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Roland HUREAUX

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27 janvier 2013 7 27 /01 /janvier /2013 21:52

Publié par Atlantico


En consacrant  pas moins de quatre  articles à la Manif pour tous du 13 janvier, Marianne.fr a sans nul doute pris la mesure  de l’événement.

Mais à  lire ces articles, on devine que la rédaction du magazine a fait  grise mine devant  le succès de la manifestation.

Maurice Szafran, son directeur, donne la ligne éditoriale sur un ton apparemment bienveillant. Cette manifestation, dit-il, a  été impressionnante. Elle comprenait, relève-t-il,  surtout des catholiques et des gens de droite  (c’est vrai, même si le vice-président du Consistoire israélite et quelques imams  étaient à la tribune !). François Hollande doit en tenir compte.  En  changeant ses  projets ? Que non : en faisant un « travail pédagogique » à leur égard. Pédagogie, de  παιδός, enfant : pour lui,  ces gens-là sont  de grands enfants. Pédagogie, éducation, rééducation : au moment où les Chinois parlent   de  fermer le  laogai, ils ont  peut-être  des « éducateurs »  à   recycler ?   Idée.  « Elle n’éprouve pas le moindre doute, cette part de France (les manifestants) ».    Le directeur de Marianne  non plus : ce sont les manifestants  qu’il  faut rééduquer, pas  les promoteurs du projet. Il ne remet pas en cause ses certitudes, pire : il  n’envisage même pas qu’on puisse les  remettre en cause ; que l’on puisse tenir l’extension du mariage homosexuel  pour une aberration anthropologique  est une opinion qui , selon lui,  mérite certes de la considération (François Hollande ferait bien d’ y être ouvert )  mais apparemment  aucun respect intellectuel : ceux qui la partagent, « fermés sur eux-mêmes »,   sont  à instruire,  à apprivoiser, rien d’autre.

L’idée que le mariage  puisse être  institué  entre deux personnes, quel qu’en soit  le sexe,  fait partie pour Maurice Szafran et les siens,  de l’avenir radieux de l’humanité, des « hauteurs béantes » où le progrès nous conduit inéluctablement. Ceux qui n’ont pas encore compris  comprendront  sans doute si on  le leur explique gentiment.

Et in cauda venenum :   « Il n’y eut apparemment pas de dérapage homophobe tout au long de cet immense cortège. Tant mieux, c’était une exigence et une marque de respect minimum. Et pourtant... » . Tout est dans ce « Et pourtant… », particulièrement odieux.  La loi de suspects n’est pas loin :   la pointe du  soupçon est glissée  alors qu’on vient de dire qu’ il  n’avait pas  le moindre fondement.

« Marque de respect minimum » ? Et qu’aurait été une « marque de respect maximum » ?  De se taire et de se rallier sans  sourciller aux thèses d’Act Up ?  Et oui, même  si rien n’en transparait, ces gens  pourraient  bien  être homophobes !  Méfions-nous : si un animal dépourvu du tatouage de la pensée unique se promène dans les rues, c’est que,  comme le disait le regretté Philippe Muray,  la « cage aux phobes »  est encore  ouverte. Et pas un peu, cette fois, un million de phobes   en divagation ! Que fait la SPA ?   Soupçon  pour soupçon : que  ces gens-là puissent  avoir des raisons que la raison n’ignore pas  et qui, qui sait ? sont  peut-être de bonnes raisons, en est un qui n’effleure  pas une seconde le patron de Marianne !

En consacrant ensuite un long article à Valérie Merle, épouse Telenne, plus connue sous le nom de  Frigide Barjot,  Marianne.fr   ne se trompe pas   sur le rôle essentiel que cette personnalité atypique  a joué. Si elle n’avait pas été là, il ne se serait sans doute à peu près rien passé.   Bon ! L’article n’est pas globalement antipathique. Ce serait d’ailleurs difficile,  la connaissant. Que l’on rappelle  ses  affinités catholiques plus anciennes qu’elle ne le laisse croire, très bien, ses états de service à droite, c’est de bonne guerre.  Mais fallait-il  aller jusqu’à évoquer    son appartement, le montant de son loyer,  les origines de la  fortune  de son père, ses supposées difficultés conjugales ? Que Marianne n’aime pas la Manif’ pour tous, c’est son droit,  mais fallait-il pour autant tomber dans  le  caniveau ? Et M.Szafran,  combien de loyer paye-t-il ? Il serait  propriétaire ? Alors  d’où  vient sa fortune ? Et les militants LGBT dont personne ne nous dit qui il sont, de quoi vivent-ils ? Combien  payent-ils de loyer ?  S’entendent-ils si bien avec leur futur éventuel « conjoint » ? Marianne nous dira-t-il tout cela aussi ? Nous espérons bien  que non !  Car l’honneur d’une certaine   presse est en jeu. Mais alors,  il ne fallait pas commencer avec Frigide Barjot !

D’autant que, de ces ragots, aucune source n’est  citée. Les initiés la connaissent : un blog anonyme,  écrit par un barjot, un vrai  celui-là, un de ces nombreux hystériques que la personnalité  charismatique de Frigide Barjot  suscite. De qui s’agit-il ? Voilà ce que Marianne.fr  aurait pu nous apprendre.  

Enfin, l’article que tout le monde attendait : le Front national dans la Manif’  pour tous : en réalité une    toute petite composante que l’on avait,  après tout, le droit d’étudier. Mais par derrière cette étude,  un  message subliminal vicelard : sous  ces gentils cathos  qui défilent, méfiez-vous : c’est  en fait  le Front national qui  avance  masqué.   Derrière la marée de fanions roses, la  gaité, la jeunesse (qu’un autre témoin a trouvée « ennuyeuse »), la créativité  extraordinaire de cette manifestation, presque entièrement organisée par des moins de 25 ans,  pourrait bien ramper la bête immonde.

C’est sans doute pour cela que Simone Veil  s’est  mêlée  un moment aux manifestants ! Mais ça,  Marianne ne le dit pas.

Que n’  a-t-on, au  lieu de ce    mélange de condescendance, de fausse gentillesse et de vraies vacheries, entamé un débat de fond  sur la division de la société française entre ceux pour qui le mariage dit « gay » (l’est-il tant que cela ?) est une évidence, et ceux pour qui il est une absurdité,  cela  sans préjuger de qui a raison. Pourquoi   une telle  césure   ? Le dialogue est-il possible (nous craignons que non !) ?  Quels  risques fait courir au pays  François Hollande  à  soulever un tel débat (« navrant »  en effet, Monsieur Szafran)  dont au fond la France aurait pu ( et ça  c’est  une opinion vraiment majoritaire ! )  se passer ? A voir sans doute au prochain numéro.

Ainsi, Marianne qui, au temps de Jean-François Kahn ou de Philippe Cohen,  avait su trouver une place originale  dans la presse française, est rentré dans le rang libéral-libertaire. Sur un sujet majeur, ce magazine (à tout le moins son blog)  s’aligne   sans  nuances sur le politiquement correct. Malgré quelques foucades contre les riches ou tel  ou tel scandale, qui  sont un peu le pendant à gauche,  des  écarts populistes de Jean-François Copé,   sources de mini-remous, qui cachent  mal  son alignement libéral, Marianne  s’ est rangé    dans le grand parking des idées convenues du lilisme,  quelque part entre Libé et le Nouvel Obs . Imprévisibilité zéro. Dans une presse française qui épouse à 90 % la même ligne, à quoi sert-il  encore ?      

  Roland HUREAUX

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27 janvier 2013 7 27 /01 /janvier /2013 21:50

 

Face à la montée des oppositions au projet de loi sur le « mariage pour tous »,  le gouvernement allègerait le projet d’un ses  aspects les plus controversés : le droit des couples homosexuels à  « commander »  des bébés par PMA.

Cet amendement ne saurait susciter  que la méfiance  des  opposants au projet, non seulement parce qu’il est loin de satisfaire leur souhait, qui est,   pour la plupart, son  retrait pur et simple, mais aussi  parce qu’il risque de n’être qu’une concession de façade : ne dit-on pas déjà au lobby « gay » que sa  revendication,  provisoirement dissociée,  sera satisfaite  dans une loi ultérieure  sur la famille ou  la bioéthique  ? Et à supposer qu’elle  ne soit pas satisfaite  par la loi française, nous avons signé suffisamment de conventions internationales contre  toutes les formes de  discriminations  pour être un jour obligés de  le faire.

Mais ce n’est pas seulement sur ce sujet qu’aucun compromis n’est possible face au projet de loi.

 

Oublier les schémas classiques de négociation

 

Nous  ne sommes pas en effet  dans le  schéma  d’une négociation   classique portant sur des intérêts objectifs. Un  tel schéma  est bien  connu : je demande 100, vous m’offrez 20,  nous transigeons à 60.

Pour résonner de  cette manière, il faudrait supposer que nous ayons en face de nous un véritable groupe de pression  ressentant vraiment une discrimination, défendant vraiment des  intérêts  particuliers (fiscaux, sociaux ou autres). Auquel cas,  un compromis  serait en effet  possible comme il  l’est sur la revalorisation du SMIC ou les prix agricoles.

 Or tel n’est pas le cas.    Non seulement les homosexuels effectifs sont très minoritaires, mais seule une partie de ceux-ci sont partisans du mariage homosexuel, et une partie de ces  partisans  seulement  a vraiment le désir de se marier. Et pas pour des avantages matériels, pour le symbole !

Nous ne sommes pas dans une négociation classique parce que   la revendication est purement  idéologique. Ce que cherchent avant tout   les militants du lobby LGBT, c ‘est de faire reconnaitre par la loi la stricte  équivalence d’une relation homosexuelle et d’une relation hétérosexuelle. L’équivalence biologique  n’  étant pas possible, la loi doit passer outre et « faire comme si » les homosexuels pouvait être père et père en leur donnant des droits strictement égaux d’avoir recours à la  PMA ou d’adopter. L’idéologie, ce n’est pas nouveau,  exige que la loi corrige la nature, voire la nie.

Le  gouvernement   aurait pu se contenter de proposer un additif au code civil étendant  les droits des couples de droit commun aux couples formés par des homosexuels. Or il est allé  beaucoup plus loin : il a choisi de    bouleverser le droit de la famille dans son ensemble et  de changer la définition légale  du mariage  de tous , y compris de  l’immense majorité  hétérosexuelle, suscitant ainsi  la révolte de beaucoup qui  n'étaient  pas au départ hostiles au projet. Un   parti aussi radical ne serait pas compréhensible sans l’idéologie. Procéder autrement, c’eut été, du point de vue de l’  idéologie, continuer à traiter le couple homosexuel comme un cas à part : précisément  ce que l’on  veut abolir.

La conséquence  qu’  on pourrait dire mathématique  de cette démarche  est l’abolition, dans la foulée,  de la différence homme femme (père mère, grand-père   grand-mère, oncle  tante etc.) dans la loi   :

Si h x f  = h x h, ou si h x f = f x f,   c’est   que h = f !  Cqfd.

 

En finir avec le mariage

 

Pourquoi une telle exigence ?  Au premier abord, il s’agit de l’application pure et simple de l’idéologie du genre qui nie la différence naturelle  de l’homme et de la  femme pour n’en faire qu’une  réalité culturelle (que le législateur a dès lors le pouvoir et,  au motif d’égalité,  le devoir d’abroger).

Mais,  par-delà, se trouve  la volonté d’en finir avec  l’institution matrimoniale elle–même, puisque les tenants du  projet ne cachent pas que  leur souhait   est à terme de vider le mariage de son contenu  en supprimant  les  obligations, tenues pour résiduelles,  de fidélité, de corésidence, voire de soutien  mutuel.

Quelles motivations derrière ce projet fou ? On peut invoquer  la haine de l’héritage judéo-chrétien, qui est aussi la haine de la nature et donc la haine de soi, fondement  de toutes les idéologies.  La volonté de certains homosexuels    de se déculpabiliser en demandant à  la loi civile d’abolir une loi morale  millénaire et quasi-universelle qui proscrit  leur état, est  dans doute une autre motivation. Mais pour vouloir être  déculpabilisé, il faut se sentir  coupable. Cette loi millénaire aurait donc encore tant d’importance  qu'on veuille que  la loi civile vienne l’abroger ?

En considérant le caractère idéologique de la revendication dite « gay », on comprend pourquoi la suggestion   de  tels  hommes politiques voire de  tels évêques, qui proposent comme « moyen terme » d’améliorer  le pacs,  est à côté du  sujet. D’abord qu’elle est inutile,     le pacs  conférant  déjà beaucoup d’avantages. Ensuite  parce que  ceux qui, à l’époque,  l’avaient combattu, ont mauvaise mine à proposer aujourd’hui de l  ’améliorer. S’ils acceptent aujourd’hui le pacs, dira-t-on, ils accepteront demain le mariage : ils sont seulement en retard d’une bataille !  Enfin  parce que cette coûteuse concession  ne serait nullement à même de satisfaire une revendication qui porte d’abord sur les symboles.   

Plus satisfaisante pour les idéologues  serait   l’idée, caressée par’ certains, d’  une « alliance »  homosexuelle qui se conclurait en mairie, ce que la pression des maires et de l’opinion avait évité s’agissant du  pacs.  Pouvoir se pavaner sur le perron d’une mairie  en habit de marié et de mariée serait  en effet pour les militants homosexuels  une grande victoire symbolique même s’ils ne la jugeraient sûrement pas complète.    

Mais au point où en sont arrivés ces idéologues, il n’est pas sûr que même cela leur suffise. Ils attendaient depuis si longtemps un gouvernement qui soit entièrement acquis à leurs  thèses ; compte tenu de l’ampleur de la protestation qui s’élève contre  le projet, ils savent que c’est pour eux le moment ou jamais d’atteindre leur objectif ultime.  François  Hollande qui, dans une parfaite inconscience de  l’immensité des  problèmes anthropologiques sous-jacents , assez typique de la légèreté socialiste, le leur a promis,  donnerait l’impression de « se dégonfler » s’il faisait  aujourd’hui la moindre  concession.

Le gouvernement est ainsi  le dos au mur. Face à l’ampleur du mouvement  que se prépare, seuls un refus du projet par l’Assemblée nationale, par le Sénat ou, si le président le provoque, par référendum,  pourrait lui offrir  une issue où , sans donner l’impression de se renier, il éviterait  une grave cassure de  la société française.

 

Roland HUREAUX

 

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27 janvier 2013 7 27 /01 /janvier /2013 21:49

 

 

Il est beaucoup question ces temps-ci de laïcité.  En son nom, le premier ministre Ayrault avait   récusé les prises de position   des évêques  sur le mariage homosexuel.  Dans une déclaration  très contestée, Vincent Peillon,  ministre de l’éducation nationale,  grand défenseur de ce principe, a voulu interdire aux établissements catholiques d’en débattre.

Peu inspiré sur  le  plan économique et social, le gouvernement socialiste a voulu    faire de la laïcité son cheval de bataille :   en réformant la constitution pour y introduire la séparation des Eglises et de l’Etat (au risque de mettre fin  aux nombreuses exceptions qui  ont  permis jusqu’ ici de l’appliquer avec   souplesse),  en créant de nouvelles instances pour la mettre en œuvre etc.

 Mais de quelle laïcité parle-ton ?

Qui ne voit combien la notion s’est  radicalement  transformée  depuis les débuts de la  IIIe République au point d’en devenir méconnaissable ?

Au temps de Jules Ferry, la  laïcité était inséparable d’une morale.  Laquelle ?  : « Cette  bonne et antique morale que nous avons reçue de nos pères et mères et que nous nous honorons tous de suivre dans les relations de la vie, sans nous mettre en peine d’en discuter les bases philosophiques. ». A  l’école publique, la morale faisait non seulement l’objet d’un enseignement dédié  mais imprégnait  toutes  les disciplines.    Une morale, en continuité avec l’histoire et une morale  universelle : «Ce que vous allez communiquer à l’enfant, ce n’est pas votre propre sagesse ; c’est la sagesse du genre humain, c’est une de ces idées d’ordre universel que plusieurs siècles de civilisation ont fait entrer dans le patrimoine de l’humanité. »  «  Nous avons la même morale » lança  Jules Ferry au  monarchiste  Albert de Mun.   

L’école laïque rappelait avec la même insistance les devoirs envers  la patrie. Et  même si la République a combattu vivement l’Eglise catholique, l’héritage chrétien  se trouvait à chaque page  des manuels d’histoire d’Ernest Lavisse,  par respect   du passé certes,  mais surtout  de l’objectivité, une des composantes de base  de la laïcité !    

 

Le naufrage  de Mai 68

 

Cette  morale laïque a sombré corps et biens dans la foulée de Mai 68.  Le tournant fut  la  suppression des cours de morale à l’école élémentaire : elle se fit sans instruction particulière, par simple constat d’   obsolescence.  De toute la morale et  pas seulement du volet familial ou sexuel. Il devint « interdit d’interdire ». Depuis quelques années, les hommes politiques, de droite ou de gauche,  parlent de la réhabiliter, mais aucun ne l’a  fait.  Peillon ne le fera pas plus que les autres pour la bonne raison que la notion de laïcité a muté.

Elle signifiait la neutralité par rapport aux seules croyances, laissant  intact le socle  de la morale dont   les premiers républicains croyaient, dans la lignée de Voltaire et de Rousseau, qu’il transcendait les dogmes des différentes  confessions. La laïcité  signifie aujourd’hui la neutralité par rapport à la morale elle-même, dont  les formes traditionnelles sont  disqualifiées  et tenues pour relatives – ou évolutives. .

Récusée dans sa globalité,  la morale devient sectorielle – et lacunaire : au  lieu du respect d’autrui en général,  la lutte contre les comportements racistes ou homophobes. Mais pas le respect des personnes âgées : malheur aux catégories qui ne font pas partie du politiquement  correct de l’heure ! Des  morales  idéologiques catégorielles se sont ainsi  substituées  à la morale  universelle. 

Evoquer la famille ou la patrie ou  supposer qu’à côté des droits (en premier lieu les droits de l’enfant)  , il puisse y avoir aussi des devoirs, est tenu pour  anathème. A la morale de l’effort s’est substituée la pédagogie moderne fondée sur le moindre effort : l’actuel ministre, ce n’est pas un hasard,  propose de légaliser  le cannabis ou de supprimer les notes.  Au nom de la neutralité religieuse,  l’héritage chrétien est éliminé ou diabolisé dans ce qui reste des programmes d’histoire.   

C’est dans cet esprit  qu’un  projet comme celui  de mariage unisexe peut être tenu pour laïque, alors même qu’au temps de Jules Ferry et de Ferdinand  Buisson,  il  eut suffi à envoyer son auteur à Sainte-Anne. La PMA pour couples homosexuels contredit la maxime de Kant, philosophe préféré des premiers laïques,  selon laquelle la personne humaine doit toujours être tenue pour une fin. Qui ne voit combien un tel projet  satisfait bien peu au  critère  proposé par le grand ministre à ses instituteurs : « Au moment de proposer aux élèves un précepte, une maxime quelconque, demandez-vous   si un père de famille, je dis un seul, présent à votre classe et vous écoutant pourrait de bonne foi refuser son assentiment à ce qu’il vous entendrait dire. Si oui, abstenez-vous de le dire » ?

De cette mutation idéologique de l’idée de  laïcité,  le libéralisme libertaire   est le principale responsable. Et c’est la gauche  qui a joué le rôle principal dans le délitement du vieil esprit laïque. Jacques Chirac   dit une fois  que son grand-père  était « un instituteur  de gauche   de la IIIe République, c’est-à-dire    le contraire d’un enseignant  gauchiste de la  Ve ».   

Cette mutation est occultée par les réactionnaires  qui croient, à tort,  que   la remise en cause de la morale   était déjà, en puissance,   dans la Révolution française et  l’école laïque. Elle est occultée tout autant  par les libertaires qui, eux aussi, se voient, au nom du progrès,  dans  la suite  des Lumières.  

C’est en raison de cette mutation que  le débat actuel qui sépare l’Eglise et l’Etat n’est  nullement assimilable  aux querelles du début du XXe siècle.  La république voulait alors, au nom de la raison, affaiblir l’influence d’  une Eglise encore forte dont les dogmes ne l’intéressaient pas mais  ne remettait pas   en cause sa morale.  Aujourd’hui, l’Eglise catholique,  affaiblie,       défend  non pas  d’abord  son  influence   mais la morale naturelle  - qu‘on peut aussi bien appeler laïque – contre la déraison de  l’idéologie libertaire.  Les autres religions, font front avec elle. Une partie de l’opinion, même indifférente aux dogmes,  suit  et surtout,  la raison a changé de camp.                                    

 Roland HUREAUX                      


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Lettre de Jules Ferry aux instituteurs, 27 novembre 1883

Op.cit.

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27 janvier 2013 7 27 /01 /janvier /2013 21:46

 

Publié par Atlantico 

 

 

LA FIN DE LA FIN DE L’HISTOIRE

 

Le double veto de la Russie et de la Chine à l’ONU à une intervention occidentale en Syrie marque le début d’une ère nouvelle dans les relations internationales

 

Depuis la chute du communisme soviétique, rien ne semblait pouvoir  arrêter la  toute-puissante Amérique.   Le monopole de l’hyperpuissance, représentant à elle seule près de la moitié des dépenses militaires dans le monde,  semblait présider  au règne,  tenu pour  définitif, de  l’économie libérale et de la démocratie élective.

Forts de cette hégémonie, les Etats-Unis entreprirent de répandre par les armes  le bien  dans le monde . En Yougoslavie,  puis en Afghanistan, en  Irak, en Libye.  Chaque fois au prix de dizaines ou de centaines de milliers  de victimes, principalement civiles,  et sans que le  nouveau régime mis en place donne nulle part de meilleures garanties démocratiques – ni même, dans le cas de l’Irak, d’allégeance au camp occidental.   Nul ne doutait  que viendrait le tour de la Syrie d’Assad, la dernière dans le collimateur,  une dictature certes, mais sûrement pas pire, au contraire, que certains  alliés des Etats-Unis comme l’Arabie saoudite ou le Qatar.

Mais la Chine et la Russie qui s’étaient senties flouées par  une intervention occidentale en Libye dépassant largement le mandat  du Conseil de Sécurité auquel ils avaient consenti,  ont juré qu’on les y reprendrait plus. Un premier veto avait été opposé à une condamnation unilatérale du régime d’Assad  en octobre 2011 mais les Occidentaux n’en avaient pas perçu tout le poids ; forts de leur bonne conscience inébranlable, ils pensaient ramener sans mal Moscou à ce qu’ils jugeaient être la voie de la raison.  Avec deux nouveaux vetos  en février puis en juillet 2012, beaucoup plus directement dirigés contre l’idée d’une intervention militaire de l’OTAN,   leurs  illusions sont tombées.

Certes ils pourraient, comme ils  l’avaint fait en   Yougoslavie en 1999,  passer outre, mais le risque politique, dans une région qui demeure une poudrière et face à une Russie plus forte qu’en 1999,  serait cette fois démesuré.

Comme un  enfant,   les Occidentaux, qui ne semblent pas avoir compris immédiatement le massage, donnent des coups de pied dans la porte qu’on leur a fermée au nez. Sans craindre l’emphase, Juppé a ainsi  dénoncé le comportement de la Russie comme « criminel ».

 Beaucoup espèrent aussi  arriver à renverser le régime sans  intervention directe, en fournissant des armes sophistiquées à  la seule opposition sérieuse que rencontre aujourd’hui le régime d’Assad : des djihadistes de plus en plus radicalisés. Les avertissements pourtant clairs selon lesquels les Russes ne laisseront pas s’effondrer ce    régime  sans réagir sont minimisés par  la presse.  

Poursuivre sur cette voie, c’est faire courir les risques les plus graves  à la sécurité régionale  et même à la paix mondiale.

  D’autant que des pays comme l’Inde, le Brésil, l’Afrique du Sud  qui ne disposent pas du droit de veto, sont néanmoins sur la même ligne que  la Russie et la Chine.

Au total les pays réticents à l’action occidentale représentent 80 % de la population de la planète. Ce n’est plus l’Empire du Bien contre un groupe d’Etats-voyous ou de terroristes ( en l’occurrence, les terroristes sont dans le camp occidental) , ce sont les Etats-Unis et leurs vassaux,  gouvernements  européens et arabes, contre le reste du monde. Que dans un tel contexte, les gouvernements  français successifs ne  cherchent à se singulariser que par la surenchère, reconnaissant seuls,  par exemple,  le pseudo-Coalition nationale syrienne installée à Doha, parait singulièrement irresponsable.


  Roland HUREAUX


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27 janvier 2013 7 27 /01 /janvier /2013 21:43

Publié par Atlantico 


François Mitterrand  disait «  Au-dessus d’un million de personnes dans la rue, le régime vacille ».

Il n’est pas sûr que François Hollande, qui a pourtant été son collaborateur, l’ait compris.

On ne saura jamais le  nombre exact de manifestants  de l’extraordinaire journée du 13 janvier 2013. A tout le moins peut-on mesurer la progression entre le 17 novembre et le 13 janvier. Selon la préfecture de police, de 70 000 à 350 000, selon les organisateurs, de 200 000 à 1 million, soit,  dans les deux cas, une multiplication par cinq.

Certes, la première manifestation était régionale, la seconde nationale, mais, malgré le nombre impressionnant de cars venus de province, l’immense majorité des participants était parisienne.

La principale animatrice du mouvement  La Manif pour tous, Frigide Barjot, a demandé une audience au président de la  République,  faute de laquelle elle annoncera    une nouvelle manifestation.

Aura-elle gain de cause ?  C’est peu probable. A supposer même qu’on la reçoive, ce qui serait la moindre des choses compte tenu de l’ampleur du mouvement qu’elle représente,  le projet ne saurait, à ce stade, être  retiré par  François Hollande sans qu’il donne le sentiment d’une reculade.  Il n’envisage pas davantage de le soumettre à référendum : les juristes ne sont pas d’accord pour savoir  si la constitution le lui permet. Il pourrait à la rigueur annoncer que les députés seront autorisés à  voter  en conscience, ce qui, quoique normal, rendrait aléatoire son approbation, mais  le lobby LGBT ne le lui pardonnerait pas davantage qu’un retrait pur et simple. Le retrait de la PMA  pour les couples homosexuels est  une concession cosmétique, dans la mesure où son autorisation est reportée à un autre texte  - et en tout état de cause il ne suffirait pas à satisfaire les adversaires du projet dont la première motivation est de  préserver  le symbole du mariage. 

Les voies d’un compromis étant à peu près fermées, les perspectives sont d’autant  plus dramatiques.

 

Une situation révolutionnaire ?

 

La prochaine manifestation verra-t-elle une nouvelle multiplication par cinq  des effectifs, ce qui créerait une situation quasi révolutionnaire ? Rien n’est à exclure : la détermination des manifestants  est totale  et nul doute qu’  ils reviendront presque tous. La grossière sous-estimation de leur  nombre par la préfecture de police,  dénoncée un peu partout sur  internet,  a été ressentie  comme un camouflet, un refus de reconnaitre leur démarche et donc une incitation à manifester à nouveau, en emmenant au besoin de nouvelles recrues.

Si le plein semble avoir été à peu près fait du côté des catholiques parisiens, surtout dans les classes moyennes, et sans doute aussi chez les évangélistes, des réserves existent dans le christianisme populaire, en particulier antillais,  chez les non pratiquants et surtout chez les musulmans. Ils étaient certes représentés dans la manifestation du 13  janvier, mais à petite dose. Il semble que ceux  qui sont venus soient retournés enthousiastes de ce qu’ils ont vécu  comme un grand acte de participation à la vie  politique nationale et en définitive d’intégration.   Les appels à manifester de l’UOIF ont été timides ; un  déclic pourrait se produire la prochaine fois amenant  une bien plus large participation.

Mais la grande réserve de nouveaux  manifestants se trouve en province. Dans la plupart des départements il ne s’est agi que d’un galop d’essai timide. Les participants  sont eux aussi revenus enthousiastes. Déjà la logistique se prépare pour envoyer la prochaine fois à Paris beaucoup plus de cars.

Le gouvernement refusera-t-il  de céder si deux ou trois millions de manifestants se trouvent dans les rues de Paris ? Cela n’aurait aucun précédent. Lors de l’affaire de l’ école libre en 1984, François Mitterrand avait clos le débat  en annonçant  un référendum – qui n’a jamais  eu  lieu.

Il n’est pas exclu non plus que si, comme tout le laisse prévoir, le  mouvement prend de  l’ampleur, la revendication s’élargisse,   que des mécontents que la question du mariage   n’intéresse pas nécessairement,  se joignent aux manifestants  pour exprimer leur hostilité à un gouvernement dont la cote de popularité est au plus bas et qui devra sans doute annoncer  bientôt de nouvelles mesures d’austérité pour tenir  ses engagements  européens.

On ne saurait non plus exclure que les banlieues profitent de la manifestation, dont ils connaissent désormais l’ampleur  et le caractère festif et   à l‘égard de laquelle  ils ne ressentent  aucune antipathie,  au contraire, pour débouler massivement vers le centre de la capitale.

Que le mariage unisexe n’ait pas grand-chose à voir avec les préoccupations quotidiennes de la plupart des Français : licenciements, chômage,  érosion du niveau de vie, incertitude de l’avenir, n’empêche pas qu’un mouvement social de grande ampleur puisse démarrer de là. L’histoire nous montre qu’  entre le détonateur   d’une crise politique et sa réalité, la distance est souvent grande : en 1830, une soirée à l’Opéra à Bruxelles a fait l’indépendance de la Belgique,  en 1848, l’interdiction d’un banquet à Paris, la présence trop voyante de la danseuse Lola Montés, maitresse du roi, à Münich,  ont fait la  révolution.

Car, à bien des égards, la situation est révolutionnaire : sur la plan économique, les Français n’accepteront pas indéfiniment un régime d’austérité dont beaucoup leur disent qu’ils n’est pas vraiment nécessaire, au moment où , parallèlement,  le trouble apporté au sentiment  identitaire n’a jamais été aussi  profond. 

Sur cette question de l’identité, un des mérites de La  Manif’  pour tous  a été de déplacer la césure à laquelle tout le monde pensait avant, entre Français de souche et immigrés, vers une autre césure, plus idéologique et sans doute plus fondamentale, entre deux France : d’un côté  ceux pour qui  le mariage unisexe est une évidence, soit la  partie la plus influente de la classe dirigeante et ceux qui sont sous sa coupe, et, de l’autre,  ceux pour qui il est une absurdité, soit une autre France, qui représente un très large éventail :  la partie la plus traditionnelle de la bourgeoisie,  la plus grande partie du peuple « indigène », mais aussi  la plupart des immigrés. Il est difficile de dire si ce nouveau « bloc historique» se consolidera ; il est en tous les cas  à même de renouveler en profondeur la problématique de l’intégration.

Même si les manifestants récusent toute haine,  ne prétendant exprimer que l’amour du mariage, ils ont, au fond d’eux-mêmes,  leur cible : ce ne sont pas, contrairement à ce que l’on prétend,  les homosexuels, mais le monde des médias, libertaire,  christianophobe et manipulateur dont ils voient tous les jours qu’il leur est majoritairement hostile. Le décalage entre la réalité vécue de la manifestation et son  compte-rendu médiatique a encore     approfondi le fossé en même temps qu’il    a développé la confiance en eux-mêmes  de  ceux qui se sentaient jusque-là  idéologiquement exclus.  Plus encore que le gouvernement  et que naturellement les « gays », accessoires dans l’affaire,  ce sont tous les grands prêtres  du politiquement correct qui se sont trouvés désavoués le 13 janvier. Leur amertume, allant jusqu’à la dénégation (la guerre du Mali offrant un bon prétexte pour minimiser la manifestation), qui s’exprime dans beaucoup de compte rendus,  montre que les intéressés l’ont compris.

A moins que  de graves  évènements,  comme une nouvelle crise européenne  ou un durcissement de la guerre,    n’offrent un alibi au président  pour  reporter aux calendes le projet, la puissance du  mouvement lancé  le 13 janvier,  conjuguée  à la  logique idéologique folle dans laquelle le gouvernement s’est fort imprudemment enfermé, pourrait conduire à des  bouleversements  d’une ampleur qu’on ne soupçonne pas encore.

 

  Roland HUREAUX

Que Le Parisien d’aujourd’hui tire sur « qui va payer les pelouses abîmées du Champ de Mars ? » témoigne à soi seul de tout un état d’esprit. Dans le même registre,  Marianne.fr démontre que la Préfecture de police ne se trompe  jamais dans les chiffres !  

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 20:43

 

S’il fallait un symbole  du  déclin du syndicalisme français,  on n’en trouverait pas de meilleur que  le ballon marqué CGT flottant sur la pitoyable manifestation du 16 décembre à la Bastille en faveur du projet de loi gouvernemental instaurant le  mariage  et l’adoption homosexuels. Pitoyable : même les chiffres  de la préfecture de police (60 000) sont jugés grossièrement exagérés par la presse.  Bien que la  gauche  ait, à la différence de la droite, la culture de la manifestation,  elle fait cependant    pâle figure   face à la  « La Manif’ pour tous » du 17 novembre.

Pourquoi parler de déclin du syndicalisme?

D’abord parce que cette bataille, pour une cause typiquement « bobo », se trouve aux antipodes  des batailles historiques du syndicalisme français : que diraient Victor Griffuelhes , Léon Jouhaux, Benoit Frachon à voir leur centrale syndicale engagée dans un combat à mille lieues de ceux qu’ils menèrent ?

Tournant le dos à son histoire, la CGT, en s’engageant dans cette bataille douteuse, le tourne  aussi à la classe ouvrière.  Que pensent aujourd’hui les ouvriers d’Arcelor-Mittal  de voir le plus grand syndicat français militant  de manière aussi voyante pour  une cause si étrangère à leurs préoccupations. Se sent-elle tant d'affinités avec Pierre Bergé ? La CGT aurait-elle suivi les propositions de la fondation  Terra Nova,  proche du parti socialiste et  financée par les  multinationales américaines : laisser tomber la classe ouvrière et se tourner vers les nouvelles classes branchées en prise avec une économie mondialisée.

Déclin aussi parce qu’un tel engagement amène à s’interroger  sur la  liberté de la grande confédération vis à vis du pouvoir. Il faut voir dans quel contexte s’inscrit la manif’ du 16 décembre : surpris de la résistance l’opinion, pas seulement catholique,  à son projet de « mariage pur tous », le mouvement a battu le rappel de ses alliés. La CGT a répondu  à l’appel. Déjà au temps de Sarkozy,   la loi du 20 aout 2008  favorisait la CGT et la CFDT au détriment des petits syndicats (FO, CFTC, CGC).  Comment imaginer que les deux principales  centrales n’aient pas apporté de contreparties à ces faveurs ?  

Non qu’elles soient   unanimes sur le mariage homosexuel, loin s’en faut. La majorité de leurs  adhérents  y sont certainement hostiles. Le  conseil d’administration de la Caisse nationale des allocations familiales  ne s’était prononcé    contre le projet que  grâce aux  voix de la CGT, la CFDT ayant, ô surprise, voté pour !  La CFDT s’est aussi engagée en faveur de la manifestation du 16 décembre  mais timidement et tardivement. On peut penser que la participation si voyante de la CGT à cette  manifestation, plus qu’elle n’exprime  une adhésion,  est  un de ces services qu’on ne refuse pas aux amis.

Mais  certains  syndicalistes y verront peut-être la continuation de  la tradition libertaire du mouvement ouvrier français, venue de  l’anarcho-syndicalisme. Redoutable malentendu : si, du temps de Maurice Thorez et de Jeannette Vermeersch, il était d’usage  que les couples ouvriers ne passent pas devant Monsieur la Maire (jusqu’à ce que Staline y mette bon ordre !) et encore moins devant Monsieur le Curé, les mêmes se targuaient d’une rigoureuse fidélité, dénonçant l’adultère  comme un vice  de la bourgeoisie. De mariage homosexuel,  il n’avait jamais été question jusqu’à la fin du XXe siècle, sachant que ce projet n’a rien à voir  avec une  tolérance légitime pour l’homosexualité, laquelle  d’ailleurs n’allait pas  de soi dans  les banlieues ouvrières d’antan – comme dans les cités immigrées d’aujourd’hui.

Surtout la position de la CGT laisse supposer que, face à la  vague mondiale de la    philosophie   libérale–libertaire, la gauche pourrait choisir le volet libertaire et écarte le volet libéral (nous supposons, peut-être à tort, que la CGT ne s’est pas encore ralliée à  l’ultralibéralisme !). Certes l’association « li-li »   ne pose pas problème aux sociaux-démocrates  et aux centristes qui ne récusent  pas le mondialisme. Mais la gauche de    la gauche, réputée peu libérale,  a tort d’imaginer qu’on puisse séparer les deux.

La philosophie libertaire est essentiellement fondée sur la destruction de ce qui fut longtemps la structure de base  de toute société : la famille instituée, tenue désormais pour un tabou à faire sauter. C’est pourtant la famille  qui donne des repères, qui offre une solidarité distincte de celle d’État,  c’est elle  qui a permis à beaucoup de minorités opprimées de résister  (ainsi les huguenots sous Louis XIV comme  le rappelle Pierre-Patrick Kaltenbach). En offrant des axes de coordonnées, des points d’appui, une culture, fut-elle rudimentaire, la famille donne au dominé des ressource intellectuelles qui lui permettent de s’émanciper  du  discours du dominant. Or les  tenants du mariage « gay » ne s’en cachent pas : il ne s’agit nullement  pour eux de consolider une institution  (bien fragilisée aujourd’hui) en en  étendant l’usage, mais de préparer sa destruction : pour ses  partisans les  plus déterminés, c’est, à  terme,  l’obligation de fidélité et de stabilité qui doivent sauter. Ce qui doit advenir des enfants  au terme d’une telle désagrégation  est  préfiguré  par  l’idée d’une PMA sur étagère ou d’une gestation pour autrui, que les plus fanatiques veulent inclure dans la loi,   exprimant  leur profond mépris de l’homme.

A terme,  l‘objectif, quoi qu’en pense une certain gauche, est  l’homme atomisé des libéraux, à la fois producteur (le plus possible)  et consommateur (le moins possible),  soumis à la seule loi  du marché. Et par derrière celle-ci, l’implacable loi darwinienne de la struggle for life qui justifie la domination des forts sur les faibles.

Libéralisme et libertarisme : clairement,  il s’agit du même combat. Ceux qui, au plan international,  promeuvent cette double philosophie le savent bien. La revendication « gay » est strictement contemporaine de  l’essor de l’ultralibéralisme à partir de 1980. C’est dire à quel point il est  pitoyable de voir s’associer à ce combat douteux la plus prestigieuse des centrales syndicales françaises.

 

 Roland HUREAUX

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 20:42

 

 Article publié par Atlantico 


La sortie de Cécile Duflot demandant à l’Eglise catholique de  mettre ses locaux vacants à la disposition  des sans-abri  n’est pas seulement la bourde d’une jeune ministre écervelée.  Elle exprime les préjugés et les sentiments d’une   partie importante de l’équipe qui   gouverne aujourd’hui la  France.

Préjugés  et même ignorance. Duflot évolue dans une sphère si particulière qu’elle ignorait sûrement de bonne foi que la plupart des paroisses de la région parisienne reçoivent déjà des sans-abri l’hiver  et que des milliers de volontaires catholiques s’activent pour  les prendre en charge, que ce soit au titre  de  l’Eglise elle-même ou  à celui  de nombreuses associations  :   Secours Catholique, Emmaüs et même associations laïques.

Une ignorance qui n’est évidemment  pas innocente : si elle ne savait pas, c’est qu’elle n’avait jamais voulus avoir, et que   , se contentant des stéréotypes véhiculés par Libération et Charlie-Hebdo, elle en était restée à l’image historique d’  une Eglise riche, d’abord préoccupée du culte et indifférente aux misères.

 

Derrière les préjugés, l’hostilité

 

C’est dire que  par  derrière ces préjugés, se trouve  une hostilité profonde que l’ouverture au monde effectuée par les chrétiens au cours des quarante dernières années, n’a nullement atténuée, au contraire.

Au cœur de cette hostilité, bien sûr, les problèmes sociétaux, en particulier l’avortement   et  le statut des homosexuels où l’Eglise catholique apparait comme un obstacle insupportable et totalement ringard aux idéologies aujourd’hui dominantes  en la matière. Leurs adeptes, nourris de  clichés, n’ont naturellement jamais fait le moindre effort pour comprendre ni  même s’intéresser aux raisons de l’Eglise – qui d’ailleurs n’en fait pas  non plus beaucoup  pour  s’expliquer  clairement.

Le  récent projet  loi sur le  mariage prétendu  « pour tous » a ravivé cette hostilité et c’est sans doute la raison de la sortie de Mme Duflot  – même si, fort maladroite, elle    contribuera sans doute  à gonfler les effectifs de la nouvelle  « Manif pour tous » annoncée pour le 13 janvier.

Plus sans doute  que chez  Mélenchon qui cultive l’anticléricalisme rétro, cette  hostilité trouve sa pointe extrême dans le mouvement écologiste. Certes, on comprend mal,  vu de loin, qu’un parti dévoué à la défense de la nature soit le plus ardent à promouvoir la théorie  du genre, négation de la différence sexuelle,   ou  l’insémination artificielle : mais sa  philosophie sous-jacente, dans la lignée de la Fondation Bill Gates,  promeut la réduction de la population de la planète par tous  les  moyens, ce qui fait évidemment  horreur aux Eglises qui  défendent  la grandeur de la vie.  C’est au sein du groupe écologiste du Sénat qu’avait  été concocté un projet de loi sur le  mariage unisexe encore plus radical que celui du  gouvernement ; lors de sa discussion en commission, les représentants de ce groupe n’ont  pas caché que leur but était, non pas d’étendre le mariage mais, à terme,  de le détruire.

Mais cette idéologie va au-delà des écologistes : elle est diffuse dans une grande partie du parti socialiste, comme dans la plupart  des médias.

Il y a certes davantage de chrétiens – ou d’anciens chrétiens formés par l’Action catholique ou  les Scouts  de France -  qu’autrefois au parti socialiste, mais la plupart se sont décolorés. Ils formaient l’essentiel de la « deuxième  gauche » se réclamant de Rocard et Delors. Ils marquaient  leur différence  par un souci plus  grand de la surenchère européenne et de  la  rigueur budgétaire (quitte à passer pour d’ennuyeux « cathos masos » , voire  « deloristes-doloristes » ), que  sur les sujets vraiment clivants de type sociétal  sur lesquels ils préféraient raser les murs. L’émergence au sein du Parti socialiste  de nouveaux mouvements  chrétiens comme les Poissons roses, pas vraiment  émancipés de la culture de la deuxième gauche,   ne semble pas avoir modifié la donne. D’autant que   la culture politique de gauche  admet mal l’objection de conscience : l’engagement à gauche (à la différence de l’engagement à droite), vécu sur le mode religieux,  fait prévaloir les logiques de partis, jusqu’à à étouffer très vite toute  considération morale.   

 

Le grand parti de la déchristianisation

 

De fait le parti socialiste apparait  comme le grand parti de la déchristianisation de la France. Du christianisme, il a gardé un vague relent « humanitaire » qui se traduit  par exemple par l’ouverture à l’immigration ou un reste de rhétorique sociale,  d’  effet limité dans la mesure où il s’accompagne d’une acceptation (particulièrement nette chez les chrétiens de gauche)   des logiques ultralibérales et mondialistes. Cette France qui  non seulement a rejeté son héritage chrétien,   mais est  à peu près dépourvue de culture religieuse – et méprise tant le faut religieux qu’elle ne daigne l’approfondir,  c’est d’abord au parti socialiste qu’elle se retrouve.

Ceux qui prennent tant soit  peu au sérieux les dogmes et surtout la doctrine morale  de l’Eglise telle que les papes la formulent   y sont facilement traités d’ultracathos ou d’intégristes, voir suspects d’être « fachos », même s’ils   sont très éloignés des lefévristes.  

Les réformes sociétales, précisément celles que l’Eglise catholique réprouve sont, dans cette ambiance, un marqueur idéologique fort   de la gauche, le seul qui lui reste peut-être. Tribut payé à l’idéologie : à peine en place, Marisol Touraine, ministre de la santé a rétabli le remboursement  à 100 % de l’avortement alors même que les caisses de l’assurance-maladie sont vides et que  le  remboursement de soins de première nécessité, notamment dentaires, est si faible que beaucoup ne se soignent plus !  

Que dans cette ambiance, l’idée de promouvoir  le mariage homosexuel ait paru une sorte d’évidence indiscutée, que Hollande ait considéré qu’elle ne devait rencontrer qu’une protestation marginale et  rétrograde, comment  s’en étonner ?  

L’inconscience du parti socialiste sur ce sujet ressemble à celle  de l’Assemblée constituante de 1789 : imbibée par un siècle de philosophie des lumières, elle crut   que le fait religieux était un vestige du passé que l’on pouvait traiter par-dessus la jambe. Il s’en suivit une guerre civile de dix ans qui fit des centaines de milliers de morts  que seul Bonaparte, en signant le Concordat,  parvint à terminer. Cette guerre éclata, de manière significative, non à cause de la  confiscation des biens (alors immenses) de l’Eglise mais de  la Constitution civile du clergé qui ne posait que des problèmes de principe.

 

Vers un durcissement ?

 

L’inconscience   avec laquelle la majorité actuelle a rédigé son programme explique l’impatience avec laquelle elle ressent  une résistance à   laquelle elle ne s’attendait pas. Toute à son idéologie de la modernité,    elle découvre tout à coup que les évêques    ne sont pas seulement  de doux  marginaux tout juste bons à faire  de  temps en temps un déclaration générale en faveur des immigrés ou contre  la pauvreté ,ce  dont elle s’ accommodait plutôt bien.

Face  à cette résistance inattendue, il n’est pas exclu que cette majorité devienne méchante.

On en a eu le témoignage par  la grossière  désinvolture avec laquelle la commission compétente de l’Assemblée nationale a reçu les représentants non seulement de  l’Eglise catholique mais de toutes les religions.

On pourrait mettre aussi sur le compte du même état d’esprit l' indifférence  du gouvernement au sort des chrétiens d’Orient, que la France,  dont la vocation historique était de les protéger, promet au contraire à la destruction en soutenant les islamistes en guerre contre le régime d’Assad ; on s’en gardera cependant car  le gouvernement précédent, si prompt, lui,  à  chercher la bénédiction du Saint-Siège, n’agissait pas autrement. 

 

Un terrain miné

 

L’affrontement qui commence avec  l’Eglise catholique est  très différent de celui du début du XXe siècle.  

D’abord parce que, pour la première fois de manière aussi nette,  toutes les religions font front avec elle.   

Ensuite parce que le terrain n’est pas le même.  Contrairement  à ce qu’on croit dans les milieux anticléricaux,   l’Eglise catholique est  beaucoup plus attachée à ses dogmes  et à la morale   qu’à ses biens, ses revenus ou son statut. Jules Ferry  et Emile Combes s’en prenaient qu’à ceux-ci, François Hollande s’en prend à ceux-là. En séparant l’Eglise de l’Etat, Briand ne marquait aucun mépris pour le culte catholique.  Pragmatiques, les chefs radicaux voulaient limiter la réforme au strict nécessaire : « je ne risquerai pas la vie d’un seul de mes gendarmes pour un chandelier » avait dit non sans  humour Clémenceau  au moment des inventaires. D’une façon générale, l’Eglise (alors plus puissante,  il est vrai) était beaucoup plus respectée dans les milieux anticléricaux de la IIIe République que dans les milieux bobos de la Ve.

Elle le fut aussi de Léon Blum, premier président du conseil de l’IIIe République à se rendre à la Nonciature ou de Guy Mollet qui rêvait d’un nouveau concordat. François Mitterrand est un cas à part : sa formation catholique, sa familiarité   avec l’ancienne France lui faisaient considérer avec une infinie prudence les questions touchant au fait religieux.  Il  manifesta toujours un grand respect pour l’Eglise catholique  et sut gérer avec doigté, par exemple sur  la question de l’école privée,  la tension entre les tendances antireligieuses du parti socialiste, qu’au fond de lui il méprisait,  et son sens, sinon de la religion,  du moins de l’histoire.   

A la différence de la séparation des Eglises et de l’Etat, le  mariage homosexuel est conçu par la plupart des catholiques comme une énormité et, même si les évêques ne le disent pas ouvertement, une profanation de ce qu’ils tiennent pour une des  institutions   les plus sacrées, le mariage. Certains  y voient même une volonté   blasphématoire rappelant  les mariages homosexuels  parodiques qu’organisait l’empereur Néron au cours de  ses orgies, si on en croit Suétone.

Un autre grand changement est que sur le terrain de la morale, les catholiques , surtout   ceux qui se réfèrent à la doctrine thomiste,  ne considèrent pas qu’ils défendent une morale particulière, mais la morale naturelle ( point différente de la morale laïque que  Jules Ferry demandait à ses instituteurs d’enseigner )  et qu’ils interviennent , non pour défendre leurs intérêts  mais  parce qu’ils se sentent responsables de toute  la société. Les juristes liés à l’idéologie dominante tiennent l’idée d’un droit naturel pour une énormité, mais la population pas. Ce qui fait que la position des religions, dans cette affaire,   rejoint  le sentiment spontané d’une partie de l’opinion, de plus en plus large au fur et à mesure que le débat s’approfondit,  et lui vaut son soutien.   

Parallèlement, les milieux déchristianisés qui sont ceux du  parti socialiste, n’ont pas pris en compte l’évolution du monde catholique, devenu certes  très minoritaire mais beaucoup plus engagé, organisé, ayant pleinement intégré  la culture de la communication et du lobbying. Il était hier une majorité  passive, il  veut être aujourd’hui une minorité   agissante comme le sont les juifs  ou  les protestants.

Sa combativité est démultipliée par le fait que beaucoup de catholiques ont les nerfs à vif, constatant chaque jour que toutes les formes de critiques ou d’injures sont permises dans les médias à l’égard de l’Eglise catholique et interdits vis-à-vis de tous les autres.

Entre la volonté de mettre en œuvre des réformes sociétales promises imprudemment par un  gouvernement socialiste qui n’a , faute de  marge de manœuvre   économique ou sociale, rien d’autre à se mettre sous la dent , et  une forte minorité convaincue  que ce ne sont pas des  privilèges catégoriels  qu’elle défend  mais l’intérêt de toute la société, il se peut que nous ayons en perspective un affrontement  beaucoup  plus grave qu’on imagine.


Roland HUREAUX

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 20:40

 

Et si le projet de mariage dit « gay »,  quoique porté par les forces se qualifiant elles-mêmes de progressistes,   était un projet profondément réactionnaire, une arme parmi d’autres de la guerre mondiale des riches contre les pauvres ?  

D’abord parce que, au moins dans la version que le gouvernement français  a présentée au Parlement,  aboutissement  de l’idéologie du « genre », il participe à ce long travail de sape commencé il y a au moins quarante ans, tendant à araser les repères qui structurent la vie des peuples. Le mariage, la filiation, la différence homme-femme  avaient au moins l’intérêt d’offrir à des gens de toutes les conditions sociales un système de repères : Emmanuel Todd a montré, dans ses études anthropologiques bien connues,     comment, dans le Midi de la France, les régions à structure familiale  forte permettaient au peuple de mieux résister à l’emprise des  féodaux ou des  notables et  développaient l’esprit  social.

 

Atomiser les peuples

 

La destruction des repères nationaux passe, elle,  par  le développement illimité d’ organisations comme l’Union européenne,  le  libre-échange généralisé, la multiplication des normes mondiales qui s’imposent à la législation des États (les droits des homosexuels en font partie), l’extension de l’ « ingérence humanitaire »,  la casse des États qui voudraient maintenir une volonté propre forte face au  nouvel ordre mondial (Yougoslavie, Irak, Libye) , mais aussi la marchandisation de l’éducation réduite à la formation d’une main d’œuvre immédiatement employable ,  l’affaiblissement de la culture générale, et du sens de l’histoire (l’ambassade des États-Unis à Paris est chargée de surveiller que les programmes d’histoire français ne soient pas trop nationalistes !) .

Famille, Etat,  mais aussi syndicats, école : en promouvant leur destruction, le grand capital international participe, à l’échelle des nations  européennes,  à la  même « stratégie du chaos » que certains experts du Pentagone préconisent pour le  Moyen-Orient.

Il est significatif qu’après la destruction de a Yougoslavie par l’OTAN en 1999, un des premiers signes d’allégeance au nouvel ordre européen, conditionnant notamment l’admission de sa  candidature à la  entrée dans l’Union européenne, que l’on ait demandé à la Serbie ait été  d’autoriser la   Gay Pride à Belgrade.

Au terme de ce processus :   l’individu atomisé des « particules élémentaires » chères à  Michel Houellebecq   ne connaissant d’autre loi que celle du marché, inapte à toute action collective, grain de sable  d’une masse fongible, proie toute désignée pour les  entreprises du grand capital international qui exige sans cesse moins de solidarité (la destruction de l’héritage du Conseil national de la Résistance est  en France dans l’ « agenda » ), moins de protection sociale, moins de droits pour les travailleurs  pour qu’ils se défendent dans les Etats, moins de droits pour les Etats  pour qu’ils    défendent leurs travailleurs dans le marché mondial.

Les partisans les plus déterminés du  « mariage pour tous » ne  cachent plus que par derrière leur  revendication,  c’est une abolition pure et simple du mariage qu’ils visent, d’abord parce que,  défini pour un « genre »  indifférencié, il n’aura plus de sens,  ensuite parce qu’à terme, les obligations qui le structurent (solidarité financière, stabilité,  fidélité) tendront à se dissoudre.

 

Vers de nouvelles inégalités

 

La société qui émerge ainsi, loin d’être plus égalitaire, comme on le prétend, sera au contraire une société inégalitaire par excellence.

Cela est déjà posé dans la loi puisque l’adoption pour tous, y compris pour les couples homosexuels,  signifiera que certains enfants auront  un père et une mère (ce qui étaient autrefois la norme et qui ne serait  plus qu’un cas particulier) tandis que d’autres n’auront droit qu’à deux pères ou  deux mères.

Mais ce qui est à présent inscrit dans la loi, se trouve déjà  dans la réalité par l’affaiblissement du lien matrimonial dû à la multiplication des divorces, des naissances hors mariages et donc des  familles monoparentales.

Les divorces sont, disent les sociologues,  plus nombreux dans le peuple que dans les classes supérieures. Peut-être parce que les soucis patrimoniaux le rendent plus difficile chez les riches. Mais aussi parce que pouvoir être élevé par une famille « normale », composée d’un couple homme/femme stable constitue désormais un  privilège et que, dans toutes les sociétés, les riches ont tendu  à accaparer les privilèges.  Selon le principe  du cumul des  privilèges et des handicaps,  mis en évidence  par Pierre Bourdieu, ceux qui ont le plus d’argent bénéficient aussi davantage d’une famille stable, ceux qui en ont le moins sont plus vulnérables aux facteurs de dissolution, les difficultés financières n’étant pas le moindre. Cas extrême : la communauté noire des États-Unis, où, les modalités de l’assistance  sociale  aidant,  la famille monoparentale est devenue la règle.

Certes, ce n’est pas par  l’argent que l’on  achète l’équilibre  des couples, ce serait même parfois le contraire. Mais, par-delà l’argent, une hiérarchie tendra à  s’établir inéluctablement  entre ceux qui, de père en fils, se transmettront des valeurs familiales de stabilité et une éducation de qualité -  souvent les milieux religieux mais pas toujours -,   dont les enfants auront une généalogie, des repères forts non seulement par l’histoire nationale mais aussi par l’histoire familiale,  et une sorte de prolétariat affectif qui n’aura rien de tout cela, ceux qui ne seront pas « nés » comme on disait, les malheureux enfants de l’insémination artificielle venant instaurer cette inégalité en norme. Comme l’école, le droit du mariage, affaibli dans la sphère  publique, se privatisera !

Ainsi se trouve aboli en Occident, pour le plus grand avantage des forces multinationales qui veulent un peuple atomisé et inerte, l’effort de quinze siècles de christianisme, souvent oppressif certes, mais qui eut pour effet  démocratiser, au travers d’une discipline sexuelle aujourd’hui discréditée, ce qui était dans le monde antique le privilège des plus fortunés : avoir une gens, une généalogie, une identité familiale, un père et une mère repérables.

Ainsi se trouve remis au goût du jour le clivage  qui était celui de la société antique tardive : une minorité bénéficiant des privilèges de la vie familiale « normale », de la protection du clan, d’une identité déterminée par trois noms (prénom, nom, cognomen) et une masse d’esclaves vivant dans la promiscuité de l’ergastule, séparables au gré des achats et des ventes, pauvres d’argent, pauvres de repères affectifs et moraux, mais surtout pauvres d’identité.

 

Qui promeut le mariage « gay » ?

 

Au moment où Warren Buffet proclame que les riches ont gagné la lutte des classes à l’échelon international   grâce aux facilités de mouvement que le mondialisme confère  aux riches  et à leurs avoirs financiers, se profile ainsi une nouvelle fracture sociale entre ceux que la crise de la famille a relativement épargnés et qui ne sont désormais plus qu’une minorité bourgeoise,  voire  une nouvelle aristocratie, et une masse sans repères livrée aux quatre vents tant du « nouveau désordre amoureux » que  du mondialisme.

Le caractère impérialiste de l’entreprise de déstructuration de la famille ne se déduit  pas seulement de ses effets. Il  se lit aussi au travers des  forces  qui en donnent l’impulsion. Même si le mariage homosexuel n’a été voté que par une dizaine d’États aux États-Unis, il s’agit des plus riches et des plus évolués ; c’est la classe dominante américaine qui le promeut et ce sont les classes populaires qui résistent, au nom de la Bible ou au nom de la tradition, dans une partie du pays. Mais si au total, la grande puissance résiste plutôt aux évolutions libertaires, l’administration américaine, elle, les promeut à l’extérieur. Ce n’est   pas la première fois que les États-Unis jugent que ce qui est bon pour eux ne l’est pas nécessairement pour le reste du monde : à eux le surarmement, aux autres le désarmement, à eux les déficits gigantesques, aux autres la rigueur, à eux, la moralité néo-évangélique, aux autres l’émancipation des mœurs. A eux surtout la population et aux autres la dépopulation.  Dès les années soixante-dix un rapport  commandité par Henry Kissinger préconisait, pour « garantir la  sécurité des États-Unis », la diminution du nombre de pauvres dans le monde.  Comment ? Non par leur enrichissement,  mais par leur disparition :   par la diminution de la population, partout sauf en  Amérique du Nord,  promue par l’ONU et l’OMS aux ordres, comme l’a montré Michel Schooyans,  de leur principal financeur.  Avec la décélération de la fécondité dans le monde entier, sauf aux États-Unis, ce programme est en passe d’être réalisé. Ce qui n’empêche pas la fondation Bill Gates d’aller aujourd’hui  encore plus loin : au nom de préoccupations se voulant généreuses comme la défense de l’environnement et la santé des peuples, cette institution recherche un vaccin contraceptif propre à terme à réduire la population mondiale (et d’abord celle des pauvres) des neuf dixièmes.

Est-ce par hasard que les  droits des homosexuels  sont promus au niveau mondial par les mêmes cercles ?  Comment ne pas y voir la même    logique malthusienne ?  Le droit revendiqué à l’adoption homosexuelle n’aboutira évidemment  pas à la venue au monde d’innombrables enfants mais, en  affaiblissant  l’ordre symbolique de la filiation, il déstructurera un peu plus le lien familial au niveau  des masses.

Depuis qu’Obama est président, les agences américaines d’aide au développement se servent,  sans la moindre retenue,  de la pression financière pour obliger les États les plus vulnérables à adopter le mariage et l’adoption homosexuels   : des pays comme la Jamaïque, la Dominique, le Barbade, qui se situent dans l’ « arrière-cour » de la grande puissance sont particulièrement exposés à ces pressions impitoyables. Mais le reste du monde est aussi dans le collimateur. La France ne subit certes pas de pressions financières même si la commission européenne s’inquiète régulièrement des progrès des droits des « LGBT »  dans les États membres de l’Union européenne , mais ses grands organes de presse, dont les dirigeants  sont souvent membres de la Trilatérale, du CFP ou du Club de Bilderberg, ainsi transformés en agents d’influence, exercent une pression quasi-unanime sur l’opinion pour qu’elle admette la législation décidée par les grands lobbies transnationaux.

Sans doute une certaine tradition de gauche,  tout en rejetant le libéralisme,  continue-t-elle  à voir d’un bon œil la dimension libertaire qu’il porte aujourd’hui avec lui, comme si les deux étaient séparables. Que les syndicats les plus à gauche envisagent de manifester pour le mariage homosexuel, témoigne pourtant de ce qu’il faut bien appeler un  aveuglement qui serait risible s’il portait sur un sujet moins grave. Mais cela n’aura qu’un temps. Plus  que jamais les rapports de force mondiaux et les logiques stratégiques des grands acteurs apparaissent à nu.  Que les forces dominantes prennent le risque de diviser gravement la société française (tout en la détournant des véritables  enjeux économiques et sociaux liés à la crise)  au moment où  elles mettent le Proche-Orient, à commencer par  la Syrie, au nom du même progressisme « droit de l’hommiste »,   à feu et à sang, participe de la même stratégie de déconstruction systématique. Que le pouvoir social-démocrate français soit,  dans l’un et l’autre cas,   le serviteur zélé de cette stratégie  ne saurait nous étonner.

En disant non au projet Hollande de « mariage (faussement) pour tous », la France retrouvera sa vocation naturelle de puissance anti-impérialiste. Un exemple de résistance qui  pourrait être contagieux. Et c’est bien ce qui, dans l’immense machine mondiale à laminer les peuples, fait peur à beaucoup. 

 

Roland HUREAUX  

 

Emmanuel Todd, L'Invention de la France,   Paris, Éditions Pluriel-Hachette, 1981 ;  L'Invention de l'Europe, Paris, Seuil, coll. « L'Histoire immédiate », 1990

Michel Houellebecq, Les particules élémentaires, Flammarion, 1998

Cela est apparu notamment lors de la discussion  en commission du Sénat  de la proposition de loi n°745  du 27 août 2012  visant à l'ouverture du mariage aux personnes du même sexe et à l'ordonnancement des conditions de la parentalité, émanée du  groupe écologiste

 

Implications de la croissance de la population mondiale pour les intérêts des Etats-Unis et pour leurs intérêts outre-mer  (cité in D. Muntford, The life and death of NNSSM, North Carolina 1994.)

Michel Schooyans, Le crash démographique, Fayard, 1999

Council for Foreign policy

SUD, par exemple  

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 20:32

 

Irons-nous jusqu’à dire que la crise qui vient d’éclater à l’UMP à la suite du résultat serré du vote interne Fillon-Copé pourrait être salutaire ? A tout le moins doit-elle être l’occasion d’un véritable examen de conscience, non seulement pour  la période Sarkozy mais pour  les vingt dernières années. 

Tout au long de la campagne pour l’élection du président du parti, il est un dogme  qu’aucun des deux  candidats n’a osé toucher : Nicolas Sarkozy a été un grand président ; il a accompli des réformes courageuses ; il ne doit sa défaite qu’à la malignité de ses adversaires et à l’acharnement de la presse.

Certains allaient même plus loin : à les entendre, aussi bien Copé que Fillon n’étaient  que des succédanés. Le meilleur président pour l’UMP aurait été  Nicolas Sarkozy lui-même. D’ailleurs, au milieu de la crise actuelle, certains militants rêvent de son retour.  Il pourrait être  en 1997 le sauveur suprême.

La crise actuelle aura au moins le mérite de faire éclater cette bulle d’autosatisfaction. Est-il nécessaire de die que bien peu dans l’opinion partagent ce point de vue. Si les sondages montrent que Sarkozy pourrait battre aujourd’hui Hollande, cela ne signifie pas qu’il suscite l’enthousiasme , seulement que l’actuel président est encore plus décevant que lui. Et qui n’a entendu pendant l’élection les gens de la rue, ceux de droite mais non militants exprimer  leur scepticisme tant à l’égard de Fillon que de Copé ?     Expression d’un divorce profond entre les Français et leur classe politique ( cadres des partis  compris) et  qui exige une révision radicale des comportements tant à droite qu’à gauche.

Il est clair que le bilan du quinquennat de Sarkozy  reste à faire. Mais , par-delà,    celui de dix-sept ans de présidence de droite où n’ont été réalisées  à peu près aucune des réformes que les Français  attendaient  d’elle.

Même acharnées, les critiques de l’ancien président sont jusqu’ici rarement allées  au fond des choses.

Peu imaginatifs, les adversaires de Sarkozy l’ont accusé d’être un autocrate, un « petit César », a-t-on  dit. Mais quel autocrate aurait fait  une réforme de la constitution pour diminuer son propre pouvoir, notamment  par la  suppression  du vote bloqué (le fameux article 49-3) ?

On l’a accusé d’être un ultra-libéral n’ayant d’autre souci que de démonter le modèle social  français. Pourtant  Sarkozy a été le premier président à faire passer  la dépense publique  au-dessus de 56 % du PIB ! C’est lui  qui a  transformé le RMI en RSA,  ce qui a coûté plus de deux milliards aux contribuables.  Des deux réformes des retraites qu’il a effectuées, la première au moins (celle des régimes spéciaux)  s’est avérée avantageuse pour  les salariés !   La réforme syndicale  aboutit à  faire disparaitre à terme  les trois petits syndicats de droite (CFTC, FO, CGC) pour ne garder que les deux gros syndicats de gauche (CFDT, CGT). Et que dire de l’alourdissement de 600 milliards de la dette publique ?

La réforme la plus nécessaire, la TVA dite sociale,  a été mise en chantier, non pas au début du quinquennat mais à la fin, ce qui, politiquement , n’était pas la meilleure idée !

En  abaissant de manière ostensible  le  bouclier fiscal de 60 à 50 % , Sarkozy  a permis de rendre un demi-milliard  à quelques centaines de contribuables qui auraient aussi bien compris qu’on voulait les choyer  si l’affaire  avait été menée dans la discrétion.  

N’a-t-on pas  accusé l’ancien président d’être un hypersécuritaire ?  Mais n’a-t-il pas entrepris de réduire  les effectifs de la police et de la gendarmerie qu’il avait pourtant augmentés quand il n’était que ministre de la sécurité ?     N’a-t-il pas réformé la garde à vue, compliquant beaucoup la tâche  de la police  judicaire,  supprimé la double peine, fait voter une loi prévoyant que les peines  de moins de deux ans d’emprisonnent  ne seraient pas exécutées   ? Ainsi l’imposition des peines planchers, bienvenue  elle, s’est trouvée à peu près vidée de sa substance.

Il est entré chaque année entre 2007 et 2012 plus d’immigrés réguliers que sous Jospin. Et jamais autant de Roms qu’à la suite de l’algarade présidentielle de  l’été 2011 !

La presse a décrit un homme de rupture, méprisant  l’Etat, à l’américaine.  Mais sait-on que la réforme  de l’Etat qu’il a, pour l’essentiel, appliquée,    était inscrite dans la  loi sur les finances publiques votée sous Jospin en 2000 ?  Le rapprochement , si mal vécu par les uns et par les autres , de  la police et de la gendarmerie,  des impôts et du trésor, de la DST et des Renseignements généraux  , des ASSEDIC  et de l’ANPE (pour faire le Pôle emploi) , tout cela avait été prévu par ses prédécesseurs  et n’a pas entraîné la moindre économie. De même l’évaluation systématique des   politiques publiques, qu’aujourd’hui la gauche se targue de réhabiliter,  alors que son application par Sarkozy   lui avait  aliéné    tant de voix de fonctionnaires, conscients de son caractère inutile et  souvent vexatoire. Sarkozy, dit-on, n’aimait pas  les énarques : aucun président    n’avait  autant amélioré les traitements des hauts fonctionnaires !

Le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant en retraite, qu’on a appelé la RGPP, était programmé  mais mal  appliqué  depuis des années. Sarkozy  l’a mis véritablement  en branle, à ses risques et périls,  mais  deux ans seulement avant la fin de son quinquennat.

La loi sur les collectivités locales, si difficilement  votée en 2010,  parachève, au moins dans son volet communal,   la loi Joxe   de 1972  à l’origine de l’immense usine à gaz de l’  intercommunalité.

Pourquoi la gauche  se plaindrait-elle de sa politique en  matière d’éducation nationale ?  Sarkozy a, dès son entrée en fonctions, abrogé les circulaires   Robien de janvier 2007 qui  remettaient enfin  en cause  les deux piliers de l’idéologie de gauche en la matière : le  collège unique et les méthodes pédagogiques prétendues scientifiques. L’autonomie des universités, bonne réforme sur le papier, a donné les pleins pouvoirs à des présidents d’université qui sont  à 90 %  de gauche.

Les enseignants lui doivent beaucoup : ils furent les principaux bénéficiaires de la défiscalisation des heures supplémentaires  que la gauche a abrogée dès son arrivée. Ils n’ ont néanmoins pas  voté pour lui : mais ses maladresses à leur égard  en ont dissuadé même ceux  de droite.

Loin d’avoir accompli une quelconque rupture,  Sarkozy  a été, plus encore que ses prédécesseurs, tributaire des propositions  de ses services, services dont la culture est généralement orientée à gauche. Il a seulement donné un coup d’accélérateur à un processus réformateur vieux de quinze ou vingt ans qui, loin  de résoudre  les  problèmes, en est  généralement la cause.

On peut même   penser que si ses réformes, dont nous venons de décrire   l’orientation générale et de relever  l’inutilité, ne  lui avaient pas aliéné  les soutiens traditionnels de la droite : médecins,  militaires  et  gendarmes, mais aussi la  partie des  fonctionnaires  et   des  enseignants  , non négligeable,  qui vote habituellement  à droite, il aurait gagné. Il  aurait  ainsi évité sa plus grosse faute, la seule sans doute qui ne lui sera pas pardonnée au jour du Jugement : celle d’avoir  ramené la gauche au pouvoir !

Si Sarkozy a été battu, il faudrait aussi   regarder du  côté des deux millions  de Français qui ont voté blanc ou nul au second tour de la présidentielle (pour un différentiel Sarkozy/Hollande de 1,1 million  de voix  seulement) ? Ceux-là  ne sont pas  de gauche, sinon il  leur aurait été si simple de voter Hollande. Ils ne sont pas non plus, quoi qu’on dise,   tous des électeurs du Front national.  Peut-être s’agit-il simplement de Français de base qui, sans rien attendre du parti socialiste,   se faisaient une autre idée de la droite : moins blng-bling, plus pondérée, plus digne et peut-être aussi, pourquoi ne pas le dire, plus compétente ?   

La crise actuelle  pourrait avoir le mérite d’ouvrir les langues. Si la droite veut se renouveler pour répondre vraiment aux aspirations des Français, qui ont tant attendu d’elle, en vain, il faut que s’instaure un grand débat. L’interrègne actuel pourrait en être l’occasion.

Cette crise pourrait permettre  aussi  de renouveler les hommes et les équipes. Au moins  aux prochaines élections  locales. Dans combien de départements, les notables ou apparatchiks  locaux attendaient  la remise en ordre du parti pour se mettre à l’affut en vue de « flinguer » les nouveaux talents qui pourraient leur faire ombrage, comme ils le font depuis trente ans. Pour le moment, ils font moins les fiers.

Si tout va bien,   la  guerre de succession va permettre à la droite d’effectuer son bilan.    Il est  vain pour elle   d’espérer  revenir au pouvoir  tant que ce bilan  n’aura pas été  pas fait  et que toute les conséquences n’auront pas été tirées de l’échec de 2012 !  La crise actuelle, on le voit,  peut avoir du bon.

 

Roland HUREAUX

 

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23 décembre 2012 7 23 /12 /décembre /2012 20:29

Article publié dans Atantico le 3 novmbre 2012

 

A moins de deux semaines de l’élection du nouveau président de l’UMP, où en est-on ?

La réserve des militants et de beaucoup de caciques du parti  en dit long sur l’incertitude du résultat. Incertitude d’autant plus étonnante que, au mois de juin, Fillon était donné largement gagnant. On peut penser que l’écart s’est, entre temps, resserré.

L’opinion est relativement indifférente à cette joute. De fait,  les deux candidats sont trop compromis avec le quinquennat de Sarkozy, l’un comme premier ministre, l’autre comme chef de la majorité,  pour susciter l’enthousiasme. Si leur  mot d’ordre commun est de ne pas critiquer le président sortant, l’opinion, elle,  ne s’en prive pas, à commencer ceux qui ne lui pardonnent pas d’avoir, par la  médiocrité de sa gestion, ramené les socialistes au pouvoir.

L’opinion croit aussi que les deux candidats sont équivalents. C’est loin d’être le cas,   tant sur le plan de leur assise sociale, que sur le plan idéologique.

Même s’il est devenu député du 7e arrondissement de Paris, François Fillon, par toute sa personne, représente assez bien cette bonne vieille bourgeoisie  de province qui,  depuis des lustres, constitue l’assise  de la droite française.

Quoiqu’  il soit le seul  énarque, Jean-François Copé se dit, lui,  le candidat de la base militante, une base qui est loin d’être en majorité bourgeoise. Il est un efficace maire de banlieue.  Mais en même temps, par ses réseaux, notamment  le cabinet Gide,  Loyrette et Nouel qui l’emploie, il est sans doute le plus directement  lié aux milieux d’  affaires.   

Sur le plan idéologique, la situation est  analogue : François Fillon, quoique avec discrétion, est catholique et gaulliste. Le catholicisme, socle historique de la droite française, le gaullisme, socle originel de l’UMP.  Gaulliste, comment ne le serait–il pas ayant fait ses classes auprès de Joël Le Theule et Philippe Séguin ( ce qui l’amena à voter non au traité de Maastricht) ? Catholique, comment ne l’aurait-il pas été,  ayant eu si  longtemps l’abbaye de Solesmes dans sa circonscription ?

Sa vie rangée contraste avec les frasques que l’on prête à son rival.

Jean-François Copé ne s’est jamais vanté d’être gaulliste ou catholique. Il s’affiche comme le champion d’une  « droite décomplexée »  (même si,  pas plus que son rival, il n’envisage de traiter avec le Front national), une droite  à la fois sécuritaire et libérale. Son discours apparemment  musclé  parle davantage   à la base de l’UMP, comme avait parlé   celui de Chirac et de Sarkozy. Mieux   que son rival ,  il a compris que, compte tenu de la sociologie des militants, le pouvoir à l’UMP se prenait à droite.    Pour faire bouger les lignes, il a eu recours  à  quelques provocations : la dénonciation du « racisme anti-français », l’appel à manifester. Vieilles ficelles toujours efficaces. Son meilleur allié : l’indignation immédiate de la presse de gauche qui, croyant ainsi l’affaiblir, le  légitime : aux yeux de la majorité des militants, il passe aujourd’hui  pour plus  musclé, comme Sarkozy était passé pour musclé en promettant de nettoyer les banlieues au « karcher ».  C’est le côté « droite populaire » de Copé  qui  n’a cependant pas convaincu tous les élus de ce bord, comme Eric Ciotti directeur de campagne de  Fillon ou Jacques Myard, récemment rallié à son concurrent.

Il est vrai que Copé  n’attaque pas les positions de Fillon seulement  sur sa droite mais aussi sur sa gauche : il est aussi  le candidat des grands notables centristes, tels Raffarin ou Gaudin, sûrs que c’est lui qui, sans avoir besoin  de le crier sur les toits,  offre les meilleures garanties d’alignement  européen et atlantiste

Là où Fillon est le candidat de la droite classique,  de bon ton, ayant des valeurs, certes un peu timide  (ses adversaires disent molle !)  mais sincère, Copé incarne la droite « moderne » qui, ainsi qu’ont  si bien su le faire Chirac et Sarkozy,  ayant  la charge de faire accepter à la base par une communication droitière (que les mauvaises langues appelleront démagogique !),    l’alignement  de la France sur les grands systèmes internationaux.

Est-ce pour cette raison que Copé qui au départ n’avait à opposer à l’équipe   Filon que  les époux  Balkany, Rachida Dati et Nadine Morano a peu à peu bénéficié du  soutien de fait de presque toute l’  équipe  Sarkozy ?

C’est dire en tous cas que la compétition est loin d’opposer, comme on le dit trop facilement,  la droite et la gauche du parti  ce serait plutôt le centre conte la coalition des  ailes.

Dans cette configuration, ce qu’avait à faire Fillon était  de consolider sa base au centre du mouvement, de parler très fort de rassemblement et de ne s’aliéner aucun de ses soutiens naturels.

Qu’il soit catholique et gaulliste, en fait personne ne le sait hors de quelques initiés. Mais il a néanmoins craint que ça se sache trop   jusqu’à s’aliéner les soutiens  que ces affinités  auraient dû lui assurer. Henri Guaino, vrai gaulliste même s’il a dû avaler bien des couleuvres au cabinet de Sarkozy, issu comme Fillon de l’entourage de Philippe Séguin,  aurait aimé entrer dans son équipe : rejeté, il en est venu,  sans enthousiasme, à soutenir Copé.

Christine Boutin pèse peu, dira-t-on, mais elle est une figure emblématique,  un « marqueur » comme disent les publicitaires : dans beaucoup de nos provinces,  ce sont encore  les mêmes visages que l’on rencontre à la messe du dimanche et aux réunions de l’UMP: elle aussi, qui avait vocation à soutenir Fillon,   soutient Copé.

Malgré sa prudence, Fillon n’a pu s’empêcher de laisser voir sa différence gaulliste en politique étrangère.

Irrité des repentances à réplétion de Hollande, ce qu’il appelle la « culpabilité permanente »,  il  s’est attiré les foudres d’Arno Klarsfeld.

Dans un article du Figaro du 12 août intitulé « Un peu de courage, Monsieur le président ! », Fillon  préconise  la reprise du dialogue avec la Russie,   mais c’est dit tellement entre les lignes que des pro-russes ont compris le contraire ! C’est pourtant là    la seule dissonance que l’on ait entendu depuis longtemps  avec le discours atlantiste unanimiste pro-américain  Sarkozy–Hollande-Copé. Les vigies transatlantiques qui veulent domestiquer la politique française  - ou l’ont déjà fait -  ont,  elles,  sûrement compris.

Sûres de leur victoire, les équipes Fillon ont surtout eu le souci de se partager les places, craignant que tout nouveau venu  les oblige à se serrer.  Buisson fait la stratégie de Copé, qui fait celle de Fillon ?

Hors de l’UMP, Fillon a bien peu de relais. Borloo semble plus  proche de Copé.  Le Parti socialiste et le Front national, pour des raisons qui restent à éclaircir,  font presque ouvertement campagne pour  Copé.  

On le voit, les deux candidats sont loin d’être, contrairement à ce que croit le grand public,  « bonnet blanc et blanc bonnet ». Fort au départ de sa position centrale, Fillon l’a vue s’effriter et  sur sa droite et sur sa gauche. Jusqu’où ?  

Ce qui ne fait pas de doute est que l’ emportera celui qui l’aura voulu  le plus.

 

 

 

    

 

 

 

 

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