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Roland HUREAUX

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12 mars 2024 2 12 /03 /mars /2024 21:59

 

L’inflation a deux significations.

La première, la plus connue : la hausse des prix des biens, des services et, éventuellement, des salaires. Hausse nominale, c’est à dire exprimée dans la monnaie courante qui est  en même temps une baisse du pouvoir d’achat si les revenus ne suivent pas.

La deuxième est aussi importante : l’enflement, toujours nominal, de la masse monétaire d’un pays, d’un groupe de pays ou du monde. Il est difficile d’en définir le périmètre : on distingue M1, M2, M3, selon le degré de disponibilité des actifs. Certains actifs telles les créances à court terme sont généralement considérés comme une part de la masse monétaire : bien que je l’aie prêtée, j’en ai la disposition presque immédiate. Si je l’ai placée à la banque, je la tiens à disposition aussi mais la banque peut l’utiliser en même temps en la prêtant à quelqu ‘un d’autre.

L’économie classique a toujours considéré que la dilatation de la masse monétaire entrainait la hausse des prix. Depuis environ vingt ans, les deux variables semblaient déconnectées. L’économie mondiale euphorique, notamment la Bourse, semblait vivre de création monétaire sans que les prix montent plus que les 2-3 % de routine.  Depuis quelques mois la loi économique nous a rattrapés et, au plan mondial, les prix montent de plus en plus, l’inflation  revient au premier   plan.

 

Money is credit

 

Comment se crée la monnaie ?  Là encor, selon la théorie la plus classique,  elle est la contrepartie des crédits à court terme que se consentent entre eux les agents économiques y compris les banques, les Etats, les entreprises et naturellement les particuliers. Le total consolidé de ces prêts   constitue la masse monétaire.

Qui mettre en cause dans l’inflation ? Le laxisme des banques, dit-on souvent, spécialement de la Banque fédérale américaine et de la Banque centrale européenne ? Oui et non : ce n’est pas là le début de la chaine causale. Personne n’emprunte s’il n’y est pas plus ou moins contraint (sauf pour investir mais les prêts à moyen et long terme n’entrent pas dans la masse monétaire).

Pour qu’il y ait demande de crédit, quelle qu’elle soit, il faut qu’il y ait quelque part un déséquilibre : des finances publiques, des États (défit de la balance de paiements), des entreprises, des particuliers. Le refus du crédit entraine une faillite.

 

Les facteurs de l’inflation

 

Quelles sont les principales causes de ces déséquilibres ?   A l’international, nous en voyons deux :

D’abord le déficit du budget et de la balance commerciale américains qui sont énormes  et qui ne cessent de grossir :   700 milliards de dollars, comme par hasard le montant du budget militaire américain, soit 50 % des budgets militaires du monde.

Les autres pays, jusqu’à une date récente, étaient obligés de rééquilibrer leurs balances pour rembourser les emprunts contractés en temps de déficit. Sur le court terme, un pays normal était soit déficitaire, soit excédentaire, mais sur le long terme il devrait équilibrer ses comptes.  Les Etats-Unis, eux, étaient dispensés de rembourser, le monnaie qu’ils mettaient en circulation dans le monde s’accumulait ou circulait dans les différents pays sans leur revenir. Et ça continue.

L’autre déséquilibre est créé par l’euro. Paradoxe pour un mécanisme prévu au départ pour assurer le stabilité des prix en Europe, il contribue aujourd’hui à l’ inflation, ce que Hayek appelait « la loi des effets contraires aux buts poursuivis ». Comment ?

Dans une Europe idéale, les Etats européens étant homogènes, les comptes des pays entre eux s’équilibreraient, sous réserve des variations passagères. L’Europe réelle n’est pas homogène.   L’évolution naturelle des prix et des coûts n’a donc pas tardé  à diverger  après la création de l’euro . Cette évolution différentielle des coûts entraine automatiquement des déséquilibres, dont on voit assez vite qu’ils sont sans remède en zone euro. Les pays structurellement excédentaires le sont de plus en plus, les pays structurellement déficitaires aussi.

Avant l’euro le rééquilibrage était assuré par des changements de parités monétaires, réévaluation, ou dévaluation.  Le pays qui dévalue   achète moins car il s’est appauvri mais vend plus parce que ses prix ont baissé, jusqu’au retour à l’équilibre. La dévaluation est difficile  mais nécessaire pour que les déséquilibres se résorbent périodiquement. Elle est aussi difficile pour celui qui réévalue : il s‘enrichit mais perd en compétitivité.

L’Europe a fonctionné avec ces mécanismes, point si douloureux qu’on a dit, jusque début de l’euro en 2000. Depuis,  la réévaluation et la dévaluation sont interdites. Les déficits et excédents qui se creusent à l’intérieur de la zone euro (laquelle jusqu’à une date récente était équilibrée à l’extérieur), se traduisent par des dettes et des créances qui ne cessent de grossir. Ces dettes et ces créances composent la masse monétaire.  D’autant que la Banque centrale européenne, pour éviter qu’aucune entité (Etat ou pays, voire grandes entreprises ou banques) ne fasse faillite, achète les créances en les transformant en euros qu’elle produit elle-même. C’est de la création monétaire ni plus ni moins. Sans cela l’euro se serait depuis longtemps effondré.

D’autres pays ont  leur part de responsabilité dans ces déséquilibres : la Chine longtemps excédentaire aurait dû réévaluer le yuan  pour rééquilibrer ses comptes. A quoi elle répondra sans doute que personne ne le lui avait demandé - et ce fut  en effet une grave erreur de ne pas poser cette condition quand ce pays fut admis l’OMC en 1999.  

On peut aussi mettre en cause beaucoup d’autres facteurs : le déséquilibre   des budgets par le covid, la hausse des matières premières,  mais le fait de base, c’est l’inflation de la masse monétaire au fil des ans.

 

Jusqu’où ?

 

Faut-il s’attendre à ce que la vague d’inflation s’apaise ?  Pour les Etats-Unis, c’est notre affaire, pas la leur  : the dollar is our money and your problem. Le récent sommet des Brics à Johannesburg a montré qu’ils n’étaient pas pressés de mettre les Etats-Unis à terre, ce qu’ils pourraient faire en refusant les dollars, mais ils ont, surtout la Chine, tant de réserves en dollar que ces réserves perdraient d’un coup une partie de leur valeur et ils seraient appauvris d’autant. Nul ne tient mieux un créancier qu’un gros débiteur. Pour la même raison sans doute ils n’envisagent pas de rétablir l’étalon or, or  qu’ils ont en abondance.

Mais les Chinois ne sont pas les seuls à pouvoir déséquilibrer le système monétaire américain. Les dettes internes sont encore plus colossales que les dettes externes. Les spéculateurs peuvent le faire imploser s’ils entendent dire qu’il va imploser et qu’il leur faut prendre les devants. Les marchés financiers conservent leur incertitude.

Côté européen, le sujet est plus délicat. L’accumulation des dettes des Etats, comme la France, celle des déficits extérieurs, ne pourra  pas durer indéfiniment. La déstabilisation de ce système impliquerait la fin de l ’euro que personne aujourd’hui n’envisage. Là aussi l’incertitude grande.

On a toujours distingué deux sortes d’inflation : rampante entre 3 % et 25 % par an, galopante jusqu’à 1000 % par jour et plus. Seule l’Allemagne a connu celle-ci en 1923 et en 1947. La France n’a pas connu d’inflation galopante depuis 1776, seulement rampante. Le plus probable est que les Etats européens empêcheront l’inflation galopante mais ne pourront enrayer une inflation rampante élevée.

La masse monétaire existante  est de plusieurs   centaines de milliers de milliards, peut-être   mille (la définition des contours de la dette ne permet pas d’être plus précis) pour un PIB mondial  d’environ 70 000 milliards de dollars. Une masse de 200 000 milliards serait déjà suffisante selon les ratios habituels.

 

La vitesse de circulation de la monnaie

 

La masse monétaire doit cependant  être corrigée par un autre paramètre, celui de la vitesse de circulation de la monnaie. Imaginons que ces immenses masses d’argent soient entre les mains de vieux riches et malades, sortant peu et n’ayant d’autres frais que quelques courses et les émoluments de leur gouvernante : tout se passe alors comme si cette masse n’existait pas. C’est en partie ce qui arrive  aujourd’hui. La vitesse de circulation de la monnaie reste basse mais elle peut se réactiver, à l‘occasion d’un héritage par exemple. A titre individuel sans doute mais à titre collectif ? On ne sait. Une panique monétaire peut entrainer une fuite devant la monnaie et l’inflation galopante. Dans ce cas, les avoirs bancaires seraient bloqués.

Il est déjà difficile aux Etats, l’Etat français en particulier, de réduire leur déficit, il est quasi impossible qu’ils reconstituent un excédent à même de rembourser leurs dettes. Les dettes continueront longtemps à être remboursées par d’autres dettes. Jusqu’à quand ?

Il est donc  douteux que la vague d’inflation que nous connaissons s’apaise. Aboutira-telle à un cataclysme ? Qui peut le dire ?

 

Roland HUREAUX

 

 

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12 mars 2024 2 12 /03 /mars /2024 21:57

 

Comment ne pas s’effrayer d’entendre que certains Polonais rêvent que la Pologne ait la première armée d’Europe de l’Ouest ?

La moins réticente à s’engager en Ukraine, la plus remontée contre les Russes, ce qui n’est pas peu dire, c’est elle qui récolte le plus  d’armes américaines. Aussi certains, à Varsovie,  se prennent-ils à rêver d’une double revanche, sur la Russie mais aussi l’Allemane régulièrement mise en cause à Varsovie  pour sa tiédeur à envoyer des armes à l’Ukraine et aujourd’hui affaiblie.

Entre la Russie et l’Allemagne, la position de la Pologne n’a jamais été, il faut bien le dire, facile.

On a d’autant plus de mal à comprendre que la Pologne soit aujourd’hui beaucoup plus antirusse qu’antiallemande. Serait-ce l’effet des stratégies d’influence   de Washington, devenues si sophistiquées ?

A preuve la confiance aveugle que font les Polonais aux Etats-Unis qui les ont pourtant lâchés en 1939, en 1945 (Yalta), 1956, 1968, 1981  et qui les lâcheraient sans nul doute s’il y avait risque de guerre mondiale , au cas où la Russie s’en prendrait à eux .

L’Allemagne et la Russie, parfois avec l’Autriche, se sont partagé  la Pologne à plusieurs reprises à travers l’histoire. La première fois à l’initiative de deux Allemands : Frédéric II et Catherine II. La dernière en 1939.

Qui fut l’occupant le plus cruel ? C’est difficile à dire : le communisme stalinien s’en prenait tout le monde. Le massacre de Katyn toucha 24 000 officiers mais plus d’un million d’autres civils non-juifs furent aussi exécutés. Le régime d’Hitler visa d’abord les élites polonaises, y compris les prêtres catholiques. Le but était de faire de  la Pologne un peuple de sous-hommes sans instruction propres à devenir les serfs des Aryens. Avec ls juifs, qui étaient eux aussi polonais, il faut ajouter environ 3 millions de victimes (soit la moitié de celles de la Shoah).

Les Allemands firent souvent exécuter leurs basses œuvres par les Ukrainiens de Bandera. Le soutien aveugle que la Pologne apporte à l’Ukraine est d’autant  plus étonnant que le massacre le plus concentré dans le temps , sous  la Seconde guerre mondiale,  fut  celui où périrent, en juillet 1943, plusieurs dizaines de milliers de  Polonais de Volhynie sous les coups des Ukrainiens bandéristes inféodés à Hitler. 

La sagesse eut été pour la Pologne de ménager la Russie qui sera toujours pour elle un puissant voisin d’autant qu’au départ Poutine n’avait aucune revendication sur la Pologne. En s’engageant à fond du côté de l’OTAN dans une guerre perdue d’avance, les Polonais ont joué un jeu dangereux.

Mais la dernière chose qu’il faut demander aux Polonais, c’est une politique étrangère prudente. Qui se souvent du traité de défense entre l’Allemagne la Pologne de 1934 ?  Sait-on qu’aux accords de Munich (1938), la Pologne obtint une petite province tchécoslovaque ?  Un an avant de passer elle-même à la casserole ! La seule période où la politique polonaise a été raisonnable fut celle où s’exerça la tutelle discrète mais efficace du pape Jean Paul II.

L’aide de la France avait  sauvé la Pologne des Bolcheviks en 1921. On critique à juste titre la passivité française, qui, après avoir déclaré la guerre en 1939 pour défendre le Pologne ne fit rien. Mais a-ton jamais vu un pays perdre sa liberté pour en sauver un autre comme nous l’avons fait ? Et où étaient alors les Etats-Unis si révérés aujourd’hui à Varsovie ?

Le vrai risque pour la Pologne vient aujourd’hui des Etats-Unis. S’ils ne gagnent pas la guerre d’Ukraine, ils n’en auront pas mois affaibli, selon un plan très explicite rendu public un peu partout, la Russie , l’objectif initial étant de l’enliser dans une ou plusieurs guerres où elle épuiserait ses forces . Ils s’étaient mis à partir de 2014 à exciter et armer les Ukrainiens pour qu’ils leur servent, dans cette mauvaise affaire de mercenaires (proxys) . L’Ukraine y a perdu ses principales infrastructures, près de 200 000 hommes et peut-être sa liberté. Les armes américaines sont financées par des prêts et non données. Il lui faudra des dizaines d’années pour se relever.

Qui dit que les « néo-conservateurs » qui ont concocté toute l’affaire à Washington, dès que  la guerre d’Ukraine se terminera, par une victoire russe bien sûr, ne poursuivront pas leur opération de harcèlement et d’attrition de la Russie  en prenant pour base, après  l’Ukraine, la Pologne ?

Une provocation (les Américains savent monter des opérations sous faux drapeau : Vietnam, Irak, Libye, Syrie et peut-être d’autres – comme les Allemands l’avaient fait à la frontière polonaise en 1939 ) et la vanité polonaise aidant , voilà que ce pays partirait  pour l’abîme. Tout ce qui a fait sa prospérité depuis 1990 serait détruit.  Les  Américains ne s’engageraient pas directement , les pays d’Europe occidentale dont les armées sont exsangues non plus.

La Pologne ferait bien de revenir de son hystérie pro-ukrainienne qui a plus  nui que tout à sa sécurité.

 

Roland HUREAUX

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12 mars 2024 2 12 /03 /mars /2024 21:47

Compte-rendu de lecture :

Roland HUREAUX : Jésus de Nazareth, roi des Juifs (DDB, 2021, 567 pages.)

En écrivant Jésus de Nazareth, roi des Juifs, notre confrère Roland HUREAUX a voulu faire œuvre historique. Un projet en cohérence avec sa qualité d’agrégé d’histoire. Sa biographie  de Jésus  est centrée sur les faits, laissant de côté  les autres lectures : symbolique, morale, mystique, eschatologique - et a fortiori  numérologique !  

Il part de deux hypothèses :

  • La première, qui d’ailleurs est une certitude : la source presque unique que nous ayons sur la vie de Jésus, ce sont les quatre évangiles. Leurs divergences apparentes laissent supposer que les auteurs ne se sont pas concertés. Quatre sources, c’est plus que pour la plupart des personnages de l’Antiquité. Les apocryphes apportent peu de choses (même le Protévangile de Jacques qui donne des détails sur les origines    de Marie a une crédibilité incertaine).  Flavius Josèphe, le grand historien juif de cette période, mais né seulement en 37, soit après la mort de Jésus,  nous éclaire sur le contexte politique et religieux mais ne dit que très peu sur Jésus de Nazareth, un peu plus sur Jean Baptiste.   
  • La seconde est que les auteurs étaient des juifs qui connaissaient la gravité du 8e commandement : « Tu ne porteras pas de faux témoignage » et qu’il faut donc les prendre au sérieux.

C’est dire que l’ouvrage procède d’une lecture plutôt bienveillante des textes, éclairés par l’Ancien testament auquel les évangiles se réfèrent en permanence. Une lecture historique n’est pas forcément déconstructrice comme beaucoup le pensent depuis Renan. Au contraire, dit Hureaux dans son introduction, la plupart des auteurs qui prétendent « démythologiser » les Evangiles font des choix arbitraires  de ce qui selon eux, est historique de ce qui  ne l’est pas  : ils ne font qu’exprimer ainsi leur subjectivité , un  exercice que Roland Hureaux se refuse à faire , se contentant de dire que , par hypothèse, il  ne rejette rien  a priori.    

Lire les Evangiles, comme il le fait, en s’en tenant à la part humaine de celui que les croyants tiennent pour l’Homme-Dieu, c’est, dit-il, se conformer au Concile de Chalcédoine (451) pour lequel Jésus est  à la fois homme et Dieu sans séparation, mais aussi sans confusion

Dans cette perspective, il était normal qu’il fasse référence à la période où vécut Jésus   et qu’il connait bien :    le début  de l’Empire romain, premier siècle  de la pax romana, ce en quoi les  chrétiens de l’Antiquité  ont vu plus qu’une coïncidence.

L’auteur écarte naturellement l’hypothèse émise par certains, selon qui Jésus de Nazareth n’aurait pas existé. Aux arguments   habituels, il ajoute    qu’une lecture attentive des sources évangéliques  montre l’extrême finesse de l’observation des comportements politiques et  psychologiques des acteurs .   Même s’ils n’avaient pas voulu faire un récit vrai, les évangélistes étaient d’excellents   sociologues de la politique.

S’agissant de la date des évangiles, sujet controversé, l’auteur suit Claude  Tresmontant, l’abbé Carmignac et l’évêque anglican John Robinson   pour les  avancer plus qu’on ne fait d’habitude  en les situant  au milieu du Ier siècle (50-65) , en même temps que les épîtres de saint  Paul, dont les dates sont connues (51-65), ce qui situe les évangélistes plus près  des événements qu’ils narrent que bien des historiens de l’ l’Antiquité.   Les raisons de cette option sont nombreuses, ne serait-ce que   l’absence de toute mention de la destruction de Jérusalem en 70 ou les Actes des apôtres écrits après l’évangile de Luc qui se termine en 61, ce qui exclut , comme l’avait vu le grand  exégète allemand Harnack,  que ce dernier ait été écrit vers 80  comme l’a longtemps voulu  l’exégèse officielle.  

Roland Hureaux   écarte aussi quelques idées qui furent longtemps à la mode : celle d’une tradition orale portée par des illettrés, tardivement mise par écrit . Le Ier siècle romain est, dit-il, une civilisation de l’écrit, spécialement le monde juif : il y a des banques, des billets à ordre, des livres ; beaucoup de Juifs lisent le Bible ou ont mis par écrit leur généalogie .  Rien à voir avec le désert d’Arabie du VIIe siècle où fut, dit-on, rédigé le Coran. Un siècle avant Jésus, les Pharisiens avaient prescrit la scolarisation obligatoire.  Les évangiles ne sont pas non plus la production de « communautés », mythe que l’auteur qualifie de « clérico-germanique » : écrire est un travail solitaire même si l’auteur se fait aider par des scribes, comme le fit Tacite, ou s’il consulte une autorité, comme Luc consulta Paul et Marc consulta Pierre.

Ceux qui pensent que l’histoire ne peut être que transgressive sont certains que les « frères de Jésus » étaient de vrais frères :  de solides arguments, présentés dans ce livre peuvent étayer la thèse contraire .  De même qu’il  est d’usage de dire,  pour faire sérieux,  que Marie Madelaine ne serait que la synthèse de plusieurs  personnages  de l’Evangile , une thèse que l’auteur  démonte.     Restent de vraies difficultés comme les récits de miracles, à regarder eux aussi de près : pour deux résurrections sur trois, Jésus dit « il (elle) n’est pas mort,  il (elle)  dort » : ne s’agissait-il d’un coma profond ?  Il est en tous cas difficile de comprendre le succès de Jésus presque immédiat sans y voir l’attirance de ses dons extraordinaires.

Un tel ouvrage n’a rien à voir avec les thèses simplistes et  provocatrices qui ont assuré  un  succès passager à certains livres : Jésus aurait été un zélote , un essénien  ( il sont totalement absents des évangiles : pourquoi ? On ne sait) ou  le compagnon  de Marie Madeleine ( alors que tous ses faits et gestes étaient surveillés en permanence tant par la police juive que par la police romaine ).  L’auteur a voulu écrire un ouvrage durable, particulièrement utile en ces temps où tant de repères se perdent. Donc pas de thèse radicale, mais quelques points de vue qui s’écartent d’une certaine doxa.

Une grande importance  a été accordée  à l’enfance de Jésus ; sa généalogie est essentielle ;  même si les deux que nous avons diffèrent ,  il est appelé partout Fils de David et personne ne le conteste – alors qu’est contesté avec force qu’il soit le Messie. Cette ascendance royale était en soi une menace pour la stabilité politique comme Hérode le Grand l’a compris tout de suite.  Lui qui avait exterminé la dynastie précédente, celle des Hasmonéens (Maccabées) et fait massacrer les enfants du la région de Bethléem,  

Un exercice risqué : décrire la personnalité de  Jésus : compte tenu de sa visite au Temple à l’âge de 12 ans, il est assurément un surdoué , ce qui n’est pas  un don surnaturel puisque nous en connaissons d’autres. On peut même penser qu’il était assez doué pour connaitre toutes les langues parles dans la région dont le latin, sinon liturgique, du moins administratif. De même, selon les évangiles, le don des miracles ( appelés  « signes ») ne lui est-il   pas propre, puisqu’il incite ses  disciples à en faire comme lui,  ce qui exige qu’ils aient  la foi.

Jésus apparait aussi comme un leader, un chef « qui parle avec autorité et non comme les scribes » (entendons les bureaucrates !). L’auteur écarte une « théologie facile » qui ne laisserait à Jésus-homme que   les actes ordinaires   et renverrait les miracles à sa nature divine.

Le point important est que beaucoup de ce que le discours contemporain, chrétien ou pas, attribue à Jésus se trouve déjà dans le  Testament juif .  Le Magnificat et les Béatitudes sont, dit-il, des quasi-collages de la Bible juive. Le devoir de miséricorde ou la nécessité d’aider les pauvres sont présents en permanence dans les psaumes et chez les prophètes. Jésus ne cesse de dire qu’il n’est pas venu changer un seul iota de la Loi. Il la durcit même sur le mariage ou sur la prestation de serments.   Figure en annexe un intéressant tableau des positions des différents groupes religieux du Ier siècle : en dehors des disciples de Jean-Baptiste, c’est des pharisiens qu’il semble le plus proche. Or ils furent ses plus farouches ennemis. Etonnant ? Pas vraiment. Ceux qui connaissent la vie politique savent que ce ne sont généralement pas les oppositions idéologiques qui font les grandes haines, mais les petites différences - et parfois l’absence de différence.

Sur le fond Jésus se distingue des pharisiens de son temps par l’ordre de priorité qu’il donne aux différents commandements de la Loi, considérant, comme plus tard saint Paul,  que les principaux sont les  deux premiers auxquels tous les autres  se ramènent  , l’amour de Dieu et celui  du prochain. D’ailleurs,  les  pharisiens, si opposés à Jésus durant sa vie,   devaient , entre les années trente et soixante , selon   les Actes des apôtres, les soutenir constamment contre le haut sacerdoce (les sadducéens) . Qu’est ce qui est donc vraiment propre à l’enseignement de Jésus ? Moins que l’on croit : la nécessité, non seulement de secourir les pauvres mais aussi le l’être – ou encore le privilège conféré à l’enfance - et bien entendu le fait de qualifier Dieu comme Père, ce qui ne figure que très rarement dans l’Ancien testament.

Loin d’être une bande désordonnée, l’équipe que met en place Jésus est très hiérarchisée :  Jésus lui-même, Pierre, Jacques et Jean, les autres apôtres, les 72 disciples, les autres disciples. Six degrés hiérarchiques !  

A côté des hommes, plusieurs femmes, apparemment plus riches que les hommes, qui sont un peu les « sponsors » de Jésus ; parmi elles, la femme de Chouza, intendant, c’est-à-dire ministre de finances   d’Hérode Antipas. Ce dernier, fils d’Hérode le grand, après avoir fait décapiter Jean-Baptiste est tombé en disgrâce à l’avènement de Caligula ( 37) et serait  mort en exil avec sa femme  Hérodiade,  à  Lugdunum Convenarum ( peut-être Saint Bertrand de Comminges). La condition des femmes s’était durcie au cours du siècle passé : une femme honnête ne pouvait pas sortir sans nécessité, elle devait en tous les cas être voilée; elle ne pouvait pas  parler à un homme et sûrement pas aller écouter des prêcheurs.  Seules les femmes de l’aristocratie ou au contraire déjà déconsidérées (ou les deux !) pouvaient suivre Jésus.   

Le grand prêtre Caïphe donne des raisons suffisantes à la décision de mettre à mort de Jésus : son succès attire de plus en plus les foules ; les Romains vont s’en inquiéter,  venir en force  et détruire  l’équilibre  colonial que  la  classe dirigeante juive ne souhaite pas remettre  en cause.   Le Concile de Trente (1545-1563) a dit avec toute la clarté voulue que les Juifs n’étaient pas plus responsables que le reste des hommes de la   crucifixion de Jésus. D’autant que le phénomène du roi sacrifié décrit par Frazer et Girard, est une réalité anthropologique qui vaut pour tous les peuples. Pilate surplombe la croix de l’inscription bien connue   Iesvs Nazarenvs, Rex Ivdæorvm (INRI). Un roi dans le contexte romain, c’est un protégé comme Hérode ou bien un rebelle : Jésus n'étant pas un protégé, il est un rebelle : par cette inscription qui sert de titre au livre, Pilate qui sait qui sait qu’il n’est pas un rebelle, se couvre vis-à-vis de sa hiérarchie à Rome pour une décision risquée. 

L’intérêt de ce livre ouvrage réside aussi dans la description de la terre sainte et de la société juive sous le férule de l’empire romain : une société perturbée par cette première  forme de mondialisation que représente la conquête romaine : un grand écart entre riches et pauvres, beaucoup de brigandage , une inquiétude religieuse  qui ne pouvait constituer qu’un terrain favorable à la parole  de Jésus Christ.  

La couverture est illustrée par un beau tableau de Daumier dont on ne connaissait pas la veine religieuse.

J.M.

A côté des hommes, plusieurs femmes, apparemment plus riches que les hommes, qui sont un peu les « sponsors » de Jésus ; parmi elles, la femme de Chouza, intendant, c’est-à-dire ministre de finances   d’Hérode Antipas. Ce dernier, fils d’Hérode le grand, après avoir fait décapiter Jean-Baptiste est tombé en disgrâce à l’avènement de Caligula ( 37) et serait  mort en exil avec sa femme  Hérodiade,  à  Lugdunum Convenarum ( peut-être Saint Bertrand de Comminges). La condition des femmes s’était durcie au cours du siècle passé : une femme honnête ne pouvait pas sortir sans nécessité, elle devait en tous les cas être voilée; elle ne pouvait pas  parler à un homme et sûrement pas aller écouter des prêcheurs.  Seules les femmes de l’aristocratie ou au contraire déjà déconsidérées (ou les deux !) pouvaient suivre Jésus.   

Le grand prêtre Caïphe donne des raisons suffisantes à la décision de mettre à mort de Jésus : son succès attire de plus en plus les foules ; les Romains vont s’en inquiéter,  venir en force  et détruire  l’équilibre  colonial que  la  classe dirigeante juive ne souhaite pas remettre  en cause.   Le Concile de Trente (1545-1563) a dit avec toute la clarté voulue que les Juifs n’étaient pas plus responsables que le reste des hommes de la   crucifixion de Jésus. D’autant que le phénomène du roi sacrifié décrit par Frazer et Girard, est une réalité anthropologique qui vaut pour tous les peuples. Pilate surplombe la croix de l’inscription bien connue   Iesvs Nazarenvs, Rex Ivdæorvm (INRI). Un roi dans le contexte romain, c’est un protégé comme Hérode ou bien un rebelle : Jésus n'étant pas un protégé, il est un rebelle : par cette inscription qui sert de titre au livre, Pilate qui sait qui sait qu’il n’est pas un rebelle, se couvre vis-à-vis de sa hiérarchie à Rome pour une décision risquée. 

L’intérêt de ce livre ouvrage réside aussi dans la description de la terre sainte et de la société juive sous le férule de l’empire romain : une société perturbée par cette première  forme de mondialisation que représente la conquête romaine : un grand écart entre riches et pauvres, beaucoup de brigandage , une inquiétude religieuse  qui ne pouvait constituer qu’un terrain favorable à la parole  de Jésus Christ.  

La couverture est illustrée par un beau tableau de Daumier dont on ne connaissait pas la veine religieuse.

J.M.

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12 mars 2024 2 12 /03 /mars /2024 21:44

M.MACRON VEUT COUPER LES RETRAITES PAR LES DEUX BOUTS

 

Il est hautement significatif que le gouvernement nommé par M. Macron n’ait en ce début d’année  que deux projets : la réforme des retraites et la légalisation de l’euthanasie.

Alors que l’économie s’effondre, que l’inflation s’envole, que l’emploi régresse, que la faim et le froid menacent, que les populations désespèrent, il n’a donc pas d’autres sujets de préoccupation !

Quoi de commun entre ces deux sujets ?  C’est simple :  dans les deux cas, il s’agit de diminuer le poids des retraites et de l’assurance-maladie (qui demeurent les principales charges sociales) en s’y prenant par les deux bouts.

Le recul de l’âge delà retraite jusqu’à 65 ans – d’autant plus problématique qu’on n’a pas de travail à donner aux intéressés -   a un but évident :  réduire le nombre de retraités et peut-être les faire partir à un âge où ils seront un peu plus fatigués.

Et l’euthanasie, dira-t-on ? Là aussi c’est simple :  on sait que 50 % des dépenses de maladie se produisent dans la dernière année de vie. Il suffit donc de supprimer cette dernière année pour alléger de moitié ces dépenses.   Nous ne plaisantons qu’à moitié.

Le recours à l’euthanasie ou au suicide assisté, reposera, dit-on sur le consentement.

Mais qui sait combien cette notion de consentement recouvre d’équivoques ?  Dans un pays comme la Belgique, le suicide assisté est ouvert aux mineurs ; il peut être justifié par des maladies psychologiques. Résultat : on imagine un adolescent en crise – par exemple parce qu’il ne saura pas quel genre choisir – tombant en dépression et demandant le suicide assisté. Dans la loi belge, on ne le lui refusera pas.

A l’autre bout de la vie, combien de personnes âgées sentiront le regard pesant de leurs proches leur faisant sentir qu’ils ne servent désormais à rien, et  qu’ils pèsent à la société, jusqu’à ce qu’ils consentent eux aussi à disparaitre.

Comment le consentement à la mort sera-t-il obtenu de  vieillards ayant perdu un partie leur autonomie ? Ce qui s’est passé dans les Epad durant l’épidémie de covid est instructif. L’exemple des pays voisins qui se sont dotés de cette législation barbare aussi. Un récent rapport de Cour européenne des droits de l’homme montre les abus sur lesquels débouchent dans un pays comme la Belgique les pratiques prétendues euthanasiques.

Qu’il y ait une cohérence entre la légalisation de l’euthanasie et le souci d’alléger le poids des inutiles avait été dit crûment par Jacques Attali en 1981 :

 

 « Dès qu'il dépasse 60/65 ans, l'homme vit plus longtemps qu'il ne produit et il coûte cher à la société. Je crois que dans la logique même de la société industrielle, l'objectif ne va plus être d'allonger l'espérance de vie ». « Il est bien préférable que la machine humaine s'arrête brutalement plutôt qu'elle se détériore progressivement. L'euthanasie sera un instrument essentiel de nos sociétés future. » (« L'avenir de la vie », Editions Seghers 1981).

Aujourd’hui, beaucoup pensent la même chose – et pire – mais ne le disent pas.

Dans certains clubs du Troisième âge, on parle de la vieillesse comme de la « Vie montante ». C’est cette vie là que Macron et son équipe veulent raccourcir … par les deux bouts.

 

Roland HUREAUX

 

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12 mars 2024 2 12 /03 /mars /2024 21:42

SUR LES RETRAITES

 

Une fois de plus, je regrette que le gouvernement ait la maladresse de mélanger deux sujets : l’âge « normal » de départ en retraite et les régimes spéciaux. Il aurait été tellement plus habile de dissocier les deux. Mais si son  but final est de faire assez de bruit pour montrer à Bruxelles qu’il  se bouge, évidemment, la maladresse n’a pas que des inconvénients.

Repousser de deux ans l’âge de la retraite c’est mettre environ 500 000 personnes de plus sur le marché du travail.

Alors que nous avons 3 millions de chômeurs officiels et sans doute 6 millions véritables.  Les nouveaux actifs seront-ils tous employés ?  Le but de la réforme ne saurait être de les transférer des caisses de retraites à l’assurance chômage.

Une telle réforme, aurait eu du sens en période de croissance où les nouveaux actifs auraient été vite absorbés par le marché du travail.  Aujourd’hui ? 

Personnellement, je préfère une retraite à la carte sans seuil, mais personne ne semble la  vouloir ; il y a tant s’actifs qui seraient utiles s’ils restaient au-dessus de 65 ans, d’autres qui voudront continuer à travailler et qui ne le peuvent pas pour des raisons réglementaires ; d’autres qui voudraient travailler plus pour arriver une retraite convenable. Il va de soi que toute année supplémentaire doit entrainer un supplément de pension, et l’inverse pour ceux qui partent avant terme, dans une stricte proportionnalité.

S’agissant des charges des entreprises, je pense ce que la réforme des retraites leur rapportera  bien moins que ce que leur rapporterait un abandon du prix unique de l’électricité et la suppression tout ce qui pèse sur celui -ci (éolien etc.) On attend de 5 à 15 milliards de bénéfice de cotisations pour la réforme des retraites. Le refus de sortir de l4europe de l’énergie côute à nos entreprises ( et aux particuliers) de 50 à 150 milliards.

Il ne faut non plus mettre au même niveau ceux qui ont commencé à travailler à 18 ans et les babas cool, qui poursuivent leurs études au-delà de 25 ans.

Pour ce qui est, des régimes, spéciaux, il y en a de toutes sortes.

La jalousie joue beaucoup dans la revendication de les supprimer. Si les rentes, bien réelles, de certains éteint transformés en supplément de salaires, on en entendrait beaucoup moins parler.

Mais là aussi les situations sont très variées : pour les fonctionnaires moyens qui arrivent à leur maximum indiciaire à 40 ans, compter la dernière année ou les vingt dernières en fait pas une grosse différence. Pour les haut -fonctionnaires dont 50 %  du revenu est composé de primes  non prises en compte dans la  retraite, la chute est brutale en fin de carrière.

Je suis en revanche favorable aux privilèges de certains servies public, privilèges qui ont d’ailleurs été largement abrogés : EDF, SNCF. Ces services ont longtemps bien tourné, si on les compare aux autres pays, parce que les employés se considéraient comme une élite ; malgré les grèves, ils étaient attachés au service et soucieux qu’il fonctionne bien. Je ne souhaite pas qu’une centrale nucléaire ou un train soient entre les mains de cdd ou même d’employés au statut banalisé.

La retraite par capitalisation est un leurre :  le retraité qui va à la superette n’achète pas des produits fabriqués il y a  trente ans. Ce système supposerait qu’on double les cotisations pendant X années pour  arriver à un capital convenable. Il aurait un sens si la France n’avait pas assez d’épargne, mais elle est un des pays au monde où il y  en a le plus .  Savoir comment elle est employée est une autre question. J’ai quelques idées sur le sujet.

Fondamentalement, les retraites sont un partage de la charge actuelle des anciens.

J’ajoute que les mères de famille qui élèvent les futurs cotisants au détriment de leur carrière risquent d’être encore sacrifiées. Ce n’est pas le genre du gouvernement actuel de s’en préoccuper.

 

RH

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12 mars 2024 2 12 /03 /mars /2024 21:39

LA MODERNITE AUX PRISES AVEC SES CONTRADICTIONS

 

Jamais peut-être le monde n’a été si plein de contradictions.

La modernité ou ce qui est tenu pour tel est contradictoire.

Lors d’une récente  « journée de la femme », comme il y en a beaucoup, des « trans » (hommes ayant voulu devenir femmes) ont été agressés par des féministes. La transsexualité et la promotion de la femme sont pourtant des tendances que l’on rattache toutes deux à l’« avancée » des mœurs.  

Les « trans » veulent pousser au plus loin la théorie du genre selon laquelle les sexes sont fongibles et doivent être indifférenciés ; ayant choisi de devenir femmes, ils voudraient être admis parmi les femmes militantes pour partager leurs combats mais celles-ci ne veulent pas d’eux. C’est comme ça.

A peine élu le président Biden a autorisé les hommes « trans » à participer aux compétitions sportives de femmes, même la boxe. Les obliger à rester dans leur sexe d’origine serait selon eux ( ou elles ) discriminant mais les femmes de naissance craignent une concurrence inégale qui leur fera sans doute perdre beaucoup de médailles.

Beaucoup de ces contradictions concernent, on le voit, les rapports entre les sexes.

 

GPA et égalité

 

A l’heure de la promotion générale – et bienvenue – de la femme à travers le monde, certains milieux libertaires, partisans de la théorie du genre, poussent pour que soit autorisée la gestation pour autrui, qui seule permettrait à des homosexuels d’avoir des enfants (ou de faire comme si ) et qui conduit, on le sait, à une forme particulièrement odieuse d’esclavage. « La femme loue bien ses bras dans les usines, pourquoi ne louerait-elle pas aussi son utérus ? » n’hésitait pas à dire Pierre Berger, cet homme délicat.  La  GPA ( gestation pour autrui )  , si contraire à l’égalité , est pourtant l’aboutissement d’une  démarche de non-discrimination :  il n’y  pas de raison, dit-on,  que le mariage soit le privilège des couples homme-femme, instaurons un mariage homosexuel ; les femmes homosexuelles , voire seules, ont autant de droits que  celles qui vivent  avec un homme à avoir un enfant, d’où le droit à la  PMA (procréation médicalement assistée)  pour  femmes seules ou en couples de femmes  récemment adoptée par le  Parlement français ; dernière étape dont nous nous approchons : il n’y a pas de raison que la paternité et la maternité soient réservées aux femmes en couple, il faut que les hommes en couple y aient accès aussi, donc la GPA doit être autorisée ; ainsi trois étapes de raisonnement supposées libératrices aboutissent  à un  abaissement de la femme que dans les pires périodes d’esclavage, on n’avait pas imaginé .  

Divergences analogues sur la prostitution qui oppose les différentes écoles ultraféministes.  Pour les unes, elle est une forme d’esclavage à bannir, à l’initiative de la puissance publique.  Pour les autres, d’inspiration libertaire, elle fait partie de la liberté sexuelle, voire de la liberté du commerce et de l’industrie: l’Etat n’a pas à la réglementer. L’idée moyenne que « le plus vieux métier du monde » pourrait être simplement toléré échappe à l’un et l’autre camp : il n’y a pas de moyenne chez ces gens là. 

 

Parité politique et parité conjugale

 

Toujours le mariage homosexuel : il conduit à abolir la parité homme femme dans sa forme la plus élémentaire, le couple. Fort bien, mais pourquoi coïncide-t-il avec l’instauration sans précédent d’une rigoureuse parité dans les élections à tout niveau, dans les conseils, dans le recrutement des entreprises publiques – et aux Etats-Unis de plus en plus,  privées. Si la parité est une nécessité, pourquoi ne pas la maintenir dans un couple de parents ? « Il faut la parité pour se porter candidat au conseil général et pas pour se marier ! » nous disait Jean Lassalle.

Toujours la parité : il y avait autrefois des écoles normales d’instituteurs et des écoles normales d’institutrices,  une agrégation pour les hommes et une agrégation pour les femmes qui garantissaient pour chaque discipline la parité dans l’enseignement. Au motif de s’adapter à l’évolution des mœurs, ces écoles et leurs concours d’accès ont été rendus mixtes, déséquilibrant la profession au détriment de l’un ou l’autre sexe, généralement féminin. Alors qu’on introduit la parité là où elle n’existait pas, on la supprime là où elle existait !

Il se dit que dans les couples isosexes, si advient, n’importe comment, un enfant, l’un se fait père, l’autre mère. Pointe extrême de l’existentialisme ou chacun choisit d’être ce qu’il est hors de toute contrainte de la nature. Pourtant, l’existentialisme a ses limites :  la théorie du genre n’étend pas la liberté existentielle au désir sexuel. Celui ci est au contraire tenu pour une fatalité inexorable. Le genre masculin est librement choisi par l’individu, l’attirance homosexuelle est une contrainte qui s’impose à lui. Pour parler le langage aristotélicien l’homosexualité ou hétérosexualité sont de l’ordre de l’essence alors qu’être physiquement mâle ou femelle est de l’ordre de l’attribut, donc réformable.

La liberté sexuelle, forme de la modernité s’il en est, est à l’origine d’autres paradoxes.

 

Ouverture de la chasse

 

Qui ne voit qu’elle a transformé certains milieux, dont bien souvent le monde l’entreprise,  en terrain de chasse pour jeunes mâles prédateurs ? Ils n’ont pas besoin d’avoir recours au viol ou au harcèlement pour se mettre dans la peau du chasseur.  Dans la vieille société, cet esprit prédateur existait aussi mais il était borné par le sens de l’honneur des honnêtes femmes, alors majoritaires et les usages mondains : « ce que les hommes tiennent pour un honneur est le déshonneur des femmes » (Marguerite de Navarre). Aujourd’hui cette borne ayant largement cédé, la chasse a libre cours. « Tous les hommes sont des cochons » dit une veille chanson, et aussi la pointe du mouvement féministe, comme Me too, adepte pourtant de la même liberté sexuelle.

Il reste bien quelques hommes scrupuleux qui subordonnent leurs désirs à la liberté des personnes du sexe, voir au respect de leur vertu et dans ce cas, la séduction, si séduction il y a, reste discrète. Mais les ultraféministes ne les fréquentent guère car ils n’appartiennent pas au même monde :  adeptes des vieux codes moraux ou religieux - ou simplement courtois, ils sont exclus de la sphère de la modernité dont elles se réclament.  Dommage pour elles.

Comment ne pas voir  pourtant que la libération sexuelle ne pouvait que transformer la femme en objet ?

 

Concurrence victimaire

 

Il reste que si l’Occident a suivi cette pente, il ne l’a jamais reconnu. La femme objet est au contraire, on le sait, plus ouvertement affichée dans la religion musulmane, laquelle contredit de manière frontale les exigences du féminisme. Mais en Europe, les musulmans sont des immigrés, donc des opprimés. Entre les femmes et les adeptes de l’islam, il y a, comme on dit,  « concurrence victimaire », une concurrence rude.  Dès lors, quelle attitude prendre pour rester politiquement correct :   censurer l’islam au nom des droits des femmes ou mettre ces droits entre parenthèses pour ménager l’islam,  religion des opprimés ? Quant à Cologne, lors des fêtes du nouvel an 2016, des immigrés musulmans harcelèrent de manière organisée des centaines de femmes allemandes, les associations féministes furent très embarrassées pour condamner ces agressions, de crainte d’apporter de l’eau au moulin du racisme et de l’islamophobie. Il est intéressant d’observer que la sympathie pour l’islam prit alors, dans le discours public, le dessus sur la cause de femmes et que les militantes féminines les plus exaltées choisirent de ne pas protester. Ce choix est significatif d’une hiérarchie implicite des préoccupations occidentales que l’on observe aussi d’autres circonstances. L’islamo-gauchisme, oxymore étonnant, juxtapose une préoccupation politique et sociale issue des Lumières, par marxisme interposé, le gauchisme,  et la défense de valeurs qui, aux yeux des mêmes Lumières, apparaissent les plus rétrogrades. Quand on sait la part essentielle prise par l’UNEF lors des manifestions de mai 698, à la tonalité libertaire explicite, comment ne pas être étonné que sa vice-présidente soit aujourd’hui une jeune fille voilée ?  Et que par ailleurs le même mouvement organise des séminaires interdits aux Blancs ?

De même les défenseurs de la cause animale, si en pointe aujourd’hui, se trouvent fort embarrassés pour condamner l’abattage hallal.

Pourquoi ce privilège de l’islamophilie sur le féminisme ou la cause animale ?  Ne serait-ce pas que les islamistes sont davantage craints dans la société occidentale que les femmes ou les animaux ?  Hiérarchie des valeurs ou hiérarchie des peurs ?

Autre contradiction : la prévention légitime du sida, souvent prise en mains par les associations homosexuelles, ne se transforme-t-elle pas en propagande subliminale pour les comportements dits à risque ? Quand lors d‘une soirée télévisée consacrée à la lutte contre le sida, il y a quelques années, l’abbé Pierre avait suggéré que cette lutte pourrait commencer par le refus de la promiscuité sexuelle, il se fit copieusement huer. Tout autre que lui se serait fait lyncher.

Comment comprendre que soit institué un mariage homosexuel, tributaire d’une théorie du genre qui nie les identités sexuelles innées, au moment précis où nos sociétés redécouvrent massivement, au travers de l’écologie, la nature végétale et animale dont la reproduction sexuée est la règle, rappelons-le, depuis un milliard d’années. Toutes les « avancées » biologiques ou sexuelles, y compris les plus artificielles, peuvent être soumises à l’Assemblée nationale :  s’il est un groupe dont on est sûr qu’il les votera, c’est bien le groupe écologiste. Il m’a été rapporté qu’une « cheffe » écologiste s’était fait faire un enfant par PMA, alors que, saine de corps, elle aurait pu arriver même résultat en faisant l’amour comme tout le monde.  Une vieille dame qui avait toujours voté écologiste par amour de la nature, cessa quand elle apprit que Noël Mamère, alors maire vert de Bègles, célébrait des mariages homosexuels.

 

Le temps du rock’n roll

 

Revenons au féminisme : comment comprendre que la génération qui a été par excellence celle de la libération de la femme, ait pu avoir pour danse emblématique le rock‘n roll ? Qu’est-ce en effet que cette danse sinon un symbole fort de l’inégalité de l’homme et de la femme ?  Non seulement la femme fait le plus d’efforts car elle est amenée à tourner sur elle-même presque en permanence, mais c’est l’homme qui lui dicte ses mouvements par de légères impulsions données au bon moment. La fin du  fin pour le play boy de surprise-party était de faire tourner sa partenaire très vite en ne bougeant lui-même presque pas, prenant ainsi la posture de la maîtrise facile, d’une domination d’autant plus efficace qu’elle est discrète, de l’aisance souveraine dans la position de la supériorité, telle que la décrit Bourdieu dans l’univers scolaire.  Personne à ma connaissance n’a jamais demandé que les rôles soient inversés.

Pour se situer à un autre niveau, un des plus grands tirages de la génération qui a connu l’émancipation féminine fut Gérard de Villiers et son fameux SAS. Il est sans doute inutile de s’attarder sur le rôle qui échoit la femme dans le climat de sexualité débridée qui est celui de ces romans.  

Nous avons évoqué la parité en politique. Tous ceux qui s’y sont exercé savent à quelles acrobaties conduit la règle de la parité dans l’établissement des listes.  On commence généralement par faire, non sans arbitrages sanglants, une liste d’hommes en leur conférant un numéro sur deux ; puis sont inscrites les femmes, souvent peu demandeuses, plus difficiles à trouver et   trop souvent tenues pour des figurantes.  Comme par hasard, il est rare que cet exercice favorise celles qui ont la plus forte personnalité. Chez les hommes non plus d’ailleurs. Création idéologique s’il en est, la parité forcée n’est pas seulement une atteinte au libre choix démocratique, puisqu’elle le limite, elle illustre aussi ce que Hayek appelle « la loi des effets contraires aux buts poursuivis ». Nous sommes loin d’une vraie promotion de femme qui, elle, n’aurait pas besoin d’une telle contrainte.  

Paradoxe : la même génération qui a vu l’émergence des femmes en politique a conduit une femme d’Etat aussi talentueuse que Marie-France Garraud, qui ne nous en voudra pas, pas, je l’espère, de l’évoquer, assignée chez elle pendant quarante ans.

 

Mai 68 au risque de la pédomanie

 

Dans les années soixante-dix, les tenants de la libération sexuelle ne craignirent pas d’aller jusqu’ bout de leur philosophie : on a assez reproché à Daniel Cohn-Bendit de s’être fait l’avocat de relations intimes entre adultes et enfants ; il ne faisait que suivre la logique qui était celle de son époque.

Les temps ont changé :  de plus en plus ces relations font horreur, surtout si elles sont incestueuses, et c’est légitime. Le paradoxe demeure que l’hallali contre la pédomanie (un terme que nous préférons à celui de pédophile, par respect pour la φιλία grecque, sentiment noble s’il en est) soit le fait non des tenants de la morale traditionnelle, discréditée, mais des libertaires eux-mêmes.  Choc des logiques : les derniers représentants de la pensée 68 se heurtent de front aux défenseurs des droits de l’enfant.

Paradoxe proche : notre société qui a mis en valeur comme aucune avant elle (pas même la société grecque du Ve siècle à laquelle on se réfère de manière souvent abusive) l’homosexualité, est en même temps devenue la plus sévère qui soit contre la pédomanie. Or la limite entre l’une et l’autre tient souvent à peu de choses selon la  date anniversaire, pédomanie le lundi, homosexualité  le jeudi. Il en résulte que le mot pédérastie, qui signifiait au départ l’amour érotique des enfants mais qui en était venu à désigner l’homosexualité en général, se trouve aujourd’hui banni.

 

L’abolition du handicap

 

Avec les questions de vie et de mort, nous entrons dans un autre domaine. Jamais le handicap n’avait fait l’objet d’une attention aussi grande : les handicapés reçoivent une allocation, ils ont des maisons spécialisées   qui coûtent  cher, le droit du travail les favorise, ils ont des emplois, des places de parking réservées, les bâtiments publics leur sont adaptés.  On se demande pourtant qui va bientôt bénéficier de ces avantages. La même société si attentive au handicap, pratique de plus en plus un eugénisme impitoyable, autorisant, voire prescrivant, en cas de handicap repéré, un avortement quasi-systématique.

Alors que l’avortement normal qui était limité à douze  semaines de grossesse a été porté à quatorze,  l’avortement dit thérapeutique peut se pratiquer jusqu’à la naissance. Cette possibilité a été étendue par une  loi  récente, sans qu’il y ait malformation de l’enfant, à la « détresse psycho-sociale » de la mère, motif dont on devine l’élasticité.  Un enfant qui nait dans le délai normal, et que ses parents veulent garder fera l’objet d’un luxe de moyens de réanimation sans précédent, allant parfois jusqu’à l’acharnement thérapeutique, pendant que l’autre, déjà formé lui aussi mais paraissant handicapé ou normal mais rejeté au motif de cette détresse, sera mis à mort dans les conditions les plus sordides. On peut s’interroger sur les raisons d’un tel paradoxe.  Croyant peu à l’autre monde, notre société pense qu’une vie en situation de handicap, dès lors qu’elle est la seule qui nous soit donnée, est le plus grand des malheurs ; les gens normaux   se sentent par rapport à lui, vaguement coupables et tentent de se racheter par des politiques généreuses. Mais le malheur parait si grand que la même société se fera compréhensive à l’égard des parents (souvent pressés par leur entourage, y compris hospitalier) qui abrègent une vie dont on juge par devers soi qu’elle « ne vaut pas la peine d’être vécue ». Les bien portants exorcisent ainsi leur culpabilité en faisant disparaitre les handicapés de leur vue. Le « meilleur des mondes » est à ce prix.

Nous nous sommes attardés sur les contradictions de nos contemporains touchant à la sexualité et à la vie car c ‘est là un terrain où ces contradictions sont les plus patentes, mais nous pouvons élargir la question à d’autres sujets.

 

Droit naturel et mise en scène

 

Par exemple les beaux-arts dans leur rapport au droit.   Point de théorie si décriée dans les milieux dits progressistes que celle du droit naturel, l’idée que la nature humaine implique par elle-même des règles pérennes et universelles qui s’appliquent à toutes les sociétés, par exemple l’interdiction du meurtre au sein du groupe ou celle de l’inceste.  C’est au contraire le positivisme juridique qui prévaut, l’idée que la loi positive est la norme ultime, qu’aucun principe pérenne, moral ou religieux, ne saurait lui être opposé et qu’elle est naturellement variable.

N’oublions pas la dimension scientifique du sujet : ainsi l’idée de nature humaine se trouve disqualifiée au moment où prend son essor la génétique moderne selon laquelle le génome humain est constant depuis au moins 35 000 ans.

Voyons d’abord le paradoxe qu’il y a de voir le positivisme juridique dominer au moment où sont parallèlement exaltés de droits de l’homme, que la déclaration du 26 août 1789 qualifie de « naturels et imprescriptibles ». La nature mise au rancart d’un côté, plus célébrée que jamais de l’autre ? Et  curieusement, la race n’existe pas, mais la nature humaine universelle non plus !

Ce paradoxe s’étend même aux questions esthétiques. Combien d’entre nous sont exaspérés par ces mises en scène de théâtre ou d’opéra qui habillent les personnages d’Andromaque ou de Carmen en costumes d’aujourd’hui, ou les personnages du Ring en clochards. Beaucoup ne vont plus à l’opéra par horreur de ces usages.  Mais ils ont une signification bien précise : le grand art traite de l’homme en général, les figures qui sont mises en scène se veulent éternelles, elles transcendent l’espace et le temps, elles nous touchent si directement qu’il n’est pas nécessaire de les mettre en costume d’époque.  Cela au moment où l’historicisme et le relativisme n’ont jamais été aussi à l’honneur, où jamais les émissions historiques n’ont eu autant de succès. Qui y comprendra quelque chose ?

 

Egalité et transhumanisme

 

Nous parlons de la nature humaine : l’existentialisme qui se fait si restrictif en matière d’orientation sexuelle, reprend toute sa place dans les recherches à la mode tendant à un dépassement de l’humanité par le transhumanisme, par la génération d’hommes nouveaux plus performants que ceux du passé, d’hommes « augmentés ». Il n’est pas certain que ces recherches aboutissent jamais à faire des êtres viables, mais comment ne pas être frappé de voir qu’elles fleurissent, comme le comble de l’audace libérale voire libertaire, en un temps où l’égalité est recherchée partout, voire où le socialisme national, qui fut précurseur en la matière,  est tenu, à juste titre, pour une infamie absolue ?  Le libéralisme moderne veut en outre qu’aucun homme n’ait un pouvoir excessif sur un autre. Le transhumanisme, forme supposée la plus « avancée » du libéralisme, c’est que certains hommes aient un pouvoir illimité sur d’autres, présents ou à venir.

On terminera pour l’anecdote par la surpression de toute mention locale dans les plaques d’immatriculation des véhicules. Elles facilitaient l’identification de ces derniers, leur suppression va la rendre plus difficile, cela à l’heure où se met en place une surveillance électronique généralisée. Il se peut cependant que l’extension sans limites de la surveillance des individus rende inutile toute attache géographique.

D’autres paradoxes propres à la modernité pourraient être aisément relevés.  Nous disons modernité car il ne nous semble pas que les sociétés du passé étaient si fertiles en étonnantes contradictions. Pourquoi donc ?

 

L’idéologie jusqu’à l’absurde

 

Peut-être la réponse se trouve-t-elle dans le fait que les attitudes supposées modernes que nous avons évoquées sont toutes rattachées à une idéologie.  Une idéologie, c’est l’envahissement de la pensée politique par une préoccupation unique ou quasi-unique.  Pour les ultra-féministes, la préoccupation de l’égalité des femmes est devenue un absolu au point de tenir toute différence pour une injustice et de prôner l’identité et la fongibilité des sexes. Il en est de même pour les militants homosexuels adeptes de la théorie du genre.  La culpabilisation de l’Occident amène les antiracistes et autres « décoloniaux » à occulter toute préoccupation de la condition de la femme dans les anciens pays colonisés.  Pour certains, le handicap mérite une attention sans mesure ; pour d’autres, et quelquefois les mêmes, la possibilité d’avorter sur demande ne saurait être limitée etc.

Là où le politique ordinaire arbitre en permanence entre des préoccupations concurrentes et par là même, à un moment ou à un autre, les limite, l’idéologue s’attache à une ou deux logiques et les pousse jusqu’aux extrémités, soit, bien souvent,  jusqu’à l’absurde.

Il y a en tous les cas un lien entre la multiplication des contradictions idéologiques et l’affaiblissement de la fonction politique qui a précisément le rôle d’arbitrer entre ces logiques avant quelles ne viennent à s’affronter ou s’entre-détruire.

Nous sommes dans un monde profondément idéologique. Pour des raisons qu’il conviendrait d’approfondir – mais c’est un autre sujet – il n’est pas aujourd’hui de politique publique qui ne soit marquée par une forme ou une autre d’idéologie.  Poussées jusqu’au bout sans que la sagesse ancestrale, le sens de la mesure ou la prise en considération de logiques concurrentes ne vienne à les tempérer, elles se contredisent et s’entrechoquent, donnant parfois au paysage politique un air d’absurdité.  Comment s’en étonner ?

 

Roland HUREAUX

 

2020

 

 

 

 

 

 

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12 mars 2024 2 12 /03 /mars /2024 21:36

Ayant pris l’habitude de relire les classiques, j’en suis à l’Iliade : épopée écrite per un Grec et racontant la guerre contre les Troyens, comme chacun sait. Ces combats à l’arme blanche étaient atroces mais jamais l’auteur ne se laisse aller à la moindre disqualification morale de l’ennemi.
Le temps ont changé ! Plus de guerre sans hystérie, dénonciation de l’ennemi comme un rebut qui ne mérite aucune considération, haine abyssale et diabolisation sans nuances.

Le pire dans cette attitude est qu’elle ne rend aucun compromis possible. 

Mais elle a aussi un autre inconvénient : elle ne justifie aucun effort de compréhension de la position de l’adversaire. Comprendre la logique de l’adversaire, ce n’est pas avoir de la sympathie pour lui (être « compréhensif »), c’est faire ce que doit faire tout stratège car comprendre c’est prévoir et donc se donner les moyens de manœuvrer au mieux.  

 

Un aveuglement abyssal

 

Aujourd’hui l’aveuglement des Occidentaux (en fait de leurs dirigeants et des médias) à l’égard de Poutine est abyssal.

Ils se contentent d’exciter à son encontre une haine aveugle qui rendra très difficile le retour dela paix.

Le président russe est comparé à Staline.  20 ou 30 milliards d’assassinats pour ce dernier. Et Poutine ? On lui impute cinq ou six tentatives d’empoisonnement qui ont toutes échoué sauf une. Mais il y a aussi en Russie, dit-on, des atrocités qu’on ne connait pas :  alors que font les 2000 correspondants de presse, presque tous anti-Poutine, qui sont à Moscou ?  Que ne nous livrent-ils au moins de temps en temps quelques noms pour que nous puissions pétitionner ?  

Je ne suis pas pour autant pro-Poutine : la manière dont il cherche à nous damer le pion en Afrique me parait insupportable. Presque autant que la passivité de notre président face à cela, lequel préfère parader en Roumanie que préserver nos amitiés africaines pour lesquelles il n’a que mépris.

Reste à comprendre la stratégie de Poutine depuis le mois de février 2022. La réaction de la Russie à l’Ukraine peur être comparée à celle de la France à la Belgique : les premiers grands-ducs de Russie étaient à Kiev, les premiers rois mérovingiens à Tournai.  La France ne remet en cause ni l’indépendance ni l’intégrité territoriale de la Belgique, comme, nous semble-t-il, la Russie n’a pas remis en cause celle l’Ukraine de 1990 à 2014, date de ce que Valéry Giscard d’Estaing a appelé une coup d’état de la CIA » à Kiev (appelé les « évènements de la place Maidan » ) .  Que dirions-nous en revanche si la Belgique, dirigée par des Flamands avait passé un traité d’alliance avec le Chine, lui permettant de recevoir sur son sol des fusées chinoises pointées sur Paris, que dirons-nous si les mêmes Flamands entreprenaient de chasser du pays les Wallons ? Si la France (dirigée par d’autres que ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui) tentait d’entrer en Belgique pour se défendre, ne le trouverions nous pas normal ? Comme nous avons trouvé normal en 1962 que les Etats-Unis n’acceptent pas la présence de fusées soviétiques à Cuba.

Entrer dans un pays voisin, comme l’ont fait les forces russes, c’est assurément une violation claire du droit international et en tous les cas une grossière maladresse.  Mais il y en a eu tant, et de tous bords, depuis qu’a été signée la Charte des Nations unies !  On a dit que la première victime de la guerre était la vérité. Elle est en tous les cas l’intelligence. Il n’y a pas de paix sans l’intelligence… de l’ennemi.  

 

Roland HUREAUX

 

 

 

 

 

 

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12 mars 2024 2 12 /03 /mars /2024 21:35

                                                        

26/12/2022

 

Je crois qu’à 13 ans je m’étais forcé à lire l’Iliade dans la tradition de Lecomte de Lisle sans y comprendre grand-chose.

Alexandre le Grand la savait, parait-il, par cœur.

Je viens donc de  la relire dans la traduction de Mario Meunier (GF).

Je ne sais qui pourrait se vanter de l’avoir lue sans y trouver quelques longueurs.

Une exception : les spécialistes du combat antique trouveront dans ces récits interminables de lutte au corps à corps, la matière d’une analyse approfondie de la guerre  dans la Grèce archaïque.

On trouve en outre beaucoup d’éléments intéressants pour comprendre la société qui est décrite là.

Le combat est individuel, malheur aux guerriers inaccomplis qui tombent sur les grands chefs : Hector ; Achille. Ils sont décimés.

Ces grands chefs n’ont pas formellement  une autorité hiérarchique mais ils dominent la mêlée  par leur force physique , la qualité de leur armement (et donc leur richesse) et aussi parce qu’ils bénéficient, plus que les autres, de la protection des dieux : Poséidon, Athéna, Héra, pour les Grecs, Apollon, Adès (Mars),  Aphrodite pour les Troyens. Zeus  ne cesse d’hésiter comme le sort des armes lui-même hésite. Les héros sont souvent à cheval ou sur un char.

L’Iliade n’est qu’un épisode de la guerre de Troie. On n’en connait pas la fin.

Les méthodes de combat à l’arme blanche n’ont guère changé de l’Antiquité jusqu’au XVe siècle. Celles qu’on voit dans l’Iliade sont peut-être les mêmes que celles du  temps que l’on suppose être celui de la guerre de Troie (XIIe siècle avant JC) . La période classique n’a pas modifié  les armements mais imposé des disciplines strictes : la phalange grecque,  la légion romaine, plus efficaces à forces égales.

Le monde de l’Iliade se caractérise par la présence proche des dieux auxquels, beaucoup de prières sont adressées , beaucoup de sacrifices sont offerts , souvent de vastes ripailles autour d’un bœuf à la broche. Les bovins sont à l’honneur chez Homère. Ces ripailles fortifient la camaraderie virile des combattants.

Importance aussi des liens de famille sans cesse rappelés.

Les femmes sont évidements peu présentes mais elles restent le principal enjeu de la guerre. La guerre a une cause : l’enlèvement d’Hélène, mari du grec Ménélas,  par Pâris et son adultère  consenti . Le récit  de l’Iliade tourne autour de la colère d’Achille, humilié par Agamemnon qui lui prend sa belle prisonnière Briséis. Homère évoque de belles figures  de  femme comme Andromaque ou  Pénélope.

Les combats sont impitoyables, le sang coule de toutes parts et parfois les entrailles. Il faut l‘intervention d’un dieu pour empêcher Achille de jeter le cadavre d’Hector aux chiens.

Selon les  chercheurs, l’Iliade n’est pas sortie du néant. Il existait une tradition épique dès le IIe millénaire qui a survécu aux invasion doriennes  et à l’effondrement de la civilisation mycénienne vers les XIe-XIIe  siècles. Reste que la rédaction de l’Iliade (IXe-VIIIe siècles) et de l’Odyssée (VIIIe-VIIe siècles) recèle des mystères. Elle intervient dans un âge sombre où la civilisation grecque est  au point mort et traite de héros qui datent de l’époque précédente, bien plus brillante  ( XIIIe- XIIe siècles avant JC ).

Le texte de l’Iliade, rédigé  par des Grecs ne se traduit jamais par une condamnation morale de l’ennemi. La guerre est un sport admis ; il y a des vainqueurs et des vaincus mais pas des bons et des mauvais, des coupables et des innocents. Heureux temps.  RH

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12 mars 2024 2 12 /03 /mars /2024 21:33

https://frontpopulaire.fr/o/Content/co12912882/comment-les-extremes-se-rejoignent

Quel singulier paradoxe de voir que, dans la guerre d’Ukraine, le fer de lance du « libéralisme » occidental lequel prétend repousser l’autoritarisme russe, est composé de miliciens qualifiés de néo-nazis.

On a mis en doute leur existence : ceux qui ont voulu les voir de près ont pourtant  vu des militaires ou paramilitaires, troupes de choc bien entrainées, dont les insignes ou les tatouages faisaient une référence claire aux symboles hitlériens.

Des néo-nazis dans le « camp de la liberté »

Autant qu’on le sache, ces milices étaient au départ composées de gens originaires de l’Ouest du pays où était resté le souvenir que les horreurs du stalinisme avaient été, pour eux,  pires que celles du socialisme national et même celui des tentatives de collaboration avec le régime hitlérien entre 1940 et 1944, découragées par le racisme allemand . Ils cultivent les symboles nazis comme le svastika. Mais ces forces ont évolué. Elles ont bénéficié d’une formation particulière de l’armée américaine et d’autres, ont reçu à partir de 1994 des avalanches d’armes. Le président ukrainien Zelenski les a intégrées à l’armée où elles jouent un rôle de troupes d’élite, comme les bataillons Azov, Aïdar, Secteur Droit [1] .  Des volontaires issus de tous les pays veulent les rejoindre.  Mises ainsi en valeur au sein de l’armée et de l’Etat, ces forces pourraient, si l’Ukraine l’avait emporté,  faire rayonner un modèle de soldat et une idéologie que l’on croyait révolus.

Le fondateur du régiment Azov, Andreï Bielinski , s’est fait élire au Parlement.

Apparemment, aucun des pays qui envoient des armes à l’Ukraine – et donc aux milices néo-nazies - n’a émis des réserves à l’idée de soutenir ce genre d’unités. Ls Américains semblent même les avoir favorisées. Les extrêmes se rejoignent.

Les extrêmes se rejoignent aussi à Davos. Klaus Schwab, le pape du mondialisme, dont les instructions sur l’économie mondiale sont indiscutées,  en tous les cas en Europe, est le fils du chef d’une entreprise métallurgique suisse, venu travailler en Allemagne à l’avènement d’Hitler. Il aurait utilisé de la main d’œuvre concentrationnaire.  Il est reparti en 1945. Le jeune Klaus a mis la même entreprise au service du régime d’apartheid en Afrique du Sud : il semble qu’il l’ait aidé à construire sa propre bombe atomique. Il a bien sûr quitté ce pays à la fin du régime d’apartheid.

Davos d’un eugénisme à l’autre

Le mondialisme auquel se réfère Schwab prétend s’inscrire dans la tradition libérale. Son livre The Great reset, tout en promettant la continuation des contraintes nées du covid, la baisse de la consommation, en particulier d’énergie, promeut le libre-échange universel et préconise même pour les gens du bas de l’échelle une sorte de socialisme qui réduirait par exemple la propriété foncière au strict minimum (sauf pour les très riches). Parmi les magnats qui soutiennent l’entreprise de Davos ( Gates, Soros et d’autres) , presque tous sont malthusiens : ils pensent que la population mondiale est trop nombreuse et qu’il faut la réduite – pas forcément par un génocide ouvert mais par différents biais, comme les vaccins si ardemment préconisés par Bill Gates. Que la vitesse de croissance de la population mondiale soit en baisse continue semble ignoré par eux. Gates a vendu en Afrique des vaccins destinés à prévenir certaines maladies infectieuses mais qui contenaient des stérilisants pour les femmes sans qu’elles en aient été averties.  Certains opposants au vaccin contre le Covid prétendent qu’il en est de même de ces derniers,  les effets ne devant se manifester que progressivement. En tous les cas, qui dit réduction de la population, dit sélection : quel genre d’hommes va-t-on conserver en priorité  sur la planète ?  Les malthusiens presque tous rattachés au parti démocrate et donc à la gauche américaine, engagés dans l’antiracisme, se gardent de préciser.

Hitler était nataliste pour ce qui était des Allemands mais lui aussi voulait réduire la population des autres groupes ethniques : pas seulement les Juifs mais aussi les Slaves et pratiquement tous les non-aryens. 

Le Führer ambitionnait de créer une surhumanité fondée sur la race aryenne (allemande), race d’élite,  selon lui appelée à dominer le monde. Les moyens de la créer étaient d’abord la sélection naturelle au sein de centres ouverts à des géniteurs et des femmes de pure race allemande , mais aussi la guerre qui par le moyen de la « lutte pour la vie » fait émerger les plus forts.  Il commença ses massacres par celui des handicapés mentaux.

Généralement associée à l’eugénisme est le transhumanisme, l’idée que les manipulations génétiques aux premiers commencements de la vie pourraient améliorer l’espèce humaine au point que l’on puisse créer une nouvelle classe d’hommes « augmentés » ou surhommes qui aura vocation à dominer les autres. Les autres pourraient, avec le progrès des techniques, devenir inutiles. C’est cette angoisse de devenir inutiles qui aurait motivé les Gilets jaunes, selon le Dr Philippe Alexandre, proche de Macron, élitiste et transhumaniste affiché[2].

On peut se demander ce qui sépare   ce genre d’élucubrations des théories de la gauche libertaire. Les lois dites de « bioéthique » introduites récemment en France par le gouvernement français, qui ouvrent très largement le marché de la fécondation artificielle, ont pour effet, au travers de la sélection des embryons, de permettre ce genre d’ eugénisme.

Autres signes de la faveur de l’inégalité : les différences de revenus ne cessent de croître au sein des pays développés, ce qui serait au gré de certains économistes, l’effet de l’ouverture internationale des échanges. C’est peut-être cette situation qui a permis à un Biden de passer de l’extrême-droite ségrégationniste à l’extrême gauche woke

La propension inégalitaire et eugéniste est présente au cœur de l’ultralibéralisme contemporains. Nous disons ultralibéralisme pour nous adapter au langage commun : il faut cependant se souvenir que ce courant qui aujourd’hui gouverne le monde,  a introduit une censure généralisée au travers des Gafam ( les grandes entreprises du numérique) , il s’est servi du covid pour imposer un contrôle étendu des mouvements de population, entamer un fichage généralisé. Les prochaines étapes seront la monnaie numérique qui devrait permettre de suivre le moindre achat d’un individu, la vaccination obligatoire dès le premier âge et l’institution d’une identité numérique.  Le modèle chinois fascine certaines élites occidentales.  1984 n’est pas loin.

 

Le Rwanda : où l’Occident se fait le champion de l’inégalité

Après la Chine, l’Afrique. Il ne faut pas idéaliser l’Afrique précoloniale : il y avait les dominants et les dominés. Au Rwanda et au Burundi, une minorité de dominants, les Tutsi (10%), gouvernait une majorité de dominés, les Hutus (90 %). Au Rwanda,  l’introduction du suffrage universel à l’indépendance (1959) , permit à la majorité hutu de prendre le pouvoir. Une partie des Tutsi s’exila. Certains de ces exilés tentèrent de reprendre le pouvoir à partir de 1990 avec l’appui de la finance anglo-saxonne. Ils y parvinrent en 1994. Ces turbulences entrainèrent d’immenses massacres : celui des dominants tutsi (environ 400 000 victimes en 1994), puis celui des dominés hutu, en fuite au Congo (4 millions de victimes à partir de 1997). La communauté internationale, sous l’impulsion des puissances anglo-saxonnes n’a voulu reconnaitre comme victimes de génocide que l’aristocratie tutsi, jamais le peuple hutu où le nombre de morts est pourtant dix fois supérieur. La philosophie élitiste propre aux libéraux anglosaxons les a amenés à penser que la vie des Hutus ne valait rien. Les Tutsis, en revanche, étaient dans l’air du temps.

Le chef de la révolte tutsi, Paul Kagame, parvenu au pouvoir en 1994, est la coqueluche de la sphère internationale, tenu pour un chef d’Etat modèle. Personne ne veut entendre parler des immenses massacres dont il est la cause, directe ou indirecte. Il est régulièrement invité comme observateur au G 20.

Que toute la sphère mondialiste ait soutenu la minorité tutsi est assez extravagant compte tenu des idéaux égalitaires qui sont, en principe, ceux du monde actuel, a fortiori si on considère les massacres épouvantables commis par les vainqueurs.  On peut y voir l’effet d’une conjoncture locale – à vrai dire assez exceptionnelle, ou de l ‘intérêt économique. Comment ne pas y voir aussi l’effet d’une secrète connivence entre les cercles qui dominent le monde avec une société africaine élitiste et inégalitaire ? Donc avec l’homme qui l’incarne, Kagame.  On trouverait sans doute d’autres exemples d’inégalités flagrantes, en Afrique ou ailleurs, admises par la communauté internationale au nom de la sélection naturelle.

Nous revenons au paradoxe de départ : cette gouvernance,  qui centralise de plus en plus, au moins en Europe et en Amérique, le pouvoir, qui contrôle l’opinion publique par la presse, qui se réclame des idéaux de liberté et d’égalité, promouvant un égalitarisme radical  (antiracisme, ultra-féminisme) exprimés notamment par le wokisme rageusement hostile à toute discrimination,  ne se maintient , on vient de la voir en France , qu’en identifiant ses adversaires au fascisme ou au socialisme national et donc à une idéologie de l’inégalité, de la sélection naturelle. Pourtant, au motif de   transgresser  toutes les normes issues de vingt siècles de judéo-christianisme et qui préconisent le respect de l’homme, elle se retrouve sur des positions contraires à ces traditions humanistes.   L’ opposition des  deux camps avait encore un sens il y a trente ou quarante ans, au temps où on pouvait parler sérieusement du « monde libre », du camp de la liberté. Aujourd’hui, ce monde libre semble, par une étonnante mutation, en train de changer son système de valeurs et d’adopter celui , inégalitaire et transhumain ( c’est-à-dire antihumain),  qui  avait été si longtemps celui de ses adversaires.  

 

                                                                       Roland HUREAUX

Juillet 2022

 

[1] Et aussi Dnipro, Safari, Svoboda, Pravy Sektor, C14 ,  Corps national. 

[2]  Cela montre qu’il n’a jamais vu de près des Gilets jaunes dont certains étaient très intelligents et informés.

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12 mars 2024 2 12 /03 /mars /2024 21:28

LA QUESTION FRANCO-ALLEMANDE EST DE RETOUR

Il n’y a jamais eu de « couple franco-allemand »

 

Une nouvelle fois , la question franco-allemande est à l’ordre du jour .

Le report sine die du conseil des ministres franco-allemand qui devait se tenir le 26 octobre à Fontainebleau reflète l’exaspération des deux partenaires, singulièrement de la France. Macron pour qui l’Europe était tout et la relation franco-allemande son préalable obligé semble ne plus y croire.

Même Nicolas Beytout, patron de L’Opinion, « européen » et libéral s’il en est , a proposé de rompre avec une Allemagne qui ne montre plus aucune solidarité européenne :

« Puisqu’il ne faut plus aujourd’hui attendre grand-chose des Allemands, n’est-il pas temps de faire turbuler le système en cassant, avec ou sans les autres pays européens, le système fou des prix du gaz et de l’électricité ? » [1]

Le marché unique de l’énergie : une des réalisations les plus calamiteuses de l’Union européenne. Mais aussi un « acquis communautaire » dont la remise en cause toucherait tout l’édifice de Bruxelles. Elle avait été promue par le chancelier Kohl afin de faire baisser, par la concurrence, le prix de l’énergie : il serait étonné de voir qu’il a conduit aujourd’hui à son contraire !  

Alors que la France avait , mieux que d’autres , dès les années 1970, anticipé l’avenir par un admirable programme de centrales nucléaires,  le marché unique européen la prive de cet avantage, ses prix intérieurs se voyant tirés vers le haut par les pénuries allemandes et ceux de l’électricité par ceux du gaz, au détriment de la capacité des couches populaires à se chauffer l’hiver ou à circuler et des ses industries à rester compétitives.

 

Le « couple franco-allemand » n’a jamais existé

 

Mais la crise actuelle a le mérite de mettre au jour une première illusion : le « couple franco-allemand » n’a jamais existé.  Jamais les Allemands n’ont accepté cette expression , d’abord pour une question de vocabulaire  : couple évoque en allemand copuler, ce qui les dégoûte , mais aussi pour une question de fond :  dès le départ de l’entreprise, nos voisins d’outre-Rhin n’ont jamais voulu s’enfermer dans une relation exclusive , ni même privilégiée avec la France. Et ils ne s’en sont jamais cachés !

Cela n’a pas empêché que,  pendant   trente ou quarante ans nos journalistes et nos hommes politiques,  répètent  en boucle, comme des perroquets , le « couple franco-allemand »,  « le couple franco-allemand » et aujourd’hui plus que jamais.  Et les plus ignorants sont les européistes patentés : quand on est « européen » ( au sens de Bruxelles) , a-t-on encore besoin de connaitre les Allemands, les Italiens etc. ?  Paradoxalement, ceux qui passent pour euro-critiques   sont généralement mieux informés de la psychologie de nos voisins . Par-delà les mots,  la France s’inscrit dans une relation sentimentale, pour ne pas dire névrotique ,  à sens unique où , comme une femme enamourée  (ou un homme) , elle demande avec insistance des faveurs qu’elle ne reçoit pas mais il suffit d’un clignement d’oeil pour lui en donner l’illusion.   

De fait , ce n’est pas de maintenant que les Allemands donnent la priorité aux intérêts allemands sur les partenariats européens ; on pourrait remonter loin  et voir que la  France a tendu au moins à deux reprises la main à une Allemagne en difficulté : après les changements de parité de 1969, en concédant  aux produits agricoles d’outre-Rhin  des « montants compensatoires,   sorte de droits de douane à l’envers  qui ont sauvé une  agriculture  allemande en difficulté ;  plus tard en acceptant de partager le fardeau de la politique de rigueur instaurée par l’Allemagne après la réunification pour éponger son surplus de  marks  venus de l’est (2012), bridant ainsi  tout au long des années 1990 la croissance française pour les intérêts  de Berlin  . Inutile de dire que rien de semblable n’a été proposé à la France qui pâtit depuis plus de vingt ans d’un euro déséquilibré. Au contraire le chancelier Schröder a lancé en 2000 le plan Hartz , destiné, par la régression sociale ,  à doper la compétitivité allemande à l’entrée dans l’euro. Alors que les Français croyaient que Bruxelles l’interdisait, ils ont instauré une TVA sociale partielle. Cette politique folle a d’emblée déséquilibré la balance franco-allemande à notre détriment. Quand l’euro aura disparu, ses tenants pourront remercier l’Allemagne de l’avoir sapé dès le départ.

Comme l’ont montré des études allemandes, l’euro été beaucoup plus favorable à l’économie allemande qu’à l’économie française[2].  Les deux économies voguaient de conserve depuis 50 ans ,  la France représentant les 2/3 de la population et du PIB   allemands et 50 % de son industrie . L’écart n’a commencé à s’ élargir qu’avec l’entrée dans l’euro.  Favorisée par l’euro, sous-évalué pour elle, surévalué pour nous , l’économie allemande est à présent défavorisée par la crise énergique : faut-il que nous volions à son secours en lui vendant du gaz comme nous avons déjà commencé à la faire  ?

Malgré ses handicaps, la France a cru bon d’en rajouter en promouvant aux dépens de ses intérêts le plan de relance européen de 2021 . Voulant , pour des raisons idéologiques, que le premier emprunt européen qu’il comporte voie le jour, Macron a fait de la France le premier contributeur net : pour une cotisation de 70 milliards, elle en recevra 40 !    

La gestion de la crise énergétique est le premier sujet du contentieux franco-allemand : en subventionnant l’industrie allemande à hauteur de 200 milliards sur deux ans  (  venant après une première aide de 80 milliards)  , le gouvernement allemand , qui seul a les moyens de ces injections massives d’argent public,  permet  à celle-ci de pomper l’énergie encore disponible sur le marché européen, au détriment de ses partenaires.    

Pourtant l’attentat terroriste du 26 septembre 2022 contre le gazoduc Nord Stream sous la Baltique aurait dû instruire les Allemands que la Russie n’est pas leur seul ennemi et les appeler à plus de solidarité européenne ; mais non ! Curieusement, l’Allemagne, menacée directement par cet attentat,   ravale la rancune   qu’elle pourrait avoir vis-à-vis de ses    auteurs anglo-saxons et préfère se rattraper en écrasant ses partenaires européens ! Cet attentat qui touche une Allemagne encore hésitante sur l’application des sanctions antirusses,  la contraint à les prendre et   porte , ce faisant , un coup très grave à sa puissance industrielle.

 

L’Europe de la défense non plus

 

La France et l’Allemagne ont un autre sujet de contentieux : les affaires militaires.

Il nous permet de découvrir que,  tout comme le « couple franco-allemand », l’ « Europe de la défense » dont se gargarisent les Français n’existe pas et n’a jamais existé. Elle est , elle aussi,  un fantasme   franco-français auquel n’adhère aucun de ses partenaires européens lesquels considèrent , de manière réaliste,  que le cadre de la défense européenne est l‘OTAN et qu’il est dès lors    normal que les armées européennes soient soumises au commandement américain . Que l’Allemagne, malgré l’ attentat de la Baltique partage le même point de vue est assez ahurissant : faut-il y voir l’effet de la médiocrité du nouveau chancelier Olaf Scholz ou du fait que la classe politique allemande est tenue avec une laisse particulièrement courte de Washington ? La nomination d’un homme de Goldman Sachs aux finances de ce pays est significative. Cette dépendance est particulièrement le fait des Verts qui avaient inspiré, sinon décidé,  la dénucléarisation du pays et donc son affaiblissement, caché un temps par les achats de gaz russe à bon marché. Elle apparait aujourd’hui en pleine lumière.  Les Allemands avaient déjà montré leur servilité géopolitique lors de la guerre de Yougoslavie ( 1999) sur laquelle nous reviendrons.

L’Allemagne avait néanmoins fait mine de se raccrocher au train d’Europe de la défense ( une seule locomotive et un seul passager aujourd’hui ! ) avec l’arrière pensée de remonter son déficit en matière d’industrie de défense par des coopérations où elle soutirerait ce qui reste de technique avancée française en matière de chars, de satellites et surtout d’ avions de combat, cela pour des raisons à la fois industrielles et de puissance. Leur autre arrière pensée est de se rapprocher du statut nucléaire , la presse allemande discutant sérieusement pour savoir si le pays doit récupérer la capacité française ou la doubler. L’Allemagne qui avait une ( trop) puissante industrie de défense en 1940 , s’est vue punie en 1945 par sa quasi-disparition. Elle ne rêve depuis lors que de la reconstituer.   

L’annonce récente que l’Allemagne achèterait 100 milliards d’armement dans les toutes prochaines années et essentiellement du matériel américain a fait l’effet d’une douche froide auprès de tous ceux qui n’avaient pas compris le double jeu allemand. Disons-le crument :  l’Allemagne veut mettre la main sur certaines de nos industries de défense et n’a que faire de la défense européenne. Mettre la main, ce peut être récupérer , dans le cadre d’une coopération bilatérale, 50 % de telle ou elle entreprise française : Nexter ( ex-GIAT) , ce qui est déjà fait,  Dassault ( dont le Rafale est toujours en avance sur le F 35 américain) , et même pourquoi pas   Naval Group  ( ex-DCN)[3] . Nous savons par le précédent d’Airbus que quand l’Allemagne prend un partenariat de 50 -50 %, elle s’arrange pour que ce soit très vite un 60-40 % à son bénéfice : en Chine tout le monde croit aujourd’hui que l’Airbus est une réalisation allemande !  

Il y a quelques jours, il a même pris à Berlin de vouloir contrôler les exportations françaises d’armement [4].

Entre 1925 et 1930,  , la France et l’Allemagne avaient connu une lune de miel pacifiste.  A ceux de ses compatriotes qui le lui reprochaient, le chancelier allemand Gustav Stresemann disait : « Je finasse »  ( Ich finassiere), quand les Français croyaient qu’il pavait sincèrement  les sentiers de la paix avec son partenaire    Aristide Briand. (1926-29).   Une attitude que nous ne devons pas être étonnés de retrouver aujourd’hui .

En augmentant sensiblement son budget militaire, l’Allemagne veut tirer les dividendes de sa supériorité économique développée grâce à l’euro .  Elle se montre en même temps le bon élève de la classe au sein de l’OTAN où l’Amérique ne cesse d’exiger un relèvement des budgets de défense des pays d’Europe occidentale.

Il est fâcheux que la reconquête silencieuse de la suprématie, diplomatique et militaire  de l’Allemagne ait reçu au vu et au su de la terre entière l’aval du gouvernement français actuel : le président  Macron a laissé  entendre que la bombe nucléaire française pourrait être européanisée, ce que les Allemands ont compris  « germanisée » ; le partage  ridicule de la présidence française du Conseil de sécurité  au cours de l’année dernière  n’est certes qu’un symbole mais il a été vu , sur cette scène privilégiée, par le reste du monde , comme  le signe de l’ assujettissement volontaire de la France à l’Allemagne ; étonnants signaux  de faiblesse , d’autant  plus consternants que personne ne les avait demandés à M. Macron et que , comme la suite le l’a prouvé, il n’en a rien retiré.

La nouvelle hégémonie allemande a trouvé son accomplissement militaire dans la guerre de Yougoslavie ( 1999),  règlement de compte historique contre la Serbie, alliée fidèle de la France et qui avait été le grand obstacle à l’expansion du germanisme dans l’Europe du Sud. Elle a trouvé son accomplissement constitutionnel avec la décision du Tribunal de Karlsruhe  (2009) déclarant que les normes européennes n’entreraient en vigueur en Allemagne que si elles ne portaient pas atteinte droits fondamentaux protégés par la Constitution[5], une entorse tant aux traités européens qu’au droit international que l’Allemagne, à la différence de la France, a cru pouvoir s’autoriser.  Elle a enfin trouvé son accomplissement diplomatique dans le traité d’Aix-la-Chapelle de 2019 ,  initiative de Macron, supposé actualiser le traité de l’Elysée de 1963 et renforcer la coopération bilatérale et , en réalité, la subordination de la France, traité qui, à ce jour,  n’a pas été ratifié par le Parlement français, ce qui vaut peut-être mieux.

L’unilatéralisme brutal de l’Allemagne qu’on avait vu à l’œuvre avec le plan Hartz s’est renouvelé quand en 2015 Angela Merkel décida   d’accueillir deux millions de réfugiés proche-orientaux envoyés par Erdogan[6].

L’irritation des dirigeants français et d’une partie de la classe dirigeante face au comportement allemand récent n’aurait pas lieu d’être si elle avait   compris toutes les ambiguïtés du prétendu partenariat franco-allemand . Quelle naïveté !

Que faire dès lors ?

 

Défendre les intérêts français

 

Au lieu de récriminer contre les Allemands et d’accumuler les rancœurs, il faut faire comme eux : défendre nos intérêts à tous les niveaux , particulièrement là où ils sont les plus menacés, au niveau stratégique.

D’abord en matière d’énergie. Comme nous n’avons pas les moyens de soustraire nos industries à la hausse des prix de l’énergie par des subventions massives, il nous faut mettre fin à toutes aberrations qu’a entrainées, tout le monde en est conscient, le marché unique européen . Cela veut dire que la France s’exonère sans délai des règles du marché européen de l’électricité , en particulier du prix unique européen et de l’alignement des prix de l’électricité sur celui du gaz. L’Espagne et le Portugal l’ont obtenu ; pourquoi pas nous ? La France a un bel avantage en matière nucléaire ; il est aujourd’hui en partie perdu du fait d’une incroyable négligence dans l’entretien qui a mis hors service 24 réacteurs sur 56 .  Cette négligence s’explique par le climat anti-nucléaire qui règne depuis 2012   du fait de la pression de Bruxelles ( et par derrière de Berlin) et des Verts et qui a conduit à un plan de démantèlement de nos centrales à l’horizon 2050, en vue de leur remplacement … par des éoliennes.  Dans l’immédiat,  il n’est pas d’autre choix que de réparer vite nos réacteurs , ce qui est possible à condition de recourir à la main d’œuvre étrangère ( car la compétence de nos techniciens s’est perdue !) .  Il faut supprimer l’absurde système qui oblige EDF à vendre à perte une partie de sa production à des entités artificielles purement financières, au nom de la libre concurrence . Avec l’allongement de durée de vie des centrales et donc des amortissements , une EDF reconstituée pourra   vite rétablir ses comptes . Fessenheim qui à lui seul représentait 30 % de nos exportations électriques doit être réouverte . Il faut dire à cette occasion très clairement à l’Allemagne que, écologie ou pas, elle doit cesser de faire un travail de sape sournois à l’ égard de l’ énergie nucléaire française dont elle a longtemps profité.

Toujours l’énergie : il faudra bien un jour mettre le holà à l’escalade écologique folle, poussée par le Forum de Davos, le GIEC et la commission européenne, tendant à promouvoir la voiture électrique, à faire disparaitre les carburants fossiles et à couvrir l’Europe d’éoliennes. Le Plan vert pour l’Europe qu’elle a inspiré, adopté le 22 juin 2022, est une catastrophe industrielle pour le continent.

En matière de défense, la maison Dassault ne saurait être que soulagée si l’Allemagne renonce à l’avion du futur, projet dans lequel l’entreprise ne s’était engagée qu’à recoulons . Le Rafale est le meilleur avion de chasse du monde. Seule la pression politique américaine force , contre toute rationalité technique,   la plupart de nos partenaires à lui préférer le F 35.  Dassault doit garder ses secrets maison et préparer lui-même le successeur du Rafale, une entreprise de 20-25 ans qui est tout à fait dans ses capacités. La France doit veiller à garder le contrôle des entreprises en coopération , déjà évoquées,   et, pour reconquérir son autonomie ,   être prête à substituer des productions nationales aux pièces détachées importées qui nous placent sous dépendance extérieure, y compris allemande.

Deux pays qui défendent leurs intérêts, ce   ne sont pas, contrairement à ce que certains pensent,    les prodromes d’une guerre, c’est au contraire l’assurance de reprendre une coopération saine sur une base réaliste, un langage que les Allemands ne peuvent que comprendre. Qui dit intérêts suppose que ,  à la différence d’ idéaux fumeux,  ils ne sont pas illimités ; cela implique que ces intérêts sont négociables. C’est là la vraie coopération dans le respect réciproque.

La France doit en outre , dans la discrétion mais avec une inébranlable détermination conserver ses privilèges : sa place de membre permanent du Conseil de sécurité, sa force de dissuasion, son outre-mer.  Elle aurait pour ce faire un allié naturel : la Russie qui,  faute de pouvoir nous appuyer à court terme, doit pouvoir le faire à long terme.

Cette coopération saine fondée sur les intérêts toujours négociables est exposée à deux risques :

D’abord l’attitude des élites françaises, principalement industrielles : Villepin s’en est fait récemment l’écho en disant : il faut à tout prix sauver le « couple le franco-allemand » . Voilà bien un bon élève de Chirac !  C’était bien la peine de prendre avec emphase des postures gaulliennes à l’ONU en 2003 pour parler aujourd’hui comme Laval.  Une telle attitude signifie in fine que la France accepte de faire des concessions sans contrepartie , comme elle l’a fait si souvent depuis 30 ans. Il n’y a pas d’autre raison au fait que les rapports entre les deux pays se soient progressivement dégradés.  Hélas, cette attitude qui tend à recoller les morceaux à court terme est désastreuse à long terme car elle amplifie les déséquilibres et accumule les rancœurs   de part et d’autre . Ceux qui se réclament du traité franco-allemand De Gaulle-Adenauer de 1963 pour justifier cette attitude,  ne  se rendent pas compte qu’ils sont à l’opposé de l’idée que se faisait le général de la coopération franco-allemande laquelle, dans son esprit, ne pouvait être qu’égalitaire.

Cette attitude de la classe dirigeante est la principale faiblesse de la France dans son face à face avec l’Allemagne : pas l’économie, pas la finance , la trahison. 

L’autre risque est l’attitude des Etats-Unis. N’oublions pas ce que disait De Gaulle :  dans toute fédération, il faut un fédérateur ; pour l’Union européenne, il est depuis l’origine, à Washington. Contrairement à que les Français pensent, ce n’est pas de Bruxelles que vient la contrainte   de rester dans l’Union européenne, c’est de Washington.  C’est Washington qui , après avoir fait entrer de force la Grèce dans la zone euro,  a recollé   les morceaux lors des crises grecques successives, obligeant l’Allemagne à des concessions contraires à son souci de rigueur budgétaire  ; ce sont les Etats-Unis qui ont fait avaler à Berlin la couleuvre du  quantitative easing dans la gestion de l’euro, seule alternative à son démantèlement    mais porteur d’un risque d’inflation considérable, nous ne le voyons que trop aujourd’hui . La question monétaire est, pour cette raison, la seule qui ait échappé au contrôle de l’Allemagne depuis la création de l’euro . Elle a été tenue, contre son opinion publique, à accepter la gestion plus laxiste des pays latins ( ou grec ), alors que , là encore, le but de l’euro était la stabilité des prix.  Ce sont encore les Etats-Unis qui font pression pour empêcher l’édifice européen de se disloquer,  bien qu’il fasse eau de toutes part . Ce sont eux qui ont mis eu fil de ans presque tous les gouvernements européens , y compris le Français et l’Allemand, à leur botte .  Si la France prenait trop nettement ses distances avec l’Allemagne, ce sont les Etats-Unis qui tenteront par tous les moyens de la faire rentrer dans le rang . Il faudra résister.

Il n’y a pas d’Europe indépendante si elle n’est pas unie . Mais il n’est   de véritable union que si chacun   défend   ses intérêts.

 

Roland HUREAUX

 

 

 

 

 

[1] L’Opinion,  20 octobre 2022

[2] Depuis 2019, elle a gagné 2000 milliards ; nous en avons perdu 3600 . Centrum für europäische politik, Fribourg en Brisgau, 2017.

[3] Seuls les intérêts personnels d’Alexis Kohler, principal conseiller de Macron, et de sa famille ont empêché la cession de Naval group à une entreprise allemande ou italienne. Felix culpa ! 

[4] La Tribune, 4 octobre 2022

[5] Les Allemands en ont une interprétation large. Par exemple, une politique inflationniste qui porte atteinte , selon eux, au droit de la propriété.

[6] Les réfugiés ont dû verser 5000 euros environ à la Mafia turque , proche des services secrets de la Turquie, pour traverser les Balkans à pied, alors que Merkel aurait pu offrir à chacun un billet d’avion Ankara-Berlin à 150 €.

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