L’AVORTEMENT DANS LA CONSTITUTION : FIN DE LA DEMOCRATIE CHRETIENNE
Le vote par l’Assemblée nationale de l’insertion d’un « droit » à l’avortement dans la constitution à une très large majorité (493 voix pour, 30 contre) , témoigne de la perte des repères d’une France déchristianisée et indifférente aux générations à venir.
Il témoigne en même temps du renouvellement du panorama idéologique national.
Que les différentes gauches , macroniens, socialistes, communistes, indignés , écologistes aient voté pour la modification de la Constitution comme un seul homme alors que les partis de droite ont laissé leurs députés libres de leur choix, n’est pas nouveau . Dès 1973 , la loi Veil était passée comme ça. La gauche avait fait bloc pour . La droite avait été laissée à sa conscience. La loi était passée même si la majorité de la droite s’y était opposée.
Cela montre bien que la caractère pré-totalitaire de la gauche française. Il peut y avoir des dissidences sur les impôts, l’agriculture ou la politique étrangère mais pas sur les questions de conscience. Puisque l’ambition de la gauche est de faire un homme nouveau, débarrassé des tabous du passé et donc une rupture anthropologique , pas une voix ne saurait manquer à cette entreprise prométhéenne quasi- ( ou anti) religieuse. Au lieu de dénoncer cette attitude, les gens de droite la rallient les uns après les autres, tel un troupeau de moutons, comme on dit « la queue basse ».
Des 30 voix qui se sont opposées au projet de constitutionnalisation, c’est encore le RN qui en apporte le plus , 23 ( pour 7 à LR), mais ce n’est qu’une minorité du groupe qui compte 38 membres. Beaucoup plus que chez les Républicains ont voté pour, y compris leur chef, Marine Le Pen. Témoin d’une normalisation qui va au-delà de toutes les espérances de certains.
Au total l’adoption facile de ce texte qui est aussi absurde, tant sur le plan sociétal ( il décourage la natalité qui s’est effondrée depuis 2022 ), que constitutionnel : les meilleurs juristes ont dit que l’avortement n’avait rien à faire dans la loi fondamentale.
Mais le plus surprenant dans ce scrutin est la quasi-unanimité du Mouvement démocrate (Modem) en faveur du texte : 31 sur 51 l’ont voté ; 1 abstention. Résultat d’autant plus surprenant que ce mouvement est le dernier avatar de la démocratie chrétienne française. C’était le MRP à la Libération , puis ce furent , entre autres, le CDS, le Modem. Inertie sociologique ? C’est toujours au Modem que l’épiscopat français cherche ses conseillers, même s’ils ont maille à partir avec la justice, jamais ailleurs.
Curieusement , ce parti qui se dit démocrate est le plus aligné qui soit sur les logiques technocratiques de Bruxelles. Autre paradoxe , il se dit centriste et donc modéré : il est pourtant un des plus bellicistes dans la guerre d’Ukraine.
Le Diable et le Bon Dieu
Cette unanimité face à une réforme qui ne peut que révolter les consciences chrétiennes et qui est une absurdité anthropologique résulte, si on l’analyse sur le plan politicien, de l’alliance étroite nouée en 2017 entre le Modem et le parti de Macron. Le Diable et le Bon Dieu, disent certains . Elle résulte plus profondément de la logique centriste et européenne.
Les anciens démocrates-chrétiens ayant mis sous le boisseau la honteuse référence chrétienne , ont fait depuis longtemps de la construction de l’Europe supranationale leur marqueur identitaire. Depuis, cet argument passe avant tout et fait passer avec lui tout ce qui ne le met pas en cause. Dès lors que le chef de file européiste, qui est aujourd’hui Macron, veut insérer l’avortement dans la constitution la discipline de groupe impose sa loi.
On ne peut avoir qu’une seule religion . Comme l’a bien vu Emmanuel Todd : si c’est l’Europe, il n’y en a plus d’autre.
Il y aurait eu trois ou quatre objecteurs de conscience au Modem, on l’aurait compris. Mais il n’y a eu qu’une seule abstention . Que la démocratie chrétienne française arrive à ce degré de reniement de l’héritage chrétien, est assez peu croyable. La dégénérescence a atteint son terme. Pour la démocratie chrétienne, c’est fin de partie.
Roland HUREAUX