tyrannies et des crimes  que nous savons.

Retenons en deux définitions : « l’utopie (notion proche de l’idéologie) se caractérise par la volonté d’organiser les  activités sociales jusque dans leur détail   à partir d’un principe unique « (Jean Baechler) « les idéologies sont des ismes qui peuvent tout expliquer en le déduisant d’une seule prémisse » (Hannah Arendt). Ces prémisses : l’université de la lutte des classes, la suppression de la propriété privée et de la religion, le primat de la race etc.

Hannah Arendt  dit aussi que l’idéologie est la « logique d’une idée ». Le mot important, c’est « une ». Là où un esprit bien conformé analysera une partie   du réel en tentant d’y vérifier un ou deux hypothèses , et, une fois transplanté dans une autre partie du réel, refera l’opération avec des hypothèses différentes, l’idéologue, lui,  part d’une idée, parfois opérationnelle dans un segment limité de la réalité, et encore pas toujours, et, une fois transplanté ailleurs, ne regarde plus la réalité : il continue de  lui appliquer l’idée unique  choisie  une fois pour toutes ou les déductions faites à partir de cette idée  unique.

Le savoir, comme l’action, ont certes besoin de principes simples ; mais il ne faut pas confondre la fausse science qui détermine ces principes a priori et la vraie qui les tire laborieusement du réel par une série d’essais et d’erreurs, considérant que toute généralisation n’est pas a priori opérationnelle, seulement celle que l’expérience vérifie. Et encore, avons-nous le cas de la théorie quantique qui explique tout ce qui se passe au niveau des particules élémentaires, mais sans jamais se réduire à des principes simples aisément formulables.

Nous avons longtemps pensé que les régimes libéraux qui luttèrent contre les utopies totalitaires  étaient, eux, exempts de cette folie de la simplification, qu’ils faisaient  droit, au contraire, à la politique empirique, à la nature,  à la complexité du monde et donc à la liberté.

L’emprise qui  est exercée de plus en plus au sein de la sphère dite libérale par la pensée « politiquement correcte » amène à considérer qu’elle aussi pourrait être tombée dans l’ornière idéologique  qu’elle se targuait  d’éviter. De fait,  une série de prémisses simples dictent aujourd’hui l’essentiel  de la politique au niveau international, européen et national : la liberté du commerce tenue pour un absolu, la suprématie du marché, l’idéal de la concurrence pure et parfaite,  la péremption du fait national conçu comme une menace totalitaire (cette péremption ne valant que pour l’Europe de l’Ouest) etc.

Du fait que cette idéologie ne pratique pas l’emprisonnement arbitraire (sauf à Guantanamo), ne fait pas de camps de concentration, ne pratique pas la terreur de masse, il faut la considérer comme  différente des idéologies totalitaires. Si l’on assimile l’idéologie à une forme de folie, il ne s’agit plus de folie furieuse, seulement de folie douce (disons relativement douce puisque il lui arrive de plus en plus  de trainer en justice des citoyens en raison de leur seule opinion).  L’idéologie douce qui nous submerge peu à peu    exerce son empire  de  manière plus sournoise mais  non moins  efficace que l’idéologie totalitaire : ceux qui lui résistent  sont menacés de marginalisation, de diabolisation ; tels les partisans de la nation qui subsistent dans l’espace européen ou ceux qui clament leur refus de l’islamisation de  l’Europe. A la pression violente, s’est substituée la pression  indolore.  C’est donc  à une toute autre sorte de régime idéologique que nous avons affaire mais la plupart des  traits de l’idéologie  n’en sont pas moins présents dans  cette nouvelle forme de normalisation de la pensée.

Le point de départ est le même : la simplification, le fait de reconstruire toute une politique sur des principes généraux tenus pour des absolus, tels ceux que nous venons d’évoquer.

Le point d’arrivée est dans les deux cas   l’intolérance et la contrainte qui s’exerce sur la pensée, même si elle n’use pas des mêmes méthodes et n’atteint pas le même degré.

Quel est le rapport entre le principe de l’idéologie, la simplification, et son effet,   l’intolérance ?

 

De la simplification à l’intolérance

 

Il est  loin d’être évident.  Seule une analyse approfondie du fait idéologique permet de comprendre ce lien.

En simplifiant la réalité politique par le recours à des principes simples, trop simples et donc faux,  la démarche idéologique ne trahit pas seulement  la complexité du réel, elle va à l’encontre de  toute une histoire antérieure qui prenait au contraire  en  compte  cette complexité.

En disant que la clef du progrès économique est  la généralisation du libre échange – telle est la doctrine officielle de l’Organisation Mondiale du Commerce  –, l’idéologie ne se contente pas   de simplifier une réalité où le libre échange est non pas  mauvais en soi (être aussi systématique relèverait aussi de l’idéologie !) – mais tantôt bon, tantôt mauvais. Elle tend à considérer tous ceux qui, dans le passé, ont fait une autre politique que celle du libre échange comme des barbares, des hommes dépassés. Plus l’idée qui inspire les politiques idéologiques est simpliste,   plus elle apparaît    en    rupture avec un passé de civilisation où était préservé  le sens de la complexité.

L’idéologie est ainsi non seulement un rapport au réel, extraordinairement biaisé puisqu’il tend à en ignorer la complexité, mais encore un rapport  au temps, désormais divisé entre l’avant – où l’humanité n’avait pas encore saisi l’idée géniale  et simplificatrice qui doit faire son bonheur -,  et l’avenir qui s’organisera  sur la  base de cette idée. Marx lui-même disait que la préhistoire de l’humanité ne cesserait qu’avec le socialisme.

Ce n’est pas seulement tel ou tel trait du passé qui se trouve ainsi disqualifié  dans le mode de pensée idéologique, mais le passé en général. A partir du moment où elle prétend organiser l’Europe en gommant le fait national, la démarche européenne, tend à considérer les siècles où les nations existaient comme des siècles barbares, où presque tout était mauvais : des siècles  de guerre, d’obscurantisme, de haine, marqués par la traite des noirs, le colonialisme, le racisme, l’intolérance  etc. C’est pourquoi la mémoire ou les racines – en particulier les racines chrétiennes – sont toujours disqualifiées pour l’idéologie puisque elles renvoient à une époque où la politique n’était pas encore animée par l’idée formidable qui désormais l’inspire : suppression de la propriété privée et de la religion pour le communisme, suppression des nations et universalité du marché pour l’idéologie moderne.

Il est probable que l’idéologue pressent  au fond de lui, même s’il ne veut pas se l'avouer ou l’avouer, que son idée est fausse, fausse parce que trop simple. Il a l’intuition que, à cause de cette fausseté, il  rencontrera  des oppositions de toutes sortes, en particulier dans cette partie de la population qui est moins sensible  à la logique des idées qu’est le peuple.

En même temps, il a le sentiment  de tenir une idée si neuve, si radicale qu’elle ne peut être que salvatrice, qu’elle doit  permettre à l’humanité de franchir une nouvelle tape.

Porteur d’une idée extraordinaire, salvatrice mais qui rencontre des résistances, qui ne « passe »  pas, l’idéologue sera nécessairement à cran. Et c’est ce qui le rend méchant : non seulement il n’a pas raison, mais il  le sent confusément.

La simplification  opère en tant que vision du réel, offrant  une vision du monde à bon marché qui permet de le réduire à quelque principe simple.

La simplification opère aussi en tant que doctrine du salut. Puisque elle est entièrement nouvelle, l’idée géniale qui inspire l'idéologie est nécessairement porteuse d'un immense progrès, d’une forme de rédemption de l’humanité, ce qui place l’enjeu du combat contre les adversaires tellement  haut qu’ils ne méritent aucune mansuétude.

La simplification répond ainsi  à un besoin ancestral : celui de distinguer facilement le bien et le mal, les bons et les méchants. Les bons seront ceux qui adoptent l’idée, les méchants ceux qui y résistent, autre forme de simplification,  et ils sont nombreux puisque cette idée viole la nature, ce que l'idéologue se refuse à reconnaitre mais qu’en son for intérieur, il sait.

Le clivage entre les bons et les mauvais ne résulte pas seulement des résistances à l’idéologie. Le plus souvent, il  est déterminé à l’avance par l’idéologie elle-même : dans le marxisme léninisme, les mauvais  sont d’emblée les bourgeois et fils de bourgeois, les prêtres, les  paysans,   même s’ils n’opposent aucune résistance au régime, dans le nazisme, ce sont les Juifs, même s’ils ne font rien de subversif.

Rapport au réel, rapport à l’histoire, rapport au salut, l’idéologie est aussi, la plupart du temps, porteuse d’une histoire mythique, également simplifiée. L’expérience de la Seconde guerre mondiale a laissé croire à une partie des élites européennes, persuadée à juste titre que la cause de la guerre était l’idéologie nazie, que le nazisme n’était qu’une forme exagérée du fascisme, ce qui était déjà en partie faux, que le fascisme était une forme exacerbée du nationalisme, le nationalisme, une hypertrophie de l’esprit national et donc du patriotisme.  C’est sur  ce raisonnement, dont à peu près tous les maillons sont contestables, qu’a été pourtant entreprise la construction européenne. Pour les porteurs de l’idéologie européiste, ou du mondialisme qui en est difficilement séparable,  ou encore des formes les plus frénétiques de  l’antiracisme, une fois qu’ils ont admis que la cause de toutes les guerres c’est la nation,   aimer sa patrie, un sentiment qui, dans toutes les civilisations est, ainsi que le rappelle Léo Strauss, le plus moral qui soit, c’est être nationaliste, donc fasciste, donc nazi, donc, en puissance,  kapo dans un camp de concentration. D’où la haine qui anime ces gens là   vis-à-vis de toute affirmation identitaire, pour timide quelle soit. Pour eux, elle ne saurait être que  la manifestation des forces du mal, forces d’autant plus puissantes que, fondées dans la nature,  elles  résistent de toute part à son Idée

Et c’est ainsi que l’idéologie, partie d’une opération intellectuelle de simplification, conduit à l’intolérance, au refus absolu du dialogue et à la haine.

Les porteurs de l’Idée trop simple qui va  bouleverser l’humanité ne se trouvent pas seulement en rupture avec le passé ; ils sont aussi  en rupture avec la majorité de leurs contemporains qui résistent à la puissance lumineuse de l’Idée.

Le principal motif de cette résistance tient au caractère artificiel de l’Idée : quoi qu'en pensent les idéologues, le sens de la propriété existe, le fait religieux existe, le marché (sans en faire un absolu) existe, le fait national existe ; et ils résistent  sourdement à ceux qui voudraient les abolir.

Parmi ceux qui résistent plus particulièrement, les classes populaires  en tous temps et en tous lieux : elles résistent parce qu’elles  sont plus près des réalités, parce qu’elles  éprouvent moins le besoin d’une vision logique des choses ou de la politique. Même si, la propagande aidant, le peuple peut se laisser séduire un moment par l’idéologie, il s’en détache vite. La haine des idéologues pour le peuple, au nom de la lutte contre les « koulaks » ou contre le « populisme » est une constante de l’idéologie.

L’autre motif de résistance peut être à l’inverse  une grande culture  et donc la conscience d’une dimension historique qui interdit de dévaloriser sommairement le passé. Une   culture approfondie conduit à éprouver la complexité des choses et donc à se méfier d’une simplification exagérée du réel telle que l’opèrent les idéologues.

L’idéologie prospère, dit Jean Baechler, chez les demi-intellectuels, assez évolués pour   subir la séduction de la logique, mais pas  assez instruits  pour avoir développé le sens de la complexité et le sens   critique.

Les résistances populaires qu’ils rencontrent  conduisent  les idéologues à se considérer comme une élite, plus éclairée, plus lucide, une avant-garde, voire une secte d’initiés. Lénine a fait la théorie du parti avant-garde. Les SS se voulaient aussi une avant garde idéologique. La Commission européenne se veut explicitement une avant-garde destinée à détruire peu à peu chez les peuples le sens national et son expression économique, le protectionnisme, et à faire entrer les nations d’Europe dans ses schémas nolens volens.   Les  idéologues s’impatientent d’autant plus des résistances qu’ils rencontrent qu’elles ne rentrent pas dans leurs schémas a priori. Au terme de cette démarche, le viol de la volonté populaire tel qu’il a eu lieu à la suite du référendum du 29 mai 2005 au travers de l’adoption d’un traité par les Parlements (l’élite éclairée), reprenant point par point  ce qui avait été refusé par le peuple.  

Les idéologues sont d’autant plus intraitables que l’idée qu’ils véhiculent est porteuse d’une perspective de salut : le socialisme, le dépassement des nations, la paix universelle, la prospérité générale.

Ainsi imbus de certitudes salvatrices, ils remplacent le débat par une démonologie. Ceux qui leur  résistent sont les prisonniers ou les complices des forces du mal.

La haine antiraciste qui prospère aujourd’hui n’a ainsi  rien à voir avec le sentiment des minorités que l’on est supposé défendre, noirs, Arabes, Roms, elle est la haine d’idéologues ayant décrété que le sentiment d’identité était dépassé,  qu’il faut à tout prix  l’extirper comme on extirpait autrefois la sorcellerie et qui sentent confusément combien leur doctrine est artificielle.

De la même manière, on se tromperait lourdement en réduisant la barbarie nazie à l’antisémitisme ancestral, même exacerbé : pour en comprendre la dimension apocalyptique, il faut faire entrer dans l’équation le fantastique multiplicateur de l’idéologie.

 

On n’aurait pas fait le tour de la dimension idéologique de l’intolérance contemproaine si on ne faisait sa part à la haine de soi.  Celui qui s’accommode du monde tel qu’il est et qu’  à bien des égards il a toujours été, n’éprouve pas le besoin de trouver une clef qui permettra sa transformation radicale. Cette philosophie simpliste qui doit permettre de transformer le monde existant en un monde meilleur  implique un regard largement négatif sur le monde tel qu’il est. Il implique la haine du réel et même, à bien des égards, la haine de soi puisque c’est non seulement le monde mais l’homme, tous les hommes, y compris lui-même, que l’idéologue veut transformer en éradiquant le sens de la propriété ou le sens national.

Qui dit haine de soi, dit haine des autres.  Comment aimer autrui comme soi-même si on se hait et si on hait le monde ? C’est pourquoi  les idéologues ont si souvent  le cœur rempli de haine, ils voient partout des « vipères lubriques ». Ils en voient d’autant plus  qu'ils  en portent en eux-mêmes.   Observons un procès  pour  « incitation à la haine  raciale » et regardons le ton  des parties en présence: qui, généralement sue le plus la haine sinon les antiracistes ?  Ce n’est pas sans raison que le regretté  Philippe Muray  a décrit, dans son style inimitable,  les « parties civiles » (les parties civiles de profession, organisées en associations, pas les victimes de crimes ou d’accidents)   comme des chacals haineux  désireux de dépecer un cadavre. En face,  les prétendus supposés racistes sont souvent des gens gentils, amoureux de la vérité, de bonne compagnie. Etonnant renversement des valeurs !

La haine précède-elle ou suit-elle la posture idéologique ? Les deux sans doute. Il est vrai que pour devenir un idéologue, il ne suffit pas d’être inculte, il faut aussi avoir un tempérament aigri  ou frustré. Mais on a vu bien des honnêtes gens  entrés en religion idéologique sous l’effet de la générosité et s’y dévoyer. On a vu  des amis de l’humanité entrer  au parti communiste par amour des « damnés de la terre »  et  finir par épouser les pires aberrations du stalinisme. Céline commença sa carrière comme médecin des pauvres, philanthrope donc. Par quels cheminement en est-il arrivé aux pires invectives antisémites, voir aux appels au meurtre ? C’est sans doute là  le mystère de l’idéologie.

Bien entendu les idéologies sont sous-tendues par des intérêts. Il est probable que l’intérêt et l’idéologie sont aussi inséparables que l’onde et la particule dans la mécanique quantique.  Là où il y a  l’un, il y a l’autre.  Le communisme était sous-tendu par les intérêts de la nouvelle classe bureaucratique dont parle Milovan Djilas. Le mondialisme sert  de manière tellement évidente les intérêts les plus étroits  de l’oligarchie financière mondiale, en élargissant partout l’échelle  des revenus et de la richesse,  qu’on comprendra qu'elle soit soutenue avec force par les grands médias qui appartiennent presque tous à cette oligarchie. Mais  ce serait une grave erreur de réduire les attitudes idéologiques à des logiques d’intérêt. L’idéologie prolonge  et sert les intérêts,  mais elle a  sa rigidité, sa logique propre. Il n’est pas vraiment besoin d’une eschatologie intolérante pour défendre des intérêts. Or, une fois déchaînée, la logique idéologique dépasse largement  les intérêts qu’elle prétend servir. Le communisme ne servait que jusqu'à un certain  point ceux de la nouvelle bourgeoisie russe ; il était en même temps une  terrible contrainte pour elle et un frein au  développement de l’économie russe. Cette bourgeoisie a fini par s’en apercevoir mais   avec   plusieurs dizaines d’années de retard qui furent  du temps perdu. Le nazisme fut une catastrophe autant  pour  la grande industrie allemande, qui,  paraît-il,  l’avait favorisé,  que  pour le peuple allemand.  Le mondialisme est, au dire de la plupart des experts, la cause de la crise mondiale qui sévit depuis 2008.

Non seulement les  idéologies n’ont pas disparu avec la chute des régimes totalitaires, mais elles sont revenues sous d’autres formes. Comme dans un feu d’artifice,  après une explosion initiale, on assiste à la retombée d’une gerbe d’étincelles, après l’explosion fantastique du régime totalitaire, l’idéologie revient sous une fore édulcorée et dispersée comme retombent de toutes parts des brandons. Même s’il n’y a plus ni terreur ni système global, le mode de pensée idéologique pénètre partout. Un de ses effets est de réformer à partir de schémas simples, dans le seul but de mise aux normes, des  matières qui n’avaient pas besoin de l’être et où donc, au lieu de résoudre des problèmes, on en crée. Les exemples foisonnent. Il faudrait tout un ouvrage (que nous préparons) pour les passer en revue. Deux ou trois cas :  cet hiver, la neige a posé un problème grave, alors qu’elle n’en avait presque jamais été un   dans notre pays ; que l’application mécanique de la décentralisation ait  conduit à démanteler les directions départementales de l’équipement, services d’Etat qui fonctionnaient parfaitement,  n’est pas sans responsabilité dans    cette désorganisation. Des voyageurs ont été bloqués pendant plus de 12 heures à Belfort : le démantèlement de la SNCF, prescrit par Bruxelles au nom de la libre concurrence, n’y est pas étranger. De la même manière, on veut fusionner la police et  la gendarmerie au nom de la théorie, ô combien simpliste, que la concentration accroît l’efficacité. Un officier de gendarmerie qui avait exprimé son désaccord dans un article  s’est vu infliger immédiatement la sanction la plus lourde qui soit : la révocation. Ce n’est certes pas le goulag,  mais la violence de cette réaction  est dans la ligne de ce que nous disions des idéologues qui, sachant  confusément qu’ils ont tort, sont à cran.

Il y aurait beaucoup à dire encore sur les racines idéologiques de l’intolérance contemporaine. Il y aurait encore plus à dire sur les moyens de lui résister. A ce stade, nous nous sommes contentés d’appeler l’attention sur un de ses  ressorts les plus fondamentaux. Cette approche ne saurait nous conduire à baisser les bras, au contraire. La seule issue est la résistance. Mais pour résister, la première chose à faire est de bien connaître l’  adversaire, de bien comprendre la manière dont il fonctionne. Les victimes des procès de Moscou, en 1937,  furent complètement décontenancées par une mécanique dont elles ne comprenaient pas les ressorts. Si Zinoviev  avait lu Hannah Arendt, sans doute eut-il été mieux à même   , sinon de sauver sa peau,  du moins de résister à la machine infernale qui l’avait pris entre ses griffes ;  mais le travail de compréhension et d’analyse du phénomène totalitaire commençait alors à peine. Nous sommes aujourd’hui déroutés par la nouvelle intolérance – qui, je le répète, n’est pas une nouvelle forme de totalitarisme, mais un phénomène sui generis,  à analyser en tant que tel.  Quand ses ressorts cachés seront  entièrement démontés et mis sur la place publique,  alors serons nous mieux à même de gagner le combat glorieux que tant d’entre nous ont engagé pour la liberté.     

 

Roland HUREAUX

 

 

 

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6 novembre 2021 6 06 /11 /novembre /2021 14:24

ET MAINTENANT LES REPUBLICAINS DEVRONT ORGANISER UNE VRAIE PRIMAIRE 

27/04/2021

Ls Républicains viennent de se doter d’un président , homme de rassemblement certes mais qui, à la différence de ses prédécesseur,  n’a pas jusqu’ici affiché  d’ambition présidentielle.   C’est peut-être l’occasion d’organiser une vraie primaire pour désigner le futur candidat qui portera les couleurs de ce parti à la présidentielle.

Une primaire ? Jamais plus répondra-t-on, avec ce côté expéditif qui caractérise trop de jugements collectifs   ! On en a organisé une en 2016 et on a vu le résultat calamiteux. Ce fut encore pire pour le parti socialiste.

Que nenni !  Disons-le clairement : on n’a jamais organisé en France une vraie primaire, nous voulons dire  à l’américaine, c’est à dire une  primaire étalée sur six  à huit  mois et non bloquée sur un ou deux dimanches.

Quelle différence , dira-t-on ? Elle est considérable. Pour sauter d’emblée aux conclusions,  nous dirons le système utilisé en France était une machine à reconduire « toujours les mêmes ». La primaire à  l’américaine a l’effet inverse : elle a presque toujours fait émerger des hommes  nouveaux.

Et Dieu sait si c’est nécessaire !

La crise des Gilets jaunes a montré la grave perte de légitimité , en France comme dans le reste de l’Europe, des partis politiques classiques.    Il est également significatif que le dernier président élu ait émergé hors de ces partis.

En bloquant le vote sur  deux week-ends, un pour  le premier tour, un pour second, comme on l’a fait en 2016, on instaurait de fait une présélection par la notoriété déjà acquise, c’est-à-dire que l’investiture était   réservée à ceux qui avaient déjà été quelque chose : au minimum président de la République ou premier ministre . Certes Fillon a doublé sur le  fil les deux candidats tenus pour favoris, Sarkozy et Juppé, mais il avait été tout de même premier ministre. Les autres, les « petits candidats » , non dépourvus de  talent  pourtant,  ont été écrasés. En définitive ce genre d’exercice  fut un concours de notoriété déjà acquise.   « Il faudrait , disaient beaucoup de Français, du sang neuf  : pourquoi pas Untel ? ». « Oui , mais qui le connait ? ».   Dans une France qui aspirait   profondément  à changer les têtes, la primaire telle qu’elle a été alors  organisée ne pouvait aboutir qu’à  ne pas les changer . 

 

Une   primaire étalée à l’américaine

 

Les Français ne sont que  trop prompts à imiter l’Amérique quand il ne le faut pas. Autant qu’ils le fassent quand   c’est justifié  : en étalant  les  primaires sur au moins six mois,  en procédant  chaque dimanche   à   une élection partielle   dans un groupe de départements,   on permettra   à des outsiders d’émerger. Gagnant la primaire dans un ou deux départements , ils attirent l’attention des médias et , s’ils sont bons, peuvent continuer  sur la lancée. S’ils ne le sont pas , ils jettent l’éponge. Aux  Etats-Unis les présidents élus, qui avaient au préalable arraché l’investiture d’un  des grands partis,   ont été  presque tous, depuis Carter jusqu’à  Trump,  à l’exception  de  Bush père et fils , des hommes nouveaux.  

Une primaire étalée mettrait en outre en valeur la province , surtout   si  la Région parisienne vient à la fin.

Le parti qui tenterait cette expérience occuperait   le devant de la scène  pendant au moins six mois , ce qui ne  saurait lui nuire. 

Il faut naturellement  faire une primaire ouverte où le vote , voire la candidature,  ne serait pas  réservée aux responsables des partis ni même aux seuls encartés .

Y a-t-il à cette heure  d’autre moyen de   faire émerger des hommes à la mesure des immenses problèmes qui se posent à la France et ainsi de réhabiliter la  politique aux yeux des Français  ?   L’enjeu est encore plus grand : c’est  ni plus ni moins que  de sauver la démocratie qu’il s’agit.

 

Roland HUREAUX

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