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Roland HUREAUX

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23 avril 2018 1 23 /04 /avril /2018 08:58

LA BALANCE DES PAIEMENTS, TALON D’ACHILLE DE MACRON

 

Le redoux  économique dont témoigne une légère reprise de la  croissance en Franc e (1,8 % par an pour 2017) et en Europe résulte bien davantage de la politique inflationniste menée depuis déjà quelque temps par la Banque centrale européenne (dite quantitative easing)  que  de l’effet des ordonnances sociales  de M. Macron ou de la meilleure réputation qu’il aurait donnée à la France à l’étranger ,  ni l’un ni l’autre n’ayant eu évidemment  le temps d’avoir produit un résultat, si tant est qu’ils en aient jamais.   

Pour ce qui est du déficit budgétaire, il reste contenu, au moins sur le papier,  dans la limite de 3%, ce qui veut dire que la France continue à s’endetter  de quelques dizaines de  milliards chaque année. Et il n’est contenu que par une hausse d’impôts qu’on estime déjà  à 10 milliards, comportant pas moins de 8 impôts nouveaux en huit mois. C’était la méthode Hollande, elle continue. Macron la connait bien : il était son ministre des finances. On le qualifie de libéral…

Mais cet optimisme, tout relatif, rencontre une zone d’ombre : le déficit commercial qui a grimpé de 45 à 63 milliards  (dont 50  milliards pour les produits manufacturiers). Pendant ce temps, l’excédent commercial allemand s’élève  à 245 milliards.

Ces chiffres ne font que refléter ce qu’il est   advenu de notre production industrielle depuis l’entrée dans  la zone euro : Allemagne + 32 % ; France  – 12 % ; Italie – 19 %.

Devant ces faits, on peut bien sûr faire toutes  sortes de contorsions : les Français devaient faire ceci ou cela,  baisser les impôts, mieux  soutenir leur industrie et tout ce que l’on veut : s’il   ne l’ont pas fait en 18 ans, il y a peu de chances qu’ils le fassent aujourd’hui.

 

La monnaie, facteur incontournable

 

En fait, il est un facteur avec lequel on ne triche jamais en économie, c’est la monnaie.

Quels  que soient les handicaps de compétitivité des uns ou des autres,  ils n’ont pas  d’effet sur l’équilibre des   balances  des  paiements  dès lors qu’ils se conjuguent avec un taux de change adapté.

Or la zone euro souffre d’un grave  déséquilibre : celui de l’Allemagne (et de ses compagnons de  route comme les Pays-Bas ou la Finlande )  et de  tous les autres  dont  la France. Le taux de change auquel les différents   pays ont fait entrer leur monnaie dans la zone euro,  déprécié pour l’Allemagne, trop élevé pour la France  et les pays méditerranéens  s’est conjugué avec  la politique  de déflation féroce menée par le chancelier  Schröder  à l’entrée dans l’euro  destinée à accroitre encore la marge de compétitivité de  l’économie allemande. La propension de ce pays étant  depuis longtemps  moins inflationniste que celle des  autres, le déséquilibre    n’a fait que s’aggraver  depuis 2017. Et bien évidemment, Macron qui n’envisage notamment aucune réduction des  dépenses  publiques  n’y changera rien.

La sanction de ce handicap monétaire, c’est,  comme le montre tout manuel d’économie   de première année, le déficit de la  banque des paiements . Et plus le temps  passe, plus il a de chances de s’aggraver.

Macron, fanatiquement  attaché à l’Europe et à l’euro,   sera confronté très  vite à cette embûche . Or  le cadre mental dans lequel il évolue l’empêchera d’y apporter la seule solution  possible : une redéfinition des  parités entre les pays de la zone  euro et donc son éclatement.

A la rigueur aurait-on pu rééquilibrer  en partie  nos échanges  sans changement de parité  en adoptant la   mal nommée « TVA sociale »,  remboursable aux exportateurs ;  mais en faisant le choix d’augmenter  plutôt  la CSG, non remboursable , Macron tourne le dos à cette solution qu’il aurait d’ailleurs fallu adopter déjà  il y a dix ou quinze ans.  

Les conséquences de cette situation pour  la France  sont lamentables   : notre tissu industriel s’étiole , notre agriculture aussi .  L’économie française, du fait de son  déficit global pâtit d’un manque  croissant de capitaux qui se traduit par la cession   à l’étranger de l’essentiel de nos  industries stratégiques : Alstom, Technip,  Nexter (GIAT) , Naval Group (DCNS), toutes opérations que le président, en cheville avec les milieux bancaires qui lui sont proches,  réalise  sans vergogne.

A la rigueur   un pays peu compétitif comme le sont aussi les Etats-Unis peut stimulera  son   marché intérieur en y injectant des commandes  publiques  non soumises  à la concurrence : ainsi les gigantesques dépenses d’armement  du Pentagone  qui s’élèvent à 700 milliards de dollars.   En France nos collectivités locales le font aussi  sans s’en  apercevoir  en multipliant les  ronds-points  même là où ils ne servent à rien.  Mais en  matière militaire, nous faisons exactement   le contraire : le renouvellement  des  fusils d’assaut français  qu’aucune règle internationale n’empêchait de  faire en France  (quitte à réactiver les industries  spécialisées ) a  été  confié  à une  entreprise   allemande  ! Absurde.

Cela n’est pas contradictoire avec une certaine reprise  économique : un pays déficitaire importe et les importations,  même non équilibrées par des exportations, génèrent des emplois de  commerce et de service . Mais cela reste  à la surface des choses ; pendant ce temps, les   fondamentaux de  l’économie  française,  eux,  périclitent , exactement    comme péricliterait  un commerce qui vendrait  25 % plus cher que son concurrent.  L’euphorie passée, Macron n’échappera pas à cette  épreuve de vérité.

 

Roland HUREAUX *

Mars 2018

 

*Auteur de D’une crise à l’autre, Mondialisation, euro, France, Allemagne , Ed Libres, 2017

 

 

 

 

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