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Roland HUREAUX

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31 mars 2017 5 31 /03 /mars /2017 22:59

 

L'ECHEC D'OBAMA EST D'ABORD DU AUX CONTRADICTIONS DE SA POLITIQUE

 

Rarement un président des Etats-Unis aura quitté le pouvoir avec un bilan international aussi mauvais que Barack Obama, en particulier au Proche-Orient.  

L'élimination du réduit djihadiste d’Alep face à l'offensive des forces gouvernementales (l’armée de Bachar el Assad, comme on dit), appuyée par la Russie, apparaitra   vite pour ce qu'elle est : une déroute en champ clos face à une puissance que les Etats-Unis eux-mêmes avaient désignée comme leur adversaire principal.  Même si on ne sait pas exactement combien d’officiers américains et de l’OTAN se trouvaient du côté des djihadistes, les pays tiers ne manqueront pas d’y voir une terrible humiliation pour la puissance dominante, symboliquement presque aussi grave que celle du Vietnam (1975).  Le Proche-Orient, chasse gardée des Etats-Unis jusqu'à une date récente, est une région où il faut moins qu'ailleurs perdre la face. Désormais   la Russie y apparait comme la puissance dominante.

La gifle est si grande qu'il ne faut pas s'étonner que les éléments les plus bellicistes de l'administration démocrate   aient   envisagé de pousser le conflit aux extrêmes. Alors qu’il ne lui restait qu’un mois de mandat, Obama a levé toutes les   restrictions    aux ventes d'armes aux djihadistes.  Les sanctions prises en janvier 2017 à l'encontre de la Russie, au motif ridicule d'une interférence supposée de Poutine dans la campagne présidentielle, montrent dans quel état de déni se trouve depuis sa défaite le clan Obama-Clinton.

Dans cet affaiblissement américain, il serait erroné de mettre en cause, comme le font les milieux conservateurs, une insuffisance proprement militaire. Même si les Russes ont fait beaucoup de progrès, notamment dans l'anti-aérien ou le brouillage, ce qui a accru leur pouvoir de dissuasion, les Etats-Unis conservent la première armée du monde.

On met aussi en cause la faiblesse d’Obama, son indécision, son manque d'emprise sur les services qu'il est supposé commander (Pentagone, CIA, Département d’Etat). Hollande, Fabius, qui sont, eux, c’est bien connu, des hommes forts, lui ont reproché, à l'unisson des ultraconservateurs, de ne pas avoir profité de l'attaque à l 'arme chimique de la Ghouta (Faubourg de Damas) du 21 août 2013 pour bombarder massivement Damas, ce qui n'aurait pas manqué de susciter une riposte russe.  Encore heureux que le Prix Nobel de la Paix n'ait pas déclenché une guerre mondiale !   Plonger dans la guerre civile deux ou trois pays était déjà bien assez. Il savait au demeurant qu’on ne pouvait imputer l’attaque chimique au gouvernement syrien, mais   à une provocation d’Al Nosra[1].

 

De multiples contradictions

 

Mais derrière les hésitations d'Obama, il est une donnée encore plus fondamentale : les contradictions de la politique étrangère américaine en sont venues non seulement à la rendre illisible mais à la paralyser.

Une première contradiction, imputable, elle, au prédécesseur d’Obama, était apparue   avec la guerre de 2003 contre   l’Irak.  Au motif d'instaurer la démocratie dans ce pays, les Américains y ont donné le pouvoir aux chiites majoritaires :  ils sont donc les premiers responsables de la constitution de l'"arc chiite" qu'ils se sont mis à combattre à partir de 2010 : Iran, Irak, Syrie, Liban (Hezbollah).

Ils ont été ainsi amenés à affronter le chiisme en Iran (par les sanctions imposées jusqu’à l'accord de Washington en 2015), en Syrie (si tant est que l’on puisse assimiler les alaouites dominants en Syrie à des chiites), au Liban et au Yémen et, au contraire, à le soutenir en Irak.

Une autre contradiction : renverser au nom de grand principes démocratiques des gouvernements amis. Ce n 'est certes pas nouveau : on connait les précédents de Ngo Dinh Diem en 1963 ou du shah d'Iran en 2000. Mais cette pratique a   pris une tournure systématique avec les "printemps arabes » :  Ben Ali en Tunisie, Moubarak en Egypte.  Kadhafi n'était pas vraiment un ami mais était devenu un utile stabilisateur de l'Afrique septentrionale. Erdogan, autre ami de l’Amérique laquelle avait appuyé à fond sa candidature à l'Union européenne, a pu, sans être contredit, mettre en cause le rôle de Washington dans la tentative de coup d'Etat du 15 juillet 2016. Le roi du Maroc, autre allié, a vu récemment Ban Ki-Moon, secrétaire général des Nations-Unies et à ce titre proche de Washington   remettre en cause la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental : il s'est immédiatement   précipité à Moscou !  Comment ne pas se dire que les Russes qui n'ont pas lâché Assad malgré une campagne internationale de diabolisation sans précédent sont un allié bien plus fiable que les Américains ?  

Le soutien aux islamistes ne vient pas seulement du souci de trouver des alliés contre les dictatures pro-russes mais s'inscrit aussi dans une longue tradition d’alliance avec l'Arabie saoudite principalement, les   émirats du Golfe accessoirement, qui soutiennent depuis longtemps les mouvements fondamentalistes, y compris terroristes, un peu partout dans le monde arabe, en Afrique et même en Europe.

Contradiction encore plus grave, doublée d’un mensonge : depuis le 11 septembre, l’Amérique proclame à la face du monde qu’elle mène une grande croisade   contre le djihadisme : 119 pays enrôlés dans la coalition contre Daech !    Seule la lutte contre les talibans en Afghanistan, qui n'ont pas, au bout de 13 ans été vaincus et dont l'implication dans l'attentat du 11 septembre demeure hypothétique peut être tenue comme une action anti-islamiste.  Pour le reste, loin de combattre l 'islamisme, le Etats-Unis l 'ont eu sous différents formes comme allié en Libye, en Egypte, en Turquie, et surtout en Irak et en Syrie : Trump lui-même accuse le gouvernement américain d'avoir suscité l’émergence de Daech. 

Le soutien aux islamistes est encore davantage en contradiction avec la volonté affichée de faire avancer, fut-ce par la force, la démocratie et les droits de l'homme au Proche-Orient, dans la cadre de la politique dite de regime change.  Comme plus tôt en Algérie et en Turquie, les élections démocratiques ont fait émerger en Tunisie en Egypte des majorités islamistes[2]. En Syrie, le gouvernement américain , de pair avec les  autres gouvernements occidentaux a été amené à maintenir la fiction d'une rébellion démocratique  respectable et à l'appuyer  contre le "tyran" Bachar el Assad , alors même que la suite devait montrer que l'osmose était telle entre l' opposition dite démocratique et les djihadistes  que les moyens donnés aux uns allaient aux autres et que,  en position de responsabilité , les uns et les autres n'avaient  rien de plus pressé que d'établir la charia.

Ils sont significatifs que les seuls pays à avoir échappé à la vague des printemps arabes soient les monarchies du Golfe (sauf Bahreïn[3]), alors qu’ils ne sont pas, ni près, les moins oppressifs.

Le soutien aux islamistes a d'ailleurs toujours eu ses limites dans la mesure où, tout en leur fournissant des armes et de l’entrainement et même en les conseillant au combat (ce qui veut généralement dire diriger) comme à Alep, ni les Américains, ni les Israéliens, ni les Turcs, ni les autres Occidentaux ne souhaitaient vraiment que Daech - et ses frères jumeaux comme Al Nosra, prennent le pouvoir à Damas. Ce qui veut dire que le soutien qui leur était apporté n'avait d'autre objectif que de faire durer aussi longtemps que possible la guerre.  

Aux confins de la Syrie et de l'Irak et de la Turquie d'autres contradictions sont apparues : soutenir les Kurdes tout en ayant la Turquie pour allié privilégié, soutenir en même temps les Kurdes, Daech et le   gouvernement chiite de Bagdad, qui sont chacun ennemi des deux autres. S’agissant de Daech et des autres mouvements islamistes, la contradiction a atteint son comble au mois de décembre 2016 qui a vu simultanément l’armée américaine les soutenir à Alep (et Palmyre) et les combatte à Mossoul.

Si les Américains aidaient seulement Al Nosra (alias Al Qasida) à Alep-Est, c’est bien Daech qu’ils ont soutenu un peu plus à l'Est, l'aidant à garder     Deir ez-Zor et à reprendre Palmyre. Qui peut y comprendre quelque chose ? Comment s'étonner d'entendre que des mouvements islamistes aidés par la CIA se sont parfois battus avec d'autres soutenus par le Pentagone ?

 

En contraste, la clarté du jeu russe

 

Face à cette accumulation de politiques de gribouille, le positon de Poutine a été depuis le début d'une parfaite clarté :  d'abord face au droit international, puisque la Russie n’est intervenue   en Syrie qu'en   accord avec le gouvernement officiel   de Syrie et donc dans le respect de la légalité internationale   alors que les interventions   occidentales se sont faites presque toutes en violation du principe de non-ingérence.  La Russie a agi en défensive et non en offensive : face à la volonté des Etats-Unis de faire sauter le dernier point d’appui qu’elle avait conservé au Proche-Orient, elle l'a   défendu.

 Au demeurant, comment peut-on promouvoir l’Etat de droit au sein des différents pays alors qu'on ne respecte pas le droit au plan international ?

Légale, la guerre menée par les Russes n’a, non plus, quant à ses objectifs, présenté aucune     ambigüité : elle avait pour but d'assurer le contrôle du territoire syrien dans sa totalité par le gouvernement syrien et donc d'y ramener la paix.

Les Etats-Unis ont-ils au contraire poursuivi   délibérément   une "stratégie du chaos"   comme on leur en a fait grief ? Il le semble parfois   sans que l’on puisse assurer que, dans un pays comme l’Irak, ils l’aient délibérément cherché. Il reste que parmi les nombreuses erreurs des néoconservateurs, se trouve l'idée que pour démocratiser des pays dominés par des    dictatures, qui sont des Etats mais pas forcément de droit, il faut commencer par détruire l'Etat, ce qui est un contresens, l'anarchie étant toujours plus préjudiciable à la vie des peuples que n'importe lequel régime fort. 

En face de cette politique désordonnée, peut-on mettre à l'actif d'Obama, l'accord de Washington (juillet 2015) sur le nucléaire iranien.  Quoique certains, notamment Israël, ne le tiennent pas pour   positif, il a réintégré dans le concert international un grand pays stratégique dans un jeu asiatique appelé à prendre de l'importance.  De moindre portée, l'accord avec Cuba est de la même nature. En revanche Obama n'a ni évité le Brexit, ni pu faire signer   le TAFTA.

Les contradictions de la politique d'Obama   ne tiennent pas seulement à sa personnalité mais à toute la politique menée durant l 'ère néoconservateur qu'on peut faire remonter à l 'élection de Bill Clinton (1992) et qui couvre aussi bien la présidence de Bush fils (n’oublions pas que la seconde guerre du Golfe décidée par celui-ci s'est faite en violation de la légalité internationale alors que la première, décidée par son père, lui était conforme).  Une politique    marquée par l’idée d'un messianisme démocratique fondant les Américains à renverser les dictatures qui ne leur plaisaient pas et, à partir de 2000, de plus en plus hostile à la Russie. Une politique fondée sur l’idéologie, qui est toujours une forme de déraison, bien plus que sur la défense des intérêts américains comme celle que propose Trump.

 

                                                                       Roland HUREAUX

 

 

[1] Deux  documents fondamentaux démontrent  que cette attaque a été opérée  par les rebelles d'Al Nosra cherchant  à provoquer une intervention  des Etats-Unis: un rapport  du MIT publié en  janvier 2014 par  Richard Lloyd,  ancien inspecteur de l'ONU   et Theodore Postol , professeur ( http://www.nytimes.com/2013/12/29/world/middleeast/new-study-refines-view-of-sarin-attack-in-syria.html ),  et un autre de l'   OIAC , organisation pour l’interdiction des armes chimiques  près   l'ONU  basée à La Haye, prix Nobel de la Paix en 2013 , connu par une fuite parvenue à  l'agence Fides  ( Vatican)).. 

[2] Les islamistes gagnent généralement les élections ( Algérie, Egypte, Turquie )  car  ils  sont seuls sur le terrain à  apporter une aide humanitaire aux populations, et non parce que ces populations souhaiteraient le rétablissement de la charia.

[3] La population de Bahrein étant en majorité chiite, toute démocratisation aurait mis en difficulté l'émir sunnite.

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31 mars 2017 5 31 /03 /mars /2017 22:57

 

PEUT-ON SOUTENIR LES CHRÉTIENS D'ORIENT ET RESTER POLITIQUEMENT CORRECT ?

 

http://www.libertepolitique.com/site/Actualite/Decryptage/Peut-on-soutenir-les-chretiens-d-orient-et-rester-politiquement-correct

 

http://www.magistro.fr/index.php/template/lorem-ipsum/avec-l-europe/item/2594-soutenir-les-chretiens-d-orient

 

Il est d'usage dans les milieux catholiques de France de compatir au sort des chrétiens d'Orient, de demander de l'argent, de prier pour eux.  Certains   ont été massacrés, beaucoup ont été contraints de s’exiler, probablement sans retour.  Outre la bien connue Œuvre d'Orient, de nombreuses associations, dont l'Aide à l’Église en détresse ou encore la toute nouvelle SOS Chrétiens d’Orient, animée par des jeunes, se dévouent à leur service, sans pour autant exclure les autres victimes des conflits du Proche-Orient. Témoin de cette compassion, Georges Pontier, président de la Conférence des évêques de France :  " Le drame vécu depuis trop longtemps par les populations du Moyen-Orient, des chrétiens particulièrement, nous affecte plus spécialement depuis plus d'un an" (8/09/2015).

Il est bien connu par ailleurs que le haut-clergé français ou celui d’Europe que fédère le Conseil de conférences épiscopales d'Europe affichent leur soutien à la construction européenne : le même Georges Pontier, de pair avec plusieurs de ses confrères déclarait au moment de la crise grecque : « L’inquiétude est vive chez les citoyens grecs autant que dans les autres pays membres. Face à cette situation, l’Église catholique tient à réaffirmer son soutien à la poursuite du processus de construction européenne » (7/07/2015).  Des personnalités éminentes, tels les cardinaux Taurin ou Kaspar ne manquent pas d'afficher le même soutien, même si le Saint-Siège, particulièrement au temps de Jean-Paul II [1], s'est montré bien plus prudent sur ce chapitre. Bien que les attitudes de l'Eglise vis à vis de l'OTAN soient plus mesurées, on n'a jamais entendu dire que l'alignement des Européens sur Washington (inscrite dans le traité de Maastricht, article J4) ait été ouvertement critiqué.

 

Qui est responsable des souffrances des chrétiens d’Orient ?

 

Qui ne voit combien ces prises de positions sont contradictoires avec le soutien aux chrétiens d'Orient ? Il ne suffit pas en effet de leur apporter un soutien par des prières ou des dons, il faut chercher à comprendre ce qui est la cause de leurs souffrances. Or la réponse ne fait aucun doute. Les États-Unis portent certes la responsabilité la plus lourde, par le désordre qu'ils ont mis en Irak à la suite de leur intervention de 2003 (même Donald Tromp le reconnaît), par leur volonté de renverser le régime d'Assad et d'appuyer toutes les révoltes arabes, dont l'issue s'est avérée chaque fois calamiteuse, et surtout par une alliance historique rarement mise en défaut avec les forces les plus rétrogrades de l'islam, celles-là même qui persécutent les chrétiens. Cette alliance est ancienne, elle remonte au moins au pacte passé le 14 février 1945 sur le croiseur Quincy entre Roosevelt et le roi d'Arabie Ibn Séoul lequel était décidé à répandre le wahhabisme (islam rigoriste) à travers le monde. Elle ne s'est jamais démentie depuis sauf dans l’émoi qui a suivi le 11 septembre, mais qui a abouti à faire la guerre à un État qui précisément était un obstacle à l’islamisme, l'Irak de Saddam Hussein.

Le fait nouveau est que l'Union européenne et ses principaux États membres, au premier chef la France, l'Angleterre et l'Allemagne, ont épousé totalement cette politique depuis 2010 au point de faire de la surenchère. Le résultat est que les trois pays cités ont fourni des armes et de l’entraînement militaire à ceux qui exterminaient les chrétiens d'Orient, principalement les rebelles islamistes en Irak et en Syrie. Cette politique n'a jamais rencontré le moindre obstacle du côté de l’Europe institutionnelle : Commission, Parlement, bien au contraire. Les réfugiés qui affluent de Syrie sont non seulement victimes de la guerre mais aussi dans une situation économique catastrophique. Une des raisons de cette situation est l'embargo décrété par l'Union européenne dès le 10 mai 2011 qui vise en théorie le gouvernement syrien et, de fait, la population syrienne dans son ensemble. L'horreur est dépassée quand on sait que cet embargo, encore renforcé le 6 mars 2015, a pour conséquence d'interdire tout acheminement de médicaments pourtant si nécessaires au blessé et aux enfants qui souffrent de la guerre. On n'a pas entendu dire qu'aucun des éminences qui s'émeuvent du sort des chrétiens d'Orient aient élevé la voix pour demander la levée de ces sanctions.

Au passif de l'Union européenne, comment ne pas mettre les lâches complaisances vis à vis de la Turquie, candidate officielle à une adhésion que Bruxelles soutient ardemment, inondée de subventions et pourtant le principal boutefeu du Proche-Orient et de l'Europe ?  Boutefeu à la fois par son aide à Daesh (de la manière la plus efficace puisqu’elle permet le transit de milliers de volontaires qui vont rejoindre ses rangs, et qu'il suffirait d’arrêter pour arrêter la guerre) et par l'envoi délibéré de centaines milliers de réfugiés vers l’Europe ?  

La seule puissance qui aide militairement les chrétiens d’Orient en combattant ceux qui les exterminent est aujourd’hui la Russie.  Jean-Luc Mélenchon est un des rares hommes politiques français à le reconnaître et ainsi, de facto, un des rares vrais soutiens des chrétiens d'Orient ! Pourtant l’Europe institutionnelle a, au cours des dernières années, multiplié les signes d'hostilité à l' égard de la Russie allant jusqu'à lui imposer , à elle aussi,  des sanctions : un homme aussi pondéré que l'ancien chancelier  Helmut Schmidt, social-démocrate et protestant,  soulignait peu avant sa mort  combien était historiquement absurde le dessein de la Commission européenne de vouloir, avec les encouragements en sous-main des États-Unis, pousser les limites de l'Union - et par là de l'OTAN -  jusqu'à l'Ukraine[2]. Il n'hésitait pas à dire que l’incompétence et la mégalomanie des commissaires faisait courir le risque d'une nouvelle guerre mondiale. C'est le même alignement qui a conduit à alimenter la guerre au    Proche-Orient et à mettre les chrétiens victimes de l'islamisme dans le camp ennemi de l'Europe officielle, celui que soutient la Russie. En rencontrant le patriarche de Moscou Cyrille à La Havane, le pape François a montré qu'il ne faisait pas siens ces antagonismes, mais il s'en faut de beaucoup que toutes ses ouailles en aient tiré les conséquences.  De fait l'Europe est aujourd’hui dans le camp opposé aux chrétiens d'Orient. Un évêque français[3] est allé jusqu'au bout de cette logique en attaquant publiquement le patriarche melkite catholique de Syrie pour son soutien au régime d'Assad, lui suggérant même de manifester plus de compréhension envers les islamistes, une déclaration que l'on peut juger assez honteuse quand on sait ce que souffrent au quotidien, de la part de ces islamistes, les évêques, prêtres et fidèles du patriarche :  enlèvements, massacres, exil. Le prélat en cause ne faisait que s’aligner sur les positions de l'OTAN qui sont aujourd'hui, en ce début du XXe siècle, l'aune du politiquement correct international. Le silence de ses confrères signifiait-il la gêne ou l'acquiescement ? On aurait aimé le savoir.

 

Une logique intrinsèque au projet européen

 

Toutefois l’action de l'Europe au Proche-Orient ne résulte pas seulement de la tutelle de fait qu'exercent les États-Unis sur ses gouvernements ; elle découle de manière intrinsèque de la logique européenne elle-même. Faute d'un intérêt commun clair, les institutions de l'Union européenne ont défini leur politique étrangère en fonction de grands principes : extension d'un certain modèle démocratique, des droits de l’homme etc.  Prétentions largement mensongères quand elles conduisent ces institutions à qualifier en Ukraine de dictature un régime issu du suffrage universel et de démocratique son renversement à la suite d'un coup d'État (c'est le mot qu'emploie Valéry Giscard d'Estaing pour qualifier les fameux événements de la place Maidan de février 2014).  Dès lors que la politique d'un État ou d'un ensemble d’États est conduite par des idées universelles, elle les fonde à s'étendre sans limites dans le monde et les prédispose à habiller ainsi une forme ou une autre d’impérialisme.  C'est cela qui est au fondement des ingérences européennes, prétendues humanitaires, dont on a vu le caractère désastreux en Yougoslavie : 20 000 civils victimes de la guerre de 1999 et en Lybie : pas moins de 160 000 civils morts lors de l'intervention occidentale de 2011[4]. Il faut le savoir : quand des pays du Tiers monde essuient aujourd’hui, de la part des instances européennes ou d’autres, des critiques un peu insistantes en matière de démocratie et de droits de l'homme, ils entendent des bruits de botte qui laissent présager une intervention militaire et   des milliers de victimes.

Certains diront que l'entreprise européenne était fondamentalement bonne mais qu'elle est aujourd'hui affectée de dérives fâcheuses mais passagères et que les choses devraient rentrer dans l'ordre. C'est oublier que l’assujettissement à l'OTAN était dès le départ, dès la constitution de la CECA, au principe de la construction européenne :  c'était en tous les cas ainsi que le voyait un Jean Monnet, dont la proximité avec les milieux américains n'est plus à démontrer et dont le pieux Robert Schumann ne fut jamais que le prête nom. Encore cet assujettissement pouvait-il se justifier au temps où la guerre froide était dans sa phase la plus aiguë. Beaucoup moins nécessaire maintenant que le communisme s'est effondré en Europe, elle n'en est pas moins plus étroite que jamais et conduit à cautionner, voire à participer directement à des politiques criminelles entrainant des guerres terriblement cruelles pour les peuples concernés, et spécialement pour les chrétiens d'Orient.  La rancœur de ces dernières vis à vis de l'Europe en général et de la France en particulier est bien connue de tous ceux qui tentent de rattraper ces immenses lâchetés en allant à leur rencontre.

N'hésitons pas à le dire : les grands pays occidentaux, la plupart des Européens et les institutions européennes de Bruxelles avec eux se sont déshonorés dans leur action au Proche-Orient au cours des dernières années. Pour aider sérieusement les chrétiens d'Orient, les Européens de l'Ouest doivent recouvrer leur liberté, ce qui ne se fera pas dans le cadre institutionnel actuel. Loin de connaître une dérive, l'Union européenne telle qu'elle se construit depuis un demi-siècle a révélé sa nature d’entreprise idéologique et par là potentiellement criminelle. Il est politiquement incorrect de regarder la vérité en face. Tous ceux qui, voulant rester du côté de la bien-pensance, se taisent sur ces sujets sensibles tout en se prétendent   solidaires de leurs frères d'Orient, font preuve d'une grave inconséquence.

                                                                      

                                                           Roland HUREAUX    

 

 

 

 

 

 

 

[1] De même les évêques de Pologne ont pris récemment leurs distances vis à vis des institutions européennes.

[2] Bild, 16 mai 2015

[3] Radio Notre-Dame, 11 septembre 2013

[4] Chiffre donné par la Croix rouge

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31 mars 2017 5 31 /03 /mars /2017 22:56

UN TERRORISME NI BARBARE, NI AVEUGLE, NI INCOMPREHENSIBLE

 

Le souci de se trouver en phase avec des évènements liés au terrorisme, qui ont stupéfié beaucoup de nos compatriotes, doit-il conduire à une escalade de qualificatifs emphatiques qui n'ont pas le seul inconvénient de la répétition, voire de la trivialité, mais aussi celui d’induire en erreur sur la véritable nature du phénomène en cause ?

 

Ni barbare

 

A peu près tous les éditoriaux nous ont dit ainsi   que les attentats de Nice et de Saint Nicolas du Rouvray étaient « barbares ». Pitié pour les barbares qui méritent mieux que ça !  Au moins ceux de l'Antiquité, les vrais.  Le mot signifiait pour les Grecs, des hommes qui balbutiaient, c'est-à-dire   qu'ils ne parlaient pas le grec, ni plus tard le latin.  Aux Ve et VIe siècle de notre ère, ces hommes, Germains ou Asiates, venus du Nord et de l’Est, se sont jetés sur l'Empire romain moribond parce que, refroidissement climatique oblige, ils n’arrivaient plus à vivre chez eux. Ils en ont alors occupé la partie occidentale. Mais quand ces barbares   se jetaient sur une ville, il ne ne se livraient pas à des violences gratuites, ils pillaient les biens (le vase de Soissons !), ils violaient les femmes et même ils s’appropriaient les terres.  Rien qui, d'une certaine manière, ne sorte des bornes de la nature humaine ordinaire.

II est vrai que côté Sud, au VIIe siècles sont venus d'autres barbares, les Arabes du désert, dont les motivations de base n'étaient guère différentes mais qui en avaient une de plus : répandre l'islam. La fureur des combats passés, ils imposaient aux adeptes des religions vaincues le statut de d’imamis, c'est à dire de protégés et les contraignaient à payer un impôt spécial. Très vite, le zèle religieux se refroidissant, beaucoup de ces nouveaux maîtres ont préféré freiner la conversion des   peuples conquis pour préserver les rentrées fiscales.

 

Ni aveugle

 

On nous dit aussi que le terrorisme est "aveugle". Il est vrai qu’il suppose des dommages collatéraux importants. Ainsi   à   Nice près du tiers des victimes de la promenade des Anglais étaye, dit-on, des musulmans. Les dommages collatéraux, frappant la population civile, les Occidentaux connaissent :     20 000 civils en Yougoslavie, 500 000 en Irak, 160 000 en Libye. Les terroristes n'ont pas été les seuls à frapper en aveugles. Pourtant les terroristes - ou leurs commanditaires - ont visé chaque fois des cibles hautement significatives : un journal jugé blasphémateur (Charlie), un lieu d'amusement populaire jugé satanique (le Bataclan), la République elle-même (le 14 juillet à Nice) puis l’Eglise catholique. Le terrorisme est, on le voit, tout   sauf aveugle.

Il est vrai qu'on nous dit généralement que le meurtrier est   un forcené, un déséquilibré, quitte à se raviser ensuite. Les forcenés, les vrais, oui, sont aveugles mais la vague de terrorisme que nous connaissons aujourd'hui n'est pas, pour l’essentiel, le fait de forcenés.

 

Par-delà la haine, l'idéologie   

 

Autre lieu commun : les tueurs seraient mus par la haine la plus absolue. Nous n'avons pas eu leurs confidences puisqu’ils sont généralement morts dans les attentats. Mais depuis l'attentat de Sarajevo (1914), l'Europe a déjà une longue expérience du terrorisme.  Invoquer la haine exacerbée, c'est oublier que la plupart des meurtriers auxquels nous avons affaire ne sont que des exécutants qui se sont engagés pur une cause et ont promis d'obéir aux ordres quels qu’ils soient, même au prix du sacrifice de leur vie. Rien ne dit que les tueurs de Saint Etienne du Rouvray n’avaient pas au fond d'eux-mêmes horreur   de tuer un prêtre ou un vieillard. Derrière, se trouvent des commanditaires mus par une idéologie : le dessein de tuer est pour ceux-ci le terme d'une chaîne de raisonnement logique, trop logique, dont on connait les prémisses :  il y a une lutte morte entre l'islam et ce qui n’est pas l'islam. Gagneront ceux qui n'auront pas peur de tuer. Choisissons donc les cibles qui auront le maximum de retentissement. S'il y a sans doute de la haine dans cette démarche à caractère idéologique, les prémisses en sont d’abord de mauvaises idées

L'idéologie, c'est deux   choses : d'abord une   vision simplifiée du réel qui pose les prémisses d’un raisonnement fou, mais d'un raisonnement quand même    logique, ensuite la maîtrise d'un pouvoir, pouvoir d'Etat ou pouvoir sur une organisation. Hors du pouvoir, les idéologues ne sont que de doux rêveurs. Au pouvoir, ils sont le plus dangereux des hommes.

Plus que de haine, il faudrait parler de possession, dans la mesure où ceux qui entrent dans la logique idéologique, généralement terroriste, sont tenus par cette chaine de raisons à laquelle ils ne voient pas d’échappatoire.  Prisonniers d'une certaine conception du monde, ils n’y voient généralement pas d'alternative sauf à changer complètement leur vision, à se convertir ou reconvertir.

 

Rien d'incompréhensible

 

Il est dès lors absurde de dire que le terrorisme est "incompréhensible". Le mécanisme idéologique tel que nous venons de le décrire n'est pas nouveau : à l’œuvre depuis longtemps, il explique en grande partie les crimes qui ont eu lieu dans les régimes totalitaires du XXe siècle lesquels dépassent largement ceux terrorisme : 40 millions de victimes en Union soviétique, 80 millions en Chine, 50 pour l'Allemagne nazie (en incluant la guerre qu’elle a provoqué) etc.

Dans tous les cas, il est faux d'imaginer que ces crimes ont été commis par des assassins mus par une haine exacerbée, comme le serait celle d’un mari jaloux ou d’un homme voulant se venger d'une offense.    Ce genre de haine reste, elle aussi, dans l’ordre de la nature. Le crime idéologique est, lui, le produit d'une mécanique froide dont il n'est pas exclu que chacun de maillons déteste ce qu'il fait. Il y a des crimes individuels qui partent des tripes. Les grands crimes historiques, eux, partent d’abord d’idées folles.  Haine ou racisme au départ, certes, mais que le mécanisme idéologique élève à la puissance x.   

Comment ont germé ces idées folles, est une autre histoire.  Mais n'oublions pas que le plus grand des péchés est l'orgueil, qui peut échauffer l'esprit hors de toute mesure.

La société ne survivra pas s’il n'y a pas des hommes et des femmes lucides, gardant en toutes circonstances une froide capacité d'analyse, pour      tenter de maitriser l'irrationalité apparente des évènements.  La première chose que nous devons aux victimes de ces crimes atroces (pour le coup l'épithète est justifiée mais elle ne prétend à aucune fonction explicative) est de comprendre, pas pour être "compréhensif " naturellement, mais comprendre pour combatte, combattre pour mettre un terme à ce qui s’apparente à une grave maladie intellectuelle peut-être propre à la modernité.

 

                                                           Roland HUREAUX

 

 

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31 mars 2017 5 31 /03 /mars /2017 22:55

 

POUR UNE EUROPE A GEOMETRIE VARIABLE

 

Publié dans Liberté politique   

 

Qui ne comprend les angoisses des partisans de l'Europe de Bruxelles quand ils ont pris connaissance des déclarations de Donald Trump dans le Times du 17 janvier dernier[1], où il   affirme que "Le Brexit va s’avérer une grande chose », que "l'Union européenne   est basiquement un véhicule de l'Allemagne « et même que "l'OTAN est obsolète".

Les réactions crispées de Merkel " Les Européens ont leur destin en mains" et de Hollande qui lui fait écho, cachent mal un profond désarroi. Depuis son commencement, après la dernière guerre, l'entreprise dite de "construction européenne" avait reçu presque toujours l’appui des Etats-Unis. Que peut être encore son avenir si cet appui vient à lui manquer ?

 

Aux origines de la construction européenne : le rôle du général de Gaulle

 

Sans doute n'va-t-il pas toujours été aussi total que ce que François Asselin eau ou d’autres disent mais il est fondamental.

La Déclaration Schuman du 9 mai 1950   avait été préparée par Jean Monnet en liaison avec l'Ambassade des Etats-Unis. Ce qui   montre au passage que l'inspiration démocrate-chrétienne de la constriction européenne est largement une légende : Schuman a signé ce qu'on lui a présenté, Adenauer et De Gasperi, vrais patriotes, songeaient d’abord à remettre leurs pays, vaincus, dans le concert international.  L'inspiration social-démocrate de la construction européenne à ses débuts : Paul-Henri Spaak, Guy Mollet, Monnet lui-même, est au moins aussi décisive. 

Les premières initiatives, la CECA (1951) et la CED (1952), ont été prises en conformité avec la volonté expresse des Américains ; pas plus que   l'Euratom (1956), elles n’ont eu de suite durable.

Seul le traité de Rome (1957) n’a pas eu l'entier appui de Washington :    instituant une union douanière et un marché commun agricole solidement protégés il ne pouvait pas convenir vraiment aux intérêts américains : d'ailleurs, Jean Monnet, fidèle interprète de ceux-ci, le bouda.

C'est peut-être la raison pour laquelle le général de Gaulle, revenu au pouvoir en 1958, qui n'avait pourtant pas été enthousiaste de cette initiative, poussa très fort pour que le traité soit appliqué, en particulier dans   son volet agricole, alors très favorable aux intérêts français. Or c'est le marché commun agricole (la fameuse Politique agricole commune, première manière), et lui seul, qui est à la base des institutions actuelles. Certes le plan Fouché qui exprimait la vision européenne du général a été refusé par ses partenaires, sur l'instigation de Washington - ou plutôt réduit au seul partenariat franco-allemand.  Il reste que sans l’intervention du général, qui s'est même traduite un moment par la "politique de la chaise vide" (1965-66), ce qui est devenu l’Union européenne aurait fait long feu.

Mais depuis ces commencements l’entreprise européenne a subi une mue.

 

Une mue

 

Ce n'est pas tant l'élargissement qui avait vu passer à partir de 1973 le nombre de membres de 6 à 28   qui constitue cette mue.  Même si  cet élargissement  a renforcé  le pouvoir de la commission  sachant qu' il est plus difficile de s'écarter de  ses  propositions quand on est   nombreux autour de la table et entrainé une politique de développement régional au profit de l'Europe du Sud dont l'euro  a presque entièrement annulé les effets, il   ne nous parait pas aussi décisif qu'on le dit : est-ce d'ailleurs aux Français de regretter  l'extension de l'Union   à des   pays comme  ceux  d'Europe centrale, vieux amis de la France et de civilisation européenne authentique ( Pologne, Roumanie  et même Hongrie et Tchéquie ) ?

Non, ce qui a changé c'est d'abord l'érosion du marché commun, industriel en raison de l'extension du libre-échange mondial sous l'impulsion du GATT et agricole, la politique agricole commune ayant reçu un coup fatal quand Mitterrand céda en 1984 à la vieille exigence des Américains de la faire entrer elle aussi dans la mécanique du GATT. Cela aboutit, d'abord à la réforme de la PAC de 1992 qui en changea complètement le caractère et à l'accord de l'OMC (nouveau nom du GATT) de 1994 qui visait à diluer la PAC dans le marché mondial. De forteresse quelle était au départ, l'Europe communautaire est devenue peu à peu un espace ouvert à tout vent.

Il fallait trouver un nouvel élément fédérateur :  c'est dans la même année charnière 1992 (celle de la réforme de la PAC), que, par le traité de Maastricht, fut instaurée la monnaie unique, entrée en application en 2000.  

 

L'Acte unique : du fédéralisme au centralisme

 

Mais cinq ans avant avait été adoptée, sous l'inspiration de Jacques Delors, une décision peut-être encore plus fondamentale : l'Acte unique de 1987, instaurant non plus un marché commun mais un marché unique, ce qui voulait dire, au-delà de la disparition des barrières douanières, l’unification progressive de toutes les normes de production et des règles professionnelles dans l'ensemble de l’Europe. Le renforcement, jusqu'à l’absurde, de la politique de la concurrence de Bruxelles et le   traité d'Amsterdam (1997), reprenant la Convention de Schengen (1995) instaurant la libre circulation des hommes, en constituaient, de pair avec la monnaie unique, le prolongement, l’objectif final étant un espace européen entièrement homogène.

Tout le monde n’avait   pas saisi sur le moment la portée de l’Acte unique

: cette uniformisation généralisée des règlements économiques ou professionnels transformait un projet fédéral en une entité centralisée   puisque c’est désormais au niveau de Bruxelles que se décide n'importe    quelle norme , y compris   la taille des  bouchons de bouteille ou celle des cages à poule. Ce changement est même  de plus grande portée que l'instauration de la monnaie unique dans la mesure où celle-ci serait facilement réversible alors que le travail normatif qui résulte de l'Acte unique ne le sera sans doute pas.

Dès le départ , l'entreprise européenne avait été comprise  comme  la préparation économique d'une entité qui devait in fine être politique   : un Etat unique , unique entité de droit  international , couvrant l'ensemble du continent.  Unique et unitaire , et non pas  fédéral, comme le  répètent de manière mécanique les "souverainistes"  ( autre mot piégé : le plus sûr moyen de perdre les batailles est de ne pas surveiller son vocabulaire !). Un Etat unitaire de grande envergure, ça s'appelle un empire. Barroso  l'a d'ailleurs dit : l'Union européenne  est  un  "empire non impérial",  cet oxymore désignant ce que Delors appelait de  son côté "un objet politique non identifié".

 

De multiples dysfonctionnements

 

Aujourd’hui, cet édifice est en crise. Une crise qui se manifeste par toute une série de dérives.

D'abord le marché unique a conduit à une interprétation dogmatique des règles de la concurrence. La Commission européenne avait, on s 'en souvient, interdit à Péchiney d'acheter le canadien Alcan mais autorisé Alcan à acheter Péchiney (2003) avec le résultat que l'on sait : la fermeture de la plupart de ses sites en Europe. Ce n’était que l'aspect le plus spectaculaire d'une politique dogmatique ayant pour effet, la corruption aidant, l’affaiblissement industriel de l'Europe.

La même interprétation dogmatique a conduit à imposer à EDF de se scinder en plusieurs   branches : une pour la production d'électricité, une autre pour le transport, une troisième pour la distribution avec de multiples complications et aucun bénéfice pour le consommateur. Mêmes complications à la SNCF.

Le transfert vers Bruxelles d'une grande partie des législations nationales (80 % de la législation économique environ) n'est pas pour rien dans la perte de crédit du personnel politique national qui, comme la noblesse à la fin de l'Ancien régime, donne l’impression de ne plus servir à rien, et plus largement de presque toutes les autorités. Comme Bruxelles n'a pas meilleure réputation, l'Union européenne se traduit ainsi en Europe occidentale par une crise du politique sans précédent.

Conçue pour préserver la paix, l'Union européenne - ou à tout le moins les pays qui la composent -  est   responsable (ou coresponsable avec les Etats-Unis) de deux guerres en Europe : celle de Yougoslavie (1999)   puis celle d'Ukraine (2013). C'est Helmut Schmidt lui-même qui, avant de nous quitter, pointait l'incompétence de l'Union européenne dans l’affaire ukrainienne et sa responsabilité dans la guerre qui a éclaté. La Commission européenne, dit-il, «se mêle trop de politique étrangère, alors que la plupart des commissaires européens la comprennent à peine". Il allait, du fait de ces agissements, jusqu'à évoquer le risque d’une troisième guerre mondiale[2]

Il ne s’agit pas seulement d'incompétence mais d 'impérialisme. Alors qu'un Etat défend ses frontières, un Empire, fondé sur une idéologie et persuadé d'incarner le bien, cherche généralement à s'étendre sans limites : les technocrates de Bruxelles ne comprennent pas pourquoi l'Union européenne n’engloberait pas l'Ukraine. Le prolongement de cette intervention en Ukraine, ce sont   les sanctions économiques prises à l’encontre de la Russie qui ne contriubuent pas peu à l'état de tension existant en Europe.

Dans les guerres du Proche-Orient, certains Etats (France, Royaume-Uni, Allemagne, Pays-Bas, Danemark, Pologne) se sont trouvés   plus engagés que l'Union européenne elle-même. Cela dans le cadre de l'OTAN dont le traité de Maastricht a fait le bras armé de l’Union, aucune décision de celle-ci ne pouvant prévaloir sur une décision prise au sein de l'Alliance. Mais l’Union européenne a contribué directement au chaos syrien en prenant des sanctions très dures à l'encontre des populations de ce pays (dont ne sont exonérés que celles qui sont passées sous contrôle djihadiste).  Des sanctions véritablement criminelles dans la mesure où elles appauvrissent des populations déjà durement frappées par la guerre, provoquant leur exode massif. La complaisance inouïe de l'Union vis-à-vis de la Turquie, pourtant fauteur de trouble infatigable en Syrie et en Irak, est aussi à mettre à son passif.

L'euro est en crise du fait de l'explosion du déséquilibre de balances des paiements internes à la zone et des déficits publics. Pas moins de 20 sommets, mettant en place des mécanismes de plus en plus sophistiqués, ont été organisés entre 2010 et 2015 ; l'euro ne survit   que par la politique inflationniste de la BCE (dite quantitative leasing), sous la conduite de Drag hi, fuite en avant contraire aux statuts. La zone euro, contrainte par une monnaie qui ne convient à vrai dire qu'à l'Allemagne, ne sort pas d'une récession chronique qui se répercute sur l'économie mondiale.

La politique de libre circulation des hommes et de contrôle commun des frontières extérieures communes a révélé sa faiblesse avec la vague migratoire de 2015-2016. Les pays qui appliquent le plus scrupuleusement les règles communautaires de contrôle des frontières externes, comme la Hongrie, sont même stigmatisés par l’Union.

En bref la construction européenne qui avait pour ambition de rendre à l'Europe sa puissance a entrainé son affaiblissement à peu près sur tous les plans.  

 

La sanction d'un projet idéologique

 

Depuis le début, l'Union européenne qui se fondait au départ sur des projets de coopération que nous appellerons naturels comme le marché commun agricole - mise en commun des politiques de soutien des différents états -, avait été parasitée par l'arrière-pensée, présente chez un Monnet, de créer un jour un Etat unique, projet qui présente tous les caractères d'un projet idéologique, fondé sur des idées fausses et simplificatrices.

Idées fausses : celle que les malheurs de l’Europe, notamment les guerres du XXe siècles seraient imputables au fait national, une approche un peu courte car c'est le facteur idéologique et non le facteur national qui a joué le plus grand rôle dans la seconde guerre mondiale et la guerre froide. Il est en outre excessivement sommaire de ramener la riche histoire de l'Europe à son seul côté sombre :  les guerres, le "colonialisme" ou la shoah.  

Simplification : penser que la fusion des trente Etats européens en un seul puisse être en soi une bonne chose est terriblement réductrice, autant que pouvait l’être, dans la doctrine marxiste, l’attribution de tous les malheurs des hommes à la propreté privée et le projet de l'abolir.

Réduisant des réalités complexes à des schémas trop simples, les démarches idéologiques se trouvent naturellement inadaptés à la gestion de ces mêmes réalités. 

Il en résulte deux conséquences que l'on retrouve dans toutes les démarches idéologiques :

 

- les effets pervers : c'est ce que Hayek appelle "la loi des effets contraires au but recherché". Ainsi qu'on l'a vu, au lieu de la prospérité ambitionnée, le marché unique et la monnaie unique, ont amené la récession ; la tentative d'unification politique, au lieu de permette au continent de s'affirmer, a abouti à un   assujettissent sans précédent à la puissance américaine, principalement dans le cadre de l'OTAN, menaçant ainsi la paix ; la libre circulation a conduit à faire des frontières de l'Europe une passoire sans équivalent sur la planète.

 

- le rejet par les peuples, qui sont les victimes directes et les témoins de plus en plus lucides des effets pervers auxquels conduisent des politiques inspirées par l'idéologie : ils sont les premiers à souffrir   de réglementations absurdes, et surtout du chômage, d’une immigration non contrôlée, de l'affaiblissement de l’autorité, résultat du développement continu des instances supranationales.

 

Comme les idéologies s'attirent les unes les autres, la mécanique européenne a appelé en plus de tout cela d'autres idéologies, aujourd'hui confondues dans une même idée de "progrès » : libre-échange universel, antiracisme frénétique et ouverture à l’immigration, théorie du genre, ultra écologisme qui conduit, à coups de directives irréalistes sur l’énergie, à couvrir d'éoliennes le sol européen si riche d'histoire et d’héritages culturels variés. Le problème le plus grave de l’Europe : son effondrement démographique est en revanche tabou car, comme il touche à la famille dont il politiquement incorrect (c’est-à-dire contraire à l’idéologie) de parler.

Chaque fois que les peuples sont consultés par référendum : France et Pays-Bas (2005), Grande Bretagne (2016), ils rejettent l'Union européenne ; les partis anti européens ne cessant de progresser au point d’être au pouvoir ou à ses portes   en Pologne, en Hongrie, en Autriche, aux Pays-Bas, en France. Il en résulte que les partisans de la construction européenne récusent de plus en plus ouvertement la démocratie :  « Il ne saurait y avoir de choix démocratique contre les traités européens»[3] ( Jean-Claude Juncker).

Rien ne témoigne davantage de la fragilité grandissante de l'édifice européen que la dernière crise de l’euro, due aux difficultés de la Grèce (juillet 2015). Un accord à même de permette le maintien de l’euro n’a été trouvé qu'au forceps, à la suite de l'intervention directe dans la négociation, du représentant d'Obama, le secrétaire adjoint au Trésor, venu imposer à une Allemagne réticente de garder à tout prix le Grèce dans la zone euro.  Même si seulement 18 pays sont concernés par la monnaie unique, elle est aujourd’hui la clef de voute du dispositif européen et son éclatement   conduirait   à un ébranlement profond de l'ensemble de l'édifice.

 

Deux chocs : le Brexit, l'élection de Trump

 

C'est   cet édifice fragilisé qui s'est trouvé soumis à deux chocs successifs, tout aussi inattendus l'un que l’autre, au moins par les médias : le Brexit et l’élection de Donald Trump.

Dans les deux cas, c'est le suffrage universel qui s'est exprimé, à l'encontre d'un système médiatique quasi-totalitaire déversant des torrents d'injures sur l’horreur « populiste » que représentaient selon lui   les deux options l'ayant   emporté.

Le propre des édifices idéologiques, on l'a vu avec la fin de l'Union soviétique, est que, comme ans un château de cartes, si un des éléments disparait, c'est tout l'édifice qui s'effondre.  La sortie du Royaume-Uni constitue un démenti à l’idée que la construction européenne s’inscrirait sans retour possible dans le sens de l'histoire.  On comprend par là   l'importance symbolique du Brexit et, de ce fait, le fanatisme que s'est exprimé chez ses opposants   au Royaume-Uni et sur le continent, en même temps que leur amertume qu'il se soit produit, allant jusqu'à la dénégation et le secret espoir d'en annuler les effets par des voies judicaires.   Dans une association normale, on entre et on sort sans que cela provoque de drame, il n’en est pas de même dans un projet idéologique supposé porteur d'une refondation de la condition humaine.

L'Europe connait bien d’autres ébranlements :  associée à la politique étrangère d'Obama, elle est gravement affectée par l’échec cuisant qu’elle vient d’essuyer en Syrie après cinq années d'un absurde soutien aux mouvements djihadistes opposés au régime Assad, les mêmes qui commettent des attentats sur le territoire européen.

L'élection de Trump ne menace pas seulement la construction européenne en raison de l'hostilité que ce dernier a semblé au départ lui témoigner[4] ; elle la menace aussi du fait que le nouveau président   veut se rapprocher avec la Russie, ce qui laisse l’Union comme   orpheline.

 

L'Europe de Bruxelles : un héritage de la guerre froide ?

 

Ce revirement nous fait toucher du doigt une vraie crise existentielle.  A ses origines (1950), la construction européenne était inséparable de la guerre froide : l'appui que lui apporta les Etats-Unis (et aussi le pape Pie XII) était lié à la volonté de consolider le bloc occidental de l’Europe face à la menace communiste.  S'il est vrai que le rideau de fer est tombé en 1990, la politique étrangère américaine, en manque d'ennemis, s'est dépêchée de considérer, de manière absurde, la   Russie chrétienne comme une menace analogue   à celle de l’Union soviétique, voire comme   son pur et simple prolongement.  Les dirigeants de l'Europe occidentale, dépourvus pour la plupart de la moindre vision, se sont dépêchés d'adopter le même point de vue. Dans cette perspective, la construction européenne, élargie aux pays nouvellement émancipés du joug communiste, de l’Estonie à la Bulgarie, conservait sa raison d'être, d'autant que ces pays redoutaient beaucoup la Russie et que   l'OTAN avait été reconnue dans le traité de Maastricht (1992)    comme le prolongement de l'Union européenne.  C'est ainsi que celle-ci en est venue, conformément à la vision géopolitique des think tanks nord-américains pour lesquels il fallait creuser le fossé le plus profond possible   entre l'Europe de l'Ouest et la Russie, à considérer le Russie comme une menace et à s'associer à toutes les gesticulations hostiles à son encontre : appui au régime ukrainien issu du coup d'Etat de 2013, manœuvres militaires dans les pays baltes, sanctions économiques.

Une question se pose à partir de là : quel peut être le sens de cette union si la guerre froide - et son prolongement antirusse -  vient à cesser ?

On mesure par là  le désarroi d'une Union européenne  qui avait lié son sort avec la faction néoconservatrice des Etats-Unis, incarnée par Obama et Hillary Clinton , antirusse hystérique, à la suite de la défaite de celle-ci et de la victoire de Trump lequel a marqué sa volonté d'opérer un rapprochement   positif avec Poutine  Au début de 2017, le conseil européen a décidé de reconduire  les sanctions l 'égard de la Russie , alors même que tout  le monde s'attend à ce que les Etats-Unis les lèvent bientôt , ce qui leur permettra   de prendre les meilleures positions sur le marché russe  au nez et à la barbe des Européens  

Face à ces données radicalement nouvelles : Brexit, retour de la Russie sur la scène internationale, changement de vision aux Etats-Unis, il est urgent de reconfigurer les institutions européennes pour les adapter à la   situation géopolitique qui en résulte. L'Europe doit "ouvrir ses fenêtres" aux partenaires de son environnement proche et sortir d'une opposition frontale entre les "in" et les "out » qui s’avèrerait très vite suicidaire.

 

 

Une réforme indispensable : vers une Europe à la carte  

 

La solution : s'orienter résolument vers un schéma d’Europe à la carte (qui s'applique déjà d'une certaine manière, tous les membres actuels de l'UE n'étant pas dans l’euro) ; remplacer des institutions centrales monolithiques qui, à vouloir concentrer toutes les compétences, pourraient vite devenir un "trou noir », par une "galaxie » d’agences thématiques spécialisées, sur la modèle de l’Agence spatiale européenne ou de l’OCCAR. Les différents sujets d'intérêt européen qui sont aujourd'hui  traités à Bruxelles  pourraient continuer de  l'être , par le même personnel le cas échéant, mais la participation à chacune de ces agences serait "à géométrie variable",  certains membres actuels pouvant s'en retirer et certains pays aujourd'hui à l'extérieur,  comme désormais  le Royaume-Uni, mais aussi  la Russie, la Suisse  et pourquoi pas  la Turquie ou  le Maroc , pouvant adhérer à  l'agence correspondante ou  se joindre à elle pour telle ou telle action. La coopération politique, appuyée sur un secrétariat spécifique, suivrait le même modèle, avec la possibilité d’associer certains pays tiers en fonction de l'ordre du jour.

L'autre solution, aujourd'hui envisagée dans les milieux européens, mène à une impasse. Elle consiste à dire : face aux risques de marginalisation, pour continuer à "peser », l’Union européenne telle qu'elle existe doit serrer les rangs, défendre   très fort l’acquis, s’intégrer si possible davantage.  Concrètement, durcir le Brexit pour punir Londres, maintenir les sanctions envers la Russie, continuer de battre froid Donald Trump au nom des "valeurs » :  droits de l'homme, ouverture de frontières, libre -échange etc.    Ainsi se dessinerait une configuration géopolitique comprenant d'un côté, autour de Merkel, Hollande et Juncker, une sorte de bloc continental, dirigé par l'Allemagne, la France étant désormais dans une position inféodée, et de l’autre, une sorte d’alliance   entre les Etats-Unis, la Russie et le Royaume- Uni. Etonnant clivage pour qui se souvient des "années les plus sombres de notre histoire".  Le plus probable dans un tel schéma est que les Allemands ne seraient plus que la courroie de transmission du nouveau pouvoir intercontinental. On aurait là l'aboutissement paradoxal de soixante années de "construction européenne" : les affaires l’Europe décidées entièrement en dehors d'elle. 

Une Europe à géométrie variable permettrait au contraire, à la fois d'atténuer la rigueur du Brexit et d’éloigner la Russie de la tentation du duopole en la réintroduisant dans quelque chose comme un nouveau « concert européen », de rompre ainsi le front de la mise en tutelle. Même perspective pour la Turquie aujourd'hui contrainte à s'inféoder à Moscou.

Même s'il ne préjuge pas de l'avenir de l'euro avec lequel il n'est pas formellement incompatible, ce schéma obligera les adeptes d’une intégration au sein d'un super-Etat sur le   modèle monnetiste périmant peu à peu les Etats-nations, avec ses frontières, son armée, son drapeau, et pourquoi pas ses timbres, à en faire leur deuil. 

Mais qui ne voit que le modèle de l'Europe bloc contredit le principe de complexité qui est au cœur du génie européen. Comme le dit Jean-Jacques Rosa [5], il s'oppose aux tendances modernes privilégiant, non les constructions monolithiques, mais les   organisations plurielles, souples, interconnectées sans hiérarchie stricte. Ajoutons qu'au moment où la Russie est débarrassée du communisme et les Etats-Unis de cet autre projet mondial qu’était aussi le néo-conservatisme, le monde    s’éloigne, pour le plus grand bien de la paix, des modèles idéologiques du XXe siècle auxquels on peut, même de manière atténuée, assimiler le projet européen de l'après-guerre.

La réorganisation des institutions européennes que nous proposons n’est pas une option. Qui peut croire que l'édifice actuel (ou ce qu'il en reste) pourra se maintenir longtemps en excluant frontalement les deux principaux centres financiers de la planète (New York et Londres) et la première puissance énergétique et militaire du continent ? 

 Si l'Union européenne ne procède pas à une réforme rapide de ses institutions, dont la France pourrait prendre l’initiative, on peut craindre qu'elle ne soit conduite assez vite à une cataclysmique dislocation.

 

                                                           Roland HUREAUX

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

https://www.theguardian.com/us-news/2017/jan/15/trumps-first-uk-post-election-interview-brexit-a-great-thing

 

“You look at the European Union and its Germany. Basically, a vehicle for Germany. That’s why I thought the UK was so smart in getting out,” he told Gove.

 

[1] http://www.thetimes.co.uk/article/full-transcript-of-interview-with-donald-trump-5d39sr09d

 

[2] [2] Entretien - Bild 16 mai 2014

 

[3] Déclaration faite à la suite de la victoire de Syra aux élections de Grèce, 16 janvier 2015

[4] Aux dernières nouvelles, Donald   Trump aurait   évolué : ses dernières déclarations semblent au contraire favorables au maintien de l’Union européenne.

[5] Jean-Jacques Rosa, L'erreur européenne, Grasset.

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31 mars 2017 5 31 /03 /mars /2017 22:52
Note  

 

Assad, diable ou diabolisé ?

 

Les accusations les plus graves à l'encontre du régime de Bachar-el-Assad ont fleuri dans la presse occidentale : assassinat de Rafic Hariri, premier ministre du Liban ( 2005) , répression effroyable des  premières manifestations dites démocratiques  (2011) ,  emprisonnements et tortures   , massacres de civils à Houla,  "bombardement de   son propre peuple",  utilisation d'armes chimiques notamment  à la  Ghouta ( faubourg de Damas) le 21 août 2013 , crimes de guerre à dans la bataille d'Alep, tortures  en tout  genre.  Elles ont été relayées par les gouvernements des pays de l'OTAN.

 

Il est difficile de se prononcer sur l'ensemble de ces accusations.

 

Trois sont probablement fausses.

 

1. L'assassinat de Rafiq Hariri

 

  Rafiq Hariri, premier ministre du Liban a été victime d'un attentat à la    voiture piégée 14 février 2005. Cet attentat avait été immédiatement imputé à Assad par l'ensemble de la presse internationale et fut le début de la campagne de diabolisation. Les Etats-Unis avaient même obtenu la mise en place d’un tribunal spécial pour le Liban   pour juger ce "crime contre l'humanité".  

Or en octobre 2016, Hugh Grassley, doyen et président de la commission juridique du Sénat des Etats-Unis affirmait que  « certains indices irréfutables confirment le rôle direct de l’Arabie saoudite dans des attentats terroristes dont celui de l’assassinat de Rafic Hariri »[1].

Georges Malbrunot, journaliste au Figaro, proche du renseignement français, ne retient pas non plus la thèse de la culpabilité d'Assad dans son livre : Les Chemins de Damas : Le dossier noir de la relation franco-syrienne. (1973).

 

2. Les attaques chimiques de la Ghouta

 

Le 21 août 2013, une attaque aux armes chimiques a eu lieu à la Ghouta, faubourg éloigné de Damas. Elle fut immédiatement imputée à Assad par l'ensemble des gouvernements et de la presse occidentale.

Deux semaines avant, Obama avait dit dans une conférence de presse que l'utilisation d 'armes chimiques par le régime serait une "ligne rouge" qui, si elle était franchie, entrainerait une intervention américaine directe dans le conflit.

On s'attendait à cette intervention et finalement elle n’eut pas lieu : Obama s’abstint à la suite de la proposition de Poutine de placer les armes chimiques de Syrie sous contrôle international. 

Deux rapports difficilement récusables invalident la thèse de la culpabilité d'Assad :

 

 a) un rapport du MIT :  en janvier 2014, Richard Lloyd,  ancien inspecteur de l'ONU, spécialiste des missiles, et Theodore Postol , professeur au Massachussetts Institute of technology , publient  un rapport   selon lequel le régime syrien n'est pas  responsable du massacre.  Ils ont pour cela étudié des centaines de photos et de vidéos d'ogives,  de restes de roquettes, d'impacts sur le sol, et de barils contenant le gaz sarin, publiées sur Internet,  et se sont livrés à une analyse physique qui a permis  d'établir le volume de gaz sarin utilisé,  la portée des missiles, leur direction ainsi que l'endroit d'où ils ont été tirés

(http://www.nytimes.com/2013/12/29/world/middleeast/new-study-refines-view-of-sarin-attack-in-syria.html ).

 Ces conclusions sont reprises par Franz-Olivier Giesbert en juin 2014, dans un éditorial du journal Le Point, où il accuse Le Monde et le gouvernement français, d’avoir incriminé   sans preuves le gouvernement syrien, afin de justifier d'éventuelles frappes.

 

b) un rapport de l’OIAC, organisation pour l’interdiction des armes chimiques près   l’ONU basée à La Haye, prix Nobel de la Paix en 2013   démontre par des méthodes différentes : analyse chimique des gaz montrant que ce n'est pas   le même que celui des   stocks syriens, mais en revanche le même que celui des stocks libyens dispersés après la chute de Khadafi. L'attaque serait donc due aux rebelles d'Al Nosra qui auraient été approvisionnés par l'Arabie saoudite.

Toutefois cette étude n'a jamais été rendue publique. La presse française n'en a pas non plus parlé.  Seule une fuite parvenue à l’agence Fides (Vatican)    en a révélé le contenu[2].

Il semble donc bien que l'attaque de la Ghouta ait été une provocation destinée à entrainer les Etats-Unis dans la guerre.  Assad aurait-il d'ailleurs été assez fou pour utiliser de telles armes deux semaines après qu'Obama ait averti solennellement que leur usage constituait une ligne rouge dont le franchissement déclencherait les frappes américaines ?  

En décembre 2016, l'ambassadeur de Syrie à l’ONU a accusé la France d'avoir prêté main forte au montage de cette provocation. Ce qui est sûr, c'est que nos services étaient alors proches d’Al Nosra qui est l'auteur de la provocation et que Hollande et Fabius (avec l'appui de Sarkozy et Juppé) ont immédiatement    reproché à Obama de s’être « dégonflé ». Il savait sans doute dès le début que le régime n'était pas en cause.

Mais le gouvernement français devait le savoir aussi : il se rapporte dans le milieu du renseignement que le directeur de la DGSE a alors dû refaire un premier rapport qui n'impliquait pas Assad pour en produire un autre qui l'impliquait. 

Il va de soi qu'une intervention américaine aurait obligé les Russes à réagir et qu’on ne sait pas jusqu'où serait alors allée l'escalade.

Si l’accusation contre de la France était fondée, il serait piquant de voir les héritiers de Jaurès tenter de déclencher une guerre mondiale.

D'autres attaques aux armes chimiques auraient eu lieu près d'Alep en 2013 et 2016 ; dans le premier cas, Carla Del Ponte, ancienne juge à la Cour pénale internationale, a accusé la rébellion, en faisant scandale car elle sortait de la doxa, pour ensuite nuancer ses propos.  Dans le second, Amnesty international a mis plutôt en cause l'armée gouvernementale. 

 

 - la bataille de Houla (10 juin 2012) : les télévisions ont montré   plus d'une centaine de cadavres de civils dont beaucoup d’enfants, apparemment tués dans la rue. Quelques jours après le massacre de Houla, les États Unis, la Grande Bretagne, la France et plusieurs autres pays occidentaux en tiraient prétexte pour   expulser les ambassadeurs syriens. Or selon la  Frankfurter Allgemeine Zeitung [3], le massacre de Houlà a en fait été commis par des sunnites hostiles à Assad et  la plus grande partie des victimes appartenait aux minorités chiites et alaouites favorables à Assad. Cette thèse n'est plus remise en cause.

 

Ainsi, sur trois griefs capitaux, le gouvernement syrien a été clairement visé par une manipulation. Cela seul laisse planer un doute sur d'autres accusations qui ont contribué à le discréditer.

 

- les débuts de la rébellion suscitent trois interrogations :  

 

a)  l'extension de la rébellion :   il semble qu'il n'y a guère eu de soulèvement à Damas, la capitale ; ce qui a été présenté par Al Jazzera à ce sujet serait un montage.  En tous les cas, les manifestions principales ont eu lieu en province, les premières à Deraa à la frontière de la Jordanie.

 

b)  la nature des manifestations : pour le régime, ce sont des infiltrations extérieures planifiées par l’OTAN et ses alliés, pour ceux-ci, il s'agit de révoltes populaires spontanées.

 

c) l'extension de la répression : de nombreuses   atrocités ont été rapportés, notamment à l'encontre d’enfants. Le régime dit que des provocateurs infiltrés ont attaqué la police qui a reposté.

Je n'ai pas la prétention voir clair dans les débuts de la guerre.

 

 

 -  Il est en revanche difficile d'adopter   la théorie, répandue notamment par Catherine Fourest  [4] , selon lesquelles il y aurait eu collusion entre le régime et les islamistes, Assad étant tenu pour complice des rebelles dans l'expansion du chaos en Syrie.  Thèse encore reprise peu de temps avant son départ par Laurent Fabius.  Pourquoi dit-on cela ? Parce qu'au début de la révolte, croyant bien faire en lâchant du lest, il libéra de nombreux prisonniers islamistes qui rejoignirent immédiatement la dissidence.

 

- Assad aurait régulièrement "bombardé son propre peuple". Une antienne répétée en toutes circonstances par Fabius.

Il est certain qu’il n’a pas de guerre civile sans qu’il y ait des victimes dans la population civile. S’il s'agit d'une intervention   occidentale, on parle de "dommage collatéraux », quand Erdogan bombarde les Kurdes de Turquie qui sont aussi « son propre peuple », on n'en parle guère, quand l'armée d'Assad ou ses appuis russes atteignent les populations civiles, on parle aussitôt de crimes de guerre.  

D'autre part les djihadistes ont bombardé régulièrement, notamment à Alep, les civils en dehors de la zone qu'ils contrôlaient : mais pas depuis des avions, avec de l'artillerie.

Les mêmes djihadistes ont eu très vite l'habitude de se mêler aux populations civiles, d'établer les QG dans les écoles, les hôpitaux. Cela est reconnu s'agissant de Mossoul que la coalition espère reprendre à Dach, cela ne l'est guère dans le cas de la Syrie.

Si la culture des armées syrienne et russe ne les incline peut-être pas à épargner spontanément les populations civiles, elles savaient qu'elles se trouvaient sous la surveillance étroite de l'opinion internationale et ont certainement pris, au moins dans la dernière phase de la guerre, quelques précautions pour limiter les frappes sur les civils.

 

- les crimes contre l'humanité dénoncés par l'Occident, spécialement la France, en décembre dans la reconquête d'Alep   relèvent de la même problématique.

 

- les tortures dans les prisons. La presse occidentale a publié une collection de photos qui auraient été prises par un transfuge du surnom de César montrant de milliers de personnes affreusement torturées. Fabius en a tiré prétexte pour poursuivre Assad pour crime contre l’humanité.  Ce transfuge demeure mystérieux   et on dit du côté de Damas qu’il s’agirait d’un agent qatari infiltré. Il est assez curieux que les séances de torture aient été systématiquement   photographiées. Ceci dit, il est sûr qu’il y a eu des tortures dans les prisons de la police secrète syrienne (moukhabarats), avant et pendant la guerre.  Plus qu’en Arabie saoudite, qu'en Algérie, qu’au Maroc ? Plus qu'il n'y en aurait en France si la menace islamiste y avait la même ampleur qu’elle a prise en Syrie ?

On se souvient aussi que le gouvernement algérien du FLN mena entre 1990 et 2000 une guerre très cruelle (150 000 morts au moins) pour réprimer ses propres islamistes, lesquels avaient pourtant, circonstance aggravante, gagné les élections. Le monde occidental qui s'acharne aujourd'hui contre le gouvernement baasiste syrien, détourna alors le regard.

 

- "Assad a massacré 400 000 personnes".  C'est encore ce que répétait Fabius. La guerre a fait à ce jour environ 310 000 morts et bien davantage de blessés, de déplacés.  Sur ce total, 100 000 au moins sont des soldats de l'armée du régime. On peut imaginer que compte tenu de leur inexpérience et de leur idéologie suicidaire, les djihadistes ont eu plus de victimes. Le reste, soit quelques dizaines de milliers sont des civils. Pour imputer l'ensemble à Assad, il faudrait qu'il soit responsable du déclenchement   de la guerre. Or les gouvernements   occidentaux qui ont, selon plusieurs témoignages, dont ceux de Robert Kennedy Jr ou de Roland Dumas, planifié cette guerre plusieurs années avant, le sont bien davantage. A la rigueur, peut-on lui reprocher de s'être défendu. Mais comment ne l'aurait-il pas fait face des adversaires dont certains annonçaient qu'ils allaient tuer les 2 millions d'alaouites et chasser 1,5 de chrétiens ?

 

Les Etats -Unis ont mis au point des techniques de communication qui permettent de diaboliser très vite un adversaire au point de le rendre complètement infréquentable.

Le Pentagone a dans son arsenal les « Psys » (Opérations psychologiques), lancées à travers les réseaux médiatiques du monde, ainsi définies : « Opérations planifiées pour influencer à travers des informations déterminées les émotions et motivations et donc le comportement de l’opinion publique, d’organisations et de gouvernements étrangers, afin d’induire ou renforcer des attitudes favorables aux objectifs préfixés ».  Dépendant de la Maison Blanche, le "Bureau of Public Diplomacy » dispose d’un budget énorme pour justifier les interventions américaines et jeter le discrédit sur les ennemis que Washington a décidé d'abattre.   Le résultat est que    la presse   occidentale est devenue, sur ce sujet comme sur d'autres    presque entièrement monolithique.

Il est significatif que le quasi-monopole de l'information sur la Syrie dans les médias occidentaux ait   été très vite conféré à un soi-disant Observatoire syrien des droits de l'homme ouvert à Coventry (Royaume-Uni) par un frère musulman anti-Assad Rami Abdel Rahmane, protégé du gouvernement britannique.   

Quand l’opinion occidentale est unanime à condamner Assad comme le dictateur le plus immonde de l'histoire, cela ne signifie, dans le monde actuel, rien d'autre que le fait que ses    ennemis contrôlent ladite opinion.  S'il était dans l'autre camp, il aurait une image tout à fait convenable.  R.H.

 

 

           

[1] Politico, 17 octobre 2016

[4] « Al-Assad lui-même a libéré les cadres islamistes de ses prisons pour faciliter la contagion islamiste et annihiler toute alternative entre lui et les djihadistes » Caroline Fourest.

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31 mars 2017 5 31 /03 /mars /2017 22:51

APRES LA PRISE DE FONCTIONS DE TRUMP :

 

ET MANTENANT NOUS POURRONS A NOUVEAU AIMER L’AMERIQUE !

http://www.atlantico.fr/decryptage/donald-trump-fin-ere-neo-conservateurs-vers-meilleure-relation-avec-amerique-roland-hureaux-2941868.html

 

Beaucoup sont depuis vingt-cinq ans très critiques de la politique étrangère des Etats-Unis menée sous l'égide de la pensée néoconservatrice. Ils se font en conséquence taxer régulièrement   d'antiaméricanisme de manière aussi mécanique que les critiques du communisme se faisaient autrefois taxer d'antisoviétisme par Georges Marchais.  

La doctrine néoconservatrice a inspiré aussi bien des démocrates comme Clinton, mari et femme, voire Obama, que des républicains comme Bush Jr. Nous n'incluons pas son père dans cette série dans la mesure où la première guerre du Golfe (1990), à la différence de la seconde (2003) répondait à une agression réelle et, quoique déjà discutable, était conforme à la Charte des Nations-Unies. Les principes de cette doctrine : l’Amérique a un modèle de civilisation supérieur et la mission de l 'imposer au reste du monde au besoin en changeant les régimes par la force. Par un étonnant paradoxe, sa mise en œuvre s’est traduite dans le Proche-Orient arabe par une alliance avec l'islamisme radical. Le bilan de cette politique : au moins sept guerres, des millions de morts (en incluant les effets de l'embargo imposé à l’Irak de 1991 à 2003).  

Rien à voir avec la période de la guerre froide où les Etats-Unis avaient généralement réagi à une agression du bloc communiste (Corée, Vietnam, Afghanistan), ni avec les rodomontades de Reagan qui a réussi à "gagner le guerre froide », sans jamais attaquer personne, en tous les cas de manière ouverte (sauf la minuscule Grenade).     

 

Le paramètre idéologique

 

On ne peut manquer d’établir un parallèle entre ce qui s'est passé aux Etats-Unis depuis 1990 et ce qu'il était advenu de la Russie au temps du communisme.

Nous ne reviendrons pas sur les méfaits de ce régime, d’abord pour les Russes, puis pour les peuples allogènes de l’URSS, ensuite pour ceux qui tombèrent sous le joug du communisme après 1945, notamment les pays d’Europe de l'Est. Que la Chine, devenue elle aussi communiste en 1949, ait ensuite pris ses distances avec l’Union soviétique n'empêche pas que l’idéologie marxiste y ait   été au moins aussi dévastatrice.

Toutefois l'horreur que pouvait inspirer le communisme ne pouvait empêcher que beaucoup d’entre nous aient aimé la civilisation russe : ses icônes, ses églises à bulbes, ses grands romanciers, ses grands musiciens, les films d'Eisenstein etc. C'est pourquoi la chute du communisme permet   de révérer à nouveau cette civilisation ; le nouveau régime, à   la tête de qui   se trouve Poutine, a certes des défauts mais   il met en avant la religion orthodoxe et la patrie russe, deux valeurs que la Russie actuelle ne cherche pas imposer au reste du monde.  Selon le mot du général de Gaulle, un pays bien gouverné doit être en paix à l'intérieur, respecté à l'extérieur (les deux étant liés).  C'est le programme qui semble être celui de la Russie actuelle, ce que ne veulent pas comprendre les néoconservateurs qui, avec un rare aveuglement, voient toujours le soviétisme derrière la Russie de Poutine.

La même chose peut être dite des Etats-Unis. On peut aimer l'héritage américain   bien qu'il soit moins riche que le russe, aimer l'épopée du Far West, le roman américain, le jazz, la qualité du cinéma de Hollywood, les grandes universités aimer l'enthousiasme avec lequel les Américains ont combattu à nos côtés au cours de la Première puis de la Seconde guerre mondiale, ainsi que leur résistance au communisme.  On peut en même temps trouver détestables les effets de l'idéologie néoconservatrice dans le monde :  une idéologie   moins dévastatrice   à l'intérieur que ne l'était le communisme en Russie, mais bien plus   à l’extérieur, si on additionne les dégâts des guerres engagées en son nom au cours des dernières années, y compris par Obama, Prix Nobel de la Paix. 

Trump, malgré son style grossier a   nettement pris ses distances avec   cette idéologie : il récuse le regime change, il accepte l'idée que d'autres parties du monde ne soient pas adaptées aux valeurs américaines, il refuse toute complaisance avec l'islamisme et se propose d'établir un partenariat pacifique avec   la Russie. Il se déclare   mu par la défense des intérêts des Etats-Unis et non par la volonté de répandre une idéologie. Comme la chute du rideau de fer en 1990 à l'Est, son élection annonce à l’Ouest un retour à la politique classique hors de toute idéologie. 

L'idéologie est une véritable pathologie de la raison politique : comme la Russie s'en est débarrassée en 1990, les Etats-Unis viennent de s'en débarrasser en 2016.

Que nous trouvions Donald Trump aimable ou pas n’est pas la question.  De même que la chute du communisme avait permis aux Russes et à ceux qui aiment la Russie de retrouver le goût   de ce pays, la   fin du néo-conservatisme - dont on mesurera bientôt toute la folie qu'il a représenté -  nous permet de redevenir les amis de Etats-Unis.

                                                                       Roland HUREAUX      

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31 mars 2017 5 31 /03 /mars /2017 22:50

PRIMAIRE DE GAUCHE : QUATRE GRANDS ADOLESCENTS

 

http://www.bvoltaire.fr/rolandhureaux/primaire-de-gauche-quatre-grands-adolescents,306597

 

J'ai un peu écouté le débat de la primaire de gauche, surtout pour mieux connaitre les candidats.

Comme beaucoup, j'ai surtout regardé les quatre qui comptent :  Hamon, Montebourg, Peillon et Valls. Ils m 'ont fait l’effet d’un quarteron d’adolescents attardés - Montebourg un peu moins. Ils jouent au grand   jeu du pouvoir, qui n'est pas un jeu.   Hollande   lui aussi avait un côté adolescent, sinon par le physique, on ne peut plus "normal », du moins par sa voix qui a encore un peu des accents d'étudiant revendicatif, comme Jospin.

Ce n'est pas avec cette touche   qu'on pose sa candidature au rôle de père de la nation, ce qu’est toujours un chef d'Etat, surtout par temps de crise.

Ce style est sans doute la marque du socialisme postmoderne.  Jaurès, Blum, Mollet, Mitterrand n'avaient pas l’air d’adolescents.

Il a un rapport étroit avec l'idéologie.   Le parti socialiste est certes moins subversif pour les riches qu'autrefois, s'il l'a jamais été, mais il est plus idéologique que jamais.  Il est depuis   longtemps dans la logique de Terra Nova : au diable les ouvriers et même les fonctionnaires, concentrons-nous sur les bobos, les minorités sexuelles et les immigrés (trois catégories qui ne font pas nécessairement bon ménage !). Cela sur la base de   l'idéologie libéral -libertaire et déconstructrice. Atlantistes puisque n'étant pas de vrais chefs, il leur est plus facile de   s'aligner sur les "alliés".

L'idéologie : une conception du monde ultra simplifiée et en décalage avec le réel   et par là avec le peuple : fondée sur un manichéisme sommaire, elle donne l'air intelligent à ceux qui ne le sont pas. Il n'est pas nécessaire de connaître les questions internationales pour   crier stupidement haro sur Poutine, ni la démographie pour se boucher le nez dès qu'on parle de famille.   On peut à l’inverse s’extasier devant une éolienne sans rien savoir sur l’énergie.  Dans une république idéologique, tout le monde peut avoir un avis sur tout - et même devenir ministre. Mais à l’inverse l’idéologie rend bête ceux qui ne l’étaient pas forcément au départ, par exemple les instigateurs de presque toutes les politiques actuelles :  le simplisme idéologique est rarement adaptée à la complexité du réel. On l'a vu avec la politique étrangère de Fabius.

Comme l'avait montré Jean Baechler, l'idéologie est une pensée pour adolescents immatures et   elle rend ceux qui s'y livrent immatures.

C'est peut-être ce qui explique l'impuissance de la gauche à se doter de vrais leaders, depuis Mitterrand qui était un cas à part.

 

L'assassinat ne leur fait pas peur

 

Autre remarque : aucun des candidats n’a dit non, quand on leur a demandé si, devenus présidents, ils ordonneraient des assassinats ciblés pour raison d'Etat.  Ils ont cru bon d'afficher là un cynisme qu'ils imaginent présidentiel. Les adolescents aiment à jouer les durs.

Moi qui ne suis pas de gauche, j'en suis choqué : contrairement à toutes les calomnies qui ont été déversées sur lui, le général de Gaulle qui avait une toute autre stature que ces petits chefs n’ont pas ordonné d'assassinats ciblés. Il a parfois refusé de gracier des condamnés à mort, mais ce n’est pas du tout   la même chose et il l'a toujours fait pour de motifs nobles quoi qu'on en dise.  L'attitude de ces candidats vis-à-vis des assassinats extrajudiciaires est particulièrement   choquante venant d’une mouvance politique qui avait fait de l'état de droit sa Bible et de la suppression de la peine de mort son cheval de bataille.

Paradoxe encore : ce parti qui met en avant avec tant d'insistance la parité hommes -femmes n'a pas trouvé une seule candidate qui tienne la route, Sylvia Pinel étant manifestement une figurante hors course, et d'ailleurs pas socialiste.

Enfin je noterai que trois des quatre candidats principaux (Montebourg, Hamon et Peillon) n'avaient pas voulu faire campagne pour le traité européen en 2005.

 

                                                           Roland HUREAUX

 

 

 

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31 mars 2017 5 31 /03 /mars /2017 22:49

IL FAUT PREPARER LES REFUGIES A RECONSTRUIRE  LEUR PAYS   

 

http://www.zeit-fragen.ch/fr/editions/2017/no-5-20-fevrier-2017/il-faut-preparer-les-refugies-a-reconstruire-leur-pays.html

 

On sait combien il est difficile au  gouvernement  français   de  faire admettre aux maires et aux populations  l'installation de migrants venus de la "jungle" de Calais d'autant qu'on ne sait à quoi les occuper.  Hollande a promis à Angela  Merkel d'accueillir 28 000 réfugiés arrivés  en Allemagne et beaucoup  se trouvent sur le territoire dans des conditions  plus ou moins régulières.

Nous parlons ici des migrants de Syrie , mais aussi d'Irak ou d'Afghanistan qui ont droit au statut   de réfugié.

Un réfugié, en principe, n'est pas parti de son plein gré. Il souhaite , peut-on supposer, rentrer dans son pays dès que les  conditions le permettront.

 

Ramener au plus vite la paix

 

La première  chose à faire pour  régler  le problème des réfugiés est donc de  ramener  la paix  dans les pays  en guerre.

Faut-il rappeler  que ce n'était évidemment  pas la priorité des dirigeants occidentaux au cours de dernières semaines ?  Nous savons  maintenait que des militaires  américains, français, anglais  ou    venus  de pays de la région, ,  encadraient les djihadistes d'Al Nosra (Al Qaida) résistant dans Alep-Est à la reconquête du quartier par les troupes gouvernementales  . Comme personne n'espérait , si ne souhaitait d'ailleurs,   que les djihadistes prennent le pouvoir  à Damas , il faut appeler la  chose par son  nom : l'action des dirigeants  occidentaux tendait , tend peut-être toujours,  à prolonger la guerre, pour  mettre en difficulté la Russie mais aussi par refus de reconnaître un immense échec idéologique.  

Même si la prise d'Alep Est constitue un pas important vers la  reprise du contrôle total du  territoire syrien par l'autorité légitime, il reste de nombreuses poches de résistance djihadistes dans le  pays, dont celle de Deir-es-Zor où l'intervention  de l'armée américaine a permis à Daech de reconquérir le terrain perdu.  Ne rien faire qui empêche  que ces poches  soient rapidement réduites est, comme le  rappelait  récemment Jean-Luc Mélenchon, le seul moyen d'accélérer  le retour à la  paix.

En Irak, les rôles sont renversés puisque  les Américains qui aident Daech en Syrie , le combattent en Irak . Ils ne semblent pas pour autant pressés de reprendre Mossoul.  Peut-être  cela  changera-t-il  avec Trump ?

 

Lever les sanctions

 

Aussi  urgente  que le retour de la paix est la levée des sanctions internationales , en particulier celles de l'Union européenne, qui frappent la Syrie.  Sanctions  inutiles:  elles visaient à faire plier le régime et n'y sont pas arrivées . Sanctions inhumaines: comme toujours, ce ne sont pas les hiérarques  du régime mais les populations    qui  souffrent de l'embargo : il frappe  non seulement les produits de première nécessité , en particulier alimentaires, mais  aussi les produits pharmaceutiques nécessaires pour soigner les enfants affaiblis par les privations ou les  blessés de guerre . Il a terriblement  ralenti   l'économie syrienne. Plus encore que la guerre elle-même, qui   touche  moins depuis quelque temps les régions les  plus peuplées (en dehors d'Alep), ce sont les sanctions qui sont la cause de l'exode de près d'un million de Syriens  vers l'Europe.   La normalisation du pays passe par  le levée rapide de ces sanctions. La mécanique implacable de Bruxelles dont est victime le peuple syrien saura-t- elle se faire  souple et humaine  ?  Il faut l'espérer.

La  levée des sanctions permettra  la reprise des liaisons   aériennes entre Damas et l'Europe. Les nombreux réfugiés qui se trouvent en Allemagne ou ailleurs et qui ont aujourd'hui le mal du pays rentreront  dès   que seront organisés des  vols à bon marché. C'est en particulier le cas des  lycéens de Damas  et de sa région ,  sont partis en masse sur un mouvement d'emportement collectif,  et dont beaucoup  , se sentant de plus en plus mal accueillis,  souhaitent   revoir leur famille.

 

Préparer le retour au pays

 

Enfin, les destructions de guerre ont été considérables. Beaucoup de villes et de villages  de   Syrie, d'Irak et d 'Afghanistan sont à reconstruire.  Il y faudra des chefs d'entreprises, des architectes, des contremaîtres, des maçons. Il  y faudra des crédits  internationaux pour un chantier qui devrait durer  au moins dix ans. Qu'attendent les gouvernements occidentaux pour faire  suivre  une formation professionnelle  aux  réfugiés qui se trouvent en Europe  sans rien faire et qui pourront ainsi   reconstruire  leur pays ? En France  un organisme come l'AFPA a une solide expérience de formation  aux métiers du  bâtiment.  L'Union  européenne  a été jusqu' ici particulièrement inhumaine,  les Etats qui la composent ayant armé   les djihadistes et elle-même  ayant imposé   des sanctions très cruelles  au peuple de Syrie  : elle  doit   maintenait se rattraper et faire   preuve de  générosité , en envisageant par exemple un vaste  plan Marshall pour le Proche-Orient et l'Afghanistan. C'est le moins que nous leur devions.

 

                                                                       Roland HUREAUX

 

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31 mars 2017 5 31 /03 /mars /2017 22:48

LE DERAPAGE, ARME ELECTORALE

 

http://www.causeur.fr/trump-derapages-investiture-etats-unis-42225.html/comment-page-1

 

Même ceux qui ont bien accueilli l’élection de Donald Trump, ou qui ont apprécié la manière dont il constitue son équipe, déplorent la grossièreté et la brutalité de ses propos de campagne, sur les femmes, sur les Latinos, sur les musulmans, voire sur les noirs.   Racisme, machisme, islamophobie : le nouveau président a tout pour plaire !

Si Trump s’avère un bon président, ce sera donc malgré ses foucades qui ont fait scandale.

Mais comment ne pas voir   que, sans ces foucades, il n'aurait pas été président du tout ?  

Excellent acteur, il a su donner l'impression que ses éclats étaient les débordements involontaires d'un tempérament incontrôlé. Mais il s’agissait là d'une illusion : tout cela a été bien évidemment fait exprès. Non qu'il ait été complètement insincère. Mais il ne se "lâchait » que selon un plan bien établi. La preuve :  depuis qu'il est élu, alors même qu’il tient de nombreuses réunions de remerciements, on n'entend plus rien de ce genre.

Trump a été ainsi le pionnier d'un nouveau mode de communication par le dérapage. Chaque fois, ses dérapages ont a suscité des concerts d'indignation d'un bout l’autre du pays. Mais au moins le message n’est pas passé inaperçu. Il n'était pas pour autant à prendre à la lettre : "j'interdirai l'entrée des musulmans sur le territoire des Etats-Unis » signifiait "je serai ferme contre le terrorisme". Dans le bruit de fond de l'univers médiatique, s'il n 'avait pas exagéré, personne ne l'aurait entendu. Double résultat : ceux qui pensaient comme lui   recevaient le message 5/5 ;   les médias dominants, quant à eux, donnaient par leur indignation même l’écho maximum à son message.

Cela, à vrai dire, n'est pas tout à fait nouveau. Volontairement ou pas, Sarkozy s'était déjà essayé à ce mode de communication : sa déclaration contre les "racailles" ou sa promesse de passer les banlieues au "karcher » qui avaient soulevé l'indignation, n'avaient pas fait peu pour le faire élire en 2007. Devenu président, il laissait de temps en temps Nadine Morano ou d'autres lâcher quelques énormités qui occupaient quelque temps le devant de la scène. Mais cette veine était épuisée lors de la primaire de droite faute qu’il ait eu encore quelque crédibilité.   

Le récent dérapage de Peillon, comparant aux porteurs de l’étoile jaune les musulmans de France, loin d'être involontaire, visait à amadouer ces derniers que ses origines juives risquaient de lui aliéner. 

 

Trump fait de la transgression un système

 

Mais seul Trump a utilisé de manière systématique cette méthode, au point d’occuper plusieurs fois par semaine le devant de la scène médiatique. Presque toute sa stratégie de communication a été fondée sur les transgressions.

Cela a certes été noté par des observateurs, mais on n'a pas dit en revanche que cette stratégie de transgression n'a été rendue possible que par l'emprise considérable prise au fil des ans par l'idéologie du "politiquement correct". Une emprise plus forte encore aux Etats-Unis que chez nous et qui a abouti à multiplier sur toute une série de sujets les tabous, les interdits, les lignes rouges.

Des interdits gardés surtout par les grands médias, qui lui étaient presque tous hostiles, mais encore par les entreprises ou les universités qui excluent de plus en plus    ceux qui s'écartent de la pensée unique. Malgré le 1er amendement, la judiciarisation de la police de la pensée s’est elle aussi développée.  Au fil des ans, les sociétés occidentales ont instauré un monolithisme qui n'aura bientôt plus rien à envier à celui des anciennes sociétés totalitaires.

Ce monolithisme est de nature idéologique. Il concerne toute une série de champs : la question raciale, la question religieuse, la question dite des "orientations sexuelles », bientôt celle du réchauffement climatique, où seules   sont admises les opinions dominantes. Ceux qui ne la suivent pas n’ont aune chance qu’on leur propose un dialogue argumenté : ils ne peuvent attendre que l'excommunication violente, l’injure sous la forme de la reductio ad hitlerum.

De plus en plus, tous les champs de l'action politique se trouvent envahis par une forme ou une autre de pensée unique. Même la question du réchauffement climatique : Trump a aussi fait scandale en le mettant en doute.

Le résultat de cette pétrification idéologique des discours est en premier lieu que   ceux qui respectent les codes imposés, deviennent ennuyeux. Ennuyeux parce qu'ils   ne tiendront que des propos convenus et se cantonneront au moralisme ambiant, ennuyeux parce que le public sentira confusément qu'en se montrant si respectueux des codes établis, ils font   preuve d'un   caractère terne et conformiste, voire d’un esprit timoré.   La peur est toujours disqualifiant pour qui veut exercer une forme ou une autre de leadership. Il en est de même de la langue de bois, signe de soumission. L'empire du politiquement correct est une des raisons du discrédit actuel des classes dirigeantes occidentales.

Ce constat a son revers : tous ceux qui auront l’audace de bousculer les tabous se distinguent de la grisaille. Ils n'auront rien à gagner à y mettre les formes :  par son simple contenu, la transgression, en matière de racisme, de sexisme, de climat, garantit le scandale. Autant donc en rajouter si le but est de tirer parti du bruit qui en résultera. De toute façon, la réaction sera violente.  Inutile de prendre des gants.   

La transgression n'a pas seulement pour effet de faire du bruit : elle fait apparaitre le candidat comme l'homme qui ose dire tout fort ce que beaucoup pensent tout bas ou n'osent même plus le penser du tout par un effet de refoulement. Le transgresseur apparait ainsi comme un leader et, ce faisant, comme un libérateur, pour le meilleur mais aussi parfois pour le pire. Pour le meilleur s'agissant de réhabiliter une parole libre, nécessaire à toute démocratie, pour le pire s'agissant le cas échéant du contenu exprimé.

Reste à savoir si Trump fera des émules. En Europe, la France est un des rares pays qui élit au suffrage direct son dirigeant suprême, de par la volonté du général de Gaulle[1]. L’actuelle campagne présidentielle ne semble pas montrer une dérive de ce type. Parce que la pression du politiquement correct serait moins grande en France ? Ce n'est pas sûr.  Il est vrai que Marine Le Pen se pose comme Trump en dehors de l’establishment mais à la différence de ce denier, elle semble avoir du mal à l’assumer. Elle hérite certes du bénéfice des transgressions de son père mais a le souci d’en gommer le souvenir pour regagner de la respectabilité. Les autres candidats, tous produits du sérail à   la différence de Trump, restent pour le moment dans le genre lisse. Peut-être faudra-t-il attendre une nouvelle génération pour que soit entièrement tirée la leçon de l'élection de Trump, à moins qu'un   relâchement de la pression idéologique et donc de la censure ne ramène la démocratie sur des voies plus civilisées.   

                                                           Roland HUREAUX    

 

 

[1] D'autres pays européens élisent au suffrage universel le chef de l'Etat : Finlande, Autriche, Pologne, Portugal, mais sans leur conférer des pouvoirs importants comme en France.

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31 mars 2017 5 31 /03 /mars /2017 22:47

SI CLINTON GAGNE, JE FERAI CONSTRUIRE UN ABRI ANTIATOMIQUE

 

http://www.bvoltaire.fr/rolandhureaux/si-clinton-gagne-je-ferai-construire-un-abri-antiatomique,292115

 

Unanime, la presse annonce la défaite de Trump.

Je n'en suis pas si sûr.  Malgré la campagne frénétique que mènent contre lui la plupart des médias et des institutions américaines, il peut encore gagner.   Et heureusement

Car si c’est Clinton qui l’emporte, il faudra vite se mettre   aux abris.

Si vous avez un point de chute quelque part à la campagne allez-y et construisez dans le jardin un abri antiatomique.

Ce n’est pas moi, c’est un ancien collaborateur de Reagan, Paul Craig Roberts qui écrit : " Si Hillary est installée par l’oligarchie (notez la nuance, comme l'ancien président Carter, l'auteur pense que les Etats-Unis ne sont plus une démocratie), la guerre avec la Russie et la Chine nous tombera dessus ".

Il suffit de voir les positions prises au cours de vingt dernières années par la candidate démocrate pour craindre le pire :    comme épouse d'un président hésitant, comme sénatrice puis comme secrétaire d’Etat, elle a toujours    poussé à la guerre : Yougoslavie, Afghanistan, Irak, Libye, Syrie, Yenne, Ukraine.

Les Etats-Unis ont mis le feu au cours de cette période à au moins sept pays. Hillary Clinton a toujours été du côté des  warmongers . Superfauconne !

Quand elle a appris l’assassinat de Kadhafi, elle sauta de joie sur sa chaise en criant d'un air carnassier "Je suis venue, j’ai vu, il est mort ».  Indécent.

Elle a soutenu et peut-être provoqué les "printemps arabes " qui se sont tous mal finis. Les frères musulmans   Erdogan et Morsi étaient ses préférés.  Elle rêve encore de renverser le maréchal Sissi qui a remis l’Egypte en ordre, pour y rétablir la démocratie.  De beaux dégâts en perspective.

Elle ne fait que suivre par là l’idéologie néoconservatrice qui, comme le communisme avait pris "possession » autrefois de la Russie, a depuis près d'une génération pris "possession » des classes dirigeantes nord-américaines. Ses tenants s’estiment fondés à établir par la force la démocratie (ou ce qu'ils appellent ainsi) dans le monde entier. Ils ont déjà dans le collimateur l'Algérie et certains rêvent même de rouvrir les hostilités avec l'Iran.

Et naturellement ils visent aussi   la Russie :  Hilary Clinton n’a pas hésité à comparer Poutine à Hitler, ce qui est   insensé mais en dit long sur ses dispositions à son égard.

Avant même l'élection, les relations entre les deux puissances sont aujourd’hui tendues à l'extrême : un incident entre elles peut survenir à tout moment. Que sera-ce si elle devient présidente ?

Il est peu probable qu'elle se résigne à la victoire des Russes sur les islamistes (soutenus en sous-main par les Etats-Unis, y compris Daesh) en Syrie. C'est dire que la guerre mondiale serait avec elle plus que probable.

Dans l'establishment    américain, qui craint    par-dessus tout la victoire de Trump et est sans doute prêt à tout pour l’empêcher, il se trouve des gens comme   Ashton Carter, le secrétaire à la Défense d’Obama, prix Nobel de la Paix pour dire que   les Etats-Unis se réservent le droit d’effectuer une « première frappe nucléaire ».

C’est le principal mérite de Trump que d’avoir dit son hostilité à cette idée de première frappe. On peut lui reprocher bien des choses mais dans un monde devenu éminemment dangereux, c’est cela qui importe. Et cette   prise de positon de Trump est hautement morale.     

 

                                                                  Roland HUR

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