Toujours la suprématie américaine : les Etats-Unis sont, aux Jeux de Londres, comme d’habitude premiers au classement des médailles, devant la Chine.
Portant, si l’URSS existait encore, elle serait passée devant : en additionnant les résultats de tous les pays qui la constituaient, on se trouve à égalité avec les Etats Unis pour les médailles d’or : 46, et nettement en tête pour les médailles tout court : 164 contre 104.
Peu apparente en début de jeux, la force de frappe russe a fait reculer la France, bien partie avec ses beaux résultats de natation, à la 7e place du classement. L’Allemagne, qui n’est pourtant plus que l’ombre de ce qu’elle était du temps des succès frelatés de la RDA, nous a aussi dépassés, de peu, mais nous sommes à égalité pour les médailles d’or : 11.
Des nations petites et moyennes ont confirmé leur vocation sportive, plus ou moins ancienne : Corée du Sud (entraînée dans une course de prestige avec la Corée du Nord), Australie, Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Hongrie, Cuba.
Grâce au Brésil, l’Amérique latine figure honorablement (mais rien pour le Chili et le Pérou).
Même si les noirs sont très présents sur les podiums, en particulier dans les sprints, épreuves reines de l’athlétisme, illustrées par l’étonnante Jamaïque, l’Afrique elle-même serait demeurée en retrait, n’était la suprématie spectaculaire de l’Afrique de l ‘Est dans les courses de fond : Ethiopie, Kenya et même Ouganda d’où vient le brillant vainqueur du marathon.
Le monde arabe est encore moins présent malgré un succès ponctuel comme la médaille d'or de l’Algérie au 1500 m. L’Iran seul fait bien mieux : 12 médailles, dont 4 d’or.
Grands absents
Les grands absents, au regard de leur population, demeurent, aujourd’hui comme hier, l’Inde (2 médailles d’argent 3 de bronze pour plus d’un milliard d’habitants), l’Indonésie (2 médailles de bronze), le Pakistan, le Bengladesh, le Vietnam (0).
Autre anomalie qui demanderait un approfondissement : Israël revient bredouille alors que ses moyens humains et techniques sont largement comparables à ceux des Pays-Bas ou de la Corée du Sud. Les problèmes de sécurité de ses athlètes n’expliquent pas tout. Apparemment, ce pays a d’autres priorités que le sport.
Reste le cas particulier du Royaume-Uni, bon troisième avec 65 médailles dont 29 d’or. Ce palmarès témoigne de l’effort considérable accompli par ce pays, non seulement pour organiser, sans faute, les jeux, mais pour y figurer au plus haut niveau, grâce notamment au cyclisme (ignoré outre-manche il y a une génération). Pour atteindre ce prestigieux résultat, on soupçonne chez cette nation libérale un fort investissement de l’Etat.
Par une organisation impeccable et des résultats exceptionnels, la Grande-Bretagne a ainsi eu son heure de gloire : Londres, où, en temps ordinaire, les poubelles ne sont pas ramassées tous les jours, pour l’occasion s’est faite belle.
Les Anglais, tenus pour froids, sont aussi très bon public. Cela est d’ailleurs vrai dans tous les domaines : Pierre Boulez à ses débuts avait quitté Paris pour Londres. Au lieu d’un public français difficile et snob, toujours prêt à siffler, le maître avait trouvé un public britannique ne marchandant jamais ses applaudissements.
Visiblement ce pays a voulu rappeler que, malgré ses difficultés économiques lourdes (pour mémoire, PIB par habitant de la France en 1992 : 44 401 $, du Royaume-Uni : 36 119 $), il restait une grande nation.
La fête des nations
Car cette fête universelle est aussi un festival des nations, avec leurs couleurs, leurs hymnes. Presque trop, en tous les cas chez nous. Adieu Europe, adieu, mondialisation : la presse ne s’intéresse, sauf exceptions, qu’aux disciplines où une médaille française est en jeu. Etonnant rétrécissement !
Il s’en faut en effet de beaucoup que les rivalités nationales soient dépassées : qui se rappelle que, lors du choix de la ville, Londres, avait à Singapour en 2005 volé in extrémis le succès à Paris, favori au départ ; il s’était dit que les Anglais avaient été moins regardants sur les moyens de convaincre certains membres du comité olympique. En tous cas, certaines élites françaises ne s’étaient pas beaucoup mobilisées. Quatre jours avant le choix, Ernest Seillière, président du MEDEF, sur une page pleine du Figaro, disait tout le bien qu’il pensait de l’Angleterre de Tony Blair et tout le mal qu’il voyait dans la France de Jacques Chirac. Nul doute que cet article fut diligemment distribué par nos concurrents aux membres du comité !
A quand la revanche ? Le pays de Pierre de Coubertin n’a pas organisé de jeux depuis 1924. C’est un peu long !
Roland HUREAUX