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Roland HUREAUX

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6 novembre 2021 6 06 /11 /novembre /2021 18:24

LE NOMBRE D’ORDINATIONS SACERDOTALES SE MAINTIENT EN FRANCE DEPUIS PRES DE 50 ANS

11/10/2021

Il est habituel d’entendre que le nombre de prêtres en France (comme dans le reste de l’Europe) est en chute libre.

Ce constat cache une donnée tout aussi fondamentale : le maintien du nombre de vocations – et donc d’ordinations – depuis 1975, avec des hauts et des bas certes, mais un flux d’entrées dans les ordres qui est de 100 à 150 par an, avec quelques pics récents : 179 en 2014. Abstraction faite des fluctuations annuelles, la pente serait même légèrement ascendante depuis 1980.

Ce n’est d’ailleurs pas une nouvelle puisque la situation est la même depuis 45 ans, bien que personne n’en parle : dans et hors de l’Eglise, les lamentations déclinistes ont plus de succès.

Ceux qui ignorent tout des statistiques et de la démographie, et ils sont nombreux, confondent le « flux » d’entrée, constant, avec l’évolution du nombre de prêtres (appelé fâcheusement « stock » par les statisticiens), en baisse continue puisque le nombre d’ordinations annuelle était après la guerre d’environ 500 et que donc pendant presque deux générations, les sortants ont été d’environ  500  et les entrants environ 150 par an.  Ce déficit disparaitra assez vite, d’ici cinq ans, quand les prêtres prenant leur retraite ou décédant viendront des classes moins  nombreuses  des années 1975 et suivantes.

Immédiatement après la guerre, on trouve un nombre de nouveaux prêtres important :  1028 en 1951 (qui correspond à la sortie des séminaires de tous ceux qui n’avaient pu y entrer pendant la guerre), 595 en 1960, 285 en 1970, puis la chute se précipite de 1970 à 1975 (161) pour déboucher sur une stabilisation qui perdure encore de nos jours au niveau que nous avons indiqué.

Ces chiffres sont débattus. Il est difficile de dire ce qu’ils incluent. Les prêtres diocésains bien sûr mais aussi toute une série de communautés apparues dans la période rédente : l’Emmanuel, la Communauté Saint-Martin, l’Institut du Christ-Roi  et d’autres. Faut-il y inclure aussi les prêtres de la Fraternité saint Pie X (une dizaine  par an sur une trentaine , soit 20 %,   qui pratiquent « rite extraordinaire ») ?  Il nous semble que oui :  même si certains jugent leur spiritualité dévoyée, leurs séminaristes veulent être des prêtres selon la définition de l’Eglise de toujours et témoignent donc, eux aussi, de la fécondité spirituelle de l’Eglise de France ; la division de l’Eglise est une autre question. Faut-il aussi inclure les religieux (moines en particulier) ordonnés ? Certes le peuple chrétien ne les verra pas beaucoup mais ce sont de vrais prêtres, disponibles en particulier pour l’administration des sacrements.  Même question pour les missionnaires, devenus il est vrai très rares.  Une nouvelle catégorie : de jeunes prêtres étrangers ordonnés en France pour servir à l’étranger, ne doit cependant pas être comptée.

Pour des raisons à déterminer, les prêtres proprement diocésains sont en baisse, spécialement ces deux dernières années mais pas dans tous les diocèses (exception notable : Fréjus-Toulon). Cette baisse reflète plutôt un transfert vers d’autres formes de sacerdoce qu’un recul absolu. Pourquoi les séminaires diocésains sont-ils moins attractifs ?  Cela reste à déterminer.

On dira que 100-150 nouveaux prêtres par an, c’est bien moins que sous la IIIe et même la IVe République. Mais ce chiffre n’est pas négligeable : c’est à peu près celui des énarques recrutés annuellement. Le flux actuel qui sur une carrière de 40 ans en moyenne (sauf les départs devenus moins nombreux) correspond à une population de 5-6000 prêtres français, permet d’encadrer convenablement  l’Eglise.

Savoir si la chute brutale de 1970-75 a quelque chose à voir avec le Concile Vatican II ou Mai 68, - ou tout simplement l’évolution des mœurs - n’est pas dans nos compétences.  La même période a vu un nombre important de défections : 2500 de 1960 à 1980, ce qui montre que beaucoup de vocations à l’ancienne, effet de la pression sociologique, n’étaient pas très solides.

L’évolution des chiffres témoigne aussi d’une mutation sociologique importante. Le recrutement paysan et petit-bourgeois de province s’est entièrement tari.  D’où la pénurie grave de certains diocèses ruraux . Ne reste qu’un recrutement bourgeois ou aristocratique ( petite noblesse généralement), urbain,  qui existait avant 1975 mais qui ne s’est pas, lui, tari et qui est entretenu par l’existence de familles nombreuses dans les milieux concernés.  28  % des nouveaux prêtres viennent de Paris et Versailles.  Le même milieu fournit l’essentiel des promotions de l’Ecole de Saint-Cyr et donc l’ossature, jugée excellente à l’international,  de nos armées. N’oublions pas enfin 20 % environ de séminaristes sans racines sociologiques précises, pouvant venir de   milieux déchristianisés et qui se maintiennent année après année : effet de la grâce  !  Sans doute l’Eglise de France a-t-elle changé de visage. Elle n’a plus les  moyens  d’un encadrement étroit des populations, qu’elle n’assurait d’ailleurs que dans certaines régions, difficile de toutes les façons dans les grandes villes. Mais l’efficacité d’un prêtre variant bien plus que de 1 à 10, si ces prêtres sont saints, la chute de 1975 n’interdit pas que se maintienne une certaine   vitalité spirituelle dans notre pays.

 

Roland HUREAUX

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