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Roland HUREAUX

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12 août 2016 5 12 /08 /août /2016 17:38

Que le Saint Père aille dans l'île de Lesbos rencontrer des refugiés - ou simples migrants - du Proche-Orient , qui le lui reprocherait ? N'est-il pas dans son rôle de témoin de la miséricorde ?

Le pape François se veut par là prophète . Etre prophète , c'est dire la vérité, y compris quand elle déplait.

Mais c'est aussi dire toute la vérité.

Il ne suffit pas de reprocher aux Européens leur peu enthousiasme à accueillir ces réfugiés, il faut aussi dire pourquoi il sont là.

Ils sont là parce que l'Occident, Etats-Unis , France, Angleterre, Allemagne et leurs alliés orientaux, Turquie en tête, ont fomenté la guerre depuis de nombreuses années en Irak, en Afghanistan, en Libye, en Syrie, au Yemen et cela avec le monstrueux alibi d'aller y défendre les droits de l'homme - ce explique par parenthèse que les Européens commencent à se méfier des bons sentiments, tant ils ont couvert de crimes au cours des dernières années.

Faut-il laisser à un militant athée, Michel Onfray, le soin de dire haut et fort que les Occidentaux ont tué près de 4 millions de personnes au Proche-Orient depuis 1990 ?

Les réfugiés sont là où ils sont à cause de ces guerres, mais aussi parce que les mafias, principalement turque, organisent leur transit en avion depuis l'Irak et la Syrie , via le Liban, puis, au lieu de leur permettre de continuer en avion - le vol Istamboul-Berlin coûte 170 € - leur font payer 10 000 € par personne pour prendre le bateau, les dites mafias étant notoirement proches du gouvenrment turc.

Si le pape François osait proclamer tout cela, il remplirait de joie et d'espérance les chrétiens d'Orient qui le savent depuis longtemps et instruirait les chrétiens d'Europe qui ne le savent généralement pas . Si le pape François osait dire ce que Mme Merkel n'ose pas dire : l'écrasante responsabilité de M. Erdogan , tant dans le déclenchement et la poursuite des guerres de Syrie que dans le transfert organisé des réfugiés vers l 'Europe, dans un but explicite d'islamisation, il rendrait service à l'Europe aujourd'hui tétanisée par le nouveau sultan . Si les musulmans doivent être tenus pour des hommes comme les autres quand il s'agit de les accueillir, ils sont aussi des hommes comme les autres quand il s'agit de mettre en cause la responsabilité de certains d'entre eux.

Aller jusqu'au bout de son rôle prophétique, c 'est aussi pour François aimer jusqu'au bout les refugiés. Les aimer jusqu'au bout, c'est vouloir pour eux ce qu'il y a de meilleur, le Christ, c'est donc dire qu'ils ont eux aussi le droit de connaître le Christ. C'est rappeler aux épiscopats nationaux qu'ils ont le droit et même le devoir d'évangéliser les migrants. Trop de musulmans que le christianisme intéresse ont le sentiment que les évêques d'Europe, au moins ceux de France , tout en pressant les gouvernements d'ouvrir les portes de leur pays aux musulmans , ne semblent guère pressés de leur ouvrir les portes de leurs églises.

L' exhortation apostolique Laetitia amoris cite la relation synodale qui dit que

L’accompagnement des migrants exige une pastorale spécifique pour les familles en migration, mais aussi pour les membres du foyer familial qui sont demeurés sur leurs lieux d’origine. Cela doit se faire dans le respect de leurs cultures, de la formation religieuse et humaine d’où ils proviennent, de la richesse spirituelle de leurs rites et de leurs traditions, notamment par le biais d’une pastorale spécifique. (ibid.)

Le "respect de cultures", de "la formation religieuse et humaine" , "la richesse spirituelle" supposée des rites et des traditions des migrants signifieraient-il qu'ils n'aient pas à connaître le Christ ? A moins que ce passage ne concerne que les seuls chrétiens d'Orient dont le respect des rites va évidemment de soi ?

La récente vague de migrations a suscité en Europe une immense crise morale dont nous ne connaissons sans doute que le commencement . Ce serait faire injure aux Européens que de tenir leur réticence à accueillir les migrants pour de l'égoïsme.

Dès qu'il s' agit d' accueillir des individus ou des familles isolées, les chrétiens d'Europe sont , n'en doutons pas, plus généreux que quiconque . Mais si l'accueil doit porter sur des populations entières, l'enjeu est tout autre. Ce n'est plus d'égoïsme qu'il s'agit mais d'une immense et douloureuse inquiétude identitaire , le souci de préserver leur identité collective, lequel, quoi qu'on prétende, est un sentiment noble . Comme l'avait montré le pape Jean Paul II, le patriotisme , autre nom du sentiment identitaire, se rapporte au 5e commandement, "Honore ton père et ta mère". Il est le souci de transmettre à ses enfants l'héritage reçu de ses parents et ancêtres, une Europe chrétienne en l'occurrence.

Les Européens, spécialement les catholiques, ont l'inquiétude légitime que leur continent ne bascule dans une autre civilisation, dont ils seraient un jour exclus, comme c' est arrivé au Proche-Orient et à l'Asie mineure.

Cette inquiétude va de pair avec une immense souffrance. Ce serait manquer gravement à la miséricorde que d'ignorer cette souffrance et d'accabler ce peuple en détresse en le taxant d'égoïsme. Là encore , c'est un philosophe juif et athée, Alain Finkielkraut qui a le mieux fait preuve de miséricorde et d'empathie quand il a parlé de l'"identité malheureuse" de nos compatriotes.

Cette identité malheureuse, ce ne sont pas des leçons de morale qui l'apaisera , c'est le sentiment que l'accueil des migrants s'inscrit dans une dynamique d'évangélisation.

En effet, l'inquiétude identitaire des Européens est d'abord due à la déchristianisation et à son corollaire, la dénatalité . Plaie envenimée par les récentes vagues migratoires . Tout ce qui peut rendre cette inquiétude plus aigue ne peut qu'aggraver les réactions de rejet vis à vis des nouveaux venus. D'autant que la condamnation du sentiment identitaire par des autorités d'Eglise semble rejoindre , pour le plus grand désarroi des fidèles, celle de médias généralement hostiles à l'héritage chrétien et acharnés à détruire ce qui reste de la civilisation européenne. Quelle détresse pour un troupeau qui se sent en perdition , d'entendre ses pasteurs tenir le même langage que les loups qui veulent sa mort ! Le même langage que Grorgrs Soros, parrain des fémens.

Le souci de l'identité est non seulement un sentiment noble, valorisé dans toutes les sociétés antiques, en particulier dans les cités grecques mais il est dans l' histoire le plus fondamental qui soit. Les pays d'Europe où l'Eglise catholique a le mieux prospéré sont ceux où elle a pu s' identifier au sentiment national comme la Pologne ou l'Irlande. Elle s'est bien moins enracinée partout ailleurs.

Chaque fois que, dans l'histoire, le sentiment identitaire et le catholicisme se sont trouvés au contraire en contradiction, comme par exemple dans l'Europe du Nord au temps de la Réforme, le sentiment identitaire l'a toujours emporté. Il ne faudrait pas qu'il en aille de même dans l'Europe de demain.

Roland HUREAUX

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12 août 2016 5 12 /08 /août /2016 17:37

Le général de Gaulle , qui était d'un naturel pessimiste, dit une fois qu'il n'excluait pas que son œuvre soit un jour entièrement détruite.

C'est presque fait aujourd'hui avec François Hollande. Non que ses prédécesseurs n'aient pas contribué à la déconstruction progressive de l'œuvre du général, mais parce que l'actuel président a , sur le sujet essentiel de la défense , parachevé cette déconstruction à un degré jamais vu jusque là.

Certes la constitution de la cinquième République est toujours là mais altérée de tant de manières qu'on la reconnait à peine. Pas seulement du fait des réformes ( dont le quinquennat instauré par Chirac ou la réforme Sarkozy du 21 juillet 2008 ), mais aussi par la jurisprudence de plus en plus étendue du Conseil constitutionnel et la reconnaissance de la supériorité absolue du droit européen, dont , pour sa part, l'Allemagne s'est bien gardée .

Mais la déconstruction est allée plus loin encore sur le plan militaire et diplomatique.

Le fondement de la pensée du général de Gaulle était l'indépendance nationale, non point comme une fin en soi ni pour que le pays vive dans l'isolement, mais pour qu'il soit au contraire libre de déployer dans le monde entier une diplomatie de la main tendue sans la contrainte d' alliances exclusives.

Il y a à cette attitude une raison essentielle: le but du "prince" ( au sens large : tout gouvernant) étant la poursuite du bien de la communauté dont il a la charge, toute autre considération que la poursuite de ce bien, que ce soit la pression d'une puissance étrangère , une idéologie poursuivant des objectifs propres ( construire le socialisme , construire un ordre mondial supranational ou tout autre utopie) ne saurait que fausser cette recherche et donc se traduire par un désavantage pour le pays considéré.

Si les attributs cardinaux de la souveraineté sont la monnaie, le droit, la défense et la diplomatie , il faut bien dire que les pronostics du général de Gaulle selon lequel leur abandon aboutirait à un préjudice pour l'intérêt national sont largement réalisés.

Le coût de la dépendance

Sans revenir sur le principe de l'euro , on notera que sa gestion par une banque centrale européenne échappant largement à tout contrôle n'est pas , il s'en faut de beaucoup, la solution la plus favorable aux intérêts français. Il n'y a d'ailleurs a priori aucune raison qu'elle le soit.

Mais la question fondamentale est celle de la défense et par là de la diplomatie.

En faisant voter selon une procédure accélérée , pratiquement sans débat, la loi du 20 avril 2016 autorisant l'adhésion de la France au protocole sur les quartiers généraux militaires internationaux créés en vertu du traité de l'Atlantique Nord, François Hollande a entériné la mise sous dépendance presque totale de notre défense vis à vis de l'Alliance atlantique ( on peut supposer que le nucléaire en demeure exclu mais est ce sûr ?). Il est allé plus loin encore que Sarkozy qui , tout en revenant dans le dispositif militaire intégré, avait su garder une marge de manœuvre. Il n'y pas , est-il nécessaire de le dire ? de défense européenne, l'expression militaire de la construction européenne étant désormais l'OTAN.

Au même moment , la France se trouve engagée dans une politique de renforcement des forces occidentales aux frontières de la Russie et de soutien actif au gouvernement actuel de l'Ukraine . Cela correspond à une stratégie de tension qui suit peut-être les intérêts de notre allié américain, encore que ce ne soit pas l'avis d'un Donald Trump, mais pas forcément à celui des Européens, singulièrement des Français, alliés historiques des Russes. L' "agenda" ouvertement affiché des néoconservateurs américains , dont l'influence est toujours prédominante, est de creuser un fossé, le plus profond possible, entre l'Union européenne et la Russie. Beaucoup croient qu' au contraire l'intérêt de l'Europe occidentale et singulièrement de la France est de développer des liens avec la Russie. Se jetant les yeux fermés dans le piège, l'Union européenne, et la France avec elle, ont été conduits , sous l'instigation de Washington , à prendre des sanctions qui nuisent gravement à leur économie.

Ainsi tout risque de se passe exactement comme De Gaulle l' avait prévu dans sa conférence de presse du 21 février 1966 :

"Et voici que des conflits où l'Amérique s'engage (...) risquent de prendre, en vertu de la fameuse escalade, une extension telle qu'il pourrait en sortir une déflagration générale. Dans ce cas, l'Europe dont la stratégie est dans l'OTAN celle de l'Amérique serait automatiquement impliquée dans la lutte , lors même qu'elle ne l'aurait pas voulu. Il en serait ainsi pour la France si l'imbrication de son territoire, de ses communications , de certaines de ses forces, de plusieurs de ses bases aériennes, de tel ou tel de ses ports dans le système militaire sous commandement américain devait subsister plus longtemps. "

De même au Proche-Orient, la France , Sarkozy d'abord, Hollande ensuite, s'est laissé aller, très au-delà de ce qu'exigeait la fidélité à l'OTAN, à suivre une politique néoconservatrice visant à démocratiser de force tous les pays arabes - et de fait à détruire tous les Etats organisés autres que les monarchies les plus rétrogrades. Une politique déshonorante car elle était directement contraire aux intérêts des chrétiens d'Orient , protégés par ces Etats, et que la France avait la mission immémoriale de soutenir, une mission que même les gouvernements les plus anticléricaux de la IIIe République s'honoraient de remplir. Une politique directement contraire à nos intérêts puisque les guerres que nous avons contribué à susciter se sont traduites par l' afflux de réfugiés en Europe et que les mouvements islamistes que nous avons soutenus sont responsables de la vague terroriste qui nous touche au premier chef.

La doctrine de Hollande, si tant est qu'on puisse parler de doctrine, est à l'opposé de celle du général de Gaulle : pour lui, la France n'a plus de rôle propre à jouer . L'avenir est qu'elle s'intègre à l'Union européenne d'un côté et à l'OTAN de l'autre : au diable ses amitiés historiques ! Si elle est intervenue au Sahel, malgré les réticences très fortes du président français qui avait juré qu'il ne le ferait pas , c'est moins comme un acteur autonome que comme un sous-traitant de l'Alliance atlantique dans une zone que les Français maîtrisent mieux que d'autres - et d'ailleurs à la suite des désordres que l'intervention de l'OTAN en Libye avait mis sur le continent africain.

Autant la politique d'indépendance du général de Gaulle avait valu de prestige à la France sur tous les continents ( même aux Etats-Unis si l'on considère les égards qu'eut Nixon pour lui) , autant celle de Hollande vaut aujourd'hui à notre pays un mépris universel, les uns le tenant désormais comme quantité négligeable, les autres déplorant tristement qu'il se trouve indigne du rôle qu'ils attendent de lui.

Il ne faut pas s'étonner que les intérêts fondamentaux de la France se trouvent mis à mal du fait d'une telle politique . Le voyage de Hollande à Colombey ressemble, dans un tel contexte, à une imposture dont, en réalité, personne n'est dupe.

Roland HUREAUX

Forum sur la politique étrangère de la France

18 juin 2016

Espace Varenne - 18 rue de Varenne - 75007 Paris

PEUT-ON ENCORE LIBÉRER LA FRANCE ?

Le coût de la dépendance , les moyens de l'indépendance

Avec Roland Hureaux, Hervé Juvin, Richard Labévière, David Mascre, Francis Choisel, Jean-Michel Quatrepoint , Amiral Jean Dufourcq, Alfred Gilder, animé par Eric Branca.

S'inscrire par courriel à : forum18juin@gmail.com

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12 août 2016 5 12 /08 /août /2016 17:33

http://www.bvoltaire.fr/rolandhureaux/pendant-ce-temps-la-france-continue-daider-les-djihadistes,275132

Les gesticulations de toutes sortes de nos officiels "atterrés", "horrifiés", "pleinement solidaires des victimes" (au point que le mécréant Hollande se soit rendu à Notre-Dame à la suite du meurtre du père Hamel ), leurs mouvements de menton pour durcir l'arsenal antiterroriste ou, s'ils sont opposants, appeler le gouvenrment à le faire , la rhétorique de la guerre totale que l'on assène à longueur de journée sur les petits écrans , tout cela prend un tour singulièrement amer quand on sait que les gouvernements occidentaux en général, et le français en particulier ( ce dernier avec un rare acharnement) , apportent depuis cinq ans un soutien constant en armes, en entrainement et en logistique aux djihadistes qui combattent en Syrie .

On ne le répétera jamais assez : le terrorisme, nous sommes allés le chercher nous-mêmes au Proche-Orient par une politique absurde , fruit d'une idéologie droit-de l'hommiste devenue folle et de la corruption qui entoure les commandes d'armement réglées par les monarchies du golfe, soutiens constants du djihadisme . Il faut ajouter notre lamentable suivisme vis à vis de la politique néoconservatrice ( "néo-cons, faucons et vrai cons", dit -on ! ) qui a inspiré au cours des dernières années les présidents américains successifs, dans la continuité d'une politique américaine, jamais démentie, de soutien à l'islamisme le plus radical.

Les attentats n'ont pas fait cesser le soutien français aux djihadistes

On aurait pu penser que cette politique aurait cessé après les attentats du Bataclan et de Nice . Il n'en rien été : un général français déclarait le 15 juillet [1] ( selon Georges Malbrunot, un de nos meilleurs spécialistes) qu'il fallait à tout prix éviter une défaite trop rapide de Daesh . Pourquoi ? Il ne le dit pas mais on le devine : parce que cela profiterait au gouvernement Assad, toujours tenu pour l'ennemi numéro alors qu'il ne nous a jamais menacé sur notre sol[2]. Il faut donc laisser Daesh en vie en attendant une relève hypothétique qui ne soit pas dans la mouvance gouvernementale . Laquelle ? De mythiques rebelles modérées se situant entre Daesh et le gouvernement Assad que les Occidentaux n'ont cessé depuis cinq ans de tenter de susciter en entrainant des mercenaires dans les camps de Turquie et de Jordanie. En vain : ou les intéressés rejoignent les islamistes avec armes et bagages ou ils disparaissent dans la nature après avoir empoché la solde. Il faut se rendre à l'évidence: il n'y a rien entre Assad et les différentes formations islamistes . Le tenir le premier pour l'ennemi numéro un, c'est soutenir des islamistes. Daesh est certes aujourd'hui mis au ban ( du moins on l'espère ) , et les Occidentaux ont enfin entériné la mise au ban d' Al Nosra (alias Al Qida) , dont Fabius disait, au moment où il martyrisait la ville chrétienne de Malula, qu'il "faisait du bon boulot" . Mais il y a tous les autres, répondant aux doux noms de Ahrar al-Cham, Jaïch al-Islam, Jaïch Mouhammad, Liwa’ al-Tawhid, Al-jabhat al-Islamiya, Jaïch al-Fath , autant de viviers de fondamentalistes prêts à poser des bombes chez nous . Un de ces mouvements tenu pour modéré, Harakat Nour al-Din al-Zenki, a récemment égorgé près d'Alep un enfant palestinien de douze ans. Le 25 juillet, l'ambassadeur de France aux Nations -Unies, ne trouvait à critiquer que l'armée syrienne et la Russie pour le bombardement d'Alep, prenant de fait le parti des islamistes qui l'avaient si longtemps assiégé. Comme le demandait avec humour son homologue syrien : "Pourquoi ne qualifie-t-on pas d’opposition armée modérée ceux qui ont attaqué le Bataclan, Nice ou Charlie Hebdo ? "

Il y a deux jours, commençait un stage d'entrainement des forces spéciales du Qatar organisé par l'armée française. Si celles-ci ont la même origine que l'équipe de football, nul doute qu'il s'agit de mercenaires tout prêts pour le djihad que ce pays "ami" soutient autant qu'il le peut.

Et rappelons que pendant que le terrorisme frappe à Bruxelles, l'Union européenne maintient des sanction très dures ( allant jusqu'à interdire la vente de médicaments ) à l'égard des territoires syriens de la zone gouvernementale alors que ces mêmes sanctions sont levées dès que les djihadistes s'en emparent !

Un pareil aveuglement est peut-être sans précédent dans l'histoire. Errare humanum est, perseverare diabolicum. Il y a bien quelque chose de diabolique dans ce refus de reconnaitre qu'on s'est gravement fourvoyé en soutenant des djihadistes avec le but affiché de faire régner en Syrie un régime supposé plus respectueux des droits que celui d'Assad, cela au prix d'immenses souffrances du peuple syrien, particulièrement des chrétiens qui comptaient au contraire sur notre protection .

On dira que nos djihadistes ont poussé sur le sol français. Voire. Daesh revendique la plupart des attentats , Al Nosra les approuve. Si les auteurs sont des allumés sans doute aux ordres, c'est l'émergence de l'Etat islamique et sa terreur médiatisée qui ont échauffé l'esprit de nos terroristes nationaux, ayant fait ou pas un séjour là bas.

Il est important de chercher des solutions nationales mais on n'en trouvera pas de sérieuse tant que n'aura pas cessé cet encouragement au terrorisme que constitue la politique absurde et criminelle que nous menons au Proche-Orient.

Roland HUREAUX

[1] Le Figaro, 12 juillet 2016

[2] Il nous a même propos une collaboration contre le terrorisme que nous avons refusée.

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12 août 2016 5 12 /08 /août /2016 17:32

Après la vague d'attentats qui frappe les Etats-Unis et l' Europe depuis quelques mois , on peut se demander si Bachar-el-Assad est toujours l’ennemi principal des Etats-Unis au Proche-Orient. Hélas, la réponse est claire : c'est oui.

Que juste après l'attentat d'Orlando, les plus hauts fonctionnaires du département d'État se soient plaints dans un manifeste[1] que le président n'en faisait pas assez contre le chef d'État syrien en dit long sur l'état d'esprit qui règne aujourd'hui à Washington. Le président Barack Obama a beau condamner avec emphase comme "un acte de terreur et de haine " ce qu'il qualifie de "la pire fusillade de l’histoire des Etats-Unis", qui a fait 50 morts et 53 blessés, il sait très bien que la politique américaine ne changera pas pour autant.

Les présidents américains successifs ont clamé les uns après les autres au son des trompettes qu'ils partaient en guerre contre le terrorisme, principalement islamique . Mais il n'en ont jamais tiré les conséquences : on ne comprend rien au Proche-Orient si on n'a pas intégré que l'alliance entre les Etats-Unis et l'islamisme radical est une des données géopolitiques les plus fondamentales des 70 dernières années. Une alliance qui s'est même renforcée au cours de la toute dernière période.

L'attentat du 11 septembre, revendiqué par l'organisation Al Qaida, avait semblé la remettre en cause . Le golem islamiste avait échappé des mains de son artisan. Il a donné lieu à des torrents de littérature emphatique sur la guerre planétaire sans merci que le "monde libre" devrait désormais livrer au terrorisme, proclamé ennemi mondial numéro 1. Mais il n'en a rien été : comme le chien retourne à ses vomissements, les États-Unis ont très vite délaissé ces bonnes intentions pour déclarer la guerre à un ennemi qui n'avait qu’un lointain rapport avec l'attentat, si tant est qu’il en ait eu vraiment un, le régime de talibans en Afghanistan, et surtout un autre qui n'en avait strictement aucun, et qui constituait même dans sa zone un rempart contre l'islamisme, l'Irak de Saddam Hussein.

L'attentat d'Orlando ne changera pas la donne

Pour horrible qu’il soit, l'attentat d’Orlando risque encore moins de changer la donne , en tous les cas tant que le clan néoconservateur imposera ses vues à Washington.

L'alliance américano-islamique a commencé avec le pacte passé le 14 février 1945 sur le croiseur américain Quincy, au large de la péninsule arabique, entre le président Roosevelt et le roi Ibn Séoud . Quand on sait comment le riche royaume saoudien, Etat ayant pignon sur rue mais adepte de la doctrine fanatique du wahhabisme, a financé année après année les mouvements islamistes, y compris terroristes, on mesure la portée de l'engagement américain.

On retrouve les États-Unis soutenant les Frères musulmans contre l'Egypte de Nasser au cours des années cinquante et soixante. Quoique rivaux des wahhabites, ces derniers professent la même doctrine, ayant pour objectif final le règne de l’islam sur le monde entier. Ils ont bénéficié des mêmes complicités occidentales équivoques : les Frères n'étaient-ils pas nés en 1928 dans le giron de la colonisation britannique ?

Les tenants de l'islam pur et dur n'ayant pas de doctrine économique s'accommodent facilement du libéralisme : cela suffit au Américains.

A partir de 1979, les États-Unis se sont appuyés sur l'Arabie saoudite et sur les rebelles islamistes pour rendre la vie impossible aux Soviétiques qui avaient envahi l'Afghanistan. Ils fournirent en particulier à ceux-ci des missiles Stinger terriblement meurtriers pour l'aviation russe. Au moins l'alibi de la lutte contre le communisme était-il défendable.

Quand le Front islamique du salut ( et le GIA ) algérien tentait de prendre le pouvoir à Alger et commettait des attentats sanglants à Paris, il n’avait pas eu de difficulté à ouvrir à Washington un bureau qui ressemblait fort à une représentation diplomatique. La répression de l’islamisme en Algérie (1990-2000) a fait plus de 200 000 morts (Il est étonnant que personne n'osa alors faire des reproches au gouvernement algérien, alors qu’on s'acharne sur celui de Bachar el Assad dont la position, face à une rébellion également islamiste, est analogue.)

Gulbuddin Hekmatyar, un protégé de Washington qui contrôlait le sud-est de l'Afghanistan, s'étant trouvé impliqué de loin dans le premier attentat du WTC (1993), les Américains, par Pakistanais interposés, suscitèrent pour le punir et pour le remplacer le mouvement taliban, le plus radical qui ait existé, quitte à le combattre à son tour à partir de 2001.

Dans les Balkans entre 1990 et 1999, l 'OTAN a pris parti pour les musulmans (Bosnie, Kosovo), aidés par des djihadistes, contre les chrétiens orthodoxes.

La destruction du régime de Saddam Hussein en 2003 ne pouvait que plaire aux islamistes qui détestaient ce dictateur trop tolérant pour les minorités et, quoique musulman sincère, aux manières de mécréant. Il menaçait les monarchies du Golfe protégées par les États-Unis et adeptes d'un islam bien plus radical. La nature ayant horreur du vide, sa chute attira en Irak les islamistes de tout poil qui s'implantèrent dans le nord de la Mésopotamie. Servi par des complaisances anglo-américaines, turques, saoudiennes, qatari et autres, ce mouvement conduisit en 2013 à la création de Daesh.

Les printemps arabes : de la démocratie à islamisme

Depuis son accession à la tête de la Turquie en 2003, Recyp Erdogan, frère musulman lui aussi, a bénéficié de toutes les faveurs de Washington. Sa candidature à l'entrée dans l'Union Européenne l'a protégé d'un coup d'Etat militaire kémaliste (c'est-à-dire laïque) et lui a permis de renforcer l'islamisation du pays, tout en lui offrant une base arrière à la rébellion islamiste en Syrie et en Irak. Daesh n'a pas d'allié plus solide aujourd'hui que la Turquie, membre de OTAN. Il suffirait que ce soutien lui soit retiré pour qu'il retourne dans les sables, mais personne n' exige d'Erdogan qu'il le retire.

Ce soutien aux islamistes s'est déchainé à partir de 2011, notamment sous l’influence d'Hillary Clinton. On savait depuis toujours que démocratiser un pays arabe, c’était donner le pouvoir aux Frères musulmans, non que le peuple adhère à leurs doctrines mais parce que, seuls, ils sont présents sur le terrain pour soulager sa misère. L'Occident se prit néanmoins d'enthousiasme pour les "printemps arabes" au point d'appuyer tantôt politiquement, tantôt militairement l'émergence de pouvoirs islamistes en Egypte, en Libye, en Tunisie, au Yémen avant de tenter de le faire en Syrie. Morsi et Erdogan, frères musulmans tous les deux, étaient les favoris d'Hillary Clinton.

Cette politique a failli réussir en Syrie où la dynastie Assad, pouvoir laïque fort, adapté à un pays religieusement pluraliste , se trouvait confrontée depuis des années à une opposition islamiste. Sans l'aide massive apportée aux opposants à Assad , il n'y aurait sans doute pas eu de guerre en Syrie. Ces opposants sont, quoi qu’on dise, idéologiquement proches de Daesh, même quand on feint , comme c'est le cas d' Al Nosra, branche syrienne d'Al Qaida ou d'Ahrar-el-Sham, de leur trouver des vertus démocratiques. Cette offensive anti-Assad s'est heurtée à la détermination des Russes à garder le seul point d'appui qu’ils avaient encore dans la région et à celle de la minorité alaouite dont sont issus les Assad, laquelle n'avait d'autre alternative que de rester au pouvoir ou d'être exterminée.

Pas plus que les attentats du 11 septembre, cette politique n'a été infléchie par les attentats de Paris et de Bruxelles ; seule la France semble s'être mise à l'écart . Et encore : il y a quelques semaines, l'armée syrienne aurait capturé des soldats d'Al Qaida encadrés par des conseillers techniques américains, anglais, français et saoudiens. Washington ne décolère pas que les bombardements russes n'épargnent pas Al Qaida . Al Qaida ! [2]

Contre qui cette alliance entre Washington et la mouvance islamiste ? Au Proche-Orient même contre tout ce qui avait encore apparence d'État sous la seule forme que l'on connaisse dans cette région : une dictature militaire plus ou moins laïque, fondée sur un parti unique de type baasiste ou nassérien. Bien que fort peu agressifs à l'extérieur ( la Syrie a certes tenté de faire valoir ses droits sur le Liban et l'Irak sur le Koweït mais il ne s'agissait que d'objectifs limités ), n'ayant jamais sérieusement menacé Israël, ces régimes furent pris en grippe par les néo-conservateurs, qui pensaient que pour faire un Etat de droit, il fallait s'abord détruire l'État et qui auraient voulu redécouper (reshape) le Proche-Orient selon des lignes ethnico-religieuses, mieux à même d’entretenir le chaos.

Contre la Russie

Mais cette politique est surtout dirigée contre la Russie instaurée en ennemie historique quand bien même elle n'est plus communiste ; une Russie plus vulnérable à l'islamisme par sa proximité et la présence de 15 % de musulmans sur son sol, alors que, malgré les Twin Towers et Orlando, la menace islamique est beaucoup plus lointaine en Amérique. Que l'islamisme qu'elle nourrit doive pourrir la vie aux Russes et aux Européens lui importe peu. Bien que menacée en première ligne, l'Europe s'est laissé entraîner avec une rare inconscience à soutenir les États-Unis dans cette entreprise de déstabilisation contraire à ses intérêts. La France l'a fait au mépris d' alliés historiques qui avaient toujours bénéficié de sa protection comme les chrétiens d’Orient, premières victimes de l'appui apporté aux islamistes. La question proche-orientale est un moyen d'arrimer l'Europe occidentale au char américain, contre la Russie. Que le terrorisme et les flux de migrants déstabilisent les États d'Europe est plutôt bien vu dans certains cercles washingtoniens, où l'on compte que ces États, une fois affaiblis par le multiculturalisme, seront plus dociles à l'instauration d'un espace euro-atlantique unifié.

Au vu de ces collusions , nous ne cèderons pas à la tentation de dire des attentats : "les Américains les ont bien cherchés". Ce serait indécent : les victimes d'Orlando ne sont pas les mêmes que ceux qui élaborent à Washington les politiques de déstabilisation. D'ailleurs, il ne faut pas imaginer que le terrorisme soit tenu pour un grave problème par les grands qui dirigent le monde. Malgré la rhétorique dont ils usent à l'usage du peuple, les attentats terroristes sont d'abord pour eux un moyen de déstabiliser l'adversaire (le seul qui compte, la Russie) ou de coaliser les opinions publiques autour d'eux , éventuellement de restreindre les libertés. Orlando, à cette échelle, est un non-évènement.

Aujourd'hui alliée à l'islamisme contre la Russie, l 'Amérique aurait l'option alternative de s'allier à la Russie contre l'islamisme. C'est plus ou moins le programme de Trump. Le laissera-t-on faire ? En tous les cas ce serait là une rupture avec 70 ans de politique pro-islamiste : on comprend qu’elle suscite des inquiétudes à Washington.

Roland HUREAUX

[1] Le Monde, 20/06/2016

[2] Al Qaida ( dont la branche syrienne s'appelle Al Nosra) est désignée comme une organisation terroriste à combattre dans la Résolution de l'ONU du 18 décembre 2015 et a sinon revendiqué, du moins approuvé l'attentat du Bataclan, ce qui n'est pas le cas d'Ahrar-el-Sham. Voilà ce que les forces spéciales françaises continuent à soutenir !

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12 août 2016 5 12 /08 /août /2016 17:31

http://www.causeur.fr/airbus-eads-tom-enders-paul-eremenko-39318.html

En ce mois de juillet , un nouveau directeur technique a pris ses fonctions au sein d' Airbus Group . C'est un Américain de 36 ans, Paul Eremenko , qui a fait jusqu'ici l'essentiel de sa carrière dans une annexe du Pentagone , la DARPA (Defense advanced research program agency ), chargée des techniques de pointe en matière d'armement: robotique, drones, satellites.

Cette nomination appelle plusieurs questions :

- n'y a-t-il en Europe aucun ingénieur qualifié pour occuper ce poste ?

- la réciproque est-elle concevable : Boeing nommant un directeur technique ayant travaillé dans son pays dans le domaine de la défense ? Rappelons que l'armement est dans le périmètre du groupe Airbus, comme de Boeing.

On peut douter de cette réciprocité au vu d'une récente loi américaine qui prescrit qu'en cas de prise de contrôle d'une entreprise stratégique par un groupe étranger ( même venu d'un pays de l'OTAN, bien évidemment) , le gouvernement américain se réserve de nommer l'ensemble des membres du conseil d'administration et de la direction, les nouveaux actionnaires n'ayant d'autre droit que de connaître les comptes et de percevoir des dividendes .

Voilà un pays où l'"intelligence économique" est un vrai souci, pas un sujet de colloques !

Mais le fait le plus remarquable est qu' avec cette nomination, aucun Français n'occupera désormais une des cinq fonctions majeures de la direction du groupe Airbus :

Direction générale : un allemand ( Tom Enders ), Finances: un autre allemand ; Affaires juridiques : un britannique ; Marketing : un américain , Technique, désormais un autre américain.

Les postes de directeur de la stratégie et de président d'Airbus Industrie , encore détenus par des Français , ont perdu beaucoup de leur contenu depuis la réorganisation du groupe opérée par Tom Enders en 2014 .

Cette réorganisation comprenant la fusion de la direction générale d' EADS et de celle d' Airbus industrie au sein d'Airbus Group , s'est accompagnée du transfert du siège à Toulouse, ce qui a fait illusion aux Français , toujours plus sensibles aux symboles qu'aux réalités et qui n'ont pas vu que les deux postes évoqués passaient désormais sous le contrôle étroit du PDG.

Dans la foulée, le même Enders a créé Airbus Defense & Space (ADS) , réunion d’Astrium et Cassidian dont le siège a été installé à Munich avec un management presque 100% allemand. Décision d'autant plus étonnante , elle aussi, que les poids lourds dans le domaine considéré sont la France et la Grande Bretagne. La partie électronique de cette entité vient d'être cédée, sans que personne en France ait eu son mot à dire, au fonds KKR, notoirement proche de la CIA ( alors même que Thalès était candidat) .

Une telle situation est d'autant plus paradoxale que l'Etat français est encore actionnaire du groupe à hauteur de 11 % et surtout qu'Airbus est historiquement une création française qui doit son essor, au sortir de la guerre et pratiquement jusqu'à la privatisation, à des investissements publics très importants, payés par le contribuable français.

Rien non plus pour l'Espagne actionnaire à 4 %.

Ne nous étonnons pas qu'aujourd'hui en Chine, on tienne l' Airbus , créé en France par des ingénieurs français pour un avion allemand !

Il est aujourd'hui politiquement incorrect dans les sphères dirigeantes françaises et au sein du groupe, "à l'heure de la mondialisation", d'entrer dans ce genre de considérations jugées chauvines et reflétant un nationalisme dépassé.

Pourtant, savoir qui a le pouvoir dans le groupe Airbus intéresse au premier chef notre pays : la désindustrialisation aidant, l'aéronautique représente aujourd'hui, avec ses sous-traitants, le tiers de l'emploi industriel civil.

Par ailleurs les opérations d'internationalisation du groupe semblent s' être traduites par une diminution continue de la part de l'emploi français ( à périmètre constant , c'est à dire sans compter les apports initiaux allemands ou autres) dans l'emploi total du groupe. Une voix syndicale autorisée nous dit que depuis quinze ans les plans sociaux touchent principalement la France et le Royaume-Uni, très peu l'Allemagne.

On aimerait que ces considérations , jugées chauvines et déplacées dans la classe dirigeante française , soient jugées aussi dépassées à Washington et à Berlin. Mais , entre le nationalisme implacable de l'un et celui, plus rampant de l'autre, on en doute.

Peut-être serait-il temps que la France fasse valoir ses intérêts au sein d’Airbus Group ?

Roland HUREAUX

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12 août 2016 5 12 /08 /août /2016 17:29

Le profil des trois familles ramenées par le pape François de l'île de Lesbos confirme ce qu'on croyait savoir des réfugiés syriens qui passent de Turquie en Grèce : ils appartiennent surtout à la petite bourgeoisie du Sud de la Syrie : enseignants , artisans, qui seule a les moyens de payer les sommes considérables exigées par les passeurs ( alors qu'il serait si simple de leur permettre d'acheter un billet d'avion d'Istamboul à Berlin , si vraiment les Allemands sont prêts à les recevoir ! ). Deux de ces familles viennent de Damas qui est aujourd'hui relativement sécurisée. Les mafieux qui organisent les transferts vont les chercher , en leur faisant miroiter l'espoir d'une vie meilleure, et les emmènent d'abord vers le Liban , puis du Liban à la Turquie occidentale en bateau ou en avion.

Les scandaleuses sanctions européennes

Il est vrai que la sécurité n'est pas tout : la population syrienne vit dans une pauvreté considérable. A côté de la guerre, la grande cause de cette pauvreté, ce sont les sanctions économiques que l'Union européenne inflige à la Syrie et qui interdisent entre autres d'y envoyer nourriture ou médicaments. Le pape François, à qui vient d'être remis le prix Charlemagne, s'élèvera-t-il contre ce scandale absolu ?

Les réfugiés syriens qui ont quitté le pays de force se trouvent parqués dans des conditions innommables à la frontière de la Turquie et , faute d'avoir les moyens de payer, la plupart ne partent pas.

Le Saint-Siège a fait savoir que s'il n'y avait pas de familles chrétiennes parmi celles qu'il a recueillies, c'est qu'aucune n'avait les papiers en règle. Pour avoir un dossier en règle, il faut passer, au Liban ou en Turquie, par des officines d'interprètes arabes qui, de manière notoire, privilégient les musulmans. Une raison plus compréhensible de l'absence de réfugiés chrétiens serait la crainte d'encourager les départs des chrétiens hors du Proche-Orient partagée par tous les chefs religieux d'Orient et d'Occident. Mais pourquoi dès lors encourager le départ des autres ?

Nous ne reprendrons pas à notre compte les accusations de ceux qui suspectent le Saint-Père de démagogie. Comment pourrait-il faire autrement , compte tenu de ce qu'il est, que d'encourager l'accueil des individus par des individus , ou celui des familles par des familles ?

Ethique de conviction et éthique de responsabilité

Mais il ne s'agit pas seulement de cela : la question est de savoir s'il faut accueillir des populations entières, arrivées en Europe dans des conditions qui sont loin d'être claires. Le jeu d'Erdogan , président de la Turquie, est le plus trouble qui soit : maîtrisant les flux de réfugiés ou assimilés vers l' Europe, il n'a rien fait pour les retenir . Volonté d'islamiser par ce biais le vieux continent européen, qu'il n'a pas cachée en d'autres temps , chantage pour recueillir des milliards ou bien pour obtenir le libre accès des Turcs en Europe ? Le mouvement des migrants , comme le rappelait récemment le roi Abdallah de Jordanie, n'a en tous les cas rien de spontané.

On soupçonne même le président turc de vouloir se servir de cette facilité pour expulser les Kurdes vers l'Europe et la Syrie et les remplacer par les réfugiés syriens de l'Est qui , eux, ne partent pas.

Dès lors , la décision d'accueillir ou de ne pas accueillir ces populations n'est plus de l' ordre de la charité individuelle mais de la décision politique. Elle ne ressortit plus, pour reprendre la célèbre distinction de Max Weber, à l' éthique de conviction, mais à l'éthique de responsabilité. S'il ne s'agissait que de moyens financiers, on pourrait penser que l'Europe a encore les moyens d'accueillir beaucoup de monde malgré le chômage qui y règne presque partout, sauf en Allemagne ; mais il ne s'agit pas que de cela : les chefs d'Etat européens ont-ils le droit de mettre en cause la sécurité de leurs populations : sécurité au quotidien mais aussi, à terme, sécurité de tout le pays, sachant que le multiculturalisme ou le pluralisme religieux, on ne le répètera jamais assez, ont toujours produit, un jour ou l'autre, la guerre civile ( Liban, Bosnie, Ceylan ) ?

Porter un jugement sur ce sujet est l'affaire des chefs d'Etat et de gouvernement et de personne d'autre. Le pape n'a en la matière aucune autorité. Il peut même arriver que des responsables politiques catholiques aient des opinions différentes de la sienne: c'est arrivé souvent dans l'histoire . La très catholique ville de Florence a longtemps fait la guerre à la papauté : Dante s'en fait l'écho. Charles Quint , qui se voulait pourtant le champion de l'Eglise catholique , a laissé sa soldatesque ravager la ville de Rome (1525) . La bataille de La Boyne (1690) oppose le parti protestant d'Angleterre et les catholiques d'Angleterre et d'Irlande soutenus par Louis XIV. Le pape était du côté de protestants et a fait chanter le Te Deum à la basilique Saint-Pierre quand les protestants eurent écrasé les catholiques.

Depuis la Révolution de 1789 , les catholiques de France ont pris l'habitude intellectuellement confortable d'être ultramontains ( ce qui veut dire prendre le parti de la papauté non seulement sur le plan religieux mais aussi sur le plan politique). Au XXe siècle, il s'est trouvé que les causes défendues par la papauté , hostilité au communisme en particulier, coïncidaient avec les intérêts l'Europe occidentale . La question migratoire peut être l'occasion pour les catholiques européens de retrouver en matière politique la saine indépendance d'esprit qui a longtemps fait le génie de l'Europe . Les Polonais et les Hongrois leur montrent l'exemple.

C'est en vain en effet qu' on culpabilise les catholiques , en cette année de la miséricorde, en disant qu'ils manquent de générosité ou qu'ils doivent surmonter leurs peurs. Il est vrai qu'ils ont peur et pas seulement que leurs filles soient violées, ce qui serait après tout légitime pour des pères de famille. Ils ont d'abord peur que l'Europe cesse d'être chrétienne, qu' il lui arrive ce qui est arrivé à l'Asie mineure au cours des siècles : jadis première terre chrétienne, aujourd'hui vidée de ses chrétiens , les massacres de 1916 leur ayant porté le coup final. La population musulmane est en passe d'être majoritaire à Londres et à Bruxelles . Le nouveau maire de Londres est musulman. En prolongeant avec lucidité les courbes actuelles de l'immigration, de la natalité et , il faut bien le dire, de la déchristianisation, c'est toute l'Europe qui le sera à terme plus ou moins rapproché. Sauf miracle sur lequel un homme d'Eglise peut certes miser mais pas un homme d'Etat.

Etre attaché à son pays, à sa patrie, à sa civilisation est le sentiment le plus noble qui soit. Il est aussi le plus puissant : jamais dans l'histoire le sentiment religieux ne l'a emporté sur le sentiment national ou identitaire. Le catholicisme en Pologne ou en Irlande , l'orthodoxie en Russie ou en Serbie, l'islam dans le monde arabe et au Pakistan n'ont eu tant de force , comme l'avait si bien compris Jean Paul II, que parce qu'ils s' identifiaient à la nation. Il est vrai que le chrétien se doit d'être " tout à Dieu" et donc , croit-on, d'être prêt à tout lui sacrifier , y compris sa patrie . Mais sacrifier sa patrie , n'est ce pas cesser d'être ? Et avant d'être chrétien , ne faut-il pas être tout court ? Malgré les Lumières, une partie de l'Europe sent que son identité est inséparable de l'héritage chrétien. L'idée que ce sentiment, parfaitement naturel, le mette en contradiction avec ses pasteurs qui ne verraient là, fort injustement, qu'une forme d'égoïsme, risque de gravement les détourner d'eux.

Roland HUREAUX

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12 juillet 2016 2 12 /07 /juillet /2016 16:34

Publié dans la Revue politique et parlementaire

Comment a été possible cette chose incroyable : les gouvernements français ont apporté une aide importante en armes, en entraînement militaire et même un appui occasionnel direct sur le terrain aux forces d'opposition islamistes en Syrie de 2001 à 2005.

Sans doute la posture de la France en Syrie a-t-elle changé depuis les attentats du Bataclan. Laurent Fabius qui s'était particulièrement engagé dans cette politique a rejoint le Conseil constitutionnel. Nous avions combattu le gouvernement Assad et désormais, nous ne combattons plus, nous dit-on, que Daesh et Daesh seulement. Mais même si nous ne combattons plus l'armée syrienne officielle du gouvernement de Bachar el Assad , nous continuons à proclamer que nous voulons le départ de ce dernier. Quant aux autres mouvements rebelles que nous aidions, presque tous islamistes, l'ambigüité reste de mise.

L’attentat du 7 janvier 1995 qui semblait pourtant montrer des liens entre les auteurs et certains mouvements islamiques au Yémen, n'avait pas suffi à faire bouger d'un pouce la posture française. Il a fallu que s'y rajoutent les attentats du 13 novembre revendiqués bruyamment par Daesh pour que les Français changent enfin leur fusil d'épaule et cessent de faire la guerre aux cotés des islamistes contre le gouvernement Assad - et tous ceux que ce dernier protégeait, notamment les chrétiens tombés en quatre ans dans ce pays de 2 millions à 1,2 millions.

Un engagement aberrant

Il est vrai qu'officiellement nous n'avons pas aidé Daesh, mais seulement une Armée syrienne libre, composée d'opposants "modérés" au régime, dont on peut se demander si elle a jamais vraiment existé ou des islamistes autres que Daesh, notamment le Front Al-Nosra qui pourtant est le successeur d'Al-Qaïda et qui se trouve sur la liste des organisations à combattre figurant dans la Résolution du 18 décembre 2015 du Conseil de sécurité des Nations Unies.

Il est vrai aussi que nous n'étions pas les seuls, l'alliance en faveur des rebelles syriens, de fait islamistes, étant aussi large que celle qui aujourd’hui prétend combattre Daesh : États-Unis, Royaume Uni, Allemagne (plus active qu'on le croit), Turquie, Arabie Saoudite, Qatar et sans doute Israël. N'y manquaient que la Russie et l'Iran qui soutenaient au contraire le gouvernement Assad quoique pas autant qu'aujourd’hui.

Mais cette alliance ne suffit pas à rendre compte de la véhémence de l'engagement français au moins sur le plan diplomatique : Fabius disant à la tribune des Nations Unies que Bachar El Assad "ne méritait pas de vivre" : même Roosevelt ne disait pas cela d' Hitler. Juppé n'avait pas été en reste, annonçant en 2011 que Assad n'en avait que pour une semaine. Sarkozy, Hollande furent au diapason. Les médias français, AFP en tête, violant toutes les règles de la déontologie, n'eurent d'autre source qu'un Observatoire syrien des droits de l'homme, basé à Londres, tenu par un frère musulman à la fois juge et partie.

Il y eut les actes : la rupture des relations diplomatiques (ce que nos partenaires n'ont pas eu la stupidité de faire), la fermeture du Lycée français (qui continue à fonctionner en autogestion grâce à des parents syriens), le refus de toute collaboration avec les services de sécurité syriens, qui est sans doute une des raisons pour lesquelles nous n'avons pas vu venir les attentats de 2015. Il est clair que personne au Quai d'Orsay ne se souvenait de ce vieux proverbe arabe qui devrait être inscrit sur la porte de toutes les écoles diplomatiques : "Traite ton ennemi comme s'il devait un jour être ton ami ; traite ton ami comme s'il devait un jour devenir ton ennemi".

Le temps n'est plus de ramener à la raison les auteurs de ces dérives , il est de comprendre comment ils ont pu , à ce point, la perdre.

Incompétence, corruption

Pour expliquer un comportement aussi aberrant, il faut bien sûr faire la part de l'incompétence. Aucun des quatre protagonistes principaux de la diplomatie française, Sarkozy, Juppé, Hollande et Fabius n'avait fait de la diplomatie sa préoccupation principale au cours des dernières années. Il était facile de prévoir que le régime d'Assad appuyé sur une majorité alaouite menacée de mort et sur une Russie qui ne lâche jamais ses alliés, ne céderait pas la place en une semaine comme le pronostiquait sottement Juppé. La diplomatie française, qui a fini par se trouver complètement en porte à faux, peine à trouver des justifications pour le revirement auquel les faits l'ont contrainte aujourd’hui. "C'est Assad qui fait le lit de Daesh" ont dit conjointement Fabius et Juppé, alors même que c'est l'armée syrienne qui, depuis cinq ans lutte seule sur le terrain contre les islamistes et que, si elle ne l'avait pas fait, Daesh serait aujourd'hui à 60 km de Jérusalem. Pour ces gens là, si Daesh monte, c’est la faute de « Bachar » puisqu’il les combat, mais pas la faute de ceux qui financent Daesh – Arabie, Qatar, Turquie, Occident. Sarkozy n'est pas en reste en traitant de « gugusses » les députés qui on fait le voyage de Damas pour tenter de débloquer une situation complexe. Notre diplomatie a fini, après toutes les autres, par comprendre que la cible principale devait être Daesh et sa réserve de terroristes : comme le dit Olivier Berruyer, « il a fallu 4 ans pour comprendre qu’un dictateur laïc qui ne nous menace pas est largement préférable à des wahhabites adeptes du djihad… Ça fait cher la leçon de diplomatie quand même… » D'autant que trois des principaux protagonistes sont parmi les gens les plus diplômés de France (deux Normale Sup-ENA et un HEC-ENA).

On peut aussi expliquer cette ligne aussi excessive qu'absurde par l'argent et les intérêts. Pas tant ceux qui sont liés au pétrole saoudien dont les prix s'effondrent car les pays producteurs ne savent quoi en faire, mais ceux qui concernent les marchés juteux, en particulier d'armement, que nous avons trouvés dans la péninsule arabique. L'argent des monarchies a permis à Daesh et aux autres mouvement rebelles islamistes de Syrie et d'Irak d'acheter des armes à la France. Nous avons agi en marchands de canon : c'est ainsi que les successeurs de Jaurès font la politique étrangère.

Inféodation

Il faut prendre aussi en compte le suivisme pur et simple. Depuis la réintégration complète de l'OTAN opérée par Sarkozy en 2008[1], il n'y a plus de politique indépendante de la France qui tienne. La France s'étant ainsi liée, il ne lui restait qu'à obéir aux dirigeants américains, lesquels étaient sous influence des idéologues néoconservateurs. Cet état d'esprit suiviste que l'on observe aussi dans le refus de livrer les Mistral à la Russie par Hollande, ordonné par Washington, présente un avantage : il dispense de réfléchir. Exécuter est plus facile que décider par soi-même, surtout si on manque de ces points de repère et de la vision qui sont nécessaires pour faire des choix.

Mais ce suivisme ne justifiait pas que la France tente à plusieurs reprises de faire de la surenchère, notamment dans la crise d'août 2013 où une attaque à l'arme chimique a été attribuée au gouvernement de Damas et a failli entraîner une guerre élargie. C'est finalement Obama, avec l'aide de Poutine, qui a calmé le jeu mais la France surexcitée était prête à frapper la Syrie sans tenir compte des conséquences incalculables que cela aurait pu avoir. Alors que ses dirigeants savaient dès le départ que l'usage de ces armes n'était pas le fait de Damas. Aujourd’hui, avec la constitution de la grande coalition contre Daesh en août 2015, « la diplomatie française est la dernière, ou presque, à s’en tenir à la ligne du refus de toute discussion avec Bachar qui était celle de Nicolas Sarkozy et la mienne. » dit Alain Juppé. Hollande a cependant infléchi la position de la France dans le dossier syrien: Bachar el-Assad, dit-il, « ne peut constituer l'issue en Syrie, mais notre ennemi, c'est Daesh ».

En tous les cas, la France s'est parfaitement pliée au jeu des États-Unis qui était , bien avant les printemps arabes, de détruire le régime d'Assad. Selon un article de l’avocat Robert Kennedy Junior, neveu de JFK, publié dans le magazine américain Politico : « La décision américaine d’organiser une campagne contre Bachar el-Assad n’a pas commencé avec les manifestations pacifiques du printemps arabe en 2011, mais en 2000, lorsque le Qatar a offert de construire un pipeline pour dix milliards de dollars qui traverserait l’Arabie saoudite, la Jordanie, la Syrie et la Turquie. »[2]

Le rôle de l'idéologie

Incompétence, cupidité, inféodation : il y a aussi l'idéologie, inséparable de l'inféodation. De même que, dans les années 1940-45 ("les heures les plus sombres de notre histoire") l'idéologie de la Révolution nationale avait servi de paravent à notre inféodation à l'Allemagne, l'idéologie droit-de l'hommiste a servi dans les affaires du Proche-Orient, de couverture à notre inféodation aux Etats-Unis. Le droit de promouvoir par la force les idéaux occidentaux de la démocratie et des droits de l'homme, est le fond de la pensée tant des néoconservateurs américains que des socialistes français. Comme toutes les idéologies, celle-là est simplificatrice, elle fait perdre de vue la complexité du réel, spécialement au Proche-Orient. Comme toutes les idéologies, elle est messianique : elle implique que nous entrons dans une ère nouvelle où régneraient le libéralisme économique et la démocratie élective, dont il faut précipiter l'avènement (« la fin de l'histoire » disait Fukuyama). Comme toutes les idéologies, elle obéit à la « loi des effets contraires au but recherché » (Hayek): au lieu de la protection des droits, le massacre de centaines de milliers d'individus (4 millions, dit Michel Onfray, principalement en Irak), le déclenchement de guerres excessivement meurtrières, en Syrie notamment, et l’encouragement aux islamistes qui promettent tout sauf une démocratie à l'occidentale. Ajoutons y l'antichristianisme qui fait le fond de presque toutes les idéologies de droite et de gauche, ces guerres ayant été fatales aux chrétiens d'Orient que la diplomatie française se faisait fort, depuis cinq siècles, de protéger et qu'elle a totalement ignorés au cours des dernières années. .

L'idéologie obscurcit l'esprit , divisant le monde de manière sommaire entre les bons et les méchants. Il ne faut pas chercher ailleurs que dans l'idéologie l'obscurcissement du cerveau des responsables de notre diplomatie. et de nos médias. Mais elle n'abêtit pas seulement, elle rend aussi furieux. Ce manichéisme sommaire a conduit à faire de Bachar el-Assad une sorte de nouveau Léviathan, au mépris de la réalité historique qui place les dictatures classiques très en deçà des régimes vraiment totalitaires comme la Corée du Nord. Ce manichéisme conduit les dirigeants à transformer l'action diplomatique en une propagande grossière. Un des agents de cette propagande, Bernard-Henri Lévy, est ainsi tombé dans le travers idéologique que le nouveau philosophe qu'il était dénonçait autrefois en URSS, retournement qui est assez habituel dans l'histoire des idées où ceux qui dénoncent les paille dans l'œil du voisin se retrouvent généralement avec une poutre dans le leur. On n'a pas dit qu'Assad était une vipère lubrique, mais Fabius n'a-t-il pas dit pire ? A peu près toutes les turpitudes qui lui ont été prêtées ont été démenties ou demeurent douteuses : assassinat d'Hariri, massacre de Homs, usage d'armes chimiques. Cela n'a pas empêché un Fabius de réitérer ses accusations à la radio le matin de son départ du ministère.

La frénésie idéologique fait éclater les règles élémentaires de la prudence administrative, notamment le souci de s'appuyer sur une administration objective. Concernant l'affaire des armes chimiques, Georges Malbrunot et Christian Chesnot ont révélé que la conclusion du rapport rendu public par la France avait été « élaguée » par le conseiller spécial du ministre de la Défense pour manipuler l’opinion publique et la pousser à la guerre. Une des hypothèses faite par les informateurs dans leurs rapports était la suivante : « Il est possible que des bombardements classiques de l’armée syrienne sur un laboratoire clandestin des rebelles ait provoqué une fuite de gaz. Mais cette conclusion a été « purement et simplement coupée » du texte du rapport final".

Deux rapports, l'un du MIT, l'autre de la Commission d'enquête de l'ONU sur la Syrie, basée à Genève, ont enlevé toute crédibilité à l'hypothèse de la culpabilité d'Assad (ce qui ne veut pas dire qu'il soit innocent sur tous les sujets mais qui, au Proche-Orient et ailleurs , l'est ?)

Si l'inféodation aux États-Unis et l’intérêt mercantile sont, sur fond d'incompétence, les déterminations en dernière instance de l'action calamiteuse de la France au Proche-Orient au cours des dernières années, l'idéologie a constitué un multiplicateur qui a fait perdre tous les repères aux acteurs concernés, jusqu'à brouiller gravement leur jugement.

L'opinion commence à prendre conscience du caractère monstrueux d'une diplomatie qui a conduit à armer les islamistes (qui massacraient les chrétiens, nos protégés ) dans les quatre années qui ont précédé les attentats de Charlie et du Bataclan. Aujourd’hui, les yeux s'ouvrent peu à peu : il ne faudra pas longtemps pour que nos concitoyens prennent pleinement conscience de la manière dont notre pays s'est déshonoré au cours de ces années.

Roland HUREAUX

[1] Il y avait encore quelques interstices à remplir. Il y a quelques jours, le Parlement français a ratifié un protocole comblant cette lacune: désormais nos bases et nos états-majors seront la disposition permanente de l'OTAN. Hollande parachève l'œuvre de Sarkozy.

[2] Boulevard Voltaire , 29 février 2016

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12 juillet 2016 2 12 /07 /juillet /2016 15:00

AMNESTY INTERNATIONAL ACCUSE DE CRIMES DE GUERRE LES GROUPES REBELLES SOUTENUS PAR LES OCCIDENTAUX (DONT LA FRANCE) EN SYRIE.

Paru dans Atlantico

Un rapport qui tombe mal pour les gouvernements occidentaux, dont la France, qui continuent d'aider en sous-main en Syrie les groupes rebelles islamistes autres que Daesh, y compris Al Nosra, branche syrienne d'Al Qaida . Le Front al Nosra avait pourtant été condamné au même titre que Daesh par la résolution 2253 du Conseil de sécurité du 17 décembre 2015.

L'obsession de renverser le gouvernent Assad, toujours tenu pour l'ennemi numéro 1, les a conduits depuis cinq ans à livrer des armes et à entraîner différents groupes rebelles islamistes tenus pour démocrates, un qualificatif dont personne n'est dupe.

Après avoir largement dénoncé au cours des dernières années, le gouvenrment officiel , Amnesty international vient de publier un rapport [1] accablant sur cinq de ces groupes armés choyés par les Occidentaux, actifs dans les régions d'Alep et d'Idlib depuis 2012 : le Mouvement Nour al Dine Zinki, le Front al Shamia et la brigade 16, qui ont rejoint la coalition de groupes armés "Conquête d’Alep" (Fatah Halab) en 2015, ainsi que du Front al Nosra et le Mouvement islamique Ahrar al Sham à Idlib .
"Certains groupes armés non étatiques définissent leurs propres systèmes judiciaires fondés sur la charia (loi islamique) dans les zones qu'ils contrôlent, et mettent sur pied des forces de police et des centres de détention non officiels. Ils nomment également des juges, dont certains ne connaissent pas la charia.(...)"

Le rapport recense 24 cas d'enlèvements par des groupes armés. "Parmi les victimes figurent des militants pacifiques et même des mineurs, ainsi que des membres de minorités pris pour cibles uniquement en raison de leur religion (entendons des chrétiens)." Ces enlèvements sont généralement suivis de torture ou d'exécutions.

On apprend aussi que la "Nouvelle armée syrienne", de la même mouvance anti Assad, anti Daesh , supposée non islamiste, formée en Jordanie par les Américains et les Britanniques vient d'être taillée en pièces par Daesh à Boukamal (frontière irakienne)[2].

L'obstination des gouvernements occidentaux à soutenir ces groupes tout aussi criminels que Daesh ( sans le revendiquer , Al Nosra s'est réjouit de l'attentat de Paris du 13 novembre dernier) résulte de la volonté des Etats-Unis de contrer la Russie et a pour effet de prolonger la guerre , avec les immenses souffrances qu'elle entraîne pour les populations, particulièrement les chrétiens que les groupes islamistes ont pour cible. Et le flux de réfugiés continue.

Amnesty international va jusqu' à accuser ces groupes que nous aidons ou avons aidés de crimes de guerre, ce qui laisse supposer que les gouvernements qui les soutiennent sont complices des mêmes crimes.

Cette politique , peu connue du grand public et particulièrement scandaleuse, est mal vécue par tous ceux qui ont à cœur le sort des chrétiens d'Orient, que la France se faisait depuis des siècles un point d'honneur de protéger. Une obligation à laquelle même le gouvernement du petit Père Combes se sentait lié et qui se trouve bafouée depuis cinq ans.

L'aide française aux mouvements djihadistes (puisque il faut les appeler par leur nom) est coordonnée depuis cinq ans, de l'Elysée, avec un zèle particulier, par le général Benoît Puga , chef d'état major particulier du Président de la République . Nommé par Sarkozy, il a été, de manière tout à fait exceptionnelle, probablement sur demande de l'OTAN , maintenu en place par Hollande .

Libéré de ses fonctions depuis le 1er juillet, il est pressenti pour devenir Grand Chancelier de l'Ordre de la Légion d'honneur, belle récompense pour avoir mis en œuvre une politique qui déshonore la France. La perspective de cette nomination, habituellement consensuelle, suscite déjà des murmures. Il n 'est pas impossible que, si elle était confirmée, la politique de la France en Syrie se trouve sous le feu de projecteurs, ce qui ne ferait pas forcément l'affaire de ses promoteurs.

Roland HUREAUX

[1] http://www.amnesty.fr/Presse/Communiques-de-presse/Syrie-Enlevements-torture-et-executions-sommaires-aux-mains-des-groupes-armes-18746

[2] http://www.lorientlejour.com/article/994020/la-nouvelle-armee-syrienne-mise-en-echec-par-lei-a-boukamal.html

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6 juillet 2016 3 06 /07 /juillet /2016 15:30

▶ 21:19

https://www.youtube.com/watch?v=cw9YWrxciNU

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6 juillet 2016 3 06 /07 /juillet /2016 15:24

Si l'Union européenne était une institution ordinaire, disons naturelle, de coopération entre les peuples, le Brexit n'apparaitrait pas comme un événement si grave ; il arrive que dans un club de nouveaux membres entrent, et que d'autres sortent sans qu'on en fasse tout un plat.

Tel n'est pas le cas de l'annonce, le 23 juin dernier, du vote du peuple britannique en faveur de la sortie du Royaume-Uni de l' Union européenne .

La plupart des commentateurs annoncent, ou même tiennent pour évident que le Royaume-Uni sera confronté à des difficultés de toutes sortes, que son vote a été suicidaire. Des experts autoproclamés, ou qui répètent ce qu'ils ont entendu, ont calculé que la perte britannique en termes de PIB serait d'au moins 1 % par an. Evaluation de la plus haute fantaisie bien entendu, comme celle qui nous annonçait que l'adhésion au traité de Maastricht nous amènerait deux points de croissance en plus : on a vu ce que valent ces prévisions qui ne sont que de la propagande la plus grossière.

La Bourse de Londres a baissé dès que les sondages ont laissé prévoir la victoire du Brexit , soit le 23 à minuit : mais la Bourse ne pronostique pas ce qui va se passer, elle pronostique ce que le public ( de fait , les médias, plus orientés que jamais ) vont pronostiquer. La livre aussi a baissé mais qui ne voit que la compétitivité britannique s'en trouvera accrue ? Plus calme , David de Rothschild se contente de dire que «Le Brexit n'est pas une tragédie économique. »

Le Royaume est même, dit-on, menacé de dislocation par le vote dissident de l'Ecosse et de l'Irlande du Nord . Peut-être, mais ne l'était-il pas de toutes les façons du fait de la politique régionaliste et antiétatique de Bruxelles?

On prétend que la sortie du Royaume-Uni va entrainer la renégociation de milliers de règlements européens ou d'accords avec les pays tiers , que tout cela sera immensément compliqué. Ignore-t-on que le droit international prévoit que les accord passés demeurent en vigueur (théorie de la succession d'Etat ) même si le contexte a changé, sauf impossibilité manifeste ou si l'une des parties en décide autrement, ce que rien n' impose ?

Que dirait-on si le Royaume-Uni ne se trouvait déjà en dehors des deux régimes les plus contraignants : la monnaie unique et l'espace de libre circulation ?

On dit que la Cité de Londres perdra son rôle international alors que c'est au contraire la crainte de le perdre au bénéfice d New York qui a poussé une partie de cette antique institution vers le Brexit , ce rôle international étant, selon elle, menacé par les règles actuelles et à venir de l'Union européenne.

Des alarmes encore plus grossières sont répandues parmi les Britanniques résidant en France : qu'ils ne pourront pas continuer de résider , qu'ils ne bénéficieront plus de la couverture maladie , qu'ils seront plus imposés.

On dit même que les Français ne reteindront plus les migrants à Calais ou que les produits britanniques ne pourront plus se vendre sur le continent, comme si les règles de l'Union européenne n'étaient pas, pour l'essentiel, la transposition de celles de l'OMC.

Le Conseil européen , à la suite de la plupart des hommes politiques de l'Europe continentale, Merkel et Hollande en tête, ne s'est pas comportée plus sereinement. Son approche est apparue crispée et punitive : "Puisque ils veulent s'en aller , qu'ils s'en aillent et vite". Au mépris de l'article 50 du traité de Lisbonne et même de la souveraineté britannique qui prévoit une procédure assez longue , on veut imposer aux Anglais un tempo rapide.

L'Union européenne, plus exposée que le Royaume-Uni

Si on prédit les pires catastrophes aux Britanniques, on dit moins que l'Union européenne pâtira encore davantage du Brexit et c'est peut-être ce qui explique la crispation des restants .

Des gens qui ont toujours adhéré au principe démocratique, en Grande-Bretagne et en France, sont remplis de hargne contre l'irresponsabilité de Cameron, coupable à leurs yeux d'avoir poussé l'imprudence jusqu'à donner la parole au peuple britannique.

C'est qu'ils sentent que le départ du Royaume-Uni menace tout l'édifice européen. On s'en souvient : Bruxelles avait eu recours aux pires acrobaties pour retenir dans l'euro Chypre ( 0,1 % du PIB de l'UE) et la Grèce ( 1,2 % du PB), car leur départ , en dépit de son impact économique négligeable, se heurtait au dogme de l'irréversibilité de l'euro et l'Europe (de Bruxelles).

Dès lors que l'on n'a pas affaire à une construction naturelle , mais à une construction idéologique, tout retour en arrière, que ce soit en étendue (le retrait d'un pays) ou en profondeur ( l'abandon d'une compétence) remet en cause le caractère eschatologique de l 'entreprise et donc sa raison d'être. Une construction idéologique c'est , comme le socialisme, une sorte d'utopie que l'on veut transposer dans le réel, une tentative de refondation du monde, fondée de nouveau principes, faux car le monde ne se refonde pas. Dès que toute le monde ne joue plus le jeu, que quelqu'un, comme l'enfant du conte d'Andersen, ose dire que le roi est nu, le charme cesse. D'où l'intolérance frénétique des tenants du projet envers tous ceux qui ne jouent pas le jeu, pas seulement les Britanniques.

L' argument les plus employé lors des débat référendaires français de 1992 et 2005 avait été : "si l'Europe ne poursuit pas sa marche en avant, elle s'effondrera et la paix mondiale sera menacée". Nous voyons comment , dans le contexte actuel, cet argument se retourne contre les partisans de la construction européenne et pourquoi on ne le met pas en avant.

Staline disait déjà au moment de la collectivisation des terres (1929) : "si le socialisme n'avance pas, il recule". On avait déjà vu comment s'était effondré le régime soviétique : presque d'un coup dès lors que, à la suite de l'accident de Tchernobyl, Gorbatchev avait lancé le mot d'ordre de la perestroïka, c'est à dire , en fait, celui, d'un retour à une politique naturelle, la négation même d'un système idéologique fondé sur l'illusion et le mensonge.

On peut imaginer les menaces qui pèsent désormais sur l'Union: l'euro en est le maillon faible : il ne se survit que parce que la Banque centrale européenne poursuit sa fuite en avant inflationniste ( en langage distingué, inflation se dit quantitative easing ) au grand dam des dirigeants allemands qui pour une fois n'ont pas le dernier mot car la logique idéologique ( la survie de l'euro à tout prix) prévaut. Quelle autorité aura l'Union pour imposer un nouveau train de réformes à la Grèce à la prochaine crise ? D'autres pays , les les moins bien accrochés au wagon, comme la Pologne ou la Hongrie, voire la Finlande, pourraient réclamer assez vite un référendum.

Face à ce risque de débandade, les dirigeants de l'Europe de Bruxelles seraient sans doute tentés d'appliquer le doctrine Brejnev de la "souveraineté limitée" telle qu'elle fut définie au sein au sein du bloc socialiste en 1956 et 1968 et d'envoyer des chars pour ramener le récalcitrant dans le rang. Jean-Claude Juncker en a déjà formulé la théorie : « Il ne saurait y avoir de choix démocratique contre les traités européens.» Mais le Royaume-Uni est un gros morceau à avaler ! L'Union européenne , malgré tous ses défauts, n'en est pas encore là ; au demeurant, elle n'a pas de chars. C'est ce qui la distingue, et heureusement, de la défunte Union soviétique.

Un autre scénario serait celui de Yougoslavie de 1947 : exclue du bloc soviétique pour "révisionnisme" et mise en quarantaine afin de dissuader de toute dissidence et consolider le reste du bloc. Une comparaison que certains trouveront paradoxale sachant que l'intégration européenne a commencé à cette époque, précisément pour contrer le bloc soviétique ! L'Union serait en même temps durcie par une couche supplémentaire d'intégration : c'est ce qu'esquisse le plan Merkel-Hollande de renforcement de l'Union élaboré à la hâte en riposte au Brexit. Le scénario d'un anathème durable parait cependant improbable . Le blocus continental appartient au passé ! Les liens de fait entre le Royaume-Uni et le continent sont aujourd'hui trop nombreux. En outre , et ce n'est pas le moindre des arguments, ce dernier demeurant dans l'OTAN , Washington ne le permettrait pas. Que , selon le principe que l'"Union rebondit toujours sur ses échecs ", une nouvelle couche de centralisme communautaire soit infligée à ceux qui restent , n'est en revanche pas à exclure, au risque d'amener au pouvoir les partis anti-euro.

Il reste à l'Union, comme à tous les faibles, la cautèle, la manœuvre pour ramener peu à peu la brebis égarée au bercail. C'est ce qui a réussi pour l'Irlande et le Danemark ( qu'on a fait revoter), pour la France ( dont le vote très clair du référendum de 2005 été désavoué par le Parlement à l'initiative du président Sarkozy), pour les Pays-Bas.

Il sera certes difficile de réintégrer formellement le Royaume-Uni mais on peut envisager que , sorti en gros d' l'Union, il la réintègre en détail. Ce n'est pas techniquement impossible, surtout si le négociateur britannique est complice. La mise à l'écart de Boris Johnson dont on pouvait redouter non seulement les sentiments pro-Brexit mais la forte personalité et donc la capacité à dire non est un signe ; le prochain Premier ministre conservateur pourrait être Theresa May, une anti-Brexit, ce qui serait un comble. Tout laisse penser qu' avec la complicité de la partie de l'establishment britannique pro-remain , encore majoritaire , un rouleau compresseur se met en place pour réduire a minima l'impact du vote populaire. La Grande -Bretagne se retrouverait dans la position de la Norvège qui est dans Union européenne sans y être. Pour réussir l'opération, il est probable que les dirigeants européens devront passer de leur première réaction punitive à une autre plus raisonnée , plus tactique, plus technique , mais non moins dangereuse pour la démocratie. C'est ce qu'ils feront le plus probablement car , acculés à la menace majeure que serait l'effondrement rapide de tout l'édifice européen, il n'ont guère d'autre choix que de se faire accommodants.

Roland HUREAUX

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