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Roland HUREAUX

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31 mars 2017 5 31 /03 /mars /2017 20:51

LE LIBRE FLOTTEMENT DES MONNAIES PEUT REMPLACER LES  PROTECTIONS DOUANIERES

 

Le débat sur le protectionnisme a été rouvert en Europe par la crise , singulièrement la  crise de l'industrie européenne, laquelle perd chaque jour un peu plus de sa substance.

Deux grands pays s'y opposent : l'Allemagne et la Grande-Bretagne, pour des raisons différentes.

L'Allemagne parce que son potentiel industriel et surtout sa capacité à contenir la hausse des coûts de production, combinés avec  la facilité pour sous-traiter dans les pays à bas salaire de l'Est,  lui permettent pour le moment de résister, mieux que d'autres,  au choc de la concurrence  asiatique . Même si certaines de ses branches industrielles, comme la sidérurgie, dépérissent aussi .

Les Allemands se gaussent volontiers  des tendances protectionnistes des Français, oubliant qu'au XIXe siècle le grand théoricien du protectionnisme, Friedrich List était allemand et celui du libre-échange, Frédéric Bastiat, français ! L'industrie allemande n'aurait pu connaitre l'essor qui fut le sien au temps de Bismarck sans une solide protection douanière.

Les Anglais, eux ont  une vraie tradition libérale et s'opposent au protectionnisme par doctrine; mais il faut savoir que  le flottement de la livre leur  permet de se défendre mieux que les autres de la concurrence.

Le débat sur le protectionnisme ne serait sans doute pas revenu à la surface sans la contrainte de l'euro: presque tous les pays de la zone euro ( sauf l'Allemagne) n'affrontent pas la concurrence internationale dans des conditions de marché normales du fait que  la plupart doivent subir le handicap  d' une monnaie surévaluée, un euro fort qui est sans doute à la mesure  de l'Allemagne mais pas à la leur. Il est donc vain de les taxer de "frilosité" car ce dont ils pâtissent, ce ne sont pas à proprement parler de l'ouverture internationale et  des  lois du marché  mais d'une situation monétaire artificielle qui précisément échappe aux lois du marché.

En effet, le libre-échange mondial serait beaucoup plus facile à supporter si  tous les pays pouvaient le faire en ajustant en permanence ou à intervalles réguliers, leur taux de change  à leur compétitivité réelle, cette compétitivité ne résultant pas seulement de leur  potentiel industriel et de la qualification  de leur  main d 'œuvre mais aussi de leur capacité à contenir l'inflation  intérieure.

 

Rétablir l'  équilibre extérieur est toujours possible si la variable monétaire est maîtrisée

 

Dans quelque situation qu'un pays se trouve sur le plan  de ses échanges extérieurs, un changement de parité  pourra toujours lui permettre de rétablir l'équilibre : une réévaluation de sa monnaie s'il est excédentaire, une dévaluation s'il est déficitaire.

Et de fait, le meilleur taux de change est sans doute celui qui  permet tout simplement à chaque pays  d'avoir des comptes extérieurs en équilibre

Ces ajustements peuvent certes être douloureux: une dévaluation renchérit le coût des produits importés, en particulier le pétrole, et donc , à très court terme, diminuera le pouvoir d'achat. Mais il ne s'agit là que d'une opération vérité : une monnaie surévaluée  donne toujours aux habitants d'un pays une rente imméritée - ayant pour contrepartie le ralentissement de la croissance et le chômage. La dévaluation, dans ce cas, n'est qu'un retour  au réel, douloureux mais nécessaire. Et d'autant plus facile à supporter qu'elle se traduira presque toujours  à brève échéance ( six mois  environ) par une relance de l'économie  .

C'est dire que si tous les pays retrouvaient une pleine liberté de fixer leurs taux de change ( nous réservons le cas particulier des Etats-Unis qui ne  sont pas tenus, du fait du rôle particulier  du  dollar, d'équilibrer leurs échanges extérieurs ) , les protections douanières ne seraient pas nécessaires, en tous les cas pour maintenir les grands équilibres. Un glissement de la monnaie  leur permettrait de vendre moins cher sur le marché mondial et donc à la fois de vendre plus et de maintenir certains secteurs menacés, au moins ceux qui se trouvent  proches du seuil de compétitivité.

Il est fréquent que ceux qui se plaignent du tout-marché, ont  en réalité, si l'on regarde bien,  à se plaindre en réalité des  entorses au marché. La logique du marché exige souvent, pour être pleinement efficace,  d' être poussée jusqu'au bout. Les Français trouveraient   la mondialisation plus "heureuse" si le taux de change de leur monnaie  (qui ne serait donc plus l'euro) était fixé , lui aussi, par le marché , ce qui n'est pas le cas , on le sait, dans le cadre contraint de l 'euro.

Si le protectionnisme n'est pas nécessaire à l'équilibre des échanges extérieurs, il peut  l'être en revanche à un Etat  qui voudrait  protéger certains secteurs stratégiques.

Le rééquilibrage des échanges au moyen  d'une dévaluation peut se faire par le dopage de certaines productions de faible niveau technique ( par exemple les produits agricoles ). Mais il  n'est pas incompatible, en théorie,   avec le sacrifice de  certains secteurs   prometteurs mais insuffisamment  développés  qui , même avec une monnaie dévaluée,  ne sont toujours pas compétitifs. Il est alors normal que la puissance publique, par souci du long terme,   veuille protéger ceux-ci  par des mesures adaptées : droits de douane ou contingents .

Un autre motif de protection particulière, dont il faut bien dire qu'il n'a hélas pas beaucoup préoccupé nos gouvernants depuis trente ans, est le  maintien de certains savoir-faire qui risquent de disparaître si les branches concernées  s'évanouissent complètement. Il ne faut pas insulter l'avenir en  passant trop vite à la trappe  ces savoirs. Il n'  aurait pas été inutile par exemple de conserver , comme témoin du passé et précaution  pour l'avenir, une ou deux mines de charbons sur le territoire français. De même qu'on ne saurait  imaginer que la France abandonne complètement toute  activité sidérurgique, ce qui est aujourd'hui un risque plus que sérieux.

Nous n'ignorons pas que les règles  tant de l'OMC que du Conseil de la concurrence de l'Union européenne s'opposent à de telles  politiques sectorielles et même à toute  politique industrielle, ce qui est regrettable.

Il y a  encore d'autres  raisons de faire quelques  exceptions au libre-échange  , par souci d'aménagement du territoire et d'équilibre régional. Malheureusement, la pression internationale et l'impéritie de nos gouvernements  tend à ce que ces préoccupations soient aujourd'hui perdues de vue  au point que la France, vieux pays agricole s'il en est,  pourrait un jour prochain n'avoir plus d'agriculteurs.

Le libre-échange et la protection ne  sauraient, quoi qu'il arrive, être tenus pour des absolus. Ce sont les touches d'un clavier sur lequel chaque pays doit  jouer la partition qui lui semble la plus propice à son intérêt national, à court terme mais aussi à long terme.

 

                                                                                   Roland HUREAUX

 

                                                 

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8 janvier 2017 7 08 /01 /janvier /2017 15:33

Qui s'en souvient ? La presse internationale avait évoqué à la rentrée 2015 qu'Angela Merkel puisse recevoir le Prix Nobel de la Paix en récompense de sa politique d'accueil, jugée aussi audacieuse que généreuse, des réfugiés du Proche-Orient. 

Cela ne s'est pas fait, et heureusement.

Le magazine Time l'avait néanmoins désignée comme femme de l'année.

Après l'horrible attentat terroriste de Berlin , tout le monde a déchanté, la chancelière en tête : ses jours à la tête de l' Allemagne paraissent désormais comptés. Déjà les évènement de Cologne du 31 décembre 2015 et quelques attentats commis depuis lors avaient montré les risques de cette politique d'accueil.

Dès le début de 2016, la roi Abdallah de Jordanie avait révélé au Sénat américain que des terroristes avaient été infiltrés dans les flux de réfugiés.

Certains tiendront la chancelière pour une bonne âme abusée. Il faut pourtant y regarder à deux fois avant de lui accorder les indulgences . Il est vrai que parmi la cinquantaine de militaires Occidentaux ( dont 22 Français) qui conseillaient les djihadistes à Alep- Est ( de la mouvance d'Al Qaida) il ne semble pas y avoir eu d'Allemands. Mais l'Allemagne de Merkel n'en avait pas moins été à la manœuvre dès la fin des années 2000 pour introduire le chaos en Syrie : action de ses services secrets, fourniture d'armes et d'entrainement ( sur le territoire turc ) aux djihadistes . Tout cela dans le cadre du plan de l'OTAN destiné à renverser le président Assad par djihadistes interposés. Plan qui a , grâce à l'intervention russe, a lamentablement échoué mais a tout de même réussi à plonger la Syrie dans une guerre qui a fait 300 000 morts et 8 millions de déplacés.

Les centaines de milliers de réfugiés qui ont tenté de gagner l'Europe à partir de l'été 2015 auraient pu prendra l'avion à Ankara ou Istamboul pour Berlin : cela leur aurait coûté 170€. Au lieu de cela, la chancelière, qui avait pourtant fait savoir quelle était prête à les accueillir, les a laissés traverser la mer Egée puis prendre la longue route des Balkans où chacun a été dépouillé par les passeurs de quelques milliers d'euros.

Même si Angela Merkel avait été naïve, loin d'être une circonstance atténuante, c'était là une faute majeure pour une femme à ce niveau de responsbilité. La naïveté est permise aux gens simples, elle ne l'est pas à la tête d'un Etat . Il n'était pas difficile de deviner que l'irruption d'un million de réfugiés ( ou "migrants") dans un pays comme l'Allemagne créerait d' immenses difficultés. Il fallait un haut degré d'irresponsabilité pour ne pas l'avoir prévu.

Pourquoi cette irresponsabilité ? En attendant que la chancelière écrive ses mémoires, ce qu'elle aura très vite le temps de faire, on n'a pas le dernier mot sur ce sujet. Pression du patronat qui avait besoin de main d'œuvre ? Mais est-il sérieux de raisonner en ces matières seulement en chiffres , sans prendre en compte les facteurs humains et culturels ? Pression d'Obama, voire des réseaux Soros ( et sa Foundation for an Open Society dont une des nombreuses filiales porte le nom de No Borders ) ? Pression et chantage d'Erdogan qui fut l'organisateur principal de l'exode de l'été 2015 ?

Mais peut-être ne faut-il pas oublier la psychologie d'Angela Merkel, qui mélangeant la générosité privée avec son devoir d'Etat, a cru faire œuvre pie en ouvrant, avec l'approbation de toutes les Eglises, toutes grandes les portes de l'Allemagne?

Pendant des siècles les princes chrétiens ont su qu'ils étaient d'abord comptables du maintien de la paix civile chez eux et que, face à cet immense devoir, les considérations de charité devaient être laissées à la sphère privée. Mais cette leçon est aujourd'hui oubliée. Nous vivons depuis longtemps sous le règne de ce que Chesterton appelait "les idées chrétiennes devenues folles", responsables de si grands malheurs. Emmanuel Todd , lui, parle des chrétiens "zombies", ce qui ne veut pas dire de mauvais chrétiens mais des gens issus du christianisme , aujourd'hui sortis de l' Eglise ( et souvent très hostiles à celle-ci) mais qui en conservent une vague sensiblerie, laquelle s'incarne en France dans la parti socialiste. Une sensiblerie idéologique qui obéit à ce Hayek appelle la loi des "effets contraires au but poursuivi ". Une étude reste à faire sur l'importance de ce phénomène dans la société contemporaine et sur les ravages qu'il y fait, jusqu'à mettre en danger la paix en Europe.

 

Roland HUREAUX

 

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8 janvier 2017 7 08 /01 /janvier /2017 15:11

 

Les pas-de-clercs désolants de la diplomatie de Hollande, qui lui ont attiré un pied-de-nez humiliant de Poutine quand il a renoncé à venir à Paris inaugurer le centre orthodoxe de l'Alma , montrent l'urgence d'une nouvelle politique étrangère pour notre pays.

Entre un suivisme servile et dangereux vis à vis des Etats-Unis , un droit-de-l'hommisme naïf et moralisant et un soutien criminel aux islamistes de Syrie, notre diplomatie est devenue illisible. Les amis de la France déplorent aujourd'hui son absence de la scène internationale sauf quand il s'agir de jeter d' huile sur le feu des conflits du Proche-Orient .

Les fondements d'une nouvelle politique étrangère doivent être les suivants :

- la France respecte tous les peuples et donc les gouvernements qui les représentent . Elle doit, conformément à l'article 2-7 de la Charte des Nations-Unies, s'abstenir "d'intervenir dans les affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un Etat ", comme elle n'a , hélas, cessé de faire au cours des dernières année dans le sillage de l'OTAN;

- elle ne doit à l'inverse pas permettre d'ingérence dans ses propres affaires , et donc retrouver la plénitude de son indépendance. Loin de nous isoler, l'indépendance doit nous permettre d' élargir les horizons de notre diplomatie dans toutes les directions sans exclusive;

- la diplomatie française doit être dictée par le seul souci de l'intérêt national . Nous n'avons pas vocation à répandre dans le monde notre conception des droits de l'homme . Défendre l'intérêt national est un devoir vis à vis de nos concitoyens les moins aptes à se défendre eux-mêmes dans la jungle du mondialisme. Qu'une classe politique hors sol ait perdu cette mission multiséculaire de vue est la cause principale de son discrédit. Au demeurant, rien de plus pacifique que la défense des intérêts nationaux, qui permet toujours de trouver des compromis .

La France est membre de l'Alliance atlantique depuis 1949 ; elle doit le rester. Il s'agit, rappelons-le, d'une alliance défensive et non offensive. Ceci posé, notre participation au dispositif intégré ( OTAN) peut faire l'objet d'aménagements.

Quel que soit le devenir des institutions de Bruxelles, aujourd'hui en crise, la coopération politique européenne est plus nécessaire que jamais. Elle ne saurait toutefois amener la France à se lier les mains à l'égard de tiers. La levée des sanctions absurdes prises à l'encontre de la Russie doit être immédiate.

Au moment où une inquiétante tension règne entre les Etats-Unis et la Russie, la France n'a à faire allégeance à aucune de ces puissances. Mais un rééquilibrage est nécessaire en direction de la Russie , vieille amie de la France d'autant que l'Amérique de Trump, va prendre les devants dans le rapprochement avec Moscou, risquant ainsi de nous laisser au bord de la route . L'Europe va de l'Atlantique à l'Oural: il serait très dangereux pour la paix que le prochain président de la République française continue de cultiver une hostilité de principe envers la Russie, maintenant débarrassée de l'idéologie communiste . De même les relations avec les pays d'Europe orientale historiquement proches de la France comme la Pologne, la Hongrie, la Roumanie , la Serbie, la Grèce doivent être renforcées.

La priorité du partenariat franco-allemand ne saurait faire oublier les liens anciens , forgés dans le combat, avec le Royaume-Uni, ami comme nous de la liberté, ni avec nos "sœurs latines": Italie, Espagne , Portugal .

De l'autre côté de la Méditerranée , l'Algérie , le Maroc (et aussi la Tunisie ) sont des partenaires historiques incontournables. Leurs stabilité est pour la France une nécessité stratégique. La coopération avec ces pays doit s'approfondir , cela dans l'égalité et donc en excluant définitivement toute forme de repentance ou d'acrimonie dégradantes pour les deux parties.

La Françafrique , une fois écarté le souvenir d'un affairisme douteux, n'est rien dont nous ayons à avoir honte. Il est à l'honneur de la France d'avoir conservé , plus que d'autres puissances coloniales, des liens privilégiés avec ses anciens territoires . Dans un continent appelé à peser de plus en plus, ces liens sont une carte qu'elle doit jouer à plein . Les pays d'Afrique ont leurs problèmes mais nous devons cesser de leur faire la morale. Le contrôle nécessaire de l'immigration, qu'ils comprennent , doit se faire en partenariat avec eux, dans un esprit de codéveloppement.

La francophonie constitue une chance exceptionnelle qu'il convient d'exploiter . Soyons fiers de notre langue . Il est inacceptable qu'un représentant de la France dans une organisation internationale dont le français est langue officielle puisse s'y exprimer autrement qu'en français. Il faut aussi renouer sans tarder avec d'autres amis historiques de la France comme l'Egypte , l'Ethiopie, l'Iran, le Liban . La France a longtemps rayonné en Amérique latine : elle doit y reprendre toute sa place .

Hélas nos gouvernements, tant "républicain" que socialiste, se sont attachés au cours des dernières années , de manière criminelle, à attiser les conflits au Proche-Orient. Le rôle de la France doit être, par une diplomatie équilibrée, d'être dans cette région "artisan de paix" . La sécurité d'Israël , aspiration légitime, n'est pas incompatible avec le respect de la dignité et la stabilité des pays arabes environnants. Il est urgent de renouer les liens avec le gouvernement légal de la Syrie , dont une diplomatie incompétente avait prédit la chute mais qui est en train de reprendre le contrôle de la totalité de son territoire et de réparer des erreurs dramatiques qui ont contribué, tant à décimer les communautés chrétiennes qu'à alimenter chez nous le terrorisme.

L'immense Extrême-Orient n'est pas notre premier cercle . C'est en un sens une chance : la France pourra , sans prendre parti dans les conflits régionaux, développer ses relations , notamment commerciales, avec les géants de la région : Chine, Inde, Japon. Mais ses liens particuliers avec les pays de l'ancienne Indochine sont une carte à jouer. De même sa présence en Océanie , indispensable pour conserver la deuxième zone économique du monde, une zone à valoriser par une grand politique de la mer.

L'indépendance, loin d'être un repli sur soi, doit nous ouvrir au contraire à de nouveaux partenariats . Elle seule peut nous mettre à l'abri des orages qui montent à l'horizon . Elle seule permettra à la France de travailler efficacement à la paix du monde.

 

Roland HUREAUX

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7 janvier 2017 6 07 /01 /janvier /2017 14:44

 

http://www.bvoltaire.fr/rolandhureaux/obama-prix-nobel-de-la-paix-na-plus-que-17-jours-pour-declencher-la-guerre,304072Obama : certains l' appellent par dérision le Prix Nobel de la guerre.

 

C'est exagéré : il a certes appuyé sur le bouton sans lequel les guerres de Libye et de Syrie - et peut-être du Yemen - n'auraient pas eu lieu.

Mais il a refusé de céder aux pressions d'une partie de son gouvernement et de ses alliés ( le France de Hollande et Fabius en première ligne ) qui voulaient bombarder la Syrie sans mandat de l'ONU en août 2013 à la suite de l'attaque chimique de la Ghouta ( banlieue de Damas). S'il avait là aussi appuyé sur le bouton, les Russes auraient riposté et on ne sait jusqu'où serait allée l'escalade . On peut supposer qu' il savait avant tout le monde, que ces attaques étaient une provocation destinée à mettre en cause Assad et non l'œuvre d' Assad lui-même[1].

De même le traité avec l'Iran de juillet 2015 est à mettra à son actif , tout comme la reprise des relations avec Cuba.

Sa fin de mandat est par contre moins bien inspirée : la décision d'expulser 35 diplomates russes ( une décision lourde s'agissant des deux "grands") , soi-disant en représailles d'une interférence numérique de la Russie dans la campagne présidentielle américaine, peut être jugée parfaitement rocambolesque.

D'abord parce que les preuves présentées sont minces.

Le principal grief : avoir fait circuler des courriels d'Hillary Clinton , demeure mal établi et à supposer qu'il le soit, ces courriels n'auraient pas porté préjudice à l'intéressée si elle avait été claire !

Et même si tout cela était vrai, il n'est pas d'usage que la guerre de l'ombre qui se livre depuis toujours entre grandes puissances soit portée à la lumière. A ce jeu, celui qui perd ne le dit pas. Surtout que les Américains n'ont en la matière de leçons de morale à donner à personne.

A ce grief principal , s'en ajoutent d'autres assez confus : tracasseries aux diplomates américains en poste à Moscou , tentative de perturber le système de régulation électrique de l'Etat du Vermont, victime, dit-on d'un virus d'origine russe.

Non, vraiment, Obama se ridiculise.

 

La paix en danger

 

Non seulement cela sent son mauvais perdant ( du côté du clan Obama-Clinton) mais, pire, le président, en agissant ainsi, met en danger la paix : les trois semaines de mandat qui lui restent suffiraient à déclencher une nouvelle escalade dans la mesure où il a derrière lui de grandes administrations : le Département d'Etat , le Pentagone , la CIA encore tenues par des faucons qui ne demandent qu'à en découdre avec la Russie.

A la déception de l'élection de Trump que ces gens là vomissaient et qui annonce une ligne différente s'est ajoutée celle de la victoire à Alep de l'armée syrienne soutenue par les Russes, sur les djihadistes soutenus par l'OTAN.

Or voilà bien la vraie raison de cette agressivité de fin de mandat : l'immense déception de ces forces qu'incarnait Hillary Clinton devant ce que l'ambassadeur de France à Washington, si piètre diplomate, a appelé la "fin d'un monde". La fin , non de la puissance américaine mais celle de l 'idéologie néoconservatrice au nom de laquelle les Américains se sont sentis investis du droit d'intervenir partout sur la planète pour y faire régner le bien, causant les dégâts que l'on sait. L'amertume est telle chez ces gens qui, le 20 janvier , date de la prise de fonctions de Trump, ne seront plus rien, que certains sont sans doute prêts à tout.

En ne réagissant pas à cette provocation de dernière minute, Poutine s'est montré le plus sage.

 

Roland HUREAUX

 

 

 

 

 

 

 

[1] Selon l'ambassadeur de Syrie à l'ONU, des Français auraient apporté leur concours à cette opération.

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7 janvier 2017 6 07 /01 /janvier /2017 14:43

 

http://www.bvoltaire.fr/rolandhureaux/segolene-royal-seulement-une-etourderie,300222

http://www.libertepolitique.com/Actualite/Decryptage/Segolene-Royal-seulement-une-etourdie

Ce qu'il y a de consternant dans la déclaration faite par Ségolène Royal à La Havane à l'occasion des obsèques de Fidel Castro, ce n'est pas qu'elle ait dit du bien du défunt. Un jour d' obsèques, il est mal venu, quoi qu'on pense de lui, de dénigrer le disparu.

Ce qui a choqué l'opinion, c'est le caractère à la fois exagéré et , quant au fond, erroné de cet éloge .

Etait-il nécessaire de dire que le Lider maximo a été "un monument de l'histoire ?

Il ne fallait surtout pas dire qu'il n'y a pas de prisonniers politiques à Cuba: il y en a , on en connait certains et il y en avait bien davantage encore dans les trente premières années du régime.

Evoquer l'existence sur l'île d'"une liberté religieuse" et d'"une liberté de conscience" est aussi choquant : un peu aujourd'hui , certes , et encore, mais on sait que, dans ce pays, pendant quarante ans, la religion a été persécutée et toute opinion dissidente bannie.

Il y avait pourtant des choses positives et justes à dire sur Fidel Castro: par exemple qu'il a incarné un moment la fierté du peuple cubain, une forme de résistance nationale contre un grand voisin quelque peu encombrant. Personnellement, je ne lui aurais pas reproché de dire cela. Mais l'idée d'une résistance nationale est étrangère aux valeurs de Mme Royal qui était une enthousiaste d' Hillary Clinton et des néoconservateurs américains, une mondialiste libérale et post-nationale convaincue .

Ce qui frappe dans les propos de Mme Royal ( dont on ne saurait évidemment oublier la proximité avec le présidant Hollande ) , c'est d'abord l'ignorance. Je crains en effet que Mme Royal croie sincèrement qu'il n'y avait pas de prisonniers politiques à Cuba. Cette partisane du mariage isosexe ignore sûrement que, dans les années soixante, Fidel Castro avait ouvert des camps de concentration pour les homosexuels. L'ignorance n'est pas blâmable à condition qu'elle rende modeste. Mais celle de Royal est sans gêne à l' image d'un parti socialiste de basse époque où les carrières se font au culot.

Cette dégénérescence des bonnes mœurs à l'international s'observe hélas, presque tous les jours. Le tweet grossier de l'ambassadeur de France à Washington, un personnage dont il n'est pas nécessaire de retenir le nom, envoyé au moment où il apprenait l'élection de Trump fut la fois discourtois pour celui-ci et nuisible aux intérêts de notre pays. Et il est toujours en place !

Ne parlons pas des torrents d'injures et de mensonges déversés depuis cinq ans par le Quai d'Orsay sur le président Bachar-el-Assad au mépris de tous les usages. Pour la première fois, un service diplomatique occidental se comporte comme les agences de propagande soviétiques de la grande époque.

Derrière ces comportements, il n' y a pas que l' ignorance, tant des faits que des usages, il y a aussi l'idéologie : l'ignorance est le terreau de l'idéologie, l'idéologie abêtit . A l'analyse objective du réel, elle substitue la projection de quelques valences schématiques : pour une partie de la gauche française, Castro porte encore le signe plus, comme Poutine porte le signe moins. A partir de là, on peut dire n'importe quoi : l'idéologie permet aux ignorants de pérorer sur des sujets qu'ils ne connaissent pas et dont la connaissance, au fond, leur importe peu, Encore heureux qu' à ce stade , il ne s'agisse que de mots. Mais les mots ne sont pas innocents. Depuis les commencements de l'histoire, au IIIe millénaire avant JC, la culture et la diplomatie ont eu pour but de pacifier autant que faire se peut les relations entre les hommes et les peuples : la culture pour comprendre l'autre, la diplomatie pour ne pas blesser inutilement . On craint le pire à voir disparaitre ces antiques vertus.

 

Roland HUREAUX

 

 

 

 

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7 janvier 2017 6 07 /01 /janvier /2017 14:35

 

http://www.bvoltaire.fr/rolandhureaux/valls-et-cazeneuve-la-promo-des-anticathos,298213

Valls candidat à la présidence de la République, Cazeneuve premier ministre : tout indique que l'antichristianisme ( disons le plus net : l'anticatholicisme) favorise les carrières dans la république qui est encore pour quelques mois celle de Monsieur Hollande.

Pour Cazeneuve , on savait à quoi s'en tenir : "évoquer les racines chrétiennes de la France, c'est affaire , dit-il , d'une relecture historique frelatée qui a rendu la France peu à peu nauséeuse" [1] . Au titre des travaux pratiques, le ministre de l'intérieur , qui ces dernières semaines s'est démené comme un beau diable pour convaincre les municipalités réticentes d'accueillir des "migrants", presque tous musulmans , jugeait l'année précédente "funeste" ( apparemment l'intéressé sait choisir ses adjectifs ) la décision des maires de Rouen et de Belfort d'accueillir des chrétiens d'Orient[2].

En guise de pénitence, le pauvre homme a dû, en service commandé, passer le 15 août dernier à Lourdes , à la fois en raison de la menace terroriste et parce que son chef en visite au Vatican deux jours après, voulait, campagne électorale oblige, faire un geste en direction des catholiques.

Quant à Valls, on ne saurait oublier comment, alors ministre de l'intérieur lui aussi, il avait sauvagement réprimé les participants à la Manif pour Tous - allant jusqu'à gazer des enfants en poussette. Il fallait bien qu'il montre, face à des manifestants qui ne se défendraient pas, sa virilité républicaine, lui qui, en tant d'autres circonstances se refusa à interpeller les coupables de graves désordres ( par exemple sur la place du Trocadéro le 13 mai 2013 ). Croyant , comme il arrive, à sa propre propagande selon laquelle ceux qui s'opposaient au mariage homosexuel étaient des ennemis de la République ( alors qu'on pourrait aisément démontrer le contraire : que la loi Taubira , fondée sur une théorie fausse, la théorie du genre est antirépublicaine ) , il rafla et ficha sans vergogne des centaines de jeunes qui n'avaient rien fait de mal , mais dont tout laissait penser qu'ils étaient en majorité catholiques. Il fallait bien que ses coups de menton se dirigeassent contre quelqu'un . Faute que Robespierre et la guillotine soient à l'ordre du jour, le petit premier ministre avait trouvé un terrain pour se faire son cinéma. En attendant la vague terroriste , du sérieux cette fois pour ce qui est de menacer la République, mais qui l'a vu , il fait bien le dire, moins flambant .

Les antricathos enragés n'ont pas tous connu de pareilles promotions : Vincent Peillon pour qui "on ne pourra jamais construire un pays de liberté avec la religion catholique" est , lui, sur la touche. Il avait sans doute poussé trop loin l'esprit de système.

Il reste que ces promotions nous rappellent ce que fut la réalité du quinquennat de Hollande, cet homme apparemment placide et non sectaire. Elles nous rappellent surtout ce qu'est devenu , en France et dans le monde, le socialisme de basse époque ; oubliée la justice sociale : c'est dans l'impuissance qu'il laisse monter le chômage, qu'il fait des économies sur la famille et donc sur les enfants, qu'il met en accusation le vrai peuple sur le grief de "populisme". C'est l'idéologie qui a pris la place du social dans tous les domaines : justice, éducation, gestion des territoires (coir Christophe Guilluy) , (non) politique industrielle , sur fond de mépris des "sans dents".

Contrairement à ce que certains croient ( aussi bien Peillon que beaucoup de catholiques) , ce n'est pas à un retour à l'anticléricalisme de la IIIe République que l'on assiste . Un anticléricalisme qui s 'était bien apaisé : souvenons-nous que Léon Blum fut le premier chef de gouvernement français à se rendre la nonciature. Les anticléricaux de la Troisième pensaient, à tort ou à raison, face à une Eglise pas toujours éclairée, défendre les droits de la raison . Aujourd'hui, c'est le contraire : les idéologies de toute sorte qui dénaturent la gauche conduisent à la déraison. Or face à aux idéologies , l'Eglise catholique a défendu tout au long du XXe siècle où elles ont tant sévi la nature et la raison . On ne le lui pardonne pas.

 

Roland HUREAUX

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

[1] RTL 5/04/2014

[2] Le Figaro, 11/09 /2015

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7 janvier 2017 6 07 /01 /janvier /2017 14:31


http://www.bvoltaire.fr/rolandhureaux/syrie-la-desinformation-ses-oeuvres-et-ses-pompes,303946

Ce matin, j'écoutais, comme il m'arrive de temps en temps , Radio Vatican rediffusé en français par de Radio-Notre-Dame.

Au milieu d'intéressantes nouvelles qui ont l'intérêt de balayer le monde entier, quelle n'est pas été ma surprise de voir citer comme source sur ce qui se passait en Syrie l'Observatoire syrien des droits de l'homme. Je pensais que cette radio était à l'abri de la désinformation internationale, mais non.

La nouvelle était qu'il y avait eu déjà des violations à la trêve qui vient d'être signée en Syrie. Comme par hasard , ce sont des soldats de l'armée gouvernementale , dite du "régime" (même si le régime en cause est le gouvernement légal reconnu internationalement ) qui en seraient responsables . C'est peut-être vrai, mais soyons sûrs que si cela avait été le camp adverse, l'Observatoire en question n 'en aurait rien dit.

L'Observatoire syrien des droits de l'homme , appellation aussi rassurante que trompeuse , a été fondé par Rami Abdel Rahmane, un Frère musulman basé à Coventry avec l'appui des services secrets anglais et sans doute américains, et, depuis 2011, il a le quasi monopole de l'information primaire sur ce qui se passe en Syrie. Inutile de dire que son préjugé antigouvernemental, antirusse et pro-djihadiste est bien ancré . L' AFP par exemple ne cite que lui et, dans la foulée, des dizaines de journaux commencent leurs articles par la formule devenue rituelle "selon l'OSDH" [1].

Si les médias occidentaux se laissent ainsi désinformer, c'est qu'ils le veulent bien, partageant le même préjugé idéologique qui justifie l'intervention de l'OTAN en Syrie : anti Assad, anti Poutine et , par le fait même ( le ennemis de nos ennemis sont nos amis), pro-islamiste. Bref le parti qu'on pourrait appeler "droit de l'hommiste-djihadiste" puisqu' il défend les droits de l'homme contre Assad en s'appuyant sur les djihadistes ( repeints en simples "rebelles" ).

Il était également hasardeux de la part du même Radio Vatican de citer comme parole d'Evangile les déclarations de François Hollande en visite en Irak vantant la contribution de l'armée française à la lutte contre l'islamisme quand on sait que des conseillers militaires ont été actifs auprès des groupes djihadistes comme Al Nosra en Syrie, y compris dans la récente bataille d'Alep . « Agir contre le terrorisme en Irak, c'est prévenir des actes terroristes sur notre sol » dit notre président. Et en Syrie ?

Le Vatican lui-même, très prudent sur le Proche-Orient, n'est pas en cause . C'est d'abord l'osmose de la rédaction française de Radio Vatican avec la presse catholique française et c'est ensuite l'osmose de cette presse catholique avec la presse nationale et internationale officielle qui expliquent ces dérives : un petit monde mimétique qui répercute passivement les préjugés idéologiques dominants. On s'attendrait de la part d'un organe de presse comme Radio Vatican à un peu plus de recul à l'égard de la propagande de guerre de l'OTAN et de ses instruments comme le prétendu Observatoire syrien des Droits de l'homme.

 

Roland HUREAUX

 

 

 

 

 

 

[1] http://www.lefigaro.fr/international/2016/08/09/01003-20160809ARTFIG00148-l-osdh-source-contestee-de-la-guerre-en-syrie.php

 

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7 janvier 2017 6 07 /01 /janvier /2017 14:25

 

http://www.magistro.fr/index.php/template/lorem-ipsum/en-france/item/2935-la-diplomatie-francaise-en-plein-delire

 

http://www.libertepolitique.com/Actualite/Decryptage/La-diplomatie-francaise-en-plein-desastre

 

Jamais, peut-être depuis des siècles la diplomatie française n' était tombée aussi bas. Laurent Fabius avait été un ministre des affaires étrangères désastreux . Son successeur, Jean-Marc Ayrault s'avère encore pire. Comme il ne connaissait pas le sujet, on pouvait s 'attendre au moins à ce quil soit prudent ; il n'en est rien.

La prise d'Alep par les forces gouvernementales syriennes avec l 'appui de Russes : tout le monde devrait s'en réjouir puisqu' elle annonce la défaite des djihadistes que notre police pourchasse en France et la fin de la guerre. Au contraire elle met en rage les gouvernements occidentaux , spécialement le nôtre , qui semblent vouloir regagner par la propagande ce qu'ils ont perdu sur le terrain. Comment cette guerre aurait-elle donc pu finir autrement , sauf à connaître une bataille encore plus cruelle à Damas et la prise de pouvoir finale par les islamistes ? C'est d'ailleurs le sentiment de l' immense majorité de la population de Syrie, chrétiens en tête. Jean-Luc Mélenchon l'avait compris avant d'autres.

Au lieu de cela, notre gouvernement est en pleine dénégation. Humilié par la défaite des djihadistes ( quel aveu sur ses véritables engagements !), il est conduit à prendre des initiatives absurdes à l'ONU , comme la récente tentative de supprimer le droit de veto quand des vies humaines sont en jeu . Ce qui est idiot : des vies sont toujours en jeu s'il y a "menace contre la paix ". Voilà bien du BHL à l'état pur . Alors que le droit de véto au Conseil de sécurité et le principe de non-ingérance sont les piliers de l'ordre international depuis 1945, cela reviendrait à officialiser le "droit d'ingérence humanitaire" au moment même il vient de montrer partout son caractère criminel : six pays mis à feu et à sang depuis 15 ans au nom des droits de l'homme -, et où Trump le récuse.

Ayrault multiplie les communiqués vengeurs accusant les forces gouvernementales des pires crimes : " exécutions sommaires, notamment de femmes et d’enfants ; personnes brulées vives dans leurs maisons ; poursuite du ciblage systématique des hôpitaux, de leur personnel et de leurs patients… De telles atrocités révoltent les consciences" (13/12/2016).

Aucune vérification de ces faits , hautement invraisemblables quand sait que Russes et Syriens se savent sous les projecteurs de l'opinion internationale et que la plupart des accusations proférées depuis six ans à l'encontre du gouvernement syrien se sont avérées pour le moins douteuses . Pourquoi d'ailleurs cibler les hôpitaux ( où les rebelles avaient planqué leur QG) puisque la bataille est finie ?

Aucune mention par contre des horreurs de notre allié Al Qaida , renommé Al Nosra puis Fatah al-Cham, que l'on découvre aujourd'hui , pires que celles dont on accuse le régime.

Qui ne voit que notre diplomatie se déshonore par cette propagande grossière , plus proche de celle du Kominterm ou de la Propagandastaffel que de celle d'un pays démocratique ?

Outre des médias plus serviles que jamais, il n'y a plus pour la gober, que la Conférence de évêques de France qui s'alarme , à la suite de la reprise d'Alep, d'une arrivée massive de réfugiés et demande qu'on les accueille. Or les seuls qui veulent aujourd'hui fuir la Syrie sont les islamistes défaits : voilà des pasteurs pressant les brebis d'accueillir les loups dans la bergerie !

Ce combat d'arrière-garde hypothèque gravement les intérêts de la France. Tous les Etats reprennent langue avec Bachar el Assad qui va , que cela plaise ou non, rester en place, sauf nous. L'équipe Obama, dans la même fureur du désespoir que notre gouvernement, voulant empêcher jusqu'au bout le retour de la paix, vient d'aider Daech à reprendre Palmyre, tandis que Donald Trump, aux affaires dans un mois, traite déjà avec Poutine sur une ligne réaliste .

Les adeptes européens de l'idéologie "néo-conservatrice" ( adoptée depuis longtemps par la gauche française , selon un paradoxe qui n'est qu'apparent ) , le gouvernement Hollande en première ligne , sont aujourd'hui doublement frappés : par la défaite des djihadistes et par la défaite de Clinton. Le néoconservatisme ayant perdu la partie à Washington, ils avancent désormais comme un canard sans tête. Il y a en effet pour eux de quoi désespérer. Et les derniers spasmes de survie ne sont pas les moins dangereux.

La diplomatie française s'entêtant jusqu'au bout dans ses erreurs et ses criailleries la ridiculisent. Elle se montre incapable de faire ce qui est le b a ba de toute action diplomatique : s'adapter à une nouvelle situation. En elle se conjuguent la rigidité française et la rigidité idéologique pour notre plus grand préjudice.

 

Roland HUREAUX

 

 

 

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1 novembre 2016 2 01 /11 /novembre /2016 10:42

 

EN SYRIE,  FRANCOIS HOLLANDE FAIT ENCORE LE CHOIX  DE LA GUERRE

 

http://www.atlantico.fr/decryptage/en-syrie-francois-hollande-fait-encore-choix-guerre-roland-hureaux-2853105.html

 

Voilà cinq ans que dans , dans l'affaire syrienne, la diplomatie française est à la fois ridicule et criminelle.

Ridicule parce qu'elle se réduit , avec Hollande encore plus qu'avec son prédécesseur, à un alignement aveugle sur la diplomatie américaine dominée par les néoconservateurs . Alignement  et même surenchère , pas sur le terrain car  nous n'en avons pas les moyens, mais dans les enceintes internationales. On se souvient de Fabius déclarant que Assad "ne méritait pas de vivre" !  La rupture totale des relations diplomatiques  avec la Syrie en  2012  nous a privés de moyens essentiels tant pour lutter contre le terrorisme que pour diversifier notre action comme il  sied à toute diplomatie compétente,  ce que n'est plus la notre. 

Politique criminelle car elle aboutit à armer des djihadistes qui massacrent tous ceux qui ne se rallient pas , à commencer par les chrétiens d'Orient qui comptaient sur la protection de la France. Ceux qui tiennent le quartier Est  d'Alep depuis quatre ans avaient commencé, qui s'en souvient ? par  précipiter   leurs prisonniers  du haut des immeubles. Les  mêmes   se réjouissent  bruyamment ( quand ils ne les revendiquent pas ) des attentats perpétrés en France depuis deux ans.

Le gouvernement  syrien, sinon démocratique  ( il y a plus de démocratie passé un certains seuil  de tensions sociales , comme nous  risquons d'en faire  bientôt l'expérience)  du moins légitime en droit international  a demandé l'appui des Russes dont l'intervention est donc légale.  Toutes  les autres interventions   étrangères, à commencer par celle de nos forces spéciales  en appui des  djihadistes,  sont illégales.

La présente bataille d'Alep montre que François Hollande n'a pas changé de ligne.

L'enjeu de cette bataille est simple. Les forces loyalistes ont reconquis  une grande partie de la ville. Ne reste qu'un quartier tenu par des islamistes qui  y ont  pris en otage la population. Dès que ce bastion sera réduit, la guerre de Syrie sera pratiquement terminée, sauf un nettoyage résiduel de groupes djihadistes dispersés. 

 

Demander le cessez-le-feu en Syrie c'est demander la poursuite de la guerre

 

Demander le cessez-le feu aujourd'hui au motif d'épargner les populations civiles , c'est vouloir  empêcher les loyalistes et les Russes d'en finir avec les islamistes.

Les Russes ont naturellement les moyens de réduire  en quelques jours la résistance. Si la bataille traine, c'est que , à l'encontre  de  la propagande déchainée contre leurs supposés "crimes de guerre",  ils tiennent  à épargner  la vie des civils, moins par humanisme d'ailleurs  que par souci de l'opinion.   

Que veulent donc  ceux qui demandent un cessez-le- feu  ? Que l'autre camp gagne ? Daesh au pouvoir à Damas ? Aucune puissance ne le souhaite vraiment  et les massacres seraient alors immenses.

Si l'on ne veut la victoire ni du pouvoir ni des rebelles, la seule option est  la poursuite de la guerre .  Les bonne âmes qui demandent aujourd'hui  un cessez- le feu à Alep   demandent en fait  la poursuite de la guerre et  la poursuite des  souffrances du peule syrien.

Certains prônent le dialogue. Que Hollande et Cazeneuve montrent  donc l'exemple en  dialoguant avec les terroristes du Bataclan  !   Ce  sont les  mêmes qui  combattent aujourd'hui   à  Alep-Ouest.   Aucune guerre civile ne s'est jamais terminée autrement que par la victoire d'un camp sur un autre.  Et cette issue vaut toujours mieux que la poursuite de la guerre. Dans le cas d'espèce l'un des camps est sur le point  de gagner , laissons le aller jusqu'au bout.  Quelle  aurait été  la valeur morale d'un appel au cessez-le feu début  1945 , pour soi-disant épargner  Berlin  -  et donc Hitler  ? Les islamistes valent-ils mieux ?

La propagande a toujours  joué un rôle considérable dans la  guerre : la presse collaborationniste  ne donnait pas  en 1940  une meilleure image de Churchill  que celle  d'aujourd'hui d'Assad. Ce  qui est nouveau  , c'est  la puissance effrayante de  la   machine de propagande occidentale, fondée sur une presse  de plus en plus contrôlée.

Le   manichéisme qu'elle diffuse est  inséparable d'une  idéologie qui , comme toutes les idéologies, conduit au mensonge . Mensonge que de prétendre qu'il y a entre Assad et Daesh des islamistes modérés : tous veulent établir la charia et éliminer les minorités : les chrétiens le savent.   Mensonge que d'accuser le régime de certains crimes ( pas de tous, hélas, car  cette guerre est sale)  , commis  en réalité par ses  ennemis,  telle l'attaque chimique de la Ghouta  (21 août 2013)[1] . L'ambassadeur syrien à l'ONU  a accusé les Français d'avoir aidé  Al Nosra ( dont le même Fabius disait que ses hommes  faisaient du "bon boulot") à monter cette provocation qui nous a mis au bord de la guerre mondiale.  On aimerait être sûr que ce n'est pas  vrai, tant la politique de la France en Syrie au cours de ces dernières années a pris une tournure démoniaque.

De la même eau, malgré les apparences,   est le projet de résolution  déposé par la France ( et l'Espagne habituellement mieux inspirée) au Conseil de sécurité demandant  un cessez-le-feu immédiat à Alep. Ce n'était  pas un acte de paix mais en réalité un acte de guerre, visant , si  elle était passée, à prolonger la guerre et  en tous les cas à  isoler la Russie et la Chine qui ont dû mettre  leur  veto à un moment où la tension internationale est à son comble.

C'est la rage au cœur que la puissance dominante voit en effet aujourd'hui  ses alliés islamistes , malgré les armes sophistiquées qu'elle  leur a  livrées et les conseillers techniques qui sont présents à leurs côtés, perdre la  guerre de Syrie  : le chef d’état-major des forces armées américaines , Mark Milley, vient de déclarer qu’un « conflit extrêmement meurtrier » avec la Russie est « quasiment certain ». Ashton Carter, le secrétaire à la Défense d'Obama,  prix Nobel de la paix  a indiqué  que les USA se réservaient le droit d’effectuer une « première frappe nucléaire » .

En provoquant par ses exigences le report du voyage de Poutine à Paris  Hollande , outre qu'il laisse une fois de plus  le beau rôle à Angela Merkel qui les invite tous deux à dîner à Berlin le même jour , nous remet dans une logique de guerre froide et même  pire.  

 

                                                           Roland HUREAUX

 

 

 

[1] Deux rapports décisifs l'ont établi, l'un du MIT, l'autre du Comité contre les armes chimiques de l'ONU ( ce dernier soustrait au public)

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1 novembre 2016 2 01 /11 /novembre /2016 10:24

 

Publié dans Liberté politique  n°71, septembre 2016

 

Il est aussi exagéré que ridicule de dire comme le cardinal Walter Kasper que l'exhortation  apostolique  Amoris Laetitia (La joie de l'amour) , publiée par le pape François le 8 avril 2016,  est le plus important document  pontifical des deux derniers siècles;  il ne l'est pas moins  d'y voir un tissu d'erreurs qui mènerait l'Eglise à sa perdition.

A l'évidence, ce document comporte deux strates : ce qui vient du Synode et ce qui a été rajouté par François.

L'exhortation comprend, majoritairement,  de  larges  extraits du Rapport final du Synode des évêques sur la famille (Relatio finalis) qui avait en principe pour but d'éclairer  le pape sur   ces questions, au moins sur leur dimension "pastorale".  C'est la partie la plus médiocre. Quand le pape dit que "le parcours synodal  a été d'une grande  beauté  et a offert beaucoup de lumière",  ne faut-il pas,  au moins en partie, mettre ces propos au  compte de la courtoisie   ?

 

Rappel de la doctrine traditionnelle

 

Tout n'est pas pour autant mauvais dans cette strate.  Elle contient des  rappels on ne peut plus traditionnels   sur la théologie du mariage:  la dimension  trinitaire du couple (  § 11 )  et plus largement  la famille comme  "image de Dieu qui est communion de   personnes" (§71) , l'héroïsme qu'il y  a à s' engager  dans la vie conjugale (§40).  

Les affirmations  permanentes  de l'Eglise sont rappelées  clairement :  l'indissolubilité du mariage , son  caractère sacramentel  , image du rapport du Christ  et de son Eglise  . De ce fait,    "les unions de fait ne peuvent pas être placidement comparées au mariage"  (§ 52) .  "D'aucune manière l'Eglise ne doit renoncer à  proposer l'idéal complet du  mariage"   (§ 307) .

L'encyclique Humanae Vitae (1969)  et la relation intrinsèque qu'elle affirme  entre  sexualité et fécondité est rappelée à plusieurs reprises  (§ 68, 80)  . Le  pape s'inquiète du déclin démographique de certains pays (§ 42) ." La présence des familles nombreuses dans l’Église est une bénédiction pour la communauté chrétienne et pour la société, car l’ouverture à la vie est une exigence intrinsèque de l’amour conjugal" (§ 62) .

Ceux qui attendaient quelque  "avancée" en direction de la reconnaissance de  l'homosexualité, n'apprendront pas grand chose, sinon  que les homosexuels   doivent être respectés  comme personne , ce qui n'est pas vraiment  nouveau, quoi qu'on dise.  Pour ce qui est des unions homosexuelles, le pape , comme le Synode,  sont  particulièrement nets : "Il n'y a aucun fondement pour établir des analogies , même lointaines, entre les unions homosexuelles et les dessein de Dieu sur le mariage et  la famille" ( § 251). La théorie du gender est vigoureusement condamnée  (§ 56), de même l'idée de mères porteuses .

En  parallèle  et en  cohérence avec le refus du gender, est  rappelée avec force , ce qui, quoi qu'on pense, n'est  pas  contraire à la tradition   de l' Eglise,   la dignité de la femme ( à la promotion de laquelle on ne saurait , dit-il avec raison,  imputer la crise de la famille) .

Il est dit clairement que "L'Eglise rejette de toutes ses forces les interventions coercitives de l'Etat  en faveur de la contraception, de la stérilisation et même de l'avortement " (§ 42). S'agissant de l'avortement ou de l'euthanasie,    l'obligation de l'objection de conscience des praticiens chrétiens est clairement rappelée  (§ 83) .

La question des migrants est évoquée dans des termes analogues à la  Relatio finalis avec une mention  particulière des   circuits  internationaux de traite (§ 46) .

On se demande cependant    comment interpréter  le passage suivant :  "L’accompagnement des migrants exige une pastorale spécifique pour les familles en migration (...)  Cela doit se faire dans le respect de leurs cultures, de la formation religieuse et humaine d’où ils proviennent, de la richesse spirituelle de leurs rites et de leurs traditions, notamment par le biais d’une pastorale spécifique" (ibid.).  Le "respect de cultures",  de "la formation religieuse et humaine"  , "la richesse spirituelle" supposée  des rites et des traditions des migrants  signifierait-il qu'ils  n'aient pas à connaître le Christ  ? Ni à chercher à  s'intégrer ? A moins que ce passage  ne concerne que les chrétiens d'Orient ?  

L'obligation de la conversion imposée par d'autres religions (principalement l 'islam) avant tout  mariage avec un de leurs  adeptes est évoquée avec une discrétion que l'on peut regretter (§ 248)  , et sous le seul rapport  de la  liberté religieuse. Que le fiancé chrétien  doive s'y soustraire  n'est pas  dit clairement; certains ne risquent-ils pas de comprendre que   l'intérêt  du couple  prévaut  sur les autres attachements ?

A côté d'utiles rappels, l'exhortation comprend aussi des indications pratiques    qui montrent que le souci pastoral n'a pas été sacrifié à la haute intellectualité et c'est très bien. Indications généralement du plus parfait classicisme : faire des noces sobres et simples ( alors que la crainte de la dépense en dissuade beaucoup aujourd'hui  de se marier ); utiliser les ressources de la pastorale populaire, telle la fête de Saint-Valentin;  bien élever ses enfants   "s'il vous plait, pardon, merci" (266)  devant être les mots clef de cette éducation (§ 266),  se méfier de l'abus des   jeux électroniques chez l'enfant mais aussi  dans le  couple (§ 27) ;  sont évoqués  l'importance de la catéchèse familiale, de la confession fréquente des époux.   

Ce louable souci de rester  terre à terre  glisse, il faut bien le dire, parfois à la banalité :   

 "Il ne sert à rien d'imposer des normes par la force  de l'autorité"  (§ 35) -    on s'en doutait :  faute de disposer de la  force armée , monopole des Etats , aucune autorité spirituelle ou familiale ne peut imposer quoi que ce  soit, mais ne faut-il pas rappeler clairement les normes  - en les justifiant -     dans  des sociétés où elles  sont de plus en plus  ignorées ?

"Les familles souffrent souvent d'une grande anxiété".  Et les  individus isolés,  pas  ? Pourquoi ne pas dire que "nos contemporains souffrent d'une grande anxiété" . C'est  peut-être pourquoi ils ont besoin de normes  claires.

"Le divorce est un mal  et l'augmentation du nombre des divorces très préoccupante"   (§ 247 ).

"La grossesse est  une étape difficile mais aussi un temps merveilleux"

Et au chapitre des chromos sulpiciens:

 "Le secret de Nazareth , plein  de parfum familial" (§  65)

Fallait-il évoquer  dans  un   texte de ce genre  Martin Luther King (§ 118),  victime d'une juste cause,  certes,  mais qui fut loin  d'être un modèle de fidélité conjugale ?

 

La tentation holiste

Dans la continuité de la Relatio finalis aussi, mais plus contestable à notre sens,  sont  les condamnations un peu faciles  de l'"individualisme"    qui, telles quelles,  ne sont pas dans la tradition de  l'Eglise , et trouvent leur source  dans la rhétorique antirévolutionnaire   du  XIXe siècle.  Si l'individualisme , c'est l'égoïsme, ce terme ne suffit-il pas  ? S'il s'agit du génie, de la créativité , de l'inventivité  ou de ce qui la plupart du temps les sous-tend :  la  possibilité d'échapper à la contrainte  du  groupe ou de la structure, comme tant de saints en ont donné  l' exemple,  d ' être, quand la vocation l'exige,  un "électron libre", ce genre de censure nous parait malvenue. 

De la même veine est la condamnation du "paradigme de l'autonomie de la volonté"  (§ 53) .

S'étonner comme le fait le Synode  de la  "rapidité avec laquelle les personnes passent d'une relation  affective à une autre", relève d' une sociologie ( ou  une psychologie) un peu courtes,  plus digne de l'esprit  "vieille fille" qui,  à en croire le pape François,  serait répandu au Vatican,  que d'une analyse sérieuse des causes de l'instabilité affective moderne qui , dit-on, se répand.

Tout cela va de pair avec la  conception "holiste" de la famille comme  tribu ou clan  , en rupture avec la tradition, qui règne aujourd'hui dans les milieux catholiques,  conception qui émane largement  de la Relatio finalis  :  "Le petit  noyau familial ne devrait pas s'isoler de la famille élargie incluant les parents, les oncles,  les cousins  , ainsi que les voisins." (  § 187). De même:      "Enfin on ne peut oublier que dans cette grande famille , il y a aussi le beau-père, la belle-mère  et tous  les  parents du conjoint  . Il faut  éviter de les voir comme des envahisseurs "(§ 197)  . Le problème , c'est qu'ils sont souvent des envahisseurs !   Et  nous nous risquerons à dire que  les couples où ils sont considérés comme tels ne sont pas forcément les  plus  mal partis pour résister aux turbulences de la vie  ! 

Le Saint Père n'ignore d'ailleurs rien des tensions sous-jacentes à la famille clanique puisque il n'a pas hésité, au retour des JMJ de  Cracovie , à comparer  le meurtre de sa belle-mère par un Italien à un attentat terroriste.

De manière juste, le pape relève que le drame de notre époque    semble être plus l'absence des pères  (§ 176) que les abus du  patriarcat  et, plus original encore, dénonce la pression bureaucratique qui s'exerce  aujourd'hui sur les   familles  (§ 183) , un sujet qui reste à développer.

Mais comment ne pas être surpris de lire que "Aucune famille ne peut être  féconde si elle se conçoit comme séparée"  (§ 182 ).  On est étonné qu'un document qui se veut pastoral   ignore  les pressions quasi-systématiques que font dans l'Europe chrétienne - et particulièrement   en Italie - les grands parents, même catholiques,  pour limiter la fécondité de leurs enfants.  C'est là  une des raisons  majeures de la dénatalité en Europe.

L'allongement de la durée de la vie, la décohabitation des générations là où il y avait cohabitation, l'allongement  général  des   adolescences du fait des études créent des  conditions  nouvelles  qu'on aurait aimé voir approfondir, ce qui aurait permis peut-être de remette en cause les conceptions  organiques un peu faciles  de la famille héritées du XIXe siècle .

De même aurait pu être dénoncée la fâcheuse évolution du monde de l'entreprise depuis un demi-siècle, étranger, voire hostile à tout souci de la famille et de l'enfant . Combien de femmes-cadres amenées à cacher leurs grossesses ? Loin d'aller ensemble, le travail et la famille sont devenus concurrents.

La théologie traditionnelle ne connaissait que le mariage qui se fonde sur  la conjonction de la volonté  de deux  personnes autonomes.  L'idée de famille, plus large que celle du couple conjugal, est absente de la tradition   catholique jusqu'au  XIXe siècle ( la fête de la Sainte Famille date de 1891) ;  le mot est absent du Dictionnaire de théologie catholique. On en a depuis lors usé et abusé et l'exhortation apostolique, dans la suite de la Relatio synodis ne s'en prive pas.   

 Libérer le couple conjugal (héritier du premier couple de la Genèse  tel qu'il était "au commencement" ) des emprises claniques de toutes sortes, tel avait  été au contraire  l'effort  multiséculaire  de l'Eglise: possibilité pour les  vierges chrétiennes voulant se convertir ou se consacrer de  désobéir au pater familias, interdiction à ce dernier de faire divorcer ses enfants  ( Empire romain) , interdiction rigoureuse de tout mariage  consanguin  ( Haut Moyen Age), droit des conjoints à  se marier sans l'aval de leurs parents ( Renaissance). C'est de ces efforts constants pour libérer l'individu de la tribu qu'a émergé le génie de l'Europe moderne. C'est l'Eglise  qui a instauré l'individu moderne ( la personne  en jargon catholique[1]), cela  bien avant la Révolution française,  tombée dans l'excès inverse. C'est l'Eglise  qui  a introduit  la liberté dans les sociétés traditionnelles de type holiste ( le "despotisme  oriental") . « La liberté est sur la croix du Christ, elle en descend avec lui » (Chateaubriand).

N'est ce pas ce type de famille tribale que rejettent beaucoup  de jeunes réticents au mariage ?  Un mariage présenté non comme une rupture avec  le clan mais au contraire comme une démarche de normalisation. Sans vouloir  les exonérer trop facilement, n'est il pas sain qu'ils  considèrent le mariage ,  en pleine conformité avec les traditions les plus anciennes de l'Eglise, comme un nouveau commencement, fondé sur deux personnes et non pas dix , vingt ou trente ? 

A côté de l'histoire, il y a la  psychologie : les psychiatres, les conseillers conjugaux savent combien    l'intervention des parents et beaux parents contribue trop souvent à la dislocation des couples.

De même , est-il  dit dans l'exhortation que "Les mères sont l'antidote  le plus fort à la diffusion de l'individualisme   égoïste (...) Ce sont elles qui témoignent de la beauté de la vie". Cela est beau  comme du Victor Hugo :  "Ô l'amour d'une mère, amour que nul n'oublie ! Pain merveilleux qu'un Dieu partage et multiplie" . Beau mais faux ,  trop souvent en tous cas.    L'amour désordonné , généralement  possessif, de beaucoup de  mères    pour  leurs enfants , spécialement les garçons, est une des plaies de notre époque,    la source de la plupart des désordres que l'on met de manière erronée sur le compte de l'individualisme : homosexualité, donjuanisme,  immaturité affective dans le couple et parfois pire.  A l'origine de ces dérives, le plus souvent une perception inexacte  de la  vraie hiérarchie qui doit faire passer l'amour conjugal avant l'amour maternel .  Ce qui serait  plus clair si la théologie  vague et cotonneuse de la famille n'avait pas pris la place de la théorie traditionnelle du mariage.

La structure clanique que le christianisme a combattu  au cours des siècles se retrouve inchangée et même durcie dans l'islam. Beaucoup de musulmans  la ressentent comme oppressive.  Il n'y a aucune raison que l'Eglise ait plus d'indulgence à son égard qu'elle n'en a eu dans le passé pour la famille compacte issue du paganisme. On espère en tous les cas qu'elle ne fait pas partie de ces "richesses spirituelles" propres aux migrants qu'évoque l'exhortation.

 

L'apport de François

La seconde strate de l'exhortation est faite des rajouts du  Saint Père , généralement de  meilleure qualité  que ce qui vient de la Relatio finalis.  Ils  témoignent sur certains aspects d'une réflexion personnelle originale.

Le principal  de ces rajouts est le beau commentaire de l'Hymne à la charité de saint Paul qui  compose tout  le chapitre 4 : L'amour dans le mariage .

"La charité est patiente;

La charité est serviable;

Elle n'est pas envieuse;

La charité ne fanfaronne pas,

Elle ne se gonfle pas;

Elle ne fait rien d'inconvenant ,

ne cherche pas son intérêt,

ne s'irrite pas ,

ne tient pas compte du mal ;

elle ne se réjouit pas de l'injustice.

mais elle met sa joie dans la vérité .

Elle excuse tout,

croit tout,

espère tout,

supporte tout"  ( 1 Co 13 4-7)

 

Un commentaire approfondi   qui sera sans doute ce qui , de ce texte, restera  dans les anthologies. Très moral, dans la lignée de la pastorale  pratique et précise de la Compagnie de Jésus,  il n'hésite pas à  entrer dans des prescriptions  terre à terre : "Les époux qui s'aiment et s'appartiennent  parlent bien l'un de l'autre, ils essayent de montrer le bon côté du conjoint", ce   qui n'est peut-être pas évident pour tout le monde.   Il leur est même  suggéré , parmi de nombreux conseils pratiques, de "se donner un baiser le matin"  (§ 226).

La possibilité d'un refroidissement , "l'eau stagnante qui se corrompt "   est évoquée : (§ 219) ,   sans toutefois que ses causes soient approfondies autant qu'on l'aurait  aimé.

 De même la possibilité  de crises (§ 236) :   si la nécessité du  pardon entre époux est évoquée rapidement (§ 105),     on se serait attendu que soit abordée , en cette année de la miséricorde, la question du pardon de l'adultère,  si difficile et devenu si étranger à notre  culture, ce qui rend irréversible bien des crises qui pourraient ne pas l'être. 

Ce commentaire de l'Epitre aux Corinthiens  est illustré de citations de saint Thomas d'Aquin, de saint Ignace de Loyola, de saint  Jean Paul II , mais , comme d'ailleurs  toute l'exhortation, la patristique grecque  en est absente.  Il serait dommage qu'elle n'ait pas toute sa place au Vatican au moment où des gestes audacieux, comme la rencontre de La Havane entre François et Cyrille, patriarche de Moscou,   le 11 février 2016,  ont été  accomplis.

 

 

"L'homme quittera son père et sa mère"

 

 L'autre  apport propre au Saint Père  est le rappel de deux dimensions essentielles du mariage que la Relatio finalis  élude largement :

D'abord, nous l'avons évoqué : la rupture avec les parents , avec la famille de l'amont :   "l'homme quittera son père et sa mère pour s'attacher à sa femme " (Gn 2, 34) : § 13, 18, 131, 190  .  Il a son pendant du côté de la femme :  "Oublie ton peuple et la maison de ton père" (Ps. 45,11) . Ce précepte est rappelé avec une relative insistance mais sans  véritable explicitation , notamment de toutes ses conséquences psychologiques .

Rappel  absolument nécessaire : le Saint Père a bien senti en quoi la vision quasi clanique et holiste  de la Relatio péchait mais sans doute trop tard pour s'en libérer pleinement et reformuler la problématique d'ensemble. 

 

La dimension charnelle

 

Autre ajout bien venu :  la dimension charnelle de l'union de l'homme et de la femme, presque absente des spéculations du synode . L'union sexuelle dans le mariage  est qualifiée de "chemin de croissance dans  la vie de grâce pour les époux " (§ 74).    "Leur consentement et l'union de leurs corps sont les instruments de l'action divine qui fait  d'eux une seule chair" (§ 75) et même  : "L'érotisme apparait comme une manifestation spécifiquement humaine de la  sexualité" (§ 150) . On peut  y trouver "la signification conjugale du corps et l'authentique dignité du don" ( Jean-Paul II ).  Cette citation rappelle que, sur ce chapitre , Jean-Paul II et Benoît XVI furent les vrais novateurs, ce dernier  dépassant  audacieusement dans son encyclique Caritas in veritate ( 2009) l'opposition d' eros et d'agapé , pour dire que l'un et l'autre  viennent  de Dieu , le mal dans l'eros venant de son usage mais non de son  principe.   

Par apport à ses deux prédécesseurs , François laisse apparaître encore des traces du jansénisme du XIXe siècle . Il esquisse certes une revalorisation de l'état du mariage  par rapport à l'état de virginité   :  "l'un peut être plus parfait en un sens, et l'autre peut l'être d'un autre point de vue"(§ 159)  . Il dit aussi  que la  théologie du mariage a souffert d'un accent "quasi exclusif sur le devoir de procréation"  . Exclusif surtout dans la tradition augustinienne  remise au goût du jour par le jansénisme du XIXe siècle .  Mais s'il évoque parmi les autres finalités du mariage   la croissance dans    l'amour et  le soutien  mutuel  (§ 26), il ne dit rien de la sexualité  proprement dite,  en retrait à cet égard par rapport à saint Thomas d'Aquin pour qui le plaisir est   une finalité voulue par Dieu dès lors qu'il ne s'oppose pas à la fécondité.  Et jamais il  n'évoque les effets psychologiques de la vie sexuelle,    le ciment  fondamental  qu'elle constitue pour  le couple.  

 "La sexualité n'est pas un moyen  de satisfaction ", dit-il . Il reprend la condamnation de Paul VI  de  l'"acte d'amour imposé au conjoint" (§ 154) condamnation légitime sans doute,   mais  qui semble justifier le refus de ce dernier par l'un des conjoints , dont saint Paul dit  de la manière la plus catégorique qu'il n'a pas lieu d'être. Ce  droit au refus,  qui entre de plus en plus dans les législations  sous l'impulsion de l'idéologie féministe,  est  contraire  à l'Ecriture et il  a , bien plus que des exigences sexuelles exagérées, un effet désastreux sur les couples que les nombreux pasteurs qui composaient  le Synode n'auraient pas du  ignorer, comme ne l'ignorent  pas avocats, conseillers conjugaux, psychologues , voire médecins. Saint Paul était à cet égard bien en avance : son précepte : "ne vous refusez pas l'un à l'autre, sauf d'un commun accord" et "uniquement pour vaquer à la prière " (1 Co 7, 4-5),  dont  l'application  littérale sauverait aujourd'hui  tant de couples est catégorique. Il est rappelé incidemment  (§ 61),  mais sans insistance.

 

Crise du mariage ou crise du sacrement ?

 

Reste la  question de l'accès aux sacrements de ceux qui ne vivent pas dans un état régulier , comme les divorcés remariés civilement - et aussi les concubins.  Elle est évoquée par la pape dans les mêmes termes ou à peu près que ceux du Synode.

Contrairement à ce que colportent certains   traditionnalistes , il n'est   dit   nulle part que la discipline traditionnelle de l'Eglise est remise en cause, que  le mariage ne serait  pas indissoluble ou que les divorcés auraient    accès  à la communion.

En un sens,  la discipline est renforcée , par exemple par la mise en garde contre   " des messages erronés comme l'idée  qu'un prêtre peut concéder aisément des exceptions", ce  dont, au moins en France,   certains et  des  plus traditionnels,  ne se privent pas.

Si en matière pratique, certains comportements comme la cohabitation stable peuvent s'inscrire dans  la gradualité (§ 293-295),  il est  rappelé par ailleurs que "dans la loi même il n'y a pas de gradualité". "Il doit être clair que (le remariage  hors  veuvage ) n' est pas l'idéal que l'Evangile propose pour le mariage et la famille" (§299).

Pour le reste,  il est dit  et répété qu'il faut "tenir compte de la  complexité des situations  "(§ 79)  et aussi que "l'imputabilité et la responsabilité d'une action peuvent être diminués" (§ 302) . Il   est rappelé avec insistance que    les divorcés ne sont pas excommuniés , ce que les initiés ont toujours su mais pas forcement le grand public. Dès lors "leur participation ( à la vie de l'Eglise) peut s'exprimer dans différents services ecclésiaux : il convient donc de discerner quelles sont parmi les différentes formes d'exclusion anciennes  pratiquées dans les domaines liturgique , pastoral,  éducatif et institutionnel, celles qui peuvent  être dépassées". Soit dit en passant on se demandera   où ces exclusions sont encore pratiquées. Une interprétation  rigoureuse de cette levée d'exclusions distinguera l'exclusion liturgique ( par exemple assurer les lectures de  la messe ) de l'exclusion sacramentelle  proprement dite qui demeure.   Mais faute de clarté , une interprétation plus flexible semble  ouverte, d'autant  qu'il est  rappelé plus loin  que "l'Eglise a une solide réflexion sur les circonstances atténuantes  . Par conséquent, il n'est  plus possible de dire que tous   ceux qui se trouvent dans  une certaine situation "irrégulière" vivent dans une situation de péché mortel"  (§ 301) .

Tenir compte de la diversité des situations. Mais ne  l'a-t-on pas toujours fait ?  Saint Thomas d'Aquin qui n'est pas précisément un moderne est invoqué à l'appui de cet assouplissement : pourquoi dit-on alors  "il n'est plus possible de dire" ?   Depuis combien de siècles existe la casuistique ? C'est un des aspects les plus irritants des discours à prétention progressiste  que  de caricaturer le passé  en n'en retenant  que les comportements les plus obtus, comme si la bêtise   n'était pas de tous les temps, y compris du notre.   

Dans le même veine sont opposés "morale bureaucratique froide  et discernement  pastoral empreint d'amour miséricordieux"  (§ 312 ). Le "discernement  pastoral" ( casuistique) qui évalue avec exactitude   la portée des manquements  ne relève pas de la même logique que la miséricorde  qui pardonne les mêmes manquements. Quant à opposer la loi et la miséricorde, comme   le fait abondamment  la presse ( ce qu'évite François !)  , la seconde passant pour plus "avancée" , voilà qui relève de la  plus parfaite débilité intellectuelle.  S'agissant de la miséricorde , voilà  au moins trois mille ans ( depuis  la rédaction des Psaumes, au moins  ) que le peuple de Dieu ( peuple d'Israël puis Eglise)  reconnait  corrélativement et inséparablement  la rigueur de la loi   et  l'infinie miséricorde de Dieu. Le Nouveau testament n'y a rien changé: il a tout au plus renforcé la rigueur de la loi ( interdisant tout divorce par exemple ) et est allé encore plus loin dans  la miséricorde. Mais croire que la miséricorde serait en soi  plus évangélique relève plus de la gnose de Marcion que de l'héritage biblique.

De fait , le pape François n'a pas aggravé , ni levé  les équivoques de la Relation finale du Synode. A t-il cependant , au travers des ambigüités que nous avons évoquées, voulu ménager l'aile  dite "progressiste"  de l'Eglise ( et la plupart des médias ) qui,  comme des  oisillons attendent la provende, espèrent toujours des "avancées " (toujours les mêmes  au demeurant) ?   On peut se demander si ces   ménagements sont  bien nécessaires .  D'abord parce que  le progressisme est   un fait circonscrit aux pays  riches , Europe occidentale et   Amérique du Nord : il apparait, de fait,  la plupart du temps comme le sas entre l'adhésion à la foi  et son abandon.  C'est la raison pour laquelle il ne se développe  pas : à chaque génération, hélas pour eux, beaucoup de  progressistes se perdent  dans la nature. Le progressisme est presque toujours issu du christianisme sociologique; il n'intéresse guère les convertis. D'ailleurs  combien de  vocations  en émanent  ( ce qui n'empêche pas que certains clercs issus de familles traditionnelles s'y rallient) ? Le courant progressiste est  particulièrement  influent en Allemagne où, les dispositions institutionnelles aidant , les Eglises sont encore   riches. Mais quel discours sur la famille peut tenir un pays où, tous milieux confondus hors immigrés,  la population ne se renouvelle que d'une moitié à chaque génération  ?  

 

Ni holisme ni encratisme

 

La   réflexion sur le mariage et la famille qui était l'objet de ce synode a , il faut bien le dire,  pâti de la polarisation sur la question, en définitive secondaire, des divorcés remariés , mise en exergue par la grande  presse mais aussi par certains  participants.

Il y avait matière à rénover la théologie du mariage non point par des innovations excentriques mais en revenant simplement à son fondement scripturaire :

 

L'homme quitte son père et sa mère  et  s'attache à sa femme,

Et ils deviennent une seule chair  (Gn 2, 24).

 

Une parole qui prend à contrepied les deux dérives par lesquelles un  certain catholicisme hérité du XIXe siècle , à la fois contre-révolutionnaire et janséniste a faussé la théologie du mariage :  le holisme (ou organicisme)  et l'encratisme.

Le holisme est né en réaction à la Révolution française , supposée  avoir exalté l'individu. Face à elle, il fallait retrouver  des communautés organiques  où l'individu   pris dans des réseaux de solidarité de la naissance à la tombe ne serait plus libre  : la famille    en fut considérée comme  le prototype,  d'autant plus intéressant qu'elle est un fait de nature.   Mais c'est une famille élargie qui  a fait oublier la dimension de rupture  qui , dans la Genèse, se trouve à l'origine du couple.

Le jansénisme est né au XVIIe siècle mais a connu un renouveau fâcheux au XIXe ; il colporte  un  refus sournois de la chair et de la sexualité  de type encratique dont les gnostiques avaient au IIe siècle introduit le  venin dans l'Eglise. La Bible dit au contraire que les époux ne feront qu'"une seule chair".

Sur ces deux chapitre fondamentaux, le Synode n'a fait aucun effort de dépoussiérage. Le Saint Père  en a senti la nécessité  mais sans aller jusqu'à  bousculer la logique de la Relatio  finalis.

Or ce sont ces conceptions   étriquées de la  famille que  rejettent beaucoup de jeunes. 

 

La question de la foi

 

Mais ils sont aussi victimes  , comme le rappelle excellemment François-Xavier Bellamy[2],  d'un  déficit de foi, justifié au demeurant,  dans les aptitudes naturelles d'un homme et d'une femme à instaurer une relation pérenne  et par là une méconnaissance de la puissance du sacrement à venir au secours de cette impuissance . On peut se demander si les principales questions sur lesquelles a buté  le Synode : fragilité du lien matrimonial,  cohabitation sans cérémonie, accès à l'eucharistie de  divorcés,   ne sont pas  à mettre  au chapitre d'  une crise du sens du sacrement  bien plus  qu'à celui d' une crise de la famille.  C'est peut-être l'effet d'un sacrement trop souvent présenté comme un "signe" ( de l'amour des conjoints, de leur appartenance à une communauté)  sans caractère opératoire. Or c'est  le rappel de ce    caractère opératoire qui seul permet de répondre à l'objection de nombreux  jeunes  : " à quoi sert-il de se  donner un signe, puisque nous nous aimons déjà ?" et encore davantage à cette autre : "est-il vraiment possible, à échelle humaine, qu'un couple tienne toute une vie sans rompre ou  sombrer  dans une déprimante  routine"  ?

Nos contemporains   ne rejettent pas en tant que tel  l'idéal  d'un seul conjoint choisi une  fois pour toutes  et pour la  vie.  Mais ils tiennent généralement cet idéal  pour inatteignable , ce qui les conduit à considérer que l'Eglise devrait composer avec le péché comme  Moïse avait été obligé, selon les paroles mêmes du Christ,  d'adapter la  Loi "à cause du péché" (Dt 24, 1sq). Ce problème qui est une problème de foi au sens le plus large du terme,  est sans  doute le principal qui  se pose aujourd'hui dans le domaine de la famille . D'où l'importance de montrer comment le sacrement  ( dûment prolongé par la prière évidemment ) est bien plus qu'un signe : il est l'aliment surnaturel immensément efficace qui seul permet   de réaliser ce qui  à vue humaine semble  impossible.

 

"Mon rocher, mon rempart"

Le souci de ménager au-delà du nécessaire,  ceux qui , ne voyant que le petit bout de la lorgnette  ne songeaient qu' à assouplir la discipline eucharistique,   n'a pas seulement appauvri la réflexion;  il a aussi entrainé un climat d'incertitude qui se traduit chez beaucoup de  fidèles par  un grave désarroi. Qui peut prétendre que     la sérénité des familles chrétiennes aura fait des progrès avec  le  denier Synode ? 

Il nous semble que, dans le  monde actuel , les points de repère forts sont plus nécessaires que jamais. C'est particulièrement  vrai de l'Europe occidentale où les esprits sont plus troublés aujourd'hui qu'ils ne l'ont sans doute jamais été dans l'histoire . Ce trouble est    l'effet non  du hasard mais d'une stratégie transnationale inspirée  par les idéologies mondialistes visant délibérément à   faire perdre tout  ancrage aux hommes  pour les rendre plus malléables aux logiques du marché.   Quels repères ne sont pas ébranlés ? Les Etats  et le  cadre national sont remis en cause  par le processus européen ,  en France, la commune, le canton,  le département, la région sont bouleversés et disqualifiés, les corps constitués sont presque tous  remis en cause, de même  le droit du travail qui assurait une certaine stabilité de l'emploi, mais aussi l'héritage historique ( qui oscille  entre la culpabilisation et l'amnésie), la chronologie, la grammaire et l'orthographe , mais aussi la famille,   la distinction des sexes (genres)  et pratiquement tous les repères anthropologiques. Le trouble  est encore plus grave pour les catholiques qui voient leurs rangs se clairsemer  et à qui les perspectives démographiques  et une immigration  encouragée par les idéologies  mondialistes  font  penser qu'ils ne seront bientôt qu'une   minorité en situation de  dhimmitude.

Dans un tel climat, la fonction pétrinienne au sens propre: celle de constituer  le pierre , le môle de stabilité  clair , dur  et fort qui demeure dans  un monde où tous les repères sont ébranlés, est non seulement le signe de la continuité de l'Eglise mais,  aujourd'hui,    l'œuvre de miséricorde  la plus nécessaire  qui soit  pour  tous ceux qui ont quelque autorité, pas seulement le successeur de Pierre.  

 

                                                           Roland HUREAUX

 
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